Promesse de sang

Drago préférait également éviter tout débat sur l'intérêt d'impliquer Severus Rogue. Si Harry semblait plutôt sûr de lui, Drago pour sa part n'avait plus aucune confiance en son professeur.

Il avait longtemps été son élève préféré et il avait souvent jubilé de sa façon d'humilier Harry. Cependant, son comportement à l'infirmerie après qu'il les ait trouvés dans les toilettes hantées lui avait ouvert les yeux et il trouvait désormais l'homme hautement détestable. C'était surtout parce qu'il ne parvenait plus à haïr Harry et qu'il se rendait compte à quel point le professeur avait été partial. Mais il ne pouvait pas s'empêcher de craindre que Rogue puisse blesser Harry volontairement s'ils faisaient appel à lui, que ce soit pour une obscure vengeance ou juste pour plaire à Voldemort.

Harry — même s'il ne disait rien — comprenait parfaitement les doutes de Drago au sujet de leur professeur de potion. Lui-même aurait préféré ne pas avoir à le contacter, mais il savait qu'il aurait besoin de son aide à un moment ou à un autre. Dès que le mot « potion » avait été prononcé, il avait immédiatement su qu'il devrait s'en faire un allié. Aussi détestable soit l'homme, son instinct le poussait à lui accorder sa confiance, en espérant ne pas être trahi une fois de plus.

Craignant que Drago ne pose plus de questions au sujet de ce que Harry avait vu dans la pensine de Rogue, il l'avait distrait tout le long du repas, parlant de choses banales et évitant tout ce qui pouvait mener à Voldemort. Il avait totalement confiance en Drago et il ne voulait rien lui cacher. Cependant, ce qu'il avait vu ce jour-là appartenait à Rogue et il refusait d'en dévoiler plus sans l'autorisation expresse de l'homme.

Il voyait l'expression pensive de Drago et sa façon de le surveiller du coin de l'œil. Comme s'il s'inquiétait.

Distraitement, Harry pensa qu'il aurait préféré qu'ils restent seuls tous les deux. Ils avaient trouvé un équilibre et il appréciait passer du temps avec Drago. L'arrivée de Rogue serait forcément une gêne pour eux et probablement la source de conflits.

Son assiette terminée, Drago se leva, débarrassa son assiette et s'approcha de Harry. Avec un sourire, il déposa un baiser sur ses lèvres, sans la moindre hésitation. Plus le temps passait, plus il se sentait à l'aise près de Harry et plus il prenait ce genre d'initiatives, le cœur battant.

— C'était délicieux, comme toujours. Je vais avancer les recherches… Je suppose que tu vas… le contacter ?

Harry haussa les épaules, hésitant légèrement. Il murmura, sans quitter Drago des yeux.

— Probablement. Je veux dire… je sais que c'est nécessaire, mais je n'en ai pas réellement envie. Ça va juste rendre les choses plus compliquées…

Drago lui passa la main dans les cheveux, affectueusement, ne pouvant pas s'empêcher de sourire.

— Si c'est nécessaire, fais-le. On pourra toujours demander à l'elfe ronchon de l'expulser s'il fait mine de nous trahir.

Harry lui jeta un regard qu'il voulait agacé à cause de sa façon de mentionner Kreattur, mais une petite flamme d'amusement brûlait dans les yeux verts. Il soupira alors que Drago ricanait. Cependant, il n'eut pas le temps de protester, parce que Drago l'embrassait une fois encore, cette fois, bien plus profondément que précédemment. Puis, tout contre ses lèvres, le Serpentard murmura.

— Tu crois que Rogue va faire une attaque s'il nous surprend en train de nous embrasser de cette façon ?

Malgré lui, Harry gloussa, agrippant la nuque de Drago pour le garder près de lui. Il répondit au baiser de Drago, parsemant ses lèvres de baisers tendres, alors que Drago grognait à chaque fois qu'il s'écartait, désirant visiblement plus que cette multitude de baisers innocents. Leur petit jeu lui avait permis de se calmer et il haussa les épaules, malicieux.

— Il devra s'y faire. Je ne compte pas m'éloigner de toi ou faire semblant de ne pas t'apprécier pour ménager sa susceptibilité.

Après un sourire et un dernier baiser appuyé, Drago ne tarda pas à rejoindre la bibliothèque, sous le regard pensif de Harry. Ce dernier se rendit dans le bureau du maître de maison — il pensa subitement qu'il n'avait jamais vu Sirius y entrer — et fouilla les tiroirs pour y dénicher un morceau de parchemin et du matériel pour écrire.

Il lui fallut un moment pour rassembler ce dont il avait besoin pour contacter Rogue, écartant des piles de correspondance soigneusement empilées et des lettres d'allure plus formelles, datant probablement de l'époque où Wallburga Black tenait les rênes de la maisonnée.

Il pensa vaguement que ce serait à lui de trier tout ça, un jour. C'était ce que Sirius lui avait légué et toutes les personnes qui avaient un jour vécu dans cette maison étaient désormais mortes. Peut-être devrait-il demander à Kreattur de l'aider ou essayer d'amadouer le portrait hurleur de Wallburga pour s'en faire une alliée ?

Harry se laissa distraire quelques instants par l'habituelle douleur du manque de Sirius, ses regrets de n'avoir pas pu le connaître mieux et sa colère d'avoir été privé de lui si brutalement. La culpabilité ne tarda pas non plus et il repoussa fermement toutes ses pensées pour saisir la plume, prêt à inviter Rogue à square Grimmaurd.

Avec un soupir désespéré, le jeune homme se rendit compte qu'il ne savait pas quoi écrire.

Rogue n'était pas stupide et il se méfierait immédiatement d'un courrier de l'élève qui le détestait le plus l'invitant à le rejoindre. Il était espion après tout, ça n'avait aucune chance de fonctionner. Au mieux, il l'ignorerait… au pire, il donnerait sa lettre à Dumbledore et ils seraient de nouveau en plein cœur du danger, à devoir fuir sans avoir la moindre solution de repli cette fois.

Cependant… Cependant, ils avaient besoin de Rogue. D'un adulte — de quelqu'un de majeur plus exactement pouvant faire de la magie sans risquer d'être tracé par le Ministère ou pouvant se déplacer sans attirer l'attention. Harry savait parfaitement que deux adolescents de seize ans ne sachant pas transplaner étaient largement désavantagés. Hors du Square, ils seraient démasqués à l'instant où ils feraient de la magie…

Rogue après tout l'avait déjà protégé. En l'insultant, en le traitant d'idiot… mais il l'avait sauvé. Plusieurs fois. Il s'était même mis entre lui et un loup-garou furieux sans hésiter un seul instant.

C'était probablement mince comme certitude, mais il n'y avait rien de mieux pour l'instant et il devrait faire avec…