Secrets de Serpentard : La noble famille Black
Drago se réveille en sursaut. Il s’est encore endormi sur le petit bureau. Il masse sa nuque endolorie, se frotte les yeux, et regarde autour de lui pour s’assurer qu’il est bien chez lui, dans le bureau calfeutré de la tourelle Est, et non dans le sous-sol du Serpent qui Fume, devant le feu qui consume la baguette de Bellatrix.
Une aube farouche se lève sur le jardin envahi par les ronces. Maudit rêve ! Quelle idée, aussi, de raconter cet épisode juste avant de s’endormir...
Il se lève, et se casse la figure par terre. Ses jambes de répondent plus, engourdies après plusieurs heures de compression sur la chaise. Il attend une minute que le sang revienne jusqu’au bout de ses orteils, puis marche tant bien que mal jusqu’à la porte malgré les picotements douloureux qui lui parcourent les mollets. Tous les matins, c’est la même histoire, râle-t-il intérieurement en descendant une volée de marches en colimaçon pour rentrer dans la salle de bain.
Il fait un brin de toilette, puis revient à son poste de travail. Depuis combien de temps n’est-il pas sorti de la tourelle Est ? Il n’en a aucune idée. La neige continue de tomber, mais quel jour est-on ? Quel mois ? Drago ne sait plus, mais après tout, qu’importe ? Les jours se suivent et se ressemblent, Drago avance dans son travail, et c’est bien la seule chose qui compte.
Drago revient au journal de sa mère. Il éprouve un certain malaise en lisant les premiers passages qui concernent Bellatrix. Lui ne l’a connue que des années plus tard, après quatorze ans de captivité à Azkaban, et elle était déjà devenue folle à lier : inconsciemment, dans l’imagination de Drago, Bellatrix avait toujours été ainsi. Il a donc été assez perturbé en découvrant, dans le journal de sa mère, une jeune fille qui, certes, était particulièrement séduite par les idées dominatrices de son entourage et ne vivait que pour défier l’autorité, mais qui était aussi fragile, gourmande et prête à se mettre en quatre pour protéger sa petite sœur.
Quoiqu’il en soit, c’est un véritable soulagement pour Drago d’en avoir fini avec cet épisode : c’est un des plus glaçants, à son avis. La rencontre de Bellatrix et Voldemort avait eu des conséquences terribles ; certaines que tout le monde connaissait bien, puisqu’elles avaient touché l’intégralité du monde sorcier, mais il y en avait encore d’autres, dont Scorpius n’avait jamais été averti, et qui, pourtant, le touchaient de très près...
Quant à Narcissa, à l’époque des faits, elle ne s’était doutée de rien, et poursuivait sa scolarité à Poudlard. Elle se sentait toujours coupable du renvoi de Bellatrix, et prenait donc souvent de ses nouvelles. Sa grande sœur l’avait immédiatement rassurée en lui racontant la rencontre inespérée qu’elle avait fait dans le train, puis avait évoqué des leçons de magie dans un endroit secret. Bellatrix lui écrivait qu’elle ne s’était jamais sentie aussi heureuse, et Narcissa avait décidé de la croire. Elle ne soupçonnait donc absolument pas ni l’ampleur de ce qui se tramait, ni l’emprise que Voldemort commençait à avoir sur sa sœur aînée. Elle ne réaliserait cela que plus tard – trop tard... Tout comme la manière dont la baguette en acacia acait été détruite, qu’on n’apprendrait que des années après...
Pendant ses quatre premières années de scolarité à Poudlard, Narcissa a peu écrit, prise dans le tourbillon des cours et des découvertes. Dans son journal, elle évoquait son amitié avec Daisy, sa rivalité avec Carla Avery et Juliet Selwyn, ses succès dans l’ensemble des matières à l’exception des Potions...
En tournant la page, Drago sourit, et oublie, pour un temps, l’existence de Bellatrix et de Voldemort. Car ça y est, il arrive bientôt au passage qu’il préfère...