Promesse de sang

Chapitre 34

1202 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 07/11/2022 20:45

Après son avertissement, Severus Rogue se tourna brusquement pour quitter l’infirmerie. Cependant, sa volte-face lui donnait l’impression de fuir devant deux gosses, deux adolescents broyés par la guerre en cours. Il avait la main sur la poignée de la porte lorsque Potter le retint d’une voix douce.

— Professeur.


Il se tendit, mais il s’immobilisa, attendant la suite sans faire face au jeune homme. C’était au-dessus de ses forces en cet instant que de croiser son regard pour lire dans les yeux verts identiques à ceux de sa mère l’étendue de sa stupidité. Potter hésita brièvement et Severus l’imagina échanger un regard complice avec Drago. Il se demanda si c’était la promesse de sang — ou quel que soit le type de serment qu’ils avaient échangé — qui les avait rapprochés de cette façon, mais une part de lui-même savait que les garçons s’étaient cherchés depuis longtemps, incapables de s’ignorer. Ils se cherchaient depuis leur arrivée à Poudlard sans même s’en rendre compte. C’était probablement la suite logique, ce moment où ils découvraient à quel point ils étaient complémentaires alors qu’ils appartenaient à des camps ennemis… Ils étaient comme des aimants de polarité opposée, incapables de s’éloigner l’un de l’autre, pris dans une attraction qu’ils ne comprenaient pas et qu’ils n’avaient visiblement plus envie de combattre.

Il allait abaisser la poignée, convaincu que Potter ne dirait plus rien, mais le garçon reprit la parole, chuchotant presque.

— Voldemort a libéré Lucius Malefoy d’Azkaban. Il lui a ordonné de lui livrer son fils et il compte le tuer. Monsieur Malefoy a accepté. 



La main de Severus se crispa sur la poignée de la porte au point que ses doigts blanchirent. Sa gorge se serra alors qu’un goût amer envahissait sa bouche. Il s’obligea à se calmer avant de demander, d’une voix aussi neutre que possible.

— Êtes-vous sûr ?


Il entendit Drago émettre une exclamation étouffée, puis un bruit de mouvement dans son dos. Il ne se retourna pas, cependant. Il n’était pas sûr de pouvoir faire face à ces deux enfants en sursis, pas alors qu’il avait l’impression d’avoir été trahi une fois de plus. Potter répondit simplement, sans la moindre émotion dans sa voix.

— Oui, monsieur.


Il hocha la tête, bien trop raide pour que le geste soit naturel, réprimant l’envie de prendre la fuite. Il soupira en fermant les yeux, réprimant l’envie de coller son front contre la porte devant lui et de se laisser aller quelques instants au désespoir qui grignotait son âme.

— Monsieur Malefoy doit donc rester impérativement à l’écart de chez lui.


Sans attendre la réaction des adolescents, il quitta la pièce comme s’il fuyait, marchant à pas rapides dans les couloirs sans regarder autour de lui. Il n’était pas certain de pouvoir discuter sans s’effondrer, alors mieux valait donner l’impression qu’il était pressé et très occupé. Son visage fermé et ses yeux sombres furieux suffiraient à éloigner les élèves inconscients qui voudraient s’adresser à lui.


*


Dans l’infirmerie, Harry tenait fermement la main de Drago et semblait plongé dans ses pensées, en se mordillant la lèvre distraitement.

Il y avait toujours cette expression de tristesse sur son visage et Drago restait silencieux autant que possible, jusqu’à ce qu’il ne puisse plus se retenir. Le Serpentard grogna, puis finit par avouer le fond de sa pensée. 

— Tu ne devrais pas faire attention à ce vieux fou, Harry. 


Le Gryffondor cligna des yeux comme s’il était tiré brutalement de ses réflexions puis il haussa les épaules, avec un léger sourire d’excuse, tout sauf naturel. 

— Désolé, je réfléchissais.


Harry lui souriait, comme s’il voulait le rassurer, mais Drago pouvait lire la détresse dans ses yeux et il détesta le directeur de Poudlard plus que jamais en cet instant. 

Drago insista, d’un ton inhabituellement doux. Il lui semblait vital de ramener une étincelle de vie dans les yeux verts qui l’obsédaient depuis si longtemps.

— Ce que Dumbledore a dit… tu as conscience que c’est des conneries ? Tu n’as rien fait pour… 


Harry leva la main pour l’interrompre, son sourire forcé se transformant en grimace.

— Je sais… que j’ai fait une erreur. Une énorme erreur. Malheureusement, c’est… Sirius qui en a payé le prix. Si je pouvais, je prendrais sa place, mais…


Le désespoir dans la voix de Harry glaça Drago. Il resta silencieux un long moment, incapable de savoir quoi lui dire. Il ne pouvait que tenir sa main et la serrer pour lui prouver qu’il n’était pas seul. 


Soudain, Harry se redressa, masquant sa tristesse. Drago devina que c’était une habitude chez lui de cacher en permanence sa détresse pour afficher le visage souriant que tout le monde connaissait. Il offrit un clin d’œil à Drago, assorti d’un sourire malicieux, comme si tout était normal, comme s’il n’était pas totalement brisé quelques secondes plus tôt.

— Nous devrions faire quelque chose. Quelque chose de fou.


Le Serpentard afficha une grimace exagérée, tout en secouant la tête. Cependant, il ne put pas empêcher son cœur de se mettre à battre plus vite, d’anticipation, curieux de découvrir ce que le Gryffondor face à lui allait inventer. 

Il resta calme pour déclarer, avec une pointe de malice dans son regard d’acier.

— Merlin… je craignais que tu dises un truc du genre. Tu ne tiens pas en place, n’est-ce pas ? Nous devons rester ici, tu te souviens ?


Harry haussa les épaules tranquillement, comme s’il ne se souciait pas vraiment des règles — sa scolarité entière prouvait à quel point il aimait briser les règles. Ses yeux brillèrent d’amusement quand il se pencha vers lui pour murmurer, mystérieux.

— Non. Rogue a dit de ne rien faire de stupide. Il n’a pas expressément interdit de… d’agir, si ?


 Drago plissa les yeux pour dévisager Harry, suspicieux. Il n’avait pas vraiment besoin de détails pour deviner que Harry allait faire quelque chose de très stupide et de très dangereux. Il lui suffisait de se remémorer leur passé et les décisions qu’avait prises le Gryffondor pour deviner qu’il allait probablement se jeter tête la première dans les ennuis. 


Harry avait gardé son expression légèrement malicieuse, mais son regard dans le vague indiquait à Drago qu’il était en train de planifier sa prochaine folie. Drago envisagea un bref instant que peut-être Harry Potter savait ce qu’il faisait lorsqu’il se lançait dans ses entreprises désespérées… 

Avec une expression résignée — presque torturée — Drago finit par grogner.

- Ok. Je t’écoute. Crache le morceau, Potter. 


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