R.A.B

Régulus tenait Harry contre lui, avec l’envie soudaine de se retrancher dans la maison d’Eilean Nan Ròn dans ce futur étrange. D’oublier tout le reste pour panser chacune de ses blessures, pour l’aider à aller mieux. Il savait que Harry avait vécu des moments difficiles, ils en avaient vaguement parlé, même si le Gryffondor s’arrangeait pour rapidement changer de sujet. Jusqu’à cet instant, il n’avait pas pris la mesure de la profondeur du traumatisme de Harry, et il se jura une fois encore de le protéger et de s’assurer qu’il ne soit plus jamais blessé.

Il passa la main dans les cheveux en bataille, avec l’impression que sa magie courait sous sa peau tant il était furieux, quand Harry se redressa avec un sourire hésitant.

   — Désolé, je…

Régulus l’arrêta, et le fixa dans les yeux, jusqu’à ce que les joues de Harry rougissent face à l’intensité de son regard.

   — Ne t’excuse pas. Bon sang, tu aurais dû leur tourner le dos depuis longtemps Harry. J’ai envie de te proposer de vivre avec moi, ici, et de les laisser se débrouiller, mais je sais que tu ne voudras pas. Que tu retourneras te battre… Mais cette fois, je te jure que je serais près de toi et que je ne laisserai plus jamais personne se servir de toi.

Harry eut un sourire et ses yeux pétillèrent un bref instant. Il avait chassé sa mélancolie à l’instant même où Régulus avait admis vouloir vivre avec lui, et il soupira.

   — Je veux que tu sois complètement libre, Reg. Tu n’as plus la marque, mais s’il découvre que tu es encore vivant, que tu es ici… il voudra te tuer.

Régulus roula des yeux, mais son ricanement était plutôt tendre.

   — Sérieusement ? On parle de toi et tu réussis à te préoccuper de mon éventuelle sécurité, alors que personne ne pourrait deviner que je suis ici ? Je suis certain que mon propre frère ne me reconnaîtra pas !

Le regard vert du jeune homme se perdit un instant dans le vague, probablement parce qu’il pensait à ce parrain qu’il avait perdu et qu’il allait retrouver. Puis il hocha la tête, et se reprit, cachant ses doutes.

   — À ce sujet, il faut qu’on trouve une façon d’expliquer ta présence. Je ne peux pas juste débarquer avec un inconnu, surtout vu la situation actuelle. Je veux dire, c’est dur de savoir à qui faire confiance et…

Régulus l’embrassa doucement pour le faire taire.

   — Ma mère a prévu une identité pour moi. Je suis un cousin de la famille Black, venu des États-Unis.

   — Mais…

   — Et on s’est rencontré par hasard. On a sympathisé avant de découvrir que… qu’on avait des intérêts communs. Ça me semble plutôt pas mal, non ?

Harry le fixa avec un sourcil levé, une expression moqueuse sur le visage.

   — Reg, ça ne fonctionnera jamais ! Personne n’irait avaler ça… Par contre… on peut cacher à tout le monde ta présence. Il nous faudra juste un peu d’aide.

Le Serpentard l’observa attentivement, et son expression se fit méfiante.

   — Hors de question d’impliquer mon frère !

Le jeune homme eut un sourire triste et secoua la tête.

   — Je ne pensais pas à Sirius. Ne t’en fais pas, je sais qu’il serait le premier à refuser de te faire confiance. Mes amis… s’ils n’ont pas changé, ils seront prêts à nous aider. De toute façon, Hermione semble avoir un sixième sens pour deviner ce qui se passe autour d’elle.

Régulus l’embrassa une fois encore, plus tendrement. Puis, il lui sourit.

   — J’ai confiance en toi, Harry. Je te suis. 

Ils échangèrent un long regard, puis Harry répondit avec douceur.

   — J’ai confiance en toi aussi.

*

Harry eut un sourire malicieux et il fouilla dans la bourse sans fond dans laquelle il avait rassemblé ses possessions les plus précieuses pour en tirer la cape d’invisibilité de son père.

Régulus cligna des yeux un instant puis souffla.

   — C’est bien ce que je crois ?

Harry ricana.

   — C’était à mon père, j’en ai hérité quand je suis arrivé à Poudlard. Tu n’en avais jamais entendu parler ?

Sans quitter des yeux l’artefact magique, le jeune homme venu du passé secoua la tête avec un sourire.

   — Une fois, Sirius l’a évoquée alors qu’il parlait par cheminette à ton père. Mais quand il a vu que j’étais présent dans la pièce, il a rapidement changé de sujet et j’ai pensé que c’était une plaisanterie entre eux. Je veux dire, je ne m’intéressais pas vraiment à leurs histoires, il valait mieux rester hors de leur chemin.

Harry eut une grimace qu’il dissimula rapidement. Puis il drapa la cape sur les épaules de Régulus, avant de déposer un rapide baiser sur sa joue.

   — Voilà de quoi rester discret au début. Je suis certain qu’avec l’aide de Kreattur personne ne pourra détecter ta présence à mes côtés, sauf quand nous le déciderons.

Régulus caressa le tissu soyeux, et fronça les sourcils.

   — Tu es certain de vouloir me la confier ? Tu te rends compte de la valeur de cet objet ?

Harry ne répondit même pas, roulant des yeux avant de se tourner vers Kreattur.

   — Nous devrions retourner au square. Dans… D’où je viens, je dormais dans la chambre de Sirius depuis sa… disparition, mais je suppose que je suis installé ailleurs ?

L’elfe hocha la tête.

   — Dans la chambre de maître Régulus. Kreattur a pensé que ce serait mieux.

Régulus sembla ravi, et lança un coup d’œil amusé à Harry.

   — Quel dommage, nous allons devoir partager le même lit…

Le jeune homme rougit brusquement, mais ses yeux brillants montraient sa satisfaction de découvrir qu’il ne serait pas séparé de Régulus. Il se redressa, essayant de masquer sa gêne, puis il sourit à Kreattur.

   — Tu peux nous y emmener ? Dans… notre chambre ? Ensuite, je suppose que nous allons devoir nous adapter et croiser les doigts pour avoir un peu de chance.

Régulus regarda autour de lui, regrettant déjà les moments passés dans la maison d’Eilean Nan Ròn. Il devait se faire violence pour ne pas stopper Harry et le supplier de leur accorder un peu plus de temps, de se cacher de tous. Il était certain de ne pas vouloir que le garçon dont il était tombé amoureux se retrouve encore une fois face à Voldemort.

En le serrant contre lui, attendant que Kreattur les ramène square Grimmaurd, il espéra de toutes ses forces que les amis de Harry étaient aussi dignes de confiance qu’il le disait.

Cependant, le petit elfe tira son oreille en hésitant, puis prit la parole, tête baissée.

   — Maître ? Monsieur ? Je suis désolé, mais… il n’y a pas d’amis de monsieur Harry qui viennent à Grimmaurd. Jamais. J’ai bien peur que vous ne puissiez pas compter sur eux à ce point après… les changements dus au sort.