Les Lumières dans les Ténèbres : La Réalité de la Fée Noire

Chapitre 47 : Le dragon brisé (Riku)

7215 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 09/01/2022 18:31

Six.

 

C'est le nombre d'entre nous qui restait après que cette saleté de monstre avait détruit notre vaisseau, soit quasiment la moitié. À ce moment, notre groupe se composait de Kairi, Maxwell, Lydia, Araen, Donald et moi-même. Ce qui voulait dire que Sora se trouvait avec le reste quelque part… mais où ? Est-ce qu'il était en vie ? Avant de perdre connaissance, nous avons lancé le sort « Multi-Miroir » que nous avions appris il n'y a pas si longtemps, créant un bouclier pour tous nous protéger. L'ennui, c’était que nous ne nous étions jamais entraînés à lancer ce sort sur autant de personnes.

Argh… J'aurais dû prévoir un coup pareil de la part de la sorcière ! Si seulement j'avais été plus vigilant, j’aurais pu avertir Sora avant que le monstre…

-         Monsieur ?

La marchande à qui j'avais emprunté la carte me regardait d'un air inquiet sous son grand chapeau de paille circulaire. C’est à ce moment-là que je compris que je m’étais perdu dans mes pensées en la lisant.

-         Oh. Excusez-moi, répondis-je. Je pensais à autre chose.

La vieille dame me lança un regard de compassion.

-         Vous n’avez pas l'air d'ici, pour être perdu à ce point.

Je ne répondis pas.

-         Ce n'est pas grave, poursuivit-elle. Vous pouvez prendre la carte.

-         Pourtant, je n'ai pas de quoi vous payer…

-         C’est un cadeau, me coupa-t-elle avec un sourire. J'espère pouvoir vous aider un peu.

-         Merci beaucoup, madame, répondis-je en lui rendant son sourire. J'en prendrai grand soin.

Après avoir pris congé de la commerçante, je pris soin de replier la carte et de la fourrer dans mon nouvel accoutrement.

Deux heures plus tôt, nous avions repris connaissance au beau milieu d'un environnement désertique et poussiéreux, sans vaisseau… et sans le reste de nos coéquipiers. Nous étions abattus de voir qu'il manquait nos amis : Kairi, Donald et moi avions perdu Sora, Dingo et Lea, Maxwell et Lydia étaient, encore, séparés de Thomas et Araen ne pouvait plus voir Yuki.

Dès que nous nous en rendîmes compte, je tentai aussitôt de contacter mentalement Sora, le roi Mickey ou encore Maître Yen Sid mais silence total. On aurait dit qu'une puissante force empêchait toute communication entre nous. Maléfique, sans l'ombre d’un doute. Cela étant, pas le temps de me concentrer là-dessus pour le moment, sachant que je ne pouvais rien y faire.

Il fallait que je voie dans quel état se trouvaient les autres : en tant qu'aîné, c’était mon devoir. À ma grande surprise, la moins anéantie semblait être Kairi. Bien sûr, l'absence de Sora lui faisait autant mal qu'à moi, mais elle restait forte, un regard déterminé au visage. Peu importe ce qui arriverait, elle savait que nous le retrouverions, d'une façon ou d'une autre. Je me surpris à sourire malgré moi. Elle était vraiment devenue plus forte qu'avant.

Donald semblait tenir le coup, lui aussi. Certes, il s’agissait de la première fois qu’il était séparé de Dingo et de Sora en même temps, mais je savais d’expérience que ce canard avait du courage à revendre… quand il le fallait.

Maxwell et Lydia tenaient le coup aussi de leur côté, même si au tout début, Lydia n'en menait pas le large. D'abord meurtrie par le membre manquant de leur trio, elle parvint, tant bien que mal, à se ressaisir. Et ce, grâce à Maxwell, qui la rassurait.

Maxwell… Depuis son arrivée, je ne savais pas trop quoi penser de lui, mais depuis les mises en garde de Hadès et du roi, j’étais encore plus confus. Quoi qu'il en soit, je décidai de le garder à l’œil.

Quant à Araen… Comment dire…

-         Boucles d'Argent ! appela ce dernier.

-         Ce n’est pas mon nom.

Le blond fit la sourde oreille.

-         Elles sont trop cool ces sapes !

Comme lui, nous tous étions affublés de tout nouveaux vêtements : un pantalon en toile assez large, des bottes en cuir (en tout cas, ça y ressemblait), un haut sans manches ainsi qu'un grand chapeau conique muni d’un tissu fin pour ne pas le perdre en cas de vent trop fort.

-         Heureusement que je suis là, se vanta Donald.

-         C’est à toi qu'on doit ça ? répondit Araen. Merci, mec !

Kairi le remercia à son tour.

-         Ça t'arrive souvent de changer les habits des gens ? demanda Maxwell.

-         Dans certains mondes seulement, expliqua Donald, mon sort s'active tout seul et ça donne ce genre de résultat pour que nous puissions nous fondre plus facilement dans le décor. Et ça ne se limite pas forcément aux vêtements…

-         Oh, intervint Kairi. Tu veux parler d’Atlantica ?

Devant les regards interrogateurs de tout le monde, elle expliqua :

-         Sora m'a dit un jour que vous deux ainsi que Dingo vous êtes retrouvés dans un monde sous l'eau. En grande partie, du moins.

Maxwell leva un sourcil.

-         Sous l'eau ? Comment faisaient-ils pour respirer ?

-         Ils sont devenus des créatures marines, répondit simplement Kairi.

Lydia écarquilla le seul œil que je pouvais voir, toutefois elle s’abstint de tout commentaire.

-         La magie de Donald a transformé Sora en triton, continua Kairi.

-         Ouah, la classe ! commenta Araen avant de s'adresser au sorcier. Et toi, qu’est-ce que tu es devenu ?

-         Une… pieuvre.

-         Ah. En même temps, t'es déjà une volaille alors difficile de faire pire.

Donald devint rouge de colère et se mit à bondir en hurlant de sa voix gonflée à l’hélium :

-         TU SAIS CE QU'ELLE TE DIT LA VOLAILLE ?!

-         Du calme, Donald, lui dis-je. Essayons d'abord de rassembler des informations sur l'endroit où nous nous trouvons.

Araen jeta un rapide un coup d’œil autour de lui avant de déclarer avec nonchalance :

-         Facile : on se trouve nulle part. (Il tendit le doigt devant lui.) Regarde, Maxwell, qu’est-ce que tu vois ?

-         Euh… Rien ?

-         Exact !

Avant même que je ne puisse dire quoi que ce soit, ses yeux cyans s’illuminèrent et il ajouta :

-         Oh, je sais ! Je vais foncer tout droit, je finirai bien par trouver quelque chose.

Maxwell objecta à ma place :

-         Tu es sûr que c’est une bonne idée ?

-         Ben oui, puisque c’est moi qui l'ai eue !

Là-dessus, il choisit une direction au hasard et fonça.

-         On se retrouve à la première ville sur le chemin ! nous lança-t-il en courant.

Le silence tomba parmi nous, quoique brisé par mon soupir. Sans Yuki pour le maîtriser, je sentais qu’Araen serait compliqué à gérer.

-         Il va bien ? s’inquiéta Kairi.

-         Bonne question, répondis-je.

-         Et s'il s’écroule sur le chemin ? demanda Maxwell. Avec tous les combats qu'on vient de vivre…

Je commençai à marcher dans la direction qu’avait prise le blond.

-         Dans ce cas, on le ramassera en passant. Venez.

Je ne saurais pas vous dire combien de temps nous avons marché sous la chaleur du soleil. Retenez juste que c’était pénible, même avec nos nouveaux habits, heureusement conçus pour ce genre d’environnement. Nous avons traversé des terres où la végétation se faisait rare, voire carrément absente, dépassé des restes de bâtiments en pierre détruits par je-ne-sais-quoi, de grandes étendues sans rien à l’horizon à part des montagnes et des rochers à perte de vue. Vraiment déprimant. De temps en temps, il me sembla même apercevoir des statues humaines au loin. Peut-être des représentations de gens célèbres ? Quoi qu’il en soit, je ne cherchai pas en savoir plus, les pensant sans intérêts. Pendant le trajet, je m’efforçais de ne pas penser à Sora, mais je reconnais que la tâche ne s’annonçait pas facile. Je devais me concentrer.

C'est comme ça que nous rejoignîmes un tout petit village au-dessus de l'eau, peuplé de gens habillés comme nous. J'avais conseillé au reste du groupe de chercher des informations sur ce monde – et Araen, accessoirement – tout en évitant de se faire remarquer afin de trouver un moyen de partir d'ici. J'avoue que, au début, j'avais peu d’espoir, encore sous le choc de notre séparation. Je décidai alors d'y aller étape par étape : d'abord, il nous fallait une carte, objectif rempli grâce à la gentille marchande.

Kairi, Donald, Maxwell, Lydia et Araen (qui nous avait finalement retrouvé) se joignirent à moi, l'air moroses. Je ne pouvais pas leur en vouloir, vu notre situation.

-         Vous avez trouvé quelque chose ? leur demandai-je bien que connaissant la réponse.

Avant qu’on ne me réponde, Donald émit un cancanement de surprise et montra du doigt quelque chose derrière nous. Un jeune garçon se trouvait encerclé de petits monstres humanoïdes aux corps de flammes vertes équipés de deux épées.

-         Je vous préviens, bande de… machins choses, vous ne pouvez rien faire face au Capitaine… Ouaaah !

L'une des créatures se jeta sur lui. Heureusement, je pus la trancher assez vite en m'interposant, la réduisant en cendres.

-         Va-t’en, petit ! lui hurlai-je. On s'occupe de tout !

Le gamin hésita quelques instants avant de me répondre :

-         Pas de panique, je peux le faire tout seul !

Les monstres se rapprochèrent.

-         Mais je vous remercie de votre aide ! me dit-il en détalant à toute vitesse.

Je resserrai ma prise sur mon épée.

-         Les gars, à nous de jouer !

Kairi, Lydia, Maxwell, Donald et Araen se rapprochèrent, armes en main. Nous étions six face à une trentaine de ces choses.

D’ordinaire, j'aurais pu m'occuper de ces monstres tout seul, mais avec la fatigue due aux précédents combats, l'aide de Kairi et des autres nouveaux porteurs n’étaient pas de trop.

-         Restez sur vos gardes, leur conseillai-je. On ne sait pas de quoi ils sont…

-         Bah !

Araen se jeta dans la bataille avec son épée électrifiée et détruisit l'un de nos adversaires d'un coup.

-         Tu vois ? Pas besoin de stresser, Boucles d'Argent !

Un de ces démons de feu, derrière lui, voyant une ouverture, s’élança vers lui et donna deux coups d’épées. Au même moment, quelques autres tournèrent sur eux-mêmes et créèrent une tornade de feu autour d'eux qui se propulsa vers lui. Maxwell, très vif, tendit les bras, comme s'il bandait un arc. Justement, un arc de lumière pure apparu dans ses mains et le projectile qui servait de flèche – son épée – brilla d'un éclat blanc. Il décocha sa Keyblade et détruisit le monstre d’un seul coup derrière Araen. En parallèle, je me précipitai vers lui avant d'invoquer un bouclier sombre tout autour de nous, nous protégeant tous les deux des tornades de feu. Lydia et Donald réduisirent en cendres nos assaillants à coups de Keyblade pour l'une et bâton gelé pour l'autre. Enfin, je détruisis les lanceurs avec ma propre arme.

-         Tu disais ? lui lançai-je.

Pour une fois, Araen ne répondit pas, se contentant de sourire, un peu gêné.

Avant de détruire ceux qui restaient, je pris un peu de recul pour observer nos adversaires. Ils étaient capables de créer des tornades de feu, d’exécuter de rapides attaques grâces à leurs deux épées et de nous affaiblir en volant peu à peu nos pouvoirs grâce à leurs flammes vertes si nous attaquions à distance avec la magie. Pour cette dernière capacité, il s'agissait d'une simple déduction de ma part, comme nous avions déjà affronté des monstres du même type au Colisée. Dans ce cas, leur origine…

Mes yeux rencontrèrent un symbole au milieu de leur torse : un sceptre familier.

J'en étais sûr, pensai-je.

Maléfique. C’était forcément elle.

Un hurlement parvint à mes oreilles. Il s'agissait de la voix de l’enfant que j'avais sauvé un peu plus tôt. Kairi et moi nous dirigeâmes vers l'endroit où nous avions entendu le son : un bateau. Nous y vîmes ledit garçon, un genre d’animal massif à la carapace solide ainsi qu'un duo de femmes assez inhabituel. L'une d'entre elle était vêtue comme nous, jusque-là, rien de surprenant, mais l'autre avait les cheveux bleu ciel – presque blancs – avec des mèches violettes et portait des vêtements trop grands pour elle. Cela dit, il n'y avait pas seulement eux : les créatures de Maléfique aussi répondaient présentes.

L'une des femmes dégaina une épée de son fourreau et tendit une pierre brillante face aux créatures. Mauvaise idée, elles semblaient encore plus hargneuses, comme si elles voulaient s'en emparer. La fille rangea aussitôt la pierre étrange.

-         Raya, appela son amie, la femme mince aux cheveux colorés. La pierre, ce n’est pas une bonne idée face à ces trucs !

-         Je sais, Grande Sisu !

Voyant qu’elles n'allaient pas tenir très longtemps, je me précipitai vers le duo.

-         Besoin d'un coup de main ?

La fille à l’épée me fixa d'un air perplexe.

-         Non, répondit-elle en rangeant précipitamment sa pierre. On peut se débrouiller toutes…

-         OUI ! la coupa l'autre femme.

Son amie n'eut pas l'air ravie, mais elle se contenta se reconcentrer sur le combat.

Les quelques monstres restants ne furent pas vraiment un problème, grâce à mes alliés mais aussi à la femme épéiste, je dois le reconnaître. Elle avait un style de combat que je n'avais jamais vu de toute ma vie : enchaînant à la fois les arts martiaux et coups à l’épée avec une fluidité impressionnante. Elle n’avait pas une grande force, mais sa vitesse désorientait nos ennemis et les parades ne les sauvaient pas : la fille parvenait toujours à trouver une faille.

Bientôt, il ne resta plus que des cendres émeraudes sur le pont qui, heureusement, n'avait subi que de légères brûlures. Sans doute grâce au jeune garçon qui courait partout avec un seau d'eau pendant notre combat.

-         Pfiou, souffla ce dernier. Merci bien, les gars.

-         On dirait que nous sommes tirés d'affaire, déclara la femme aux cheveux de plusieurs couleurs.

L'épéiste jeta un regard par-dessus le bateau avant d'écarquiller les yeux.

-         Ils se rapprochent !

En suivant son regard, je compris pourquoi elle était si effrayée. Au loin, à l’entrée du village des types chevauchant des montures que je n'arrivais pas à reconnaître accompagnés de forme étranges et familières se rapprochaient à vive allure.

Le duo était poursuivi.

-         Nous n'avons plus le temps, repris l'épéiste. Où est le capitaine ?

Le jeune garçon, oubliant complètement sa frayeur passée, se rapprocha de nous à toute vitesse. Il se recoiffa et pris un air enjôleur et sûr de lui. Enfin, il ponctua sa comédie par un tour sur lui-même.

-         Qu'y a-t-il, chers clients ? Je suis le capitaine Boun, patron, chef cuisinier et directeur financier du Palais de la crevette. Que puis-je pour vous ?

Lui, le capitaine ? me disais-je. Mais il a quoi, douze ans ?

La dame aux cheveux bleu/violet répondit avec air désinvolte :

-         Je me présente, Sisu, et…

-         Nous devons aller à Griffe du dragon, interrompit précipitamment sa partenaire. 

Maxwell s'interposa.

-         Nous aussi avons besoin du bateau, déclara-t-il.

-         Carrément ! Renchérit Araen.

Le… « capitaine » nous adressa à tous un regard irrité.

Le groupe de poursuivants se rapprochait.

-         Le Palais de la crevette n'est pas un taxi flottant.

Je sentais qu'il ne céderait pas, à moins… qu'une petite compensation ne le fasse changer d'avis. Mais il y avait un problème majeur. Kairi pensait sans doute à la même chose que moi car elle me lança un regard paniqué : nous n'avions pas d'argent. Enfin si, mais je n’étais pas sûr que les munnies soient acceptés ici.

L’épéiste coupa court au fil de mes pensées en tendant une main remplie de disques verts troués en leur centre.

Les yeux du capitaine s'illuminèrent.

-         Toï ! Tout ce jade ! s'extasia-t-il.

Boun essaya de s'emparer de ce qui semblait être l'argent de ce monde mais son interlocutrice retira sa main.

-         La moitié maintenant, le reste à l’arrivée, proposa-t-elle en jetant un autre regard paniqué derrière lui. Marché conclu ?

Elle lui tendit à nouveau sa main pleine et le jeune garçon prit trois « pièces » avant de les fourrer dans un sac en disant :

-         Accrochez-vous à votre congee. Le chef vous propose le menu… (Il fit un autre tour sur lui-même.) évasion.

Sur ces mots, il se dépêcha de retirer la corde qui retenait le bateau au port et prit un long bâton de bois. Il s'en servit pour éloigner le bateau du port en appuyant sur le pont qui nous reliait à la ville. L'ennui, c'est que…

-         Euh… fit Donald. C'est un peu lent, non ?

-         Capitaine Boun ? commença nerveusement l’épéiste. Est-ce qu'on peut aller plus vite ?

Nous tous, le capitaine y compris, jetâmes un œil en direction du petit village et les formes que nous avions vues plutôt se rapprochaient vite. Très vite. Nous pouvions déjà commencer à les distinguer plus clairement : cinq types chevauchaient ce qui ressemblait à des gros chats noirs et à leurs côtés…

-         Encore ces créatures ! s'exclama Kairi.

Oui. Exactement les mêmes qui nous avaient attaquées un peu plus tôt, flottant dans les airs comme si elles étaient… alliées aux poursuivants du duo féminin.

-         Vous avez Croc aux trousses ! déclara Boun après avoir remarqué les « cavaliers ». Ça sera plus cher !

-         Pas de panique, je gère.

La femme aux cheveux colorés se faufila entre l’épéiste et le capitaine avant de plonger dans l'eau.

-         Qu'est-ce qu'elle fait ? demanda le capitaine avant de voir sa vue obstruée par la main de l’épéiste.

J'essayai moi-même de voir ce que la femme avait derrière la tête pour sauter comme ça mais sans succès.

Soudain, le bateau accéléra brutalement. Tellement que les autres et moi n’eûmes pas d'autres choix que de nous accrocher à ce que nous pouvions pour ne pas basculer par-dessus bord.

-         Ouaaaaaaaaah, fit Donald.

-         Yahoooo, s'exclama Araen.

-         Qu'est-ce qui se passe ? demanda le capitaine.

L'air détendu, l’épéiste lui répondit :

-         Mon amie est une excellente nageuse.

Elle se releva et regarda ses poursuivants, qui n'eurent pas d'autres choix que de s’arrêter. La chose bizarre, c’était que même les monstres, pourtant capable de voler n’allèrent pas plus loin. Au milieu d'eux, se trouvait une femme – sans doute leur leader – qui regardait notre embarcation (ou plutôt l’épéiste) d'un air haineux.

-         Au revoir, binturi, nargua la combattante avec un signe de la main depuis notre esquif.

Les poursuivants échangèrent quelques mots, avant de finalement opérer un demi-tour à contrecœur.

 

 

Quelques minutes plus tard, alors que nous voguions, le désert laissa place à un environnement plus accueillant et chaleureux. Partout où nous portions le regard, nous voyions des montagnes tapissées de nombreux arbres aux feuilles que le soleil semblait faire resplendir. L’eau, assez claire, d’une couleur oscillante entre le bleu et le vert, m’éblouissait presque par réverbération ; rendant le tout encore plus beau. Cet endroit me fit me détendre un petit peu, me rappelant légèrement notre île, à Sora, Kairi et moi.

Le capitaine s'adressa à nous, les étrangers.

-         Bon ! Fit-il. Pour ces dames, je passe l’éponge et j'accepte leur présence à bord…

-         Surtout qu'on a payé, commenta l’épéiste.

-         Oui, surtout. Mais vous concernant…

Son regard fit l’aller-retour entre les différents porteurs de la Keyblade.

-         Je sais que vous avez aussi besoin du bateau, mais qu’avez-vous à offrir pour vous payer mes précieux services ?

Maxwell décida d'intervenir.

-         Mec, on t'a sauvé la vie.

Boun ouvrit la bouche pour répondre… avant d’écarquiller les yeux.

-         Oh ! Oh oui c’est vrai.

Il fit mine de réfléchir et, après quelques secondes qui me semblèrent interminables, déclara :

-         Alors c’est d'accord !

-         C’était rapide, chuchota Kairi à mes côtés.

-         Une seconde !

La combattante se rapprocha de nous précipitamment :

-         Et nous, alors ? Capitaine ?

-         Je… vous laisse régler ça entre vous.

Sur ces mots, il s’éloigna de nous avant de rejoindre une table où il s'affaira à la cuisine en sifflotant. La jeune femme s’adressa à nous :

-         Désolée, mais j'ai vraiment besoin de ce bateau. Et si vous vous mettez en travers de mon chemin…

-         Ah ? (De petits éclairs bleus parcoururent Araen, à la plus grande surprise de son interlocutrice.) Tu cherches la bagarre ?

Maxwell s’interposa avant que ça ne dégénère.

-         Non, non ! Personne ne veut se battre, personne ne veut se mettre en travers de ton chemin.

L’épéiste eut l'air de se calmer, mais juste un petit peu.

-         Très bien, souffla-t-elle. Alors, comment est-ce qu'on s'arrange ?

-         Avant qu'on arrive sur ce point, répondis-je. On aimerait te demander un service.

Elle leva un sourcil en réajustant son grand chapeau conique.

-         Ça dépend quel genre de service… Mais je vous dois bien ça. De quoi avez-vous besoin ?

-         D'informations.

-         Oh…

Elle s'attarda sur chacun d’entre nous.

-         Vous ne venez pas vraiment d'ici, pas vrai ?

-         Comment le sais-tu ? s’étonna Kairi.

-         L'intuition. Et puis… (La jeune femme jeta un œil à Donald.) Je n'ai pas souvent l'habitude de voir ce genre d'animaux ici.

Araen se rapprocha de Donald avant de lui chuchoter un peu trop fort à mon goût :

-         Ton sort, il craint.

-         La ferme, répondit le sorcier, agacé.

-         Enfin bref, fit l’épéiste. Tant qu’à faire, autant se présenter. Je m’appelle Raya. Mon amie aux cheveux de plusieurs couleurs, c'est… Sisu. Quant à lui (Elle fit un geste en direction du gros animal à carapace que j'avais remarqué plus tôt, qui nous sourit.), c’est mon fidèle Tuk Tuk.

-         Qui est là ? essaya Araen.

-         Quoi ?

-         Nan… rien.

-         Euh… D'accord.

Pour éviter à Araen le prolongement de ce moment gênant, je décidai d'intervenir.

-         Moi, c’est Riku. Enchanté. La fille à mes côtés s'appelle Kairi.

Mon amie lui fit un signe de la main en souriant gentiment.

-         Le brun aux yeux verts, Maxwell (Le concerné lui adressa un signe de la tête.) et l'autre fille, Lydia.

Cette dernière murmura un « Salut. » à peine audible avant de reporter son regard ailleurs aussitôt, comme si elle était intimidée par le regard de Raya.

-         Enfin, eux deux sont respectivement Donald et Araen.

-         Bonjour, fit le canard avec sympathie.

-         Salut ! Tu peux m’appeler « le Héros », « le plus fort » ou encore…

Je sortis la carte que la marchande m’avait donnée.

-         Oh ? fit Raya en voyant le papier, soulagée de ne pas avoir à écouter la comédie du combattant électrique. Vous avez une carte. Bien joué.

-         Où est-ce qu'on est, exactement ?

-         Kumandra, répondit-elle. Enfin, anciennement Kumandra. Ça, c’était avant que les nations ne soient divisées.

Je regardai la carte plus attentivement, puis je lui fis part de ce qui attirait le plus mon attention.

-         Les terres autour de cette grande étendue d’eau en forme de dragon, c'est Kumandra, n’est-ce pas ? demandai-je.

-         Comme je l’ai dit, ça l'était.

-         Pourquoi cette séparation ? Que s'est-il passé ?

Raya s'assit sur la chaise la plus proche en retirant son chapeau.

-         Ça ne vous ferait pas de mal de savoir. Mais je vous préviens : c'est un peu long à raconter.

Maxwell s'assit à son tour en tailleur sur le bois du navire, l'air prêt à écouter. Très vite, le reste d'entre nous l’imita.

-         Pas de soucis, la rassura-t-il.

-         Nous t'écoutons, renchérit Kairi.

-         O.K.

Raya jeta un œil à Tuk Tuk, qui dormait dans un coin, avant de passer la main dans ses longs cheveux bruns. Elle ramena son regard noisette à nous.

-         Tout a commencé il y a cinq cents ans, raconte-t-elle. Ce pays s'appelait alors Kumandra, des immenses terres luxuriantes et pleine de vie et d'amour où il faisait bon d’habiter. Rien à voir avec le paysage de désolation d'aujourd’hui. À l’époque, notre peuple vivait uni, en harmonie avec… les dragons.

La surprise parcourut notre petit groupe.

-         Génial, s'exclama Araen.

-         Ouah, fit Donald.

Je dois reconnaître qu'un monde peuplé de dragons attirait mon attention cela dit… je n'en avais vu aucun depuis notre arrivée. Où se trouvaient-ils, au juste ?

-         Comment étaient-ils ? demandai-je.

Devant nos réactions, Raya ne peut s’empêcher de sourire. Même le capitaine Boun, ralentissait sa cuisine pour écouter, même si j’étais presque certain qu'il connaissait très bien l’histoire, vu qu'il habitait ici.

-         Il s’agissait de grands êtres magnifiques, très nombreux à sillonner les cieux ! Les dragons étaient des créatures majestueuses, qui apportaient l'eau, la pluie et la paix. Kumandra était un paradis…

Son sourire disparut.

-         Puis le Druun est arrivé. 

-         Le Druun ? répétai-je. C'est là la cause de cette séparation ?

-         Plus ou moins. Mais j'y reviendrai.

-         À quoi est-ce qu'il ressemble ? Demanda Kairi.

-         Vous le saurez quand vous le verrez. Enfin, les verrez.

-         Les ? interrogea mon amie aux cheveux acajou. Il n'est pas tout seul ?

La grande bestiole nommée Tuk Tuk émit un ronflement.

-         Non, finit par répondre Raya. Au départ oui, cette chose était seule. Mais le Druun est une plaie qui se répand comme un incendie, se multiplie en consommant la vie et transforme ceux qu’il touche… en pierre.

Aucun commentaire de notre côté : nous étions suspendus aux lèvres de l’épéiste. En jetant un œil à Boun, je m’aperçus qu'il avait l'air… triste ?

-         Et les dragons, dans tout ça ? demanda Maxwell.

-         Des créatures pareilles ont dû essayer de faire quelque chose, non ? ajouta Araen.

-         Bien sûr. Les dragons ont essayé de nous défendre, mais en vain. Alors, la Grande Sisudatu, le dernier dragon sauv… aida à sauver le monde grâce à une pierre et repoussa le Druun.

-         Wouhou, (Araen leva le poing en l'air.) vive Sisudatu !

Même Raya eut un sourire, avant de jeter un regard inquiet par-dessus bord. Ce qui m’interpella car il n'y avait pas grand-chose autour de nous. D'ailleurs, où était son amie aux cheveux colorés ? Cela faisait un moment qu'elle s’était jetée hors du bateau…

-         Et les gens pétrifiés ? demanda Kairi. 

-         Ils sont tous revenus à la vie.

-         C'est une victoire totale, du coup ! Supposa Donald.

L’épéiste secoua la tête.

-         Pas vraiment : les dragons restèrent en pierre et il ne resta du dernier d'entre eux, Sisudatu, que sa pierre.

-         Cela explique pourquoi nous n'en avons pas vu depuis notre arrivée.

-         Exact.

Je ne voulais pas vraiment poser la question suivante, mais l'histoire n’était pas finie. On ne savait toujours pas pourquoi ce monde avait été divisé. Raya resta silencieuse quelques instants avant de reprendre d’elle-même.

-         Cela aurait dû être un moment inspirant, d'union pour l'humanité, mais les gens étant ce qu'ils sont…

-         Ils se sont battus pour la pierre ? devinai-je.

Elle hocha la tête.

Évidemment. À chaque fois qu'une puissante source de magie, de lumière qui plus est, survient, les Hommes veulent à tout prix se l'accaparer. Peu importe le monde, peu importe l’époque, c'est toujours pareil. Je ne suis même pas surpris d'une telle similitude avec la Guerre des Keyblades… Mais là, c’est une autre histoire qu'il n'est pas nécessaire pour vous de connaître tout de suite.

-         Des frontières furent tracées, et Kumandra divisé, poursuivit Raya.

Là-dessus, elle me prit la carte des mains et entreprit de la montrer aux autres.

-         Le pays est séparé en cinq royaumes, chacun selon la partie du dragon où elle se situe. D'abord, il y a « Queue » qui se trouve, comme son nom l’indique, au niveau de la queue du dragon formé par la grande étendue d'eau circulant entre les terres. Au passage, c'est l'endroit où nous sommes. Puis, il y a Griffe du dragon, Croc…

-         Tes poursuivants, se souvint Maxwell.

Raya ne répondit pas et continua de montrer les différents endroits avec son doigt.

-         Dos, et enfin le… Cœur du Dragon.

Elle me rendit la carte.

-         Après cette séparation, nous sommes devenus des ennemis et la pierre dut être cachée.

-         C'est donc pour ça que ce pays a été détruit ? en déduisit Maxwell.

-         Non, répondit son interlocutrice. Ça…

Curieusement, son expression s'obscurcit.

-         … Cela n'est arrivé qu'il y a six ans.

Silence total.

Visiblement, Raya ne semblait pas très ravie d'en parler. Vu son âge, je lui aurais donnée dans les dix-huit ans peut-être, difficile à dire ; dans tous les cas, elle avait certainement des souvenirs très clairs de ce qu’il s’était passé il y a six années. Kairi, qui, comme Sora, semblait avoir un don pour sentir la détresse des gens, essaya de la rassurer :

-         Écoute, Raya. Si tu n'as pas envie d’évoquer ce sujet…

L’épéiste l’arrêta d'un geste.

-         Ça va aller.

Sa main se resserra sur la poignée de son épée, encore dans son fourreau. Cette fois, ce n’était pas pour se défendre… mais plutôt pour se donner de la force. Enfin, c'est l’impression que j'avais face à ce geste.

-         La pierre était gardée dans un des états, le plus puissant de tous, au cœur même de ce qui était, jadis, Kumandra. Les gardiens se passaient le rôle de génération en génération, et… le dernier d'entre eux commit une terrible erreur.

-         Laquelle ? s'enquit Donald.

-         Ce gardien donna sa confiance à la mauvaise personne.

Je voulus demander plus de détails, mais vu son expression, je savais que je n'en tirerais rien du tout.

-         Résultat, la pierre fut brisée et chacun des royaumes prit un morceau.

-         C'est un de ces morceaux que tu as ?

Raya me regarda droit les yeux sans me répondre, ce qui constituait déjà une réponse en soit.

-         Ne me dit pas que tu as peur qu’on te la vole ? plaisanta Araen.

La jeune femme demeura silencieuse, au grand étonnement du blond.

Je vois…

-         Suite à la destruction de la relique du dernier dragon, reprit la jeune femme, le Druun apparut à nouveau, conduisant à la destruction du monde et transformant à nouveau les gens… en pierre, termina-t-elle avec une voix triste.

-         Où est le Druun, maintenant ? demanda Araen. Que le Héros que je suis aille lui faire sa fête !

Raya soupira.

-         Toi, tu es soit courageux… ou bien très stupide.

-         Courageux, confirma le concerné.

-         Le Druun s'est multiplié. Il en erre quasiment partout, en particulier dans les lieux sauvages. Le seul moyen de se protéger face à eux, c’est la pierre. Ou du moins, un fragment.

Son regard se posa à nouveau sur chacun d’entre nous.

-         Vous êtes drôlement chanceux pour avoir survécu jusqu’ici.

Je confirme. Nous n’avions pas rencontré le moindre de ces… « Druun » pour l'instant, et heureusement.

-         En tout cas, (Raya se leva de sa chaise.) je vous ai dit ce que vous aviez besoin de savoir. Nous sommes quittes.

-         En fait…

Une idée se forma dans mon esprit, une idée folle, qui contredisait même un peu ma philosophie, toutefois une idée qui pourrait peut-être non seulement nous aider à partir de ce monde, mais aussi à enquêter sur Maléfique.

Raya, la guerrière à l’épée, me regardait, méfiante, comme si elle savait déjà ce que j'allais lui demander et que sa réponse ne changerait pas.

Cela dit, je devais quand même essayer, pour Sora, et pour le roi.

-         Raya… Est-ce que tu nous laisserais t'accompagner ?


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