Les enfants de la guerre

Chapitre 12 : Chapitre douzième

3678 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 31/12/2023 13:43

Chapitre douzième :

« La raison parle, mais l’amour chante. » - Alfred de Vigny


On pouvait dire beaucoup à propos de Narcissa Malefoy : sang-pur, raciste, froide, hautaine. Elle était, ou avait été, tout ça et plus encore. Mais la guerre l’avait changée, comme tant d’autres. Les horreurs qu’elle avait vues et vécues avaient semé le doute en elle. Au fil des mois, ses convictions avaient vacillées pour finir par éclater quand elle avait manqué de peu de perdre son fils unique. Elle ne devait leur survie qu’à sa ruse, à son ingéniosité et à son incroyable ténacité.


Chaque fois qu’elle avait vu un nouvel enfant entrer au Manoir pour y être torturé puis assassiné, c’était le visage de son fils qui s’était superposé au sien. Et son cœur de mère n’avait pas pu le supporter. Elle était le genre de mère aimante en toute circonstance ; mais si vous aviez le malheur de menacer son enfant, elle devenait alors votre pire cauchemar : sournoise, enragée, déterminée et invincible. Voldemort lui-même n’aurait pu changer cela, même s’il l’avait voulu.

Oui, vraiment, Narcissa Malefoy pourrait tuer pour son fils et donnerait sans hésiter sa propre vie pour la chair de sa chair. Elle avait proposé d’aller en prison à sa place pour être certaine qu’il soit libre. Et, finalement, les nombreux témoignages lors de leurs audiences respectives avaient mis en lumière leur rôle dans le sauvetage d’Hermione Granger. Sans eux, elle serait, sans doute aucun, décédée. Ou, pire encore, Bellatrix aurait pu avoir le temps nécessaire pour parachever l’apposition de la rune.

Mère et fils avaient été acquittés par le département de la justice magique. Cependant, une liste longue comme le bras d’obligations légales leur avait été adressée. Mais, ni l’une, ni l’autre n’auraient à aller en prison.

Et ce fut ce jour-là précisément, qu’elle avait abandonné complètement l’idéologie centenaire de sa famille. Bien décidée, elle ne laisserait plus jamais quoi ou qui que ce soit se mettre en travers de l’avenir de son enfant. Aucun mage noir, aucun mari… Elle offrirait à son fils la possibilité d’enfin choisir sa vie. Elle espérait ainsi voir Drago sourire à nouveau et, pourquoi pas, se pardonner, aimer et être aimé. C’était sans regret et avec, tout de même, une pointe d’appréhension, qu’elle s’ouvrait au monde, acceptant ce qui était jusque-là inacceptable.

Voilà qui était vraiment Narcissa Malefoy.

Pourtant, ce matin comme tous les autres depuis des semaines, dire qu’elle n’était pas à l’aise était un euphémisme. Après des années de guerre, l’idée de simplement retourner côté moldu pour récupérer une boucle d’oreille lui apparaissait tout à fait ridicule.

Elle prit une éternité pour s’apprêter et une autre pour oser quitter son hôtel particulier. Elle rejoignit, hésitante, la cheminée du hall et utilisa le réseau pour arriver directement dans le bourg sorcier d’Hackney Road. Totalement circulaire, le seul moyen de rallier la rue moldue était de traverser la boutique « Charmes et envoutements ». Elle savait que son mari avait utilisé cet endroit comme repaire pour ses affaires douteuses, mais le gérant, désormais incarcéré, avait laissé la place à sa sœur et à un commerce respectable :

« Madame Malefoy, puis-je vous…

- Ne m’appelez pas comme ça !

Tout comme son fils, Narcissa ne supportait plus ce nom. S’entendre encore se faire appeler ainsi lui donnait des crises d’urticaires.

-Oh pardon… Miss Black, avez-vous besoin d’aide pour choisir une tenue de location ?

- C’est encore pire… murmura-t-elle en se massant les tempes et en ignorant totalement la gérante.

Elle quitta rapidement la boutique côté moldu et prit soin, cette fois, de vérifier avant de traverser la route. Elle marcha lentement pour finalement se retrouver face à la devanture « Les fleurs d’Anton » et retint sa respiration un moment, tentant de se convaincre que ce n’était pas bien compliqué : elle entrait, récupérait son bien puis elle rentrerait chez elle et oublierait toute cette histoire abracadabrante ! Voilà, c’était exactement ce qu’elle allait faire.

Se recomposant un visage neutre, elle passa la porte faisant retentir la clochette et fut surprise de voir le nombre de clients qui faisaient la queue :

« Les moldus achètent donc des fleurs ?... Pourquoi ne les font-ils pas simplement… Oh… Quelle idiote ! Ils ne peuvent pas les faire apparaître, c’est vrai…»

Un client quitta la boutique, bouquet en main, et la file avança un peu. Elle entendait vaguement le fleuriste proposer une composition au couple devant elle lorsque ses yeux se perdirent dans la contemplation de la multitude de variétés florales étendues soigneusement autour d’elle : des lys majestueux, des roses flamboyantes, des gerberas acidulés ou encore du gypsophile aérien habillaient les étals de leurs couleurs et de leurs senteurs. Au centre, elle put admirer la poésie dont faisait preuve l’artisan dans chacun de ses arrangements floraux, tous aussi beaux les uns que les autres. Il parvenait, elle ne savait par quel talent, à marier entre elles les formes, les couleurs et les significations. Elle, qui s’était toujours intéressée au sens des fleurs, voyait des messages éclore devant elle comme autant de bourgeons au printemps : là pour dire je t’aime, ici pour demander pardon, là encore pour porter chance et bonheur à son destinataire. Elle n’aurait su dire pourquoi cela la touchait tant et préféra détourner le regard, se concentrant sur la grande collection de vases de la boutique : en verre comme en céramique, il y en avait pour tous les goûts et tous les usages. Un gigantesque loutrophore ne demandait qu’à être garni de fleurs blanches et elle dut se retenir de lancer un – pas assez- discret Orchideus.

Elle détacha enfin ses yeux des étagères et les laissèrent glisser le long du comptoir jusqu’à croiser ceux du fleuriste. Soudain, le temps se figea : le bruit des conversations, évaporé ; le vrombissement des voitures à l’extérieur, évanoui ; les autres clients, disparus. L’espace d’un battement de cœur, ils étaient seuls au monde au beau milieu d’un champ fleuri, des pétales voletant autour d’eux au gré d’une douce brise tiède. Le gris de ses yeux accroché à l’ambré de ceux du fleuriste ; ils se perdaient l’un dans l’autre. Seul un raclement de gorge, suivi d’un soupir que l’on devinait exaspéré, les sortirent de leur torpeur.

Le gérant se détourna rapidement et offrit son plus beau sourire au couple face à lui en leur tendant un énorme bouquet foisonnant d’autant de couleurs que d’essences. Après avoir été payé, il attendit patiemment que ses clients passent la porte pour s’occuper de la personne suivante. Narcissa, restée en retrait jusqu’à présent, s’avança élégamment, comme son éducation aristocratique le lui avait toujours imposé. Unique signe de son trouble, une légère roseur, pouvant aisément être perçue comme étant due à la chaleur de ce début d’été, colorait ses joues.

- Que puis-je faire pour vous aujourd’hui Miss ?

Fronçant légèrement les sourcils, elle avait espéré qu’il la reconnaisse, facilitant ainsi leurs interactions. Elle devait sans doute s’habituer à ce que plus rien ne soit simple désormais. Le visage fermé et les lèvres légèrement pincées, elle posa sa voix pour ne laisser aucune émotion la trahir :

- Il y a quelques jours, j’ai manqué d’être renversée par… euh… par…

Narcissa Malefoy n’était pas du genre à perdre ses mots, encore moins ses moyens mais en sentant le regard perçant du fleuriste sur elle, et n’ayant pas une grande connaissance des objets moldus, elle se retrouvait face à un inconnu à bafouiller et à passer pour une idiote.

- Je… Et bien… J’ai perdu une boucle d’oreille et je me demandais simplement si par le plus grand des hasards vous ne l’auriez pas retrouvée. Non pas qu’elle soit d’une grande valeur, mais c’est un héritage familial auquel je tiens.

« Et si mes ancêtres savaient qu’une partie de leur héritage se retrouvait perdu chez les moldus, je serais sans aucun doute possible maudite pour l’éternité. »

Le fleuriste s’éclipsa dans l’arrière-boutique en silence et Narcissa dut parler plus fort pour qu’il l’entende :

- C’est un fermoir simple en or avec une…

- Une perle grise ? la coupa-t-il.

Son regard s’illumina en reconnaissant son bijou.

- Oui ! Quel soulagement ! Merci Monsieur… ?

- Pemble. Patrick Pemble.

- Et bien Monsieur Pemble, il est rare de tomber sur des personnes honnêtes. Merci infiniment.

- Je vous en prie Miss… ? lui sourit-il en lui tendant la boucle d’oreille.

Elle hésita quelques secondes à révéler son identité. Certes, il ne fallait pas que sa visite côté moldu s’ébruite mais, après tout, ici elle n’était pas connue et pouvait bien s’autoriser à se présenter.

- Narcissa, juste Narcissa.

L’ambre des yeux de Patrick étincela en entendant ce prénom si fort à propos dans sa boutique et s’empressa de soulever la trappe de son comptoir pour passer dans la partie magasin.

- Et bien, juste Narcissa, je suis ravi d’avoir pu vous aider aujourd’hui. Laissez-moi vous raccompagner.

Elle se laissa guider jusqu’à la vitrine où Patrick l’attendait, une main sur la poignée. A peine eut-elle le temps de penser que, pour un moldu, il avait des manières impeccables, que son talon de chaussure dérapa sur une feuille mouillée. En une seule enjambée, il arriva à son niveau et la rattrapa in extremis. Allait-elle vraiment s’effondrer à chaque excursion ?

- Vous n’avez rien de cassé ?

Se redressant rapidement, elle pesta intérieurement contre la feuille, le carrelage, sa maladresse et même contre l’univers tout entier qui avait assisté à cette scène ridicule. Armée de son visage impassible et d’un rictus à toute épreuve, elle releva fièrement le menton :

- Je suis plus résistante qu’il n’y parait !

Un sourire doux se dessina sur les lèvres de Patrick.

- Je n’en doutais pas une seule seconde.

Elle ouvrit la porte et s’apprêtait à quitter la boutique quand il la retint :

- Laissez-moi me faire pardonner et vous inviter à boire un café. Il y a un salon de thé un peu plus bas dans la rue. Mercredi, 15h ? Je ferme ma boutique exceptionnellement ce jour-là.

Elle ne répondit rien et, d’un pas pressé, se hâta de rejoindre le bourg sorcier pour pouvoir transplaner à son hôtel, loin des regards inquisiteurs des passants.


XXXXX


Veille du rendez-vous, 19h, boutique de fleurs.

Il attrapa sur son comptoir une feuille blanche et un gros feutre noir sur laquelle il écrivit en grandes lettres :

« Fermeture exceptionnelle ce mercredi. Merci de votre compréhension. »

Il observa la photo d’une femme sur son bureau après avoir accroché le message à sa vitrine. Les yeux humides, il murmura :

« Je sais ce que tu m’as dit… C’est tellement difficile, même après tout ce temps. »

« Ne me regarde pas comme ça… Oui, elle est magnifique. »

« Tu me manques tous les jours. »

XXXXX

Veille du rendez-vous, 19h, hôtel particulier de Norwich.

« C’est demain qu’il t’a donné rendez-vous, tu vas y aller ? »

Elle détourna les yeux de son reflet dans le miroir qui chuchotait de drôles d’idées à son cœur battant à tout rompre.

« Tu aurais tort de ne pas y aller. Oui, il est vrai que c’est un moldu. Mais il est tellement charmant ! Et ses mains… Ne veux-tu pas les serrer entre les tiennes ? »

Son cœur manqua de sortir de sa poitrine à l’évocation des mains du fleuriste tenant les siennes. Elle les imaginait rugueuses mais pas violentes, agiles mais pas insidieuses, déterminées mais pas obligeantes.

« Pour l’expérience… Tu pourrais savoir ce que ça fait… tu sais, celles d’un moldu. »

Un grondement sourd résonna dans sa gorge, elle se dévisagea, essayant vainement de faire taire ses pensées parasites.

« Ne fais pas ta mijaurée ! Drago ne s’est pas fait par magie… Tu as bien le droit de te faire plaisir. Par Salazar, tes ancêtres n’en sauront rien… Et quand bien même ! Ils sont morts et enterrés, ton mari en prison, ta sœur aussi. Tu es libre ! »


XXXXX


Ce fut sur ces pensées que Narcissa avait fini par sombrer dans un sommeil agité empli de rêves étranges. Elle s’était vue se faire retirer sa baguette et bannir du monde sorcier pour celui des moldus où elle avait erré entourée de fleurs géantes voulant la dévorer.

Au petit matin, bougonnant contre elle-même, elle s’était levée, la tête encore embrouillée par ses cauchemars, une boule dans le ventre, un nœud au cœur. Elle n’était pas sortie de la matinée, profitant d’être dans un hôtel particulier pour se faire monter un petit déjeuner copieux. Après s’être occupé l’esprit pendant plusieurs heures en répondant à sa correspondance et en lisant une revue passionnante portant comme titre : « Dragoncelle, avancées et traitements nouveaux », elle avait demandé un repas léger avant de commencer à se préparer. Elle avait hésité plusieurs fois à se glisser sous sa couette prétextant à qui aurait bien voulu l’entendre qu’elle couvait quelque chose. En bonne Serpentarde, c’était sans doute cette solution qu’elle aurait envisagée. Mais, par elle ne savait quel miracle, elle avait développé une forme de courage et elle avait continué à s’apprêter, prenant soin de se coiffer avec élégance et distinction.

Enfin, après plusieurs minutes à scruter le moindre détail de son apparence dans le miroir, elle hocha la tête, satisfaite. Son reflet lui renvoyait l’image d’une femme forte, parée à toute éventualité. Elle quitta sa chambre dans un état second. Une partie d’elle-même s’éclipsant à l’autre bout du monde, l’autre, d’un pas vif, se dirigeant vers Hackney road.


XXXXX


En arrivant dans le bourg sorcier, elle se rendit compte que le stress lui avait fait oublier son chapeau et son foulard. Elle garda la tête haute jusqu’à la boutique de vêtements, faisant fi des gens qui la dévisageaient sur son passage. Elle n’accorda aucune attention à la gérante qui bafouilla un malheureux « Miss Malebla… » avant de se raviser de peur de prendre un sortilège.

Aussi étrange que cela puisse paraître, elle se sentit soulagée en passant la porte. Personne ne se poussait sur son passage comme si elle était contaminée par un virus extrêmement contagieux, personne ne la regardait de travers… Aucun murmure, aucune menace de mort… Rien.

Seule une pensée fugace fit irruption dans son esprit :

« Tu vois que tu peux être libre. Ici, tu peux être qui tu veux et avec qui tu veux… »

Elle ferma les yeux et inspira profondément avant de poursuivre son chemin. A quelques dizaines de mètres de son but, elle aperçut Patrick, debout devant la carte posée dans un grand cadre en verre à l’extérieur du salon de thé.

Son cœur rata un battement en voyant les quelques rayons du soleil traverser son chignon grisonnant. Il avait particulièrement fière allure dans son pantalon de lin beige et sa chemise blanche aux manches retroussées laissant apparaître des veines parcourant ses avant-bras. Personne ne pouvait croire, elle la première, que ce bel homme avait la cinquantaine.

Elle se rapprocha de lui et le fit sursauter en lui tapotant doucement l’épaule. Il se retourna, un sourire charmeur accroché à ses lèvres.

« Je suis ravi que vous soyez là. Comment allez-vous Miss ?

- Mieux, maintenant que je suis arrivée à bon port sans me faire renverser par une automobile !

Elle avait également profité de sa matinée pour réviser quelques classiques moldus, comme la voiture mais aussi les us et coutumes ainsi que les spécialités culinaires. Elle refusait d’être aussi incompétente et gênée que le jour elle avait dû préparer à la main un thé glacé pour laisser son fils discuter avec Hermione.

- Mais vous vous souvenez. Appelez-moi Narcissa.

- Si vous acceptez de m’appeler Patrick. »

Elle acquiesça en souriant et il la conduisit à une table en terrasse. Avec le mois de Juin arrivait de belles journées ensoleillées et il voulait lui faire profiter de cet endroit qu’elle-même trouvait sublime. Eparpillées savamment, de petites tables rondes, carrées ou même encore triangulaires en fer forgé habillaient le petit espace. Des chaises dépareillées, de la même matière, recouvertes de coussins multicolores aux formes toutes plus improbables les unes que les autres complétaient l’ensemble de belles teintes chaudes et accueillantes. Dans tous les coins et les recoins, grand nombre de plantes en pot donnaient à l’endroit des airs de serre tropicale.

Ils s’assirent à une table arrondie gravée d’arabesques souples et appelèrent un serveur après avoir fait leur choix. D’abord hésitants, ils commencèrent à discuter de leurs occupations. Narcissa se renseigna subtilement sur ce que cela faisait de tenir une boutique de fleurs comme la sienne. Patrick la questionna longuement sur ses livres préférés avant de lui avouer en rougissant qu’il trouvait son prénom absolument magnifique. Elle avait souri plus que l’étiquette ne l’autorisait en temps normal mais son cœur, à moitié fondu dans sa poitrine, ne lui avait pas permis de faire différemment. Leur première boisson consommée, ils en demandèrent deux nouvelles pour continuer de faire connaissance. Après une blague d’un fleuriste se faisant envoyer sur les roses, elle avait ri plus fort que jamais et avait saisi, sans s’en rendre compte, ses mains dans les siennes. Elle n’avait pu s’empêcher de passer ses pouces sur les coupures et les cicatrices de ce dernier. Ils échangèrent un regard et ils retirèrent leurs mains du centre de la table, se concentrant sur la carte des boissons.

L’après-midi passa tranquillement. Elle lui confia que son mari, dont elle était séparée depuis des mois, était en prison à cause des horreurs qu’il avait fait. Patrick s’était montré poli et courtois en ne posant aucune question à ce sujet. Et à son tour, il confessa à demi-voix que son épouse était décédée d’un cancer quinze ans auparavant et que malgré l’amour éternel qu’il lui porterait, elle lui avait fait promettre sur son lit de mort que si l’amour se présentait un jour à sa porte, il devait saisir sa chance et tout faire pour que cela fonctionne. A nouveau, leurs yeux s’étaient croisés plus longtemps que nécessaire. Le serveur était revenu mais ne réussissant pas à obtenir l’attention de ses clients, était reparti derrière le bar avec le sentiment profond qu’il ne fallait pas interrompre un si beau moment.

Il lui avoua dans un murmure que quand elle s’était présentée à sa porte, il avait espéré trouver le moindre prétexte pour l’inviter. Et elle avait compris le vrai sens de ses mots un peu plus tôt. D’un bond, elle s’était levée pour partir, ses jambes la commandant à sa place. Il s’était redressé mais ne l’avait pas retenue, la regardant simplement partir sans dire un mot, le cœur en miettes.

Il était resté quelques longues minutes debout, ne sachant pas quoi faire. Il avait fini par sortir une liasse de billets pour la déposer sur la table. En relevant la tête, elle était de nouveau face à lui, essoufflée, les joues rougies par sa fuite soudaine, les cheveux un peu moins bien coiffée qu’à son départ. Il la trouvait encore plus magnifique qu’au début de l’après-midi.

« Vous avez oublié quelque chose ?

Sa voix terne brisa le cœur de Narcissa.

- En fait… Oui. »

Elle fit le tour de la table, s’entrava dans l’un des pieds d’une chaise et Patrick la rattrapa une nouvelle fois avant qu’elle ne tombe. Elle aurait pu s’apitoyer sur cette nouvelle chute, mais elle était tout simplement hypnotisée par les yeux ambrés du fleuriste. Elle se remit sur pied et combla l’espace entre leurs lèvres, l’embrassant doucement et sincèrement.

Cela aurait pu durer une éternité si les serveurs ne s’étaient pas mis à applaudir, les sortant de leur bulle. Ils se sourirent amoureusement et quittèrent main dans la main le salon de thé.


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