Les Amours de Radimir Vynoque
- BAM BAM BAM
Radimir tambourinait à la porte du bureau du directeur après avoir lancé le mot de passe « jointures humides » à la statue qui gardait l’entrée de la tour de l’office de Dumbledore.
Alors qu’il allait se résigner à abandonner et à repartir bredouille, la porte s’ouvrit enfin dévoilant un grand bureau baigné de l’éclat lumineux d’un soleil matinal. Dumbledore était assis à son bureau, occupé à écrire à la plume d’oie sur un long et épais parchemin. Le vieil homme ne daigna même pas lever les yeux vers Radimir. Ce dernier, peu habitué à ne pas recevoir d’attention et de marque de considération de la part du directeur de l’école, fut un peu surpris, mais ne s’en formalisa pas et s’élança vers lui d’une démarche précipitée. Plantant ses deux mains boudinées sur le large bureau il s’exclama :
- Monsieur le directeur ! Je vous en prie, j’ai besoin de votre aide !
Le vieil homme, ne daignant toujours pas lever les yeux, n’émit qu’un grommellement interrogatif.
- Voyons, par où commencer… Eh bien, débuta le Vynoque se tortillant sur lui-même, gêné, vous avez sans doute entendu parler de ce qu’il s’est passé la nuit dernière ? Oui ? Croyez-le ou non Monsieur le directeur, j’ai été pris d’une crise de somnambulisme, nom d’une pipe, je n’ai aucun souvenir de ce qui s’est passé, je vous le jure aussi sûrement que je descends des premiers sorciers : ce n’était pas volontaire ! Il a même fallu que je demande à ce bon à rien de fantôme visqueux ce qu’il s’était passé pour connaître le fin mot de toutes ses inepties.
- Radimir, abrégez je vous prie, l’interrompit le vieil homme, toujours le nez dans ses papiers.
- Vous êtes au courant de la libération de ce monstre qu’on appelle l’Ange de la mort, n’est-ce pas ? Cette créature en a après moi. Il faut me désigner d’emblée une garde rapprochée. Oui une garde rapprochée, répéta-t-il avec entrain fière de son idée, qui soit digne de mon rang, composée de valeureux sorciers ! Bien-sûr, il faudra qu’on m’accompagne dans tous mes déplacements, ce qui ne sera pas très agréable, mais je m’en accommoderai. Il le faut bien ! soupira-t-il.
- Vous avez terminé ? intervint Dumbledore, qui avait enfin relevé les yeux vers Radimir et lui lançait un regard perçant.
La sentence tomba comme un coup de massue pour notre bon Vynoque quand le directeur enchaîna avec un : « Je ne peux rien pour vous. »
Radimir en devint rouge de confusion. Ainsi son protecteur de toujours, l’admirable Dumbledore lui tournait le dos ? Décidément, cette journée était à classer parmi les plus mauvaises de sa vie.
- Mais enfin, bredouilla-t-il, mais…mais, je suis en danger ! Ma pudeur est menacée ! rugit enfin le Vynoque.
Un silence lourd s’installa alors dans la pièce. Que diable signifiait ce comportement ? se demandait le Vynoque. Dumbledore reprit d’une voix lasse :
- Aux premières lueurs du jour une personne est venue toquer à ma porte. Il s’agissait de Madame Desboudre. Vous savez bien que je ne la porte pas dans mon cœur, mais elle scandait qu’elle devait à tout prix me parler. Je l’ai donc laissé entrer. C’est alors qu’elle me conta une histoire, une histoire…troublante je dois dire. Je vous épargne tout son long charabia, naturellement. La conclusion de ce récit fut qu’elle était convaincue, après vous avoir trouvé à errer, nu, le sexe toujours en érection (oui je ne vous fais pas dire ma honte et ma gêne d’avoir dû subir un tel discours), que vous, Radimir, et moi-même, avions eu des relations sexuelles. – le directeur marqua un temps d’arrêt où il remonta ses lunettes en demies lune le long de son nez fin- Je lui ai administré un sort d’oubliettes rassurez-vous, je ne souhaite pas que ma réputation soit entaché par votre faute. Elle n’ira raconter cela à personne d’autre désormais. Je dois quand même vous prévenir : j’ignore qui est cette personne avec qui vous avez fricoté hier soir, mais je ne peux exprimer à quel point vous m’avez déçu !
A ces mots, Dumbledore fit pivoter sa chaise de bureau de manière à tourner le dos au bedonnant bonhomme. Radimir ignorait qu’à cet instant le directeur essuyait discrètement les larmes qui lui montaient aux yeux.
- Vous avez semé la pagaille, maintenant assumez-en les conséquences. Bon journée MONSIEUR Vynoque !
Vynoque mit quelques secondes à retrouver ses esprits après le discours de Dumbledore, puis sortit du bureau en bougonnant.
Ce que Vynoque ignorait c’était que le directeur de l’école avait le cœur brisé. Du fait de la potion qu’il avait ingéré ou bien simplement à cause du charme de l’homme au ventre en lune, il était tombé éperdument amoureux de Radimir, et il l’était encore bel et bien. Dumbledore s’était juré de retrouver l’homme qui lui avait volé son âme sœur et de se venger, mais pour le moment, il allait engouffrer des paquets de dragées de Berti Crochus et lire des fanfictions en robe de chambre pour soigner son cœur blessé.
C’est ainsi qu’en début d’après-midi, après avoir envisagé toutes les solutions possibles, le Vynoque se retrouva, une fois encore, à frapper à la porte du professeur de potions, Snape.
- Que me vaut ce plaisir, grinça Snape, en ouvrant la porte, qui ne paraissait nullement surpris d’y trouver le gros moustachu.
- Par Dieu, aidez-moi, recommença à implorer Radimir pour la seconde fois de la journée.
Snape eu un petit sourire, que ne vit pas Radimir, lorsqu’il remarqua la petite pince en forme de serpent accrochée à la cravate marbrée de ce dernier.
- Vous aidez ? ricanna Snape d’un rire méchant et glacial, après l’anarchie que vous avez semé hier soir ?
- Ecoutez, je suis en danger, l’Ange de la mort veut… ME VIOLER ! Je me tourne vers vous car je sais que vous êtes le plus compétent, le plus grand sorcier de ce château, le plus séduisant…enfin je veux dire le plus puissant. Mbbbbbbrrrrrrr, s’essouffla le Vynoque.
A ces mots, et à l’évocation de l’Ange de la mort, l’intérêt du ténébreux professeur des potions s’éveilla.
- Savez-vous ce que vous avez déclenché Vynoque ? Non, bien sûr, vous n’en avez pas idée… Vous avez raison, je suis le seul à pouvoir capturer l’Ange de la mort. Mais si je le fais, ce ne sera aucunement pour vous, mais pour protéger les habitants du château, naturellement.
D’un mouvement de cape, Rogue fit volte-face et se dirigea vers les livres qui trônaient sur une bibliothèque au fond de la salle. Il saisissait des livres, les ouvrait et les reposait à la vitesse de l’éclair.
- Pour la capturer j’aurai besoin de connaître tous vos faits et gestes, vous allez devoir me décrire toutes vos habitudes, toute votre histoire personnelle. Il ne va rien falloir me cacher Vynoque, le menaça-t-il avec son index, visiblement l’Ange de la Mort ne retrouvera tous ces pouvoirs maléfiques qu’une fois qu’elle aura assouvit sa soif sexuelle sur l’élu qui aura entendu son appel sordide. Il semble que cette personne soit vous, Vynoque, comme vous l’avez si judicieusement remarqué. Il faut donc s’attendre à ce qu’elle n’ait de cesse de vous piéger pour voler votre virginité.
“Ma virginité ? Pense-t-il que je sois si pure que ça ?” s’étonna le Vynoque, ému
- Ah, s’exclama Snape en trouvant le livre qu’il cherchait, la voilà !
Il désigna une page d’un épais volume où était écrit « L’Ange de la mort, histoire de la créature la plus maléfiquement lubrique du monde des sorciers ».
Snape, de sa voix suave, conta alors à un Vynoque tremblant de peur l’histoire de cette étrange créature :
Il était une fois, une jeune femme dont j’ai oublié le nom réel depuis longtemps. En réalité, c’était plutôt une vieille fille. En effet, en trente-cinq ans d’existence, elle n’avait encore jamais connu l’amour sous toutes ses formes. Non pas que la bête était farouche, bien au contraire. Il y avait quelque chose dans son apparence, dans son regard vitreux caché derrière ses lunettes, qui effrayait profondément le chaland, au grand désespoir de notre amie qui se languissait de contacts physiques.
Ne pouvant s’épanouir dans le coït, elle compensait sa frustration dans l’art : c’était un peintre de talent, l’opéra n’avait aucun secret pour elle et on venait de loin pour acquérir ses charmants petits bonnets en laine tricotés à la main. Elle avait de plus un petit plaisir qui lui permettait, une fois par mois, de sortir de sa torpeur. Elle était en effet juge de compétition de gymnastique. La vue des corps fermes des gymnastes se cabrant au rythme de la musique faisait toujours briller un léger éclat lubrique dans ses yeux, et elle n’était jamais aussi rougissante que devant ce spectacle.
Mais depuis peu, les concours de gymnastique n'éveillaient plus aucun émoi chez notre personnage. D’ailleurs, elle n’avait plus goût à rien. A rien, sauf à une chose. Une chose qui occupait constamment ses pensées, qui la suivait jusque dans ses rêves les plus lascifs, qui l’accompagnait dans chacun des gestes de ses journées. C’était son pasteur.
Notre jeune amie, en désespoir de cause, s’était mis récemment à la religion dans l’espoir de trouver du réconfort auprès de Dieu, à défaut d’en trouver un dans les bras d’un homme. Elle en avait finalement trouvé dans ceux d’un homme de Dieu. Dès qu’elle l’avait aperçu pour la première fois, alors qu’elle faisait pénitence pour ses péchés lors d’une confession à l'Église de son quartier, une vague d’émotions voluptueuses l’avait immédiatement emportée. Le soir même, elle était resté dehors jusqu’à plus de minuit afin de pouvoir entrevoir l’objet de sa luxure sortir de sa paroisse et elle l’avait suivie telle une ombre, sans aucun bruit, jusque chez lui. Depuis, chaque nuit, elle se rendait à sa fenêtre et l’y contemplait jusqu’au petit matin, se complaisant totalement dans sa luxure à même la rue glacée où elle avait placée son poste d’observation. Une fois, elle l’avait entre aperçu complètement nu, sortant de sa douche. Son émoi alors avait été si grand, qu’elle en avait poussé un cri retentissant.
De son côté, le beau pasteur était conscient de l’état dans lequel il mettait sa jeune fidèle bien malgré lui. Il faut bien avouer qu’il n’appréciait pas beaucoup la compagnie de celle-ci. Il se sentait profondément mal à l’aise sous le regard de la jeune femme. Il avait alors l’impression de se retrouver nu devant ses yeux. Elle voyait tout en lui, elle savait les courbes de son corps et devinait tous ses péchés, pensait-il dans ces moments. Maintes fois, il avait fait appel à ses supérieurs pour leur conter l’aura diabolique qui entourait la jeune femme. Il était en effet persuadé qu’elle était la création du Diable lui-même, envoyée pour le tenter. Ne supportant plus la présence de son regard vitreux, qui semblait le suivre constamment, même le soir dans l’enceinte de sa maison, il prit alors la décision de partir. Du jour au lendemain, il avait disparu. Il avait simplement laissé une note sur la porte de sa paroisse, annonçant qu’il se retirait en ermite pour sauvegarder son âme.
Notre jeune amie fut dévastée par cette nouvelle. Pendant des jours, des mois, des années, elle erra dans tout le pays à la recherche de l’objet de son désir. Sa frustration et son envie de concupiscence étaient tels, qu’ils avaient peu à peu transformé son apparence. Elle était devenue aussi sombre que la nuit, sa crinière de cheveux noirs était plus emmêlée que jamais, et elle avait même développé une barbe hirsute. La seule chose qui restait décelable dans son apparence était son regard lubrique brillant derrière ses lunettes. A de maintes reprises, elle avait effrayé des passants à la limite de la mort en errant sur des routes de campagne étroites, répétant seulement « I want more. I need more ». Cela avait conduit les survivants à cette rencontre à faire courir le bruit qu’il existait dans les montagnes une créature issue de l’enfer qui attaquait tout ceux qui aurait l’audace de s’approcher de sa tanière. Les survivants avaient même donné un nom à cette créature : elle était maintenant connue dans tout le pays sous le nom de l’Ange de la Mort.
Pendant de nombreuses années, le pasteur avait vécu tranquillement, retiré en haut d’une montagne. Il y vivait en paix, en élevant des moutons et en se consacrant totalement à sa religion. Il avait entendu de nombreuses rumeurs parlant d’une créature horrible qui errait dans le pays. Mais cette créature ne l’avait jamais trouvé en vingt ans. Il pensait qu’il avait échappé définitivement à son ancienne fidèle. Il avait bien tort…
Un soir de pleine lune, le vent s'était levé sans prévenir. Il frappait avec violence contre les murs de la maison du pasteur. Les moutons de celui-ci étaient agités, beaucoup s’étaient échappés. L’homme de Dieu, pris sous la tempête tentait tant bien que mal de faire rentrer ses bêtes dans leur étable. C’est alors qu’il l’aperçu. Au début, il ne vit qu’une forme noire se détacher de la nuit. La forme se mouvait avec lenteur dans sa direction. Le pasteur, fasciné, regardait la silhouette se rapprocher de lui sans pouvoir bouger. C’est quand la silhouette s’arrêta à quelques pas, qu’avec une horreur inimaginable, l’homme aperçu l’éclat lubrique de la bête qui se tenait devant lui : c’était l’Ange de la mort. Celle-ci, se sachant reconnue, hurla à la lune de plaisir. Le pasteur, sorti de sa torpeur par ce cri d’outre tombe, couru le plus vite possible vers sa maison. Derrière lui, l’Ange de la mort eut un grand sourire lascif, et l’éclat dans son regard se fit plus obscène que jamais. Elle détala dans la direction du pasteur. Celui-ci avait alors presque atteint la porte de chez lui. Mais la bête était rapide. Elle s’empara de lui alors qu’il avait la main sur la poignée de la porte.
Je ne vous conterai pas la scène d’horreur qui s’en suivit. L’Ange de la mort prit le pasteur dans une violence inouïe, à même le sol devant sa maison et sous le regard des moutons ébahis. Elle poussait des hurlements qui laissaient s’échapper toute la frustration qu'elle avait jamais ressentie depuis le début de son existence. Quand l’Ange de la mort se retira enfin dans un dernier râle de plaisir, il ne restait plus rien du pauvre pasteur.
Depuis, on ne sait ce qu’est devenu notre horrible créature. On dit qu’elle erre toujours dans les montagnes, cherchant une nouvelle proie. Faites attention en parcourant les sentiers de randonnés lors des nuits de pleine lune, elle sera certainement là, à guetter votre pudeur qui ne s’en sortira pas indemne.
Note : L’ange de la mort déteste les fausses notes
Snape interrompit sa lecture. Vynoque dégoulinait de sueur et marmonnait des « Nom d’une pipe » apeurés.
- Ah ! il n’y a que ça ? s’énerva Snape, en tournant rageusement les pages du livres. Il n’est dit nul part comment elle a été capturée, ni comment la neutraliser. Bon, si je comprends bien, je vais devoir mener mon enquête moi-même.
Il se tourna vers Radimir d’un geste brusque.
- Vynoque, demain, à la première heure, vous viendrez dans mon bureau. Nous allons devoir travailler de pair. Vous êtes maintenant un appât de choix, et vous serez nécessaire à la capture de la maléfique créature. Je m’en vais faire des recherches complémentaires.
- Mais… Ce n’est pas que j’ai peur mon brave, dit-il en bombant son ventre qui menaça alors de faire éclater les boutons de sa chemise, je ne recule pas devant le danger, mais que faire si cette chose me retrouve d’ici demain ?
Snape ne répondit pas, mais se mit à claquer sèchement des doigts. Soudain, un « POP » résonna et un elfe de maison apparut. Quel ne fut pas la surprise de Snape lorsqu’il vit qu’il s’agissait de l’insupportable Elfe Astruk. Dans un soupir le maître des potions lui lança :
- L’elfe, je te charge d’organiser un casting de chant. De ce pas. Le but est de déceler la personne qui enchaîne le plus de fausses notes possibles.
Puis s’adressant au Vynoque :
- Il est écrit que l’Ange déteste les fausses notes, si l’on vous trouve un piètre chanteur pour vous escorter dans vos déplacements, il est possible que la bête se tienne éloignée. Vynoque, rendez vous à ce casting et revenez me trouver dans mon bureau demain à la première heure !
C’est ainsi que Vynoque se retrouva au beau milieu d’une salle de classe vide, réquisitionnée par l’Elfe Therry, qui s’affairait, affublé de son sourire le plus enfantin, pour contenir les candidats du casting. Quatre élèves de la chorale avaient fait le déplacement, en ayant entendu qu’une rétribution leur serait accordée pour leur service. Perdu dans ses pensées, Vynoque ne prêtait guère attention aux élèves qui défilaient et chantaient devant lui. Il était partagé entre la peur et la joie. La peur face à la menace qui planait au-dessus de sa tête, la peur aussi de recroiser William. Mais quelle n’était pas sa joie de voir avec quel entrain Snape se proposait de l’aider. La joie de pouvoir passer du temps aux côtés de l’élu de son cœur, son chevalier servant, son protecteur !
- MES AMIS QUITTEZ VITE VOS MAISONS ! V’NEZ DAN-SEZ ET CHAN-TEZ DANS l’PA-TÉ ! GNIA GNIAGNIAGNIAGNIA GNIAGNIA !
- BRAAAAAAAAH, BON DIEU MAIS QUELLE CACOPHONIE !
Vynoque, beuglant et se tenant les mains sur les oreilles, n’avait jamais entendu pire castafiore que ce chanteur à la tête carré qui grinçait devant lui. Il avait trouvé son escorte. Une chose était sûr, l’Ange de la mort ne risquait pas de l’approcher de sitôt.