Le début d'une merveilleuse amitié
Chapitre 1 : Le nombre des années
3573 mots, Catégorie: T
Dernière mise à jour 14/01/2021 15:11
Cette fanfiction participe aux Défis d’écriture du forum Fanfictions . fr : Houston, on a un tas de neige (décembre 2020 - janvier 2021). Le titre est une citation de Casablanca, et la dernière phrase de ce texte est un extrait du Cid (Corneille). La scène se situe à la fin de Skyfall.
Le début d’une merveilleuse amitié
Q descendit de l’hélicoptère, un peu sonné. Il ne savait pas vraiment ce qu’il faisait ici, dans le fin fond de l’Ecosse, à 5h du matin, au beau milieu de l’hiver. La nouvelle était tombée trois heures auparavant, laissant l’ensemble du MI6 sous le choc et dans la consternation. Puis des ordres étaient venus. Q avait obéi sans poser de questions. Effacer les traces. C’était une chose pour laquelle il était doué. Cela n’avait pas posé de problème.
Et puis on lui avait demandé de prendre des vêtements chauds et de monter dans l’hélicoptère qui l’attendait, sans lui fournir davantage de précisions.
Q avait obéi, mais cette fois il avait posé des questions.
Aucune n’avait reçu de réponse.
Le froid le cueillit dès qu’il eut posé le pied sur le sol gelé. L’obscurité l’empêchait de discerner clairement le paysage, mais l’incendie qui avait ravagé la vieille demeure familiale, pas tout à fait éteint, répandait sur le loch et la lande un petit air de fin du monde. La douzaine d’agents / soldats / gens armés jusqu’aux dents, sur le qui-vive et patrouillant dans un périmètre restreint n’arrangeait rien.
Heureusement, ce fut Eve qui l’accueillit. Un semblant de normalité dans un univers surréaliste. Et, du moins l’espérait-il, la possibilité d’une explication quant à la nécessité de sa présence ici.
– Nous n’avons pas réussi à le faire bouger, dit-elle avec un soupir en désignant une forme sombre assise non loin du lac, se découpant sur le rougeoiement de l’incendie, à une cinquantaine de mètres de l’équipe silencieuse et frigorifiée.
– Qu’est-ce que vous entendez exactement par « vous n’avez pas réussi à le faire bouger » ?
Q se targuait d’être un homme plutôt patient d’ordinaire – une qualité nécessaire à son travail – mais aujourd’hui était un jour spécial et il sentait la jauge de sa longanimité atteindre sa limite supérieure.
– Ça veut dire exactement ce que ça veut dire, soupira Eve. Si on fait mine de s’approcher, il braque un révolver sur l’intrus. Qui que ce soit.
La lumière se fit soudainement dans l’esprit embrumé du jeune homme, à qui il ne fallait que cinq heures de sommeil par nuit pour être opérationnel, mais qui n’avait pas dormi depuis deux jours entiers.
– C’est de 007 que vous parlez.
Eve leva les yeux au ciel, d’un air de répondre « qui d’autre ? ». Et, en effet, qui d’autre pouvait être pénible à ce point ? Q soupira à son tour. Comptez sur Bond pour compliquer les choses. Il ne connaissait 007 que depuis quelques jours, et il avait déjà compris que son atout principal dans la vie était de s’attirer des ennuis.
– Je résume la situation : M est morte, Bond a tué Silva puis il s’est assis au bord du lac et il est resté là… à faire quoi ?
– Rien. Mais il ne veut pas bouger. On ne peut pas le laisser là, pour plein de raisons valables, la première étant qu’il a pris un bain dans un lac gelé. Son instinct de survie…
Elle fit une pause volontaire pour bien montrer ce qu’elle pensait des capacités d’auto-préservation de James Bond.
– … aurait dû depuis longtemps attirer son attention sur la nécessité de se mettre au chaud, mais non. Et personne n’a réussi à lui faire entendre raison.
– Que pensez-vous d’une petite seringue hypodermique projetée par fusil, du genre de celles qu’on utilise pour les éléphants ou les rhinocéros ?
– Q, ce n’est pas drôle.
– Je ne plaisantais pas.
Elle lui lança un regard las et il leva la main en signe d’excuse tout autant que d’incompréhension :
– Pourquoi m’avez-vous fait venir ? Vous avez un souci technique que vous voulez que je résolve ?
Au haussement de sourcil incrédule auquel se heurta sa question, Q sentit qu’il n’allait pas aimer la réponse.
– Ils ne vous ont rien dit ? temporisa la jeune femme.
Son interlocuteur se contenta de hocher négativement la tête. Non, personne n’avait rien daigné lui dire. Ses nombreuses questions, à bord de l’hélicoptère, avaient rencontré un silence presque aussi glacial que la température ambiante autour de ce fichu lac. Eve tourna la tête vers la silhouette solitaire.
– 007 a demandé à vous voir.
– Il a quoi ?
Q se demanda s’il avait soudainement été frappé d’une déformation de l’ouïe. C’était, après tout, la seule solution rationnelle possible.
– Vous m’avez très bien entendu. Il a demandé à vous voir. Une condition sine qua non pour qu’il vide enfin les lieux.
– Et vous n’auriez pas pu tout simplement lui donner un téléphone portable avec mon numéro, plutôt que de me mettre dans un hélicoptère sans la moindre explication ?
– Il a dit qu’il voulait vous voir, pas vous parler.
Le quartier-maître resta un instant silencieux, digérant l’information. Sans avoir la moindre idée de ce que pouvait lui vouloir Bond, il n’était pas certain qu’aller parler à un type surentraîné qui braquait un revolver sur tout ce qui l’approchait soit une très bonne idée. En fait, il était même certain que l’idée était très mauvaise.
– Et s’il me menace, moi ? Qu’est-ce que je fais ?
– Je ne sais pas, soupira Eve. Je suis fatiguée.
Cet aveu empêcha Q de continuer sur sa lancée. La nuit avait été difficile pour tout le monde au MI6. Si Bond était soudainement devenu cinglé – disons plus cinglé que d’habitude –, ce n’était certainement pas la faute de la jeune femme. Il n’avait pas le droit de lui faire porter le poids de ses propres angoisses. Lui-même n’avait jamais été confronté à un agent récalcitrant, le travail de terrain ne le concernant généralement pas. Il restait toujours derrière l’écran, ainsi que le lui avait signifié 007 non sans une certaine amertume.
– Une seringue hypodermique serait notre dernier recours, finit par avouer Eve devant l’indécision du jeune homme, mais si ça peut vous rassurer, oui, nous avons un sniper prêt à tirer si nécessaire.
Q la dévisagea avec incrédulité. Elle plaisantait, n’est-ce-pas ?
Un regard suffit à le convaincre. Non. Non, elle ne plaisantait pas.
Il se racla la gorge et s’enveloppa dans son manteau. Le vent coupant rendait le froid presque insupportable.
– Bonne chance, murmura Eve.
Prenant une profonde inspiration, Q se força à lever le pied et à faire un pas en direction de l’agent qui n’avait pas bougé à l’arrivée de l’hélicoptère. Il ne bougea pas davantage lorsqu’un des membres de l’équipe, équipé d’un porte-voix, lui cria que le quartier-maître s’apprêtait à le rejoindre.
Q, qui avançait en traînant des pieds dans la neige, nota des traces de sang sur le sol. M, songea-t-il – et il fut surpris d’éprouver un pincement au cœur et une inquiétude réelle et profonde quant à l’avenir du MI6. Qui allait la remplacer au pied levé, au milieu d’une crise aussi profonde que celle qu’ils venaient de traverser ? Plus prosaïquement, le corps avait-il été enlevé ? Bond avait-il laissé les médecins et le légiste s’approcher suffisamment de lui pour pénétrer dans la chapelle ? Voir les lieux du drame rendait les choses beaucoup plus tangibles. Tant que la mort de M n’avait été constituée que de mots, un récit parmi d’autres, elle était restée abstraite, déconnectée de la réalité. Maintenant que Q voyait de ses propres yeux le manoir qui se consumait, la lande parsemée de roseaux, la chapelle, l’étoile noire où se reflétait la Voie Lactée au centre du lac gelé, là où la glace avait cédé sous le poids de 007, il commençait à réaliser ce que signifiait le travail de terrain. Et, peut-être, à regretter les paroles un rien condescendantes qu’il avait adressées à Bond quelques jours auparavant, à la National Galerie.
Peut-être l’agent secret, ayant basculé dans la paranoïa complète, l’avait-il fait venir pour cela, pour lui faire payer les mots inconsidérés qu’il avait prononcées durant leur joute verbale ?
Pendant un instant, l’idée du sniper prêt à tirer le rassura.
Il entra dans le champ de vision périphérique de Bond, qui demeura immobile. Il s’approcha encore. Pas de réaction.
– Je suis là, 007, qu’est-ce que vous me voulez ? demanda-t-il en essayant de ne pas se monter trop agressif.
L’homme tourna lentement la tête et leva les yeux vers le nouveau venu, à qui il offrit un sourire moqueur.
– Alors comme ça, vous êtes venu. Je suis impressionné !
– Ce n’est pas comme si on m’avait vraiment donné le choix, fit remarquer Q, vaguement soulagé de constater que Bond n’envisageait pas de lui tirer dessus immédiatement, et vaguement irrité du peu de cas que l’agent semblait faire de lui alors qu’il avait spécifiquement requis sa présence dans cet endroit inhospitalier.
– Vous voulez dire que vous ne vous seriez pas déplacé si on ne vous avait pas forcé la main ?
Le jeune homme haussa les épaules.
– La question est nulle et non avenue. On m’a ordonné de venir, j’ai obéi aux ordres.
– Asseyez-vous.
Q jeta au sol gelé un regard peu amène.
– Asseyez-vous, s’il-vous-plaît, répéta Bond un peu plus doucement.
Le quartier-maître hésita un instant, puis obtempéra. Quelque chose dans la posture tendue de son interlocuteur – la ligne raide des épaules, les traits crispés, la mâchoire serrée malgré le sourire un peu cabotin qu’il continuait à arborer comme un ultime masque face à l’inéluctable qui s’était produit – lui soufflait qu’il ne fallait pas tirer sur la corde, déjà prête à se rompre.
Le contact avec le sol humide et glacé le transperça jusqu’à la moelle et un tremblement convulsif, irrépressible, le parcourut de bas en haut. Il doutait fortement d’être capable de parler sans claquer des dents.
– Si vous avez quelque chose à me dire, parvint-il à articuler, faites-le vite. Il fait tellement froid ici…
– Vraiment ? répondit Bond avec un étonnement non feint (et parfaitement déplacé, estima le jeune homme). Je n’avais pas remarqué.
Q s’efforça de ne pas laisser paraître sur son visage l’incrédulité qu’avait fait naître en lui cette simple phrase. Il réalisa soudainement que les vêtements de son interlocuteur, trempés, ne dégoulinaient plus mais commençaient à se raidir, au niveau des manches et du dos, sous l’effet du gel.
– 007, vous… vous réalisez que vous êtes tombé dans un lac gelé il y a quelques heures, n’est-ce-pas ? Et que la température est largement au-dessous de 0°C ?
Il se rendit compte, rétrospectivement, qu’il avait parlé sur la pointe des pieds, de ce ton prudent, contraint et maladroit que l’un utilise pour s’adresser aux très jeunes enfants en train de piquer une crise, aux grands malades ou bien encore à ceux dont on doute fortement de la santé mentale.
– Qu’est-ce que ça fait ? demanda Bond avec un haussement d’épaules désinvolte. Un agent est entraîné pour résister à ce genre de… désagrément.
Q essaya tant bien que mal de ne pas céder à la panique et observa plus attentivement l’homme qui l’avait fait venir jusqu’ici. Il embrassa d’un seul regard la peau blanche, les lèvres desséchées par le froid, les mains crispées sur le revolver, presque bleues, inertes. Bond, réalisa-t-il soudain, aurait été incapable de tirer si sa vie en avait dépendu, mais il ne semblait même pas s’en apercevoir. Le jeune homme doutait même de la capacité de son interlocuteur à se lever ou à effectuer le moindre mouvement. Ses pieds devaient être encore plus gelés que ses mains, comprimés dans des chaussures et des chaussettes détrempées qui empêchaient la circulation de se faire normalement.
– Je ne vais certainement pas discuter ce point, répondit le quartier-maître avec un calme qui l’étonna lui-même. Laissez-moi simplement vous faire remarquer, premièrement, qu’être entraîné ne rend pas la chose plus plaisante, et, deuxièmement, que je ne suis pas un agent…
La provocation était peut-être un meilleur moyen que l’inquiétude pour décider 007, visiblement en état de choc et proche de l’hypothermie, à adopter une stratégie de survie plus efficace que celle qu’il avait choisie pour l’instant ?
– … et que je n’ai pas envie d’attraper une pneumonie pour vos beaux yeux, donc, si vous aviez l’amabilité d’accélérer un peu le mouvement…
Bond émit un ricanement déplaisant.
– Une pneumonie ? N’exagérez pas non plus !
Q n’exagérait absolument pas. Il avait attrapé assez de bronchites dans sa vie pour savoir que c’était la chose la plus facile au monde. Mais à en juger par le bleuissement qui avait gagné les lèvres et les joues de l’agent, une infection pulmonaire était le cadet de ses soucis. Il fallait le faire bouger d’ici, et vite.
– Bond, je suis à peu près sûr que vous êtes à deux doigts de l’hypothermie. Ce n’est pas que je m’en préoccupe vraiment – si vous décidez de mourir de froid ici, c’est votre problème – mais ne comptez pas sur moi pour vous imiter.
Un petit rire amer lui répondit.
– Mourir ici ? répéta 007 avec dureté. Je croyais qu’il était bien établi que la mort ne voulait pas de moi. Elle a pourtant essayé de m’avoir un certain nombre de fois, mais elle vise très mal et ce sont les autres qui meurent. Je comprends que vous redoutiez les dommages collatéraux, mais je ne pense pas qu’il y ait danger immédiat. Elle a reçu son content de sang, conclut-il en esquissant un geste lent et maladroit vers les taches rouges que Q avait remarquées en arrivant près du lac.
Le jeune homme se demanda brièvement ce que son interlocuteur avait bien pu vivre durant ses années « sur le terrain » – et auparavant – pour que sa voix charrie un tel dédain pour sa propre existence. Quels morts il avait croisées, causées, été impuissant à empêcher.
Bien évidemment, il ne poserait pas la question à voix haute. Mais il n’oublierait pas.
Il avait un peu trop rapidement pris Bond pour un matamore vaniteux, sans percevoir la moindre faille derrière la carapace soigneusement entretenue, polie à grand renfort de sarcasmes. Mais aujourd’hui, le froid écaillait le vernis et permettait à Q d’entrevoir, au fond des yeux gris et fatigués, le souvenir des blessures anciennes et récentes, des âmes disparues, des fautes irréparables commises au nom du devoir.
– Vous avez demandé à me voir, reprit Q, choisissant un nouvel angle d’attaque. Qu’attendez-vous de moi ?
La neige s’était remise à tomber à gros flocons et commençait à former sur l’herbe rase de la lande un linceul immaculé. Le quartier-maître, frissonnant dans le vent glacé, avait conscience de tous les regards posés sur lui, de tous ses collègues, épuisés et sous le choc de la mort de M, qui n’attendaient qu’une chose : regagner Londres. Bond, pour sa part, demeurait muet et immobile, totalement détaché de ce qui l’entourait. Il aurait pu rester là une éternité, au milieu de la neige qui poursuivait sa sarabande endiablée, si un éternuement ne l’avait pas pris en traître et forcé à bouger.
Vers Q, naturellement.
Ce dernier, hésitant entre la colère et le dégoût, prit sur lui pour ne pas broncher, mais il ne put s’empêcher d’adresser au sniper embusqué une fervente prière – tirez-lui dessus maintenant – tandis que 007 laissait échapper un nouvel éternuement sonore, pas mieux couvert que le premier.
– Et maintenant ? demanda le jeune homme en s’essuyant le visage.
Dès qu’il rentrerait chez lui, il s’immergerait des pieds à la tête dans un bain désinfectant, mais il ne pouvait guère reprocher à un agent instable, au bord de l’hypothermie et probablement de la crise de nerfs, de lui avoir éternué dessus. Il ne s’agissait pas d’un reproche très professionnel – mais il était certain qu’au fond de lui, Bond trouvait l’air ulcéré et répugné de son interlocuteur particulièrement risible.
Un jour, il le lui ferait payer. Mais pour l’instant, il devait le tirer de là.
– Maintenant… vous allez m’aider à me lever.
Q manqua s’étrangler.
– Vous voulez dire que vous m’avez fait venir jusqu’ici pour que je vous tende la main ? Il n’y avait pas assez de collègues sur le terrain pour le faire ?
007 lui lança un regard indéchiffrable et remarqua d’une voix un peu trop égale et détachée :
– Je ne peux plus bouger mes doigts.
Le quartier-maître se força à se calmer, puis il se leva, se plaça devant son interlocuteur et lui saisit sans trop de douceur la main droite, celle qui ne tenait pas le revolver. (Il n’était pas totalement fou non plus.)
Il sentit immédiatement, placé au milieu de la paume glacée, à peine maintenu par une pression du pouce, un objet métallique.
– Une clef USB ? murmura-t-il, toute colère envolée. Celle de M ?
– Bonne déduction, Sherlock. Pas un mot à qui que ce soit, entendu ?
Q acquiesça machinalement. C’était pour ça que 007 avait réclamé sa présence ? Pour lui donner la clef USB qui avait appartenu à M, sans que personne ne s’en aperçoive ?
– Maintenant, mettez vos mains dans vos poches, comme si vous aviez froid.
– J’ai froid, répondit Q d’un ton peu amène.
Mais il fit ce que Bond lui avait demandé, transférant la clef USB de la main de son interlocuteur à la poche droite de son manteau. Bien évidemment, après son bain forcé dans le lac, l’équipe médicale allait retirer les vêtements de l’agent – et les inspecter méticuleusement, pas spécialement par méfiance, mais simplement parce que c’était ce que dictait la procédure standard dans ce genre de cas.
– Et maintenant, vous pouvez appeler les autres si vous voulez.
Le jeune homme ne se le fit pas dire deux fois et s’empressa de héler l’équipe médicale qui attendait à bonne distance. Puis il ressortit précipitamment les mains de ses poches en voyant Bond osciller dangereusement vers le sol. Le revolver s’échappa de ses doigts paralysés et tomba sur la neige.
– Bon Dieu, 007, restez avec nous !
Q s’agenouilla devant lui, le soutenant au niveau des épaules, avec l’impression déplaisante (et inquiétante) de serrer un bloc de glace.
– Vite ! appela-t-il.
Au pas de course, des brancardiers arrivaient.
– Je vous l’ai dit, murmura Bond. La mort ne veut pas de moi. Vous allez étudier le contenu de cette clef ?
Le jeune homme leva les yeux au ciel. Bien sûr qu’il allait étudier le contenu de cette clef. Mais cela ne répondait pas à la question qu’il se posait depuis qu’il avait senti l’objet glisser dans sa paume…
– Pourquoi moi, 007 ? souffla-t-il alors que deux membres de l’équipe médicale s’agenouillaient à côté de lui.
Bond, dont les lèvres étaient devenues violettes, parvint à esquisser un sourire.
– Allez savoir. Mettez cela sur le compte d’une crise de folie passagère. Ou la certitude que, contrairement à ce que je vous ai dit, la valeur n’attend pas le nombre des années.
Puis, tandis que les médecins le hissaient sur le brancard en vociférant des ordres à l’équipe de secours qui arrivait avec le camion, il s’évanouit.