Inception - La mort de Dom Cob
Niveau 0 du Rêve.
Le monde, leur monde, était faiblement éclairé à présent, une île en manque de lumière flottant dans les vastes ténèbres. Leur monde était surchauffé d'excitation, de ferveur, et d'effervescence et je lui préférais largement la fraîcheur sylvestre où je m'étais réfugié, assis à l'arrière d'un van aménagé. Un van qui ne roulait plus depuis des lustres et dont j'étais le moteur par la pensée, un effet de synesthésie me reliait à cette équipe d'une douzaine de personne qui l'avait aménagé jadis, sur la planète Ithaque-2131, après les attentats de Planck-Sur-Oise, le 13 novembre 2789.
A cette époque, par pure fantaisie et effet mimétique, je me questionnais sur le sens de la vie. Juste après le sinistre incident, la pluie s'était installé pour de bon dans ces bois. A présent, leur monde, alors que je passais en revue des cds appartenant à leurs dynasties, chantait leur dernier Te Deum. Le rêve suivant avait giclé du fond de ma mémoire :
C'était un palais de marbre au milieu d'un grand jardin sauvage. Par les fenêtres se déversait le silence glacé des feux de Bengale aperçus au loin. En me plaçant au bout d'une certaine allée, bordée de myosotis, de népenthès et d'hellébore, je vis un homme -ma proie- pencher sur un livre. Mon regard surprit aussi une femme en robe de couture ; robe de couture réveillant des couleurs douloureuses jadis avivées selon les procédés de ma lanterne magique.
Ses talons aiguilles cliquetaient sur le sol en marbre. Le sang coula soudain avec un bruit de tonnerre, Dom Cobb était mort et le rêveur disparut dans les limbes d'un autre monde imaginaire.
Niveau - 1 du rêve.
Radicalement opposés, un homme et un adolescent embauchés en binôme dans une entreprise de dératisation. La seule chose qui les réunit : cette haine féroce contre le système établi et leurs spirales d'idées noires qui, en tournant sur elle-mêmes comme des toupies, fouillent les ténèbres de leur subconscient, recherchent patiemment une fêlure parmi les murs érigés par leurs contemporains. Pour l'instant, ils font partie de la catégorie des Pisteurs. Mais quelque chose couve en eux ; les récents événements -une prolifération de rats dans les souterrains et au-dessus de la surface- vont les aiguiller vers ce qu'ils jugent encore impossible : éradiquer l'espèce humaine. Comme chaque matin, ils vont au travail à contre-coeur, et comme chaque matin, ils ne savent pas encore que c'est l'homme du van qui les secoue et les motive à sortir de leur lit.
Kyzz, qui est proche de la démence, a récemment quitté l'hôpital psychiatrique, et a trouvé ce poste pratiquement dès sa sortie ; il faut dire que les autorités promettent de l'ordre en balbutiant quelques mots comme « enrayement » ou « désinfection totale » et encouragent les entreprises de dératisation à engager n'importe quel profil. Ainsi Sphinx, le jeune délinquant multirécidiviste qui travaille avec Kyzz, parcourt les souterrains avec lui. Equipés tous les deux de lance-flammes, ils avancent dans l'obscurité, une lampe de mineur sur le front. Les murs suintent d'humidité ; une odeur pestilentielle, malsaine comme les paroles des politiciens qui ne savent que remplir de la paperasse inutile et nauséeuse, se répand. De plus en plus forte à mesure qu'ils s'approchent de Cobb agonisant. Soudain, la voix de Sphinx retentit en perçant dans le noir : il vient de marcher sur un homme et invite Kyzz à le rejoindre. Au début, Kyzz croit que c'est encore une mauvaise blague du gosse mais après plusieurs cris insistants, il vient dans sa direction et découvre ainsi Cobb mourant, étendu sur le sol : son corps meurtri et son trench-coat coupé dans l'étoffe précieuse, déjà bien attaqué par les rats.