Guérir ensemble

Chapitre 1

1350 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 04/09/2022 20:33

Harry avait souvent rêvé de sa vie future.


Lorsqu’il était enfant, il se voyait libéré de son oncle, de sa tante et de son cousin, formant sa propre famille. C’étaient des rêves simples, de petit garçon malheureux, espérant un futur plus souriant. Il n’espérait rien de plus qu’une vie simple et heureuse.


Plus tard, il avait rêvé d’un futur sans prophétie, sans mage noir. Une vie calme et sans complications, loin de la célébrité et de l’agitation qu’il connaissait à Poudlard.


Ensuite, il y avait eu la guerre. Il avait perdu Sirius, et quelque chose s’était brisé en lui. Il avait imaginé appartenir à la famille Weasley pour ne plus être si seul, prêt à épouser Ginny qui le voulait tant. Elle semblait parfaite et il s’imagina l’aimer. Il s’accrocha à ce rêve, à cette illusion d’un bonheur à portée de mains pour ne pas sombrer.

Penser à Ginny et à leur futur lui donna la force de continuer, de se relever sans cesse, malgré les obstacles.


Ginny était dans chaque rêve qu’il faisait, présence amicale et douce qui le rassurait. Parce qu’elle aimait le héros qu’il représentait, il s’imagina Auror, marié et père de famille. Il était prêt à se battre pour y parvenir, persuadé qu’il touchait du doigt son rêve.



Harry était particulièrement têtu, aussi, il ne revint jamais sur ce qu’il avait imaginé pour son avenir. Il réussit à se convaincre qu’il ne voulait rien d’autre. C’était sa façon de rester sain d’esprit et de ne pas craquer, de ne pas s’effondrer sous la pression. Quelque part, s’il souhaitait assez fort le bonheur, il y parviendrait…

Il avait peur qu’au moindre doute tout s’effondre sous lui, c’était probablement ce qu’il redoutait le plus : perdre ses rêves et découvrir qu’il n’y avait pas de bonheur pour lui.



Il était revenu à Poudlard après la chasse aux horcruxes, triomphant et déterminé. Il incarnait le héros que tous désiraient, parce qu’il n’avait pas d’autre choix. S’il échouait, personne ne se battrait et le monde magique serait perdu.


Il avait été jusqu’au bout de ses forces, cachant ses doutes et ses peurs, motivant et rassurant ses camarades. Il sentait parfois le regard inquiet de Hermione sur lui, mais il l’ignorait.

Et puis, il avait fait face à l’ultime trahison. Il avait appris qu’il devait se sacrifier. Que, depuis le début, Dumbledore l’avait préparé à cet instant, où il donnerait sa vie volontairement pour secourir le monde magique.

Un monde magique qui l’avait rabaissé, insulté et bousculé. Un monde magique ingrat, qui avait oublié qu’il n’était qu’un enfant encore.


Amer, il avait compris qu’il n’avait pas le choix. Il aimait trop ses amis pour les abandonner, pour risquer qu’ils soient tués par sa faute. Alors, le cœur lourd, il s’était rendu dans la forêt interdite pour faire face à Voldemort une dernière fois.


Il avait gardé l’image de son rêve dans son esprit, comme pour adoucir ses peurs. Puis, il avait fait face à son ennemi, seul, déterminé et digne.



Il avait noté les regards de certains mangemorts, gênés de voir qu’ils participaient à l’exécution sommaire d’un enfant. Il avait noté l’hésitation de Voldemort en personne alors qu’il lui faisait face de son plein gré, désarmé et prêt à mourir.

Puis, le sort de mort avait fusé dans sa direction et l’avait percuté de plein fouet, sans qu’il cherche à l’éviter. Il n’avait pas fermé les yeux, continuant de fixer Voldemort calmement, alors que la mort se précipitait vers lui pour l’enlacer.


Harry était mort. Quelques secondes, quelques minutes… Une éternité dans son esprit. Il était mort et quelque chose avait changé en lui.


Il avait fait face à l’esprit Dumbledore, sans pouvoir pour autant lui reprocher ses erreurs. Plus rien n’avait d’importance après tout, il voulait juste s’assurer que ses amis seraient saufs.

Il avait eu le choix, reprendre sa vie ou rejoindre ses parents. Il était si fatigué qu’il aurait aimé ne plus avoir à lutter, mais Dumbledore lui fit remarquer perfidement que tout n’était pas terminé pour ses amis. Il restait du danger et le monde magique avait besoin de lui, son symbole, le garçon qui avait survécu et qui survivrait encore une fois.


Alors, il avait accepté de retourner se battre. Pour les sauver. Encore une fois.


Il avait ouvert les yeux sur le sol glacé de la forêt interdite, toujours entouré de Mangemorts. Narcissa Malefoy s’était penchée au-dessus de lui, ses longs cheveux caressant sa joue, et il avait respiré son parfum fleuri en se demandant quel avait été le parfum de sa mère. Une vague de nostalgie l’avait envahi et il avait cligné des yeux pour réprimer ses larmes.

Narcissa avait caressé sa joue avec tendresse, comme une mère le ferait avec son enfant. C’était probablement la première fois que quelqu’un le touchait de cette façon et le cœur du jeune homme se serra, les larmes aux yeux. Elle avait vu qu’il était en vie et lui avait demandé des nouvelles de Drago.

Harry la rassura sans vraiment savoir pourquoi. Elle n’était pas vraiment hostile après tout et il n’oubliait pas le visage terrifié de Drago face au feudeymon…


Narcissa lui sourit, gardant sa main sur sa joue quelques instants de plus, le fixant avec bienveillance. Puis, elle se redressa, cachant ses sentiments.

   – Il est mort. Harry Potter est mort.


C’était une aide inattendue, mais bienvenue. Harry resta immobile, silencieux, attendant le moment parfait pour agir. Il restait Nagini, le serpent ignoble de Voldemort et il devait attendre que l’animal soit tué pour se dresser face au mage noir.



Moins de deux heures plus tard, la guerre prenait fin, alors que Voldemort tombait enfin sous la baguette de Harry. Il s’était battu et il avait survécu, une fois de plus. Mais il était mort et il avait tué.


*


Plus tard, alors qu’il contemplait le cadavre de l’homme qui avait détruit sa vie, quelque chose se brisa en Harry. Le bref instant où il était mort avait laissé des traces en lui, suffisamment pour le marquer durement. Il avait perdu les derniers proches qui le reliaient à ses défunts parents, ainsi que de nombreux amis. Épuisé et blessé, il était à bout et il aurait fallu peu de choses pour le faire basculer dans la folie.



Les semaines suivantes se passèrent dans un brouillard hébété. Le jeune homme se laissait entraîner, sans protester, comme vidé de toute volonté. Après un bref passage à Sainte-Mangouste, Molly le ramena au Terrier où elle s’employa à le remettre sur pieds, à sa façon, trop envahissante, mais pleine de bonne volonté.

Même s’il appréciait l’attention, Harry ne parvenait pas à sortir de sa quasi-catatonie. Il n’avait envie de rien, il se sentait incapable de formuler le moindre désir. Il se laissait juste porter, épuisé. Il aspirait au silence et au calme, ce qui était impossible au Terrier.


Il raconta chaque détail de ce qu’il avait vécu à Kingsley, durant les mois où il avait disparu, jusqu’à la mort de Voldemort. Il parla d’une voix morne, comme s’il relatait les aventures d’un étranger. Cependant, personne ne s’en inquiéta.

Après tout, il était le Survivant et après un peu de repos, il redeviendrait le Harry joyeux que tous connaissaient… Le gentil garçon un peu trop naïf et insouciant qui avait la vie devant lui.




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