Promesse de sang

Harry ouvrit brusquement les yeux en grand alors qu’il lui caressait la joue, la bouche ouverte sur un cri muet, totalement tendu, le regard fou. Drago l’attira contre lui sans hésiter, le serrant dans ses bras, sans cesser de lui parler dans un murmure apaisant, voulant le rassurer. Il recommença à lisser ses cheveux tranquillement, comme si tout était normal. Comme s’ils avaient toujours agi ainsi.

Drago sentait les battements désordonnés du cœur de Harry qui commençaient à s’apaiser et l’idée qu’il soit celui qui le calmait l’emplissait de satisfaction. 

Après de longues minutes, Harry sembla se rendre compte de la situation puisque Drago le sentit se tendre de nouveau. Il ne put s’empêcher d’être soulagé quand Harry le serra finalement dans ses bras sans chercher à le fuir.

Sa main enfouie dans les mèches noires, Drago murmura finalement, d’un ton tranquille.

— Tu veux en parler ?

Harry resta silencieux si longtemps que Drago crut qu’il s’était rendormi. Il était abandonné dans ses bras, détendu et silencieux. Mais après de longues minutes, le brun chuchota, la voix tremblante.

— Rien d’exceptionnel. Comme d’habitude. Il sème la terreur et le chaos.

L’estomac de Drago se tordit en pensant à ce que les Mangemorts faisaient en ce moment et il ferma les yeux. C’était ce qui l’attendait avant que Harry ne lui tende la main, même s’il n’était pas vraiment certain d’avoir échappé au mage noir. Il chuchota sans pouvoir cacher ses tremblements.

— Tu l’as vu ? Quand il m’a… marqué ?

Harry soupira et approcha Drago de lui un peu plus.

— Non. Mais j’ai vu d’autres êtres marqués. Je sais à quel point c’est… douloureux. Et humiliant.

Drago déglutit puis il tourna la tête vers les fenêtres et se rendit compte qu’il faisait nuit noire. L’infirmière devait dormir et ils étaient seuls. Il s’écarta à contrecœur de Harry et il s’assit dans le lit. Il attrapa sa baguette sur la table de chevet et il lança un lumos. La pièce n’était pas totalement obscure, mais la lueur des veilleuses n’était pas assez vive pour ce qu’il avait en tête.

Il soupira, repoussant une vague de nausée et il s’obligea à faire preuve de courage. Il ôta le haut de son pyjama, sans même défaire les boutons. Puis, torse nu, il détourna la tête pour ne pas croiser le regard de Harry et il tourna lentement son bras, dévoilant l’atroce tatouage.

Harry resta parfaitement silencieux et Drago ferma les yeux de toutes ses forces, essayant de retenir ses larmes. Il avait honte de cette marque, il la haïssait de tout son être. Son père croyait encore que c’était un motif de fierté, sans se rendre compte qu’il s’agenouillait devant un monstre cruel et sans cœur.

Il se mit à trembler alors qu’il imaginait que Harry s’était éloigné de lui et qu’il ne voudrait plus jamais l’approcher. Il n’osait pas regarder par peur de confirmer son impression, mais le silence autour de lui le terrifiait.

Il sursauta violemment lorsque la main brûlante du brun se posa sur son avant-bras, recouvrant la marque des ténèbres. Harry soupira et l’attira à lui de son autre main, maladroitement.

Drago résista brièvement avant de se laisser aller, expirant de soulagement. Il tourna la tête pour fixer les yeux verts de Harry avec une pointe d’inquiétude. Il ne pensait pas que le jeune homme le rejetterait, il était trop… gryffondor pour ça, mais certains mots avaient le pouvoir de blesser, devenant aussi tranchants que le sectumsempra.

Cependant, il n’aurait pas pu prévoir la réaction de Harry. 

— Pardon… Malefoy… Drago, je suis désolé. J’aurais dû… j’aurais dû l’empêcher. Même si on n’était pas amis, je savais que je ne voulais pas que tu les rejoignes… Je… prétendais juste que ça n’avait pas d’importance parce que je ne pouvais pas expliquer… je ne pouvais pas…

Drago écarquilla les yeux, choqué, puis il plaqua la main sur la bouche de Harry pour le faire taire, le bâillonnant efficacement. Son mouvement le rapprocha de l’adolescent, et ils se fixèrent dans les yeux, leurs nez s’effleurant presque. 

Cependant, Drago ne bougea pas, le cœur battant la chamade, prisonnier du regard douloureux de Harry. Ce dernier se sentait coupable et ce constat rendait Drago presque nauséeux. 

Finalement, il laissa échapper son souffle et murmura, sans pouvoir empêcher sa voix de trembler.

— Potter. Tu ne pouvais pas l’empêcher. D’abord, j’aurais refusé de t’écouter. J’étais furieux contre toi, pour l’arrestation de mon père. Ensuite… j’ai été élevé dans l’idée que… Que tu étais l’ennemi. Je ne me rendais pas compte avant… Je pensais que c’était honorable, que c’était ce qu’il fallait faire. Tu aurais dû m’enfermer quelque part et me ligoter pour m’empêcher de me battre de toutes mes forces contre toi.

Drago marqua une pause et passa sa langue sur ses lèvres, sous le regard intense de Harry. Puis, il laissa échapper un rire nerveux, les larmes aux yeux.

— Regarde ce que tu me fais faire… Foutu héros. Je t’interdis de te sentir coupable de quelque chose que tu ne pouvais pas contrôler. Potter… Harry… Ce que tu as fait pour moi, c’était plus que ce que n’importe qui d’autre n’a jamais fait. Mes parents y compris. 

Lorsqu’il sentit le Gryffondor se détendre sous sa prise, il le lâcha, s’éloignant légèrement, sans pour autant briser le contact visuel.

La main de Harry, touchant toujours la marque des ténèbres, se fit caressante, retraçant l’affreux motif comme pour en effacer le sens. Drago frissonna violemment, les joues rouges, incapable de le repousser.

Drago se demanda si c’était la magie qui les poussait l’un vers l’autre de cette façon. Si c’était cette promesse de sang qui provoquait cette attirance irrépressible, ce besoin d’être proche, cette soif de contact.

Sauf qu’il avait toujours eu un lien spécial avec Harry. Il y avait toujours eu ce besoin d’être dans sa vie, de se faire remarquer. Il n’avait jamais pu juste l’ignorer, il avait toujours fait en sorte d’attirer son attention, de n’importe quelle façon.

Il ferma les yeux un instant et murmura, incertain. 

— Potter. Harry… Tu as pensé que c’était peut-être ce lien magique qui nous… entraîne l’un vers l’autre ? Je veux dire plus qu’avant ?

Il y eut un rire joueur et il ouvrit les yeux pour voir un éclair malicieux passer dans le regard vert. Harry le fixa quelques secondes, le retenant prisonnier — comme un niffleur face à une pile d’objets brillants — puis il eut un sourire moqueur. Lentement, il chuchota.

— Tu as peur, Malefoy ?

Drago cligna des yeux et il eut l’impression de remonter le temps. Il se souvint de leur deuxième année et le duel organisé par Lockart. Ses propres mots, pour provoquer le Gryffondor. Sa réponse, assurée.

Un sourire naquit sur ses lèvres et il leva un sourcil, ses yeux brillant d’amusement.

— Tu aimerais bien, Potter…