Réinterprétation et autres histoires

Chapitre 10 : Deuxième partie, Et il est impossible de les esquiver, première partie

6413 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 06/08/2024 00:17

10.Et il est impossible de les esquiver, Première partie




En ce début du mois mars, Mélinda range les récentes acquisitions de sa boutique, à savoir quelques vieux grimoires rapiécés et des vases d'or du XVe siècle, ne remarquant pas son oncle, Paul, l'observer discrètement. Se retournant, il lui hurle :

— Vous devez comprendre des histoires de famille... Et je me vengerai de Thomas Gordon ! Le salaud illégitime ! Il m'a tué ! Meurtrier !

Abasourdie, la jeune antiquaire extraordinaire fixe son oncle, perplexe, ouvrant et refermant sa bouche d'étonnement de l'attaque véhémente. Paul disparaît de son champ de vision, regard qui lance des éclairs de colère.

Celle-ci soupire et commence à faire des recherches sur l'ordinateur dans l'arrière-boutique au sujet de son oncle, mais elle ne trouve rien de significatif, hormis qu'il est mort en 1978 d'un arrêt cardiaque. Perplexe, une idée lui vient à l'esprit, soudain. Souriant, elle décide d'appeler son père.

— Père, c'est ta fille, Mélinda, à l'appareil.

— Oui, ma fille. Pourquoi tu m'appelles ? l'interroge-t-il affablement.

— Je voudrais que tu m'aides pour une enquête d'esprit...

La chuchoteuse d'esprits tourne son regard à droite et à gauche pour constater que l'esprit errant est à ses côtés, au fond de la salle, près d'un meuble, la fixant sans dire un mot avant de disparaître quelques secondes plus tard.

— ... Ton défunt frère, Paul, veut que je mène une enquête, mais je ne comprends guère ses paroles ni où commencer...

— Il n'y a pas de problème, mon enfant ! Je t'aiderais volontiers ! exulte-il.

— Après-demain, je peux venir ?

— Oui, oui ! Ta mère et moi t'attendrons avec joie ! Et j'espère que tu nous apporteras de bonnes nouvelles !

— Au revoir !

Paul Gordon, petit sourire ironique dans le coin des lèvres, se manifeste à la droite de sa nièce.

— À la prochaine !

Chacun raccroche son téléphone et le frère de Thomas commente ironiquement :

— Ah ! Ah ! Mon frère qui se soucie de sa fille ! Bonne blague ! À votre place, ma chère nièce, je me méfierais de lui, cet assassin... Il est prêt à tout pour que la vérité ne soit pas connue !

— Oncle ! Ne soyez pas si méchant envers mon père !

L'esprit errant soupire, bras croisés en-dessous de la poitrine, la fixant incrédule.

— Il n'est peut-être le meilleur des pères, mais il n'est pas un monstre ! s'offusque-t-elle.

Son oncle s'en va, irrité que sa nièce ne le croit pas. L'antiquaire termine d'ordonner les dernières acquisitions. En rangeant une psyché dans un coin de l'entrepôt, la jeune femme a une vision.

Paul est devant un miroir, ajustant son complet, et, soudain, le téléphone sonne. Il se précipite vers l'appareil et soulève le combiné lorsqu'il remarque le numéro de son frère, Thomas, intrigué.

Здравствуйте [Bonjour], demi-frère, lui affirme-t-il froidement. Pourquoi m'appelles-tu ?

Здравствуйте [Bonjour], je voudrais discuter avec toi d'un sujet très sensible concernant notre mère, notre père et ton épouse.

Étonné, Paul, mine inquiète, réplique :

— À propos de quel sujet ? Soit plus clair ! Explique-moi la situation !

Ses traits se durcissent, son front se plie et il fronce des sourcils.

— Pour en parler plus en détail, veux-tu venir chez moi ? Tu connais mon adresse à Grandeville, au 179 rue Honoré Balzac.

— Ai-je le choix ?

Paul grimace lorsqu'il pose la question.

— Non ! Et c'est des informations de premières importances qui pourront t'étonner ! termine-t-il sur un ton traînant.

— Très bien ! soupire l'oncle de Mélinda, hésitant à le croire. À après-demain !

Au moment où la conversation se termine, un coup de feu s'entend, brisant une fenêtre.


Perturbée par sa vision, elle part dans le parc pour le déjeuner, attendant son mari. Ce dernier arrive quelques minutes plus tard, large sourire radieux au visage, ses yeux bleus brillent d'un éclat radieux. S'assoyant en face de son épouse, notant sa mine inquiète, son sourire s'efface pour laisser place à une mine sérieuse, il l'interroge :

— Mél, quel esprit errant te préoccupe autant ? Comment puis-je t'aider ?

Soupirant, l'interpellée fixe son repas et maugrée :

— Une histoire de famille...

— Ton père ou ta mère ?

— Non, mon oncle ! ...

Il lance à Mélinda un regard interrogateur, l'incitant à développer plus sa pensée.

— ... Il veut que je comprenne des histoires de famille, soupire-t-elle, se tenant la tête entre les mains. En plus qu'il considère mon père responsable de sa mort... J'ignore comment, s'il est mort d'une crise cardiaque !

— Bonne question ! Mais comment penses-tu mener cette enquête ?

Relevant la tête, l'épouse de Jim le fixe pendant quelques secondes avant de lui répondre, pensive.

— En interrogeant mon père, mes grands-parents paternels et la veuve de mon oncle... Bien sûr, je fouillerai dans les journaux locaux et les archives pour obtenir des informations plus crédibles et officielles.

— Voudront-ils collaborer ? Surtout ton père... S'il est réellement le meurtrier de son frère, avance l'ambulancier en se grattant le menton, lueur d'inquiétude dans son regard, je doute qu'il soit sincère et dise la vérité...

Il s'approche de sa femme pour l'enlacer.

— ... Et je crains pour ta vie... Il peut être prêt à tout pour que la vérité ne soit connue..., termine-t-il d'une voix tremblante malgré lui.

L'antiquaire soupire et tourne la tête en signe de désapprobation.

— Jim, ne sois pas si méchant, ni si pessimiste ! Mon père n'est peut-être le meilleur des pères, mais je ne peux concevoir mon père meurtrier ! Impossible qu'il tue son frère ! Et impossible qu'il pense m'éliminer pour la simple raison que j'aide mon oncle !

— Nous verrons... Mais sois prudente, Mél ! Et tu peux demander l'aide de Carl Neely, il t'aidera sans l'ombre d'un doute.

— Et il y a cette vision qui me perturbe... Mon oncle qui reçoit un appel téléphonique de mon père concernant leurs parents... Et un coup de feu s'entend... Je ne comprends guère le sens de toutes ces paroles énigmatiques...

— Mél, maintenant, ne te tracasse pas trop avec ces histoires de famille. Sache que je te soutiens toujours, mais pense à ta santé avant tout ! Je ne veux pas que tu deviennes malade ou que tu mettes ta vie en danger pour des défunts !

Il enlace son épouse pour toute réponse. Celle-ci est très perplexe des paroles de son oncle et de sa vision. Soupirant, elle se détache de l'ambulancier pour s'assoir à côté de lui, observant le monument au centre du parc dédié aux hommes morts au combat lors des Guerres Mondiales. Le couple mange dans un silence complet. Silence lourd, chargé des non-dits des dangers possibles qui planent sur la jeune chuchoteuse d'esprits.


Au même moment, Charlie Luc Wogel observe Carl Neely depuis quelques jours, ravi que l'occasion se présente pour l'affaiblir. Malgré les nombreuses disputes de plus en plus fréquentes du couple, Carl et Sylvie vivent toujours ensemble. L'atmosphère familiale est certes tendue, mais le couple préfère patienter avant de prononcer le divorce. L'esprit errant essaie de manipuler l'inspecteur en l'hypnotisant, en lui murmurant, alors qu'il est entre un état de veille et de rêve, des paroles qui sèment le doute en son esprit.

— Carl Neely, n'avez-vous jamais songé que votre femme vous soit infidèle ? Peut-être pas en acte, mais en pensée... Qu'au fond de son âme, votre Sylvie s'ennuie de vous et voudrait prendre un autre homme pour mari... Elle fantasme d'un autre homme lorsqu'elle se donne à vous... Votre épouse ne désire plus être avec vous...

Ses manipulations sournoises poussent Carl Neely, à son réveil, à douter sans raison de la fidélité de sa femme et à s'irriter pour un rien. L'esprit errant est ravi que ses sournoises manipulations fonctionnent bien, trop bien.


Charlie manipule sournoisement Carl Neely, créant des disputes fréquentes au sein du couple et la petite Catherine, une fille de dix ans, s'enfuit très souvent dans sa chambre pour ne pas assister à ces scènes de ménage, effrayée et inquiète. Le psychiatre rit de son succès foudroyant.


Simultanément au bureau du recteur, Josué Berthelot se prélasse sur son fauteuil, fixant son verre d'alcool sagement posé sur le bureau, réfléchissant au meilleur moyen d'éliminer Élie James et d'accéder au Livre des Changements. Il attend, très impatient, un appel téléphonique de Roger. Soudain, un murmure familier lui parvient :

— N'oubliez pas que vous avez encore peu de temps pour agir...

Le vieil homme sursaute, malgré qu'il reconnut les Ombres.

— Je le sais bien que le temps m'est compté... affirme-t-il d'une voix à peine audible, baissant les yeux. Mais j'ai mon plan d'attaque ! Éliminer le potentiel prochain gardien du Livre, un certain Jim Clancy, et présenter un ultimatum à Élie James !

— Très bien ! Mais ne faillez pas à votre mission ! Sinon, nous nous vengerons !

Le recteur déglutit sa salive et sue à grosse goutte, angoissé à l'idée d'un possible échec et de la froide vengeance des Ombres.

— Je ne commettrai aucun faux-pas, couine-t-il, se sentant écrasé par la présence guère rassurante autour de lui de ses démons et sombres entités, rendant l'air oppressant.

Soudain, la sonnerie du téléphone retentit dans tout le bureau. Le recteur soulève immédiatement le combiné lorsqu'il constate que le numéro est celui tant attendu.

— Oui, Roger. Quoi de neuf ? Tout fonctionne comme prévu ?

— Josué, tout est sous contrôle. Robert Langowski ne croupit plus en prison et je lui ai donné une nouvelle identité. Je l'ai informé de sa mission et je te tiens au courant de la réussite de ton plan !

Un large sourire fend le visage ridé du recteur, ravi que son plan fonctionne comme prévu.

— Roger, je le saurais d'une manière ou d'une autre... S'il rate le tir, tu sais que faire ? l'interroge-t-il sur un ton menaçant. N'est-ce pas, mon cher ?

— Oui, répond l'interpellé, étonné du changement de tonalité de son ami. Oui, je sais ce qu'il faut faire...

— Le même procédé qu'avec l'imbécile qui a raté le feu criminel.

— C'est noté ! ... À la prochaine !

— Au revoir, mon cher Roger !

Et chacun raccroche leur téléphone. Josué vide son énième verre d'alcool et hurle aux Ombres :

— Mes chers amis, je suis certain que Robert Langowski ne ratera pas son coup... Il est un tireur d'élite professionnel, à l'instar de son père... Il n'a jamais échoué dans ses missions, il ne saurait échouer cette fois-ci...

— C'est ce que nous verrons ! Répliquent froidement les entités invisibles.

Sur ces paroles, les sombres entités infernales quittent le bureau du recteur. Ce dernier fixe son miroir et affirme :

— Mère, je ne sais plus quoi faire ! As-tu une idée ? Mère, je crains que ce criminel ne rate son coup... Comment ne pas attirer la colère des Ombres sur moi ? Mère, réponds-moi ! supplie-t-il, désespéré.

Une forme fantomatique féminine apparaît dans le miroir, nulle autre que sa défunte mère, Claire.

— Très simple, lui murmure-t-elle de sa voix désincarnée... Rend-toi au magasin spécialisé en armes de la ville et achète un pistolet... Je doute que le Gardien du Livre veuille passer de l'autre côté, et ainsi augmenter le rang des défunts... Il collaborera nécessairement et tu auras accès au Livre... Simple !

Jouant avec l'alcool dans son verre, il sourit à la défunte et approuve d'un geste de tête à son attention.

— Je n'y avais pas pensé ! Mais heureusement, mère que tu me guides !

Et la forme fantomatique s'évapore. Heureux de la simplicité de son plan d'action, le vieil homme vide son verre et sort de son bureau pour régler quelques détails administratifs rattachés à sa fonction.


Au même moment, dans la maison aux esprits de Gabriel Lawrence, le chuchoteur d'esprits, laisse les esprits fêter dans le salon alors qu'il attend la visite de Charlie pour l'informer de l'évolution de l'inspecteur et de la sœur de Mélinda. Perdu dans ses réflexions, il sursaute lorsque le médecin collaborateur se matérialise sous ses yeux, sourire sardonique au visage, regard brillant d'une étrange lueur et d'arrogance.

— Le menteur pathologique, l'apostrophe-t-il. J'ai de bonnes nouvelles pour vous !

— Lesquelles ? interroge le vivant, intrigué.

— L'inspecteur Carl Neely est très sensible à mon influence et à ma manipulation ! Le fameux jour où il basculera approche à grands pas...

Le défunt se frotte les mains d'anticipation.

— ... Et je sais bien qu'il sera profondément affecté et divisé à la mort de ses enfants... En chute libre, pourrais-je dire... Occasion pour le faire basculer de notre côté, non ? Occasion pour qu'il devienne notre allié, même inconscient... Quelle aubaine !

— Effectivement, confirme simplement le chuchoteur d'esprits. Sinon, avez-vous d'autres nouvelles ? Qu'en est-il de mon autre demi-sœur, Mélanie ?

— En tant que femme rationnelle et incrédule du don de sa sœur, ignorant que vous êtes son demi-frère, vous pourrez discuter avec elle pour obtenir de précieuses informations concernant la vie de Mélinda...

— Intéressant ! Merci beaucoup, Monsieur le docteur Charlie Luc Wogel s'enthousiasme Gabriel.

Son interlocuteur invisible s'évapore, rejoignant Mélanie Gordon pour observer et évaluer les possibilités d'influence. Gabriel est ravi d'avoir un potentiel allié qu'est l'inspecteur...



Deux jours plus tard, la petite brunette se rend à la bibliothèque de la ville, laissant sa boutique entre les mains de son associée. Se dirigeant vers les rayons, une voix caverneuse derrière son dos lui somme :

— Jeune femme, revenez au comptoir de la bibliothèque ! Dites-moi la raison de votre visite aux archives !

Étonnée, sursautant au son de la voix soudaine, elle se retourne et rencontre le regard étrange et brûlant du bibliothécaire, un homme élancé de quarante ans aux cheveux sel et poivre qui passe machinalement des feuilles dans un massicot.

Mélinda, stupéfiée, note immédiatement la similarité des regards entre le bibliothécaire et Gabriel Lawrence. Elle se ressaisit rapidement et affiche une mine impassible et l'interroge en ces termes :

— À ma connaissance, la bibliothèque et ses archives sont accessibles au public, c'est-à-dire à tous les citoyens de la ville. Donc, pourquoi n'aurais-je pas le droit de consulter les archives ? Je suis citoyenne de Grandeville !

Réfléchissant, il cesse son action, ahuri de l'audace de son interlocutrice.

— Vous oubliez qu'il faut prendre rendez-vous pour consulter les archives ? Déclinez-vous !

— Une nouveauté ! s'étonne une voix masculine mélodieuse derrière le dos de la chuchoteuse d'esprits.

Cette dernière se retourne, intriguée que le bibliothécaire ne réagisse pas, et discerne, appuyé contre une bibliothèque un esprit errant. Ce dernier est un grand homme de vingt-cinq ans aux cheveux brun clair, aux yeux sombres brillant d'intelligence, au visage impassible, vêtu d'une chemise bleue et de pantalon bleu marine.

— Vous m'avez entendu ou vous feignez de m'entendre ? Je ne suis plus certain avec ces vivants ! s'exclame avec ironie l'entité invisible.

Il rencontre le regard de la jeune femme extraordinaire est compris qu'elle l'a vu et entendu.

— Ah ! Très bien madame ! Je peux vous aider... Vous savez, depuis que je ne suis plus parmi les vivants, j'ai le temps de parcourir tous les rayons... Même si, déjà de mon vivant, je connaissais chaque rayon ! ... Que cherchez-vous ?

— Je cherche les archives des années 1975 à 1980 répond posément l'antiquaire extraordinaire aux deux bibliothécaires.

— Signez ces feuilles, lui affirme le bibliothécaire vivant d'un ton impératif.

— Laissez-le, lui conseille le défunt. Les archives des années 1975 à 1980 sont dans la rangée H 19.

Le quarantenaire se lève de son siège et, feuille à la main, s'approche de Mélinda. Cette dernière se déplace et se dépêche d'arriver à la rangée H 19 avant que le vivant ne l'interpelle. Arrivée dans la rangée, elle cherche frénétiquement du regard les dossiers... Mais elle ne trouve rien ! Aucun dossier compris entre les années 1975 et 1980 ne sont sur l'étagère. La chuchoteuse d'esprits lance un regard furieux au défunt bibliothécaire. Ce dernier, étonné, murmure :

— Mais, madame, les documents y étaient il y a quelques minutes !

— Vous vous moquez de moi ! s'emporte-t-elle.

— Non... Suis-je fautif si mon collègue a ramassé ces documents pour les cataloguer et les réparer ?

— Effectivement, affirme-t-elle plus posément. Vous n'êtes pas fautif, mais vous devez m'en informer qu'ils ne sont pas dans les rayons !

Elle accourt au comptoir et son regard s'accroche aux documents sur la table, dans un coin, ceux qu'elle cherche sans le moindre doute, pense-t-elle, extasiée.

— Monsieur le bibliothécaire, je voudrais consulter rapidement les documents mis de côté.

— Lesquels ? Et pourquoi ?

Soudain, la porte grince et une figure familière se dirige vers le bibliothécaire, nul autre que Richard Payne. Ce dernier le salue poliment et lui donne une tasse de café :

— Voilà, monsieur un peu de café pour vous ! Efficace manière de lutter contre le sommeil et de garder les yeux ouverts ! Allez, monsieur, un peu plus de vie ! Je comprends bien que votre travail est exigeant, mais allons ! Un peu d'énergie !

Il lui donne une tasse de café, large sourire au visage.

— Sinon, avez-vous le livre de Jean-Jacques Charbonier Les preuves scientifiques de l'après-vie ?

Mélinda et le bibliothécaire, déconcertés par cette soudaine venue, demeurent cois pendant quelques secondes. Le bibliothécaire lui affiche un sourire forcé et réplique :

— Monsieur le professeur, le livre est bien disponible...

Il effectue une rapide recherche dans le répertoire. Temps nécessaire à la chuchoteuse d'esprits pour récupérer les documents qui l'intéresse.

— ... Au C 89, au fond à gauche.

— Merci !

Et le bibliothécaire se retourne vers les documents mis de côté, étonné de ne pas les trouver.

— Madame, s'emporte-t-il, se levant de son siège pour s'avancer vers la table où était l'antiquaire, rendez-moi les documents ! Il faut les réparer, voyez-vous bien dans quel triste et piètre état sont-ils ?

Levant ses yeux des papiers, Mélinda lui réplique posément, feuilletant rapidement les documents :

— Pourtant ces documents sont loin de ressembler à certains vieux livres jaunis, rapiécés et écornés que j'ai à ma boutique.

Pris au dépourvu par la justesse de l'argument, son interlocuteur promène son regard des documents à la jeune femme et vice-versa pendant quelques minutes.

— Il est exact, bredouille-t-il, baissant les yeux, que vous avez raison... Mais je dois faire mon travail... Vous comprenez ?

— Oui, je comprends, mais il ne devrait pas vous déranger une petite consultation rapide. Les documents n'en seront pas plus abîmés...

Vaincu, le bibliothécaire revient derrière le comptoir, fâché.

En feuilletant les documents, elle trouve que Paul Gordon est mystérieusement mort en 1978 sans laisser de trace, peu après un mystérieux arrêt cardiaque. Perplexe et intriguée, la jeune femme ne sait trop que conclure, mais prend note des informations. Une fois qu'elle consigne dans un petit cahier vert forêt les informations, elle se lève et redonne les documents à l'archiviste mécontent. Elle s'arrête au C 89, saluant d'un geste de la main le professeur universitaire.

— Merci beaucoup, Monsieur Richard Payne, lui fait-elle remarquer. Sans vous, je n'aurais jamais lu ces dossiers !

Étonné, l'interpellé se retourne et réplique :

— Bonjour, Madame ? ...

— Mélinda Gordon-Clancy, vous savez, celle qui est venue une fois à votre bureau pour vous interroger au sujet de la Dame blanche ? La seule à ne pas être une étudiante, mais une femme ordinaire de Grandeville.

— ... Oui, je m'en rappelle maintenant ! s'exclame-t-il, ravi, les yeux pétillant encore plus de curiosité. Enchanté de vous revoir. Et à la prochaine !

— Au revoir !

Et la jeune antiquaire quitte la bibliothèque, prenant un autobus pour arriver jusqu'à sa maison familiale à Grandeville.


Frappant à la porte, celle-ci remarque son oncle l'observer depuis les escaliers, secouant la tête en signe de désapprobation. Elle l'ignore et attend que son père ou sa mère lui ouvre la porte. Élizabeth l'accueille chaleureusement à l'intérieur. Son père, sourire faux aux lèvres, attend sa fille au salon. Ce dernier est une charmante pièce au mur beige décoré d'un portrait de famille en son centre. Au milieu de la pièce trône une table basse en cerisier, des fauteuils rembourrés beiges et une chaise en chêne au coussin brun foncé. Une grande fenêtre aux rideaux bleu nuit épais sont sagement retenus par une corde, laissant les rayons solaires illuminer la pièce. Le lustre en cristal au-dessus de la table basse ajoute une élégance à la salle. Sur la table, un vase avec un bouquet de lys blancs ajoute à la beauté de la pièce, en plus des tasses de café et des viennoiseries dans une petite assiette en porcelaine. Sans oublier dans un coin une télévision noire éteinte et, dans l'autre, une bibliothèque. Cette dernière, vitrée, est remplie de livres juridiques, de codes civils et pénaux, en plus de quelques ouvrages sur l'entretien jardinier et les plantes. La fille du juge sourit à son père, devenue nostalgique, se rappelant son enfance.

— Mélinda, l'invite poliment son père, lui désignant d'un geste de la main le fauteuil en face du sien, viens t'asseoir et prend quelques desserts avant que nous t'écoutons !

Élizabeth Gordon s'assoit à côté de son mari, ignorant l'esprit errant; Paul se déplace à la droite de sa nièce, lançant des regards noirs à son frère; Mélinda promène son regard de son père à son défunt oncle, perplexe. Aucunement intéressée par les viennoiseries, l'antiquaire ne prend qu'un peu d'eau, réfléchissant à la meilleure manière d'expliquer la situation à son père.

— Père, explique l'antiquaire extraordinaire, comme tu le sais sans doute, j'ai un don particulier, celui de communiquer avec les défunts...

Elle tourne ses yeux vers Paul.

— ... Et ton frère, mon oncle, Paul, est l'un d'eux.

— Que veut-il ? réplique Thomas d'un ton sec.

— Il veut que j'enquête sur sa mort... et sur quelques autres histoires de famille...

Elle lance un regard angoissé à l'esprit errant.

— ... Disons une élucidation de certaines histoires dans ta famille, père... J'ignore lesquelles...

— D'accord, commente le juge, dont la mine s'est rembrunie à la mention de son frère, donnant un air encore plus glacial à ses yeux bleus. Que veux-tu savoir ?

Soudain, une chanson fuse de la radio, à savoir la strophe suivante :

Мой близкий враг родней чужих

Исподтишка летят ножи

И увернуться невозможно*


Traduction française

Mon ennemi proche est plus proche de moi que les étrangers

Les couteaux volent à la dérobée

Et il est impossible de les esquiver*


Thomas se lève précipitamment et éteint la radio.

— Je m'excuse ! Ce n'est rien ma fille ! Probablement une thématique musicale de la semaine...

Mélinda lance un regard interrogateur au défunt.

— ... Tu sais la semaine passée, il y avait des chansons polonaises à la radio... termine-t-il nerveusement. Cette semaine, c'est les Russes ! Une occasion de découvrir une autre culture...

— D'accord, réplique, étonnée, sa fille. Mais, peux-tu au moins me traduire les paroles de cette chanson ?

— Je ne connais pas le russe, Mélinda, s'exclame-t-il sérieusement.

— Menteur ! commente Paul, offusqué. Tu connais autant cette langue que je la connais !

Yeux agrandis d'étonnement, Mélinda se tourne vers son oncle et bredouille :

— Sérieusement ? Ce n'est pas une farce !

— Mélinda, ce n'est pas une blague, je ne sais pas le russe, hurle Thomas. Qu'ai-je à dire de plus ? Je ne peux te traduire des mots d'une langue étrangère !

Et il boit d'un trait son café pour camoufler son inquiétude qui se manifeste par un tremblement imperceptible des mains.

— Paul m'informe du contraire, pourtant, s'exclame-t-elle d'une petite voix, incertaine en qui croire.

Thomas, fixant sa tasse, soupire.

— Je ne sais que te dire alors ! Mais revenons à ce qui t'intéresse ! Paul, mon frère aîné, est mort il y a vingt-deux ans...

Il lâche une larme.

— ... Sa mort était tellement soudaine...

— Menteur ! s'offusque le mentionné. Et les photographies ! Pourquoi ne veux-tu pas les montrer à ta fille ? Salaud ! Pourquoi ne veux-tu pas dire la vérité ? Hypocrite, fils de ... !

Mélinda tourne son regard vers le défunt, intriguée, étonnée et inquiète.

— Père, as-tu d'autres informations à ajouter ?

— Non, pourquoi, ma fille ?

— Ton frère demande à ce que je vois des photographies...

Thomas la fixe et, d'un mouvement des yeux, l'invite à compléter sa pensée.

— ... Des photographies de famille...

— Je ne garde aucune photographie de mon enfance, termine-t-il sur un ton sec.

— Pourquoi ? l'interroge-t-elle, sourcils relevés.

— Parce que mon frère n'est pas si bon qu'il ne le paraît ! ...

L'interpellé fulmine, serrant les mains en poing de rage et active la radio sur les mêmes paroles de la chanson russe.

Thomas, blême, se précipite pour éteindre l'appareil.

— ... Et Paul est dans la salle, c'est lui qui engendre cette cacophonie ? N'est-ce pas Mélinda ?

Sa fille opine du chef, quelque peu angoissée. Paul s'éclipse de la salle, courroucé.

— ... Et il nous menace ! Ma fille, je vais tout faire ce qui est en mon pouvoir pour te protéger !

Mélinda, émue par la réponse de son père, lui affiche un faible sourire.

— Merci, papa, chuchote-t-elle. Mais il ne change pas au fait que je dois l'aider et que je dois comprendre certaines histoires de famille ! Il relève d'une importance capitale de faire partir Paul Gordon, ton frère et mon oncle, dans la Lumière.

Soudain, sous le regard éberlué de sa nièce, Paul, apparu près de la fenêtre, possède son frère. L'âme de ce dernier observe sa fille, étonnée; son corps se dirige dans la cuisine.

— Mélinda ! Cherche les photographies d'une journée d'automne... Et le chêne qui m'enchaîne déchaîne ma colère ! Il doit être abattu !

— Ma fille, intervient Thomas, ses yeux lançant des éclairs, n'écoute pas les inepties de mon frère !

Mélinda est très confuse, ne sachant à qui croire.

— Père et oncle, je vous laisse, je vais revenir chez moi et je mènerai l'enquête de mon côté. À la prochaine !

Sur ces paroles, elle sort de la maison familiale, revenant chez elle encore plus perplexe qu'à son arrivée.


Au même moment, le recteur est assis à son bureau, vérifiant à plusieurs reprises la présence de l'arme à feu achetée quelques heures plus tôt d'une main, et de l'autre, vidant son verre. Il s'avachit sur son fauteuil, réfléchissant au meilleur moyen de conserver son poste de recteur. Il est conscient qu'un sérieux candidat, Martin Ferry, professeur et actuel directeur du Département de Droit et Science politique, menace son poste. Une idée lui vient à l'esprit, possédé par une Ombre. Il sort de son bureau et se promène le long des corridors blancs de l'Université pour se rendre au parc. Il rencontre sur son chemin Élie James. Ce dernier sursaute en discernant le recteur possédé devant lui. Celui-ci lui adresse un sourire faux et l'avertit :

— Monsieur James, je vous conseillerais de ne pas vous mêler aux affaires des autres ! Si vous ne voulez pas ressentir des représailles ! Soyez tranquille dans votre bureau et votre cabinet et rien ne vous arrivera ! Compris ?

Il le fixe de son regard possédé, donnant un frisson dans le dos du professeur.

— Vous n'avez pas de soucis à vous faire, déglutit-il. Je ne prétend aucunement à votre poste !

— Le Livre ! lui ordonne-t-il froidement. Donnez-le moi si vous ne voulez pas subir mes foudres !

Élie James ressent un mal de tête poindre.

— Monsieur le recteur, je vous laisse, je dois me rendre à mon cours.

Le professeur de Psychologie accélère le pas.

— Mais n'oubliez pas mon conseil, jeune professeur ! lui hurle le vieil homme, s'éloignant de lui, continuant sa marche.


Au même moment, le défunt médecin collaborateur discerne la fameuse possibilité qu'il attendait depuis quelques mois déjà. Carl Neely, influencé par lui, affirme sérieusement à son épouse :

— Ma chérie, que penses-tu que nous allions avec les enfants au parc naturel régional de la Montagne de Reims ? Une petite sortie familiale en plein air nous fera le plus grand bien ?

— Carl, pourquoi proposes-tu ainsi, sur un coup de tête, une telle idée ?

L'interpellé soupire et murmure :

— Pourquoi dois-je toujours tout planifier minutieusement ? ...

Il se masse les tempes, fatigué par le jeu sournois du médecin collaborateur.

— ... Je ne travaille pas aujourd'hui et un peu d'air frais nous fera du bien ! ... Tu viens ?

— Chéri, il faut au moins amener un peu d'argent pour payer de quoi manger et amener un peu d'eau...

— Sylvie, je t'attends dans la voiture !

Et l'inspecteur appelle les enfants et sort de la maison en claquant la porte.

Il s'installe sur le siège du conducteur, laissant leurs enfants s'asseoir sur les sièges arrière, attendant avec impatience son épouse. Il tambourine nerveusement sur le volant.

Son épouse arrive rapidement et la famille part en direction du parc.

Le policier conduit la voiture depuis quelques heures, sans aucun souci, espérant que son épouse cessera de lui chercher noise et que la promenade familiale lui fera changer d'esprit. Au détour d'une route, roulant rapidement, Carl Neely ne note pas un camion qui arrive dangereusement vers lui. Charlie Luc Wogel possède le camionneur et met les gaz pour percuter violemment la voiture du policier. Celle-ci, écrasée, ne peut être récupérée. Carl, comme sorti d'une transe, se dépêche de libérer sa femme et ses enfants, malgré ses blessures et la douleur lancinante aux bras, aux jambes et au dos, des débris. Son épouse montre des faibles signes de vie, alors que leurs enfants sont défunts, aucun battement de cœur, ni respiration perceptibles, malgré les tentatives de réanimation. L'inspecteur, atterré, d'une main tremblante et dans un soubresaut d'une volonté de vivre, appelle les urgences et des policiers. Il espère, aux tréfonds de son âme, que ses enfants peuvent encore être sauvés.

Aussitôt que des policiers et une équipe du SAMU arrivent sur place, Carl et Sylvie sont transférés à l'hôpital et les deux cadavres des enfants sont transférés à la morgue.


Quelques heures plus tard, l'inspecteur ouvre les yeux, confus, lorsqu'il entend un vague chuchotement des médecins entre eux.

— Messieurs, pouvez-vous me clarifier la situation ? Comment est l'état de santé de mes enfants et de mon épouse ?

Les trois médecins présents dans la salle s'entr'observent, hésitants à lui répondre. L'un d'eux se racle la gorge et répond calmement :

— Monsieur Carl Neely, l'état de santé de votre femme est stable depuis deux heures.

— Et celui de mes enfants ? les interroge-t-il, se redressant du lit.

Le médecin se tait et observe ses collègues, cherchant à temporiser l'annonce de la triste nouvelle. Charlie Luc Wogel se matérialise à la gauche de l'infortuné inspecteur, sourire sardonique aux lèvres, regard brillant de fierté.

— .... Disons que vos enfants ne sont plus vivants, affirme rapidement un autre professionnel.

— Ai-je bien entendu ? sursaute l'inspecteur.

Les autres médecins opinent du chef.

— ... Mes enfants sont défunts... sa voix s'éteint, alors qu'il murmure ces dernières paroles. Mes enfants ne sont plus de ce monde...

Un vertige prend Carl à la formulation de ces mots. Un gouffre innommable s'ouvre en son cœur, plus profond et insondable que le Tartare lui-même. Il est perdu, désorienté. Sa vie et son monde ont perdu subitement leurs couleurs, tout lui semble fade, vide et vain. Une vague de tristesse le submerge, des larmes coulent, silencieuses, le long de ses joues, ses mains tremblent, ses yeux se ternissent, perdant leur éclat habituel. Il devient semblable à un mort-vivant. Le défunt médecin collaborateur éclate de rire, un rire qui glace le sang de Konstantin Pavlovich dans un coin de la salle. L'Observateur est très attristé et inquiet pour le collègue de Paul Eastman. À la droite de l'inspecteur, sa fille, Catherine, lui murmure de sa voix fluette :

— Papa, papa, ne soit pas triste ! Ne te sens pas coupable ! Je ne suis plus vivante, mais je continue d'exister... Je suis immortelle et personne ne peut me faire de mal ! C'est ce méchant esprit qui rit à ta gauche qui est fautif de notre mort... Ne l'écoute pas, s'il te plaît... gémit-elle.

L'inspecteur blêmit à ces paroles, sa mine s'assombrit, et d'une voix basse et rauque, réplique à sa fille, dès que les médecins sont sortis :

— Catherine ! Je suis bien affligé de me savoir sans enfants ! Mes anges ! Je...

Il sanglote silencieusement.

— ... Je n'ai que votre mère... Et mes deux rayons solaires ... ne sont plus en ce monde... Ravis par ma faute... Par ma stupidité et mon entêtement ! Maudite idée de randonnée ! ...

— Papa ! Arrête de te culpabiliser ! Tu ne pouvais rien faire !

— Catherine ! éructe-t-il pour camoufler sa douleur. Veux-tu bien partir et me laisser faire mon deuil ! Tu es libre ! Bon voyage dans l'au-delà, ma chère, et meilleure chance dans l'Autre Monde !

Sa fille soupire d'exaspération et se tait. L'inspecteur rumine les mêmes pensées et finit par s'endormir, exténué.


Au même moment, quelques heures plus tard, Mélinda, cherche inlassablement dans les journaux de Grandeville et dans les documents d'archives photocopiés toutes informations concernant son oncle et sa famille paternelle. Ainsi elle découvre qu'avant ses cinq ans, sa famille vivait dans une autre maison à Grandeville. Intriguée et étonnée, ne gardant aucun souvenir, la jeune antiquaire extraordinaire note l'adresse et se promet qu'elle visitera la demeure qui a été abandonnée depuis 1981.

Paul se manifeste à ses côtés, la faisant sursauter :

— Désolé, ma nièce, mais demande à mon épouse les lettres d'enquête et les photographies... Des informations très révélatrices s'y trouvent !

— Oncle Paul, il est bien étrange qu'avant mes cinq ans, on ait habité au 179 rue Honoré Balzac, alors que je n'en garde aucun souvenir et que la maison est depuis 1981 abandonnée... Aurait-il des esprits errants qui hantent la maison ?

— Le chêne, ma nièce, le chêne !

— Que signifient ces étranges paroles ? l'interroge, très étonnée, sourcils relevés, Mélinda.

Paul ne lui répond pas et s'évapore, laissant sa nièce seule en proie à des centaines de questions irrésolues. Celle-ci, dépassée par la situation, soupire, range les documents et s'allonge sur le canapé. Laissant ses pensées se succéder les unes après les autres à propos de diverses hypothèses concernant son oncle, la mystérieuse maison et le sens de la mystérieuse chanson russe, la chuchoteuse d'esprits s'étonne que son attention soit sur sa menstruation absente. Sourire aux lèvres, elle pense qu'elle est enceinte. Se relevant pour ordonner son idée d'être mère dans neuf mois et pour observer le meilleur endroit pour la chambre de leur enfant à venir, Mélinda ne peut réprimer un sourire radieux, ses yeux brillent encore plus que d'habitude. Elle attend avec impatience, ravie, que son mari revienne du travail pour lui annoncer la très bonne nouvelle de sa maternité.

— Je suis enceinte ! Nous serons parents ! Elle lui saute au cou, regard pétillant de joie, large sourire qui illumine son visage ovale et angélique.

L'ambulancier, également heureux d'apprendre la bonne nouvelle se penche vers sa femme pour l'embrasser tendrement et réplique :

— Enfin je serais père !

Il enlace son épouse contre lui et lui chuchote :

— Sois prudente, mon amour ! Ne te fatigue pas trop avec les esprits errants. Il faut que tu penses à la santé de notre petit !

— Ne t'inquiètes pas, Jim ! Je connais les limites et je dois aider mon oncle ! Je dois élucider son cas et comprendre des histoires de famille ! Veux-tu venir avec moi demain pour visiter la maison au 179 rue Honoré Balzac ?

— Mél, cette maison n'est-elle pas hantée ? lui réplique-t-il, inquiet. Tu es certaine de vouloir y aller ?

— Oui, Jim, sans l'ombre d'un doute !

— Très bien ! soupire-t-il.

— Mais je dois t'avouer être très perplexe sur le sens d'une chanson russe. J'ignore cette langue, donc comment retrouver les paroles et leurs sens ?

— Bonne question ! s'étonne l'ambulancier en se grattant le menton. Mais nous trouverons une solution ! Paul Eastman sait le russe grâce à sa mère... Il saura nous aider...

— Nous n'avons rien à perdre à essayer !

Et le couple, ravi, prend leur dîner en tête-à-tête, puis s'endort d'un sommeil sans rêve.


Le lendemain matin, la jeune antiquaire extraordinaire note la présence de l'âme de son père dans un coin de la chambre. Inquiète, elle l'interroge :

— Père, que se passe-t-il pour que je te vois ainsi ?

— Ma fille, ne t'inquiète pas pour moi... Mon frère est très fâché contre moi et possède mon corps...

Il s'approche de sa fille et lui murmure :

— Mélinda, je te conseillerais de ne croire aux paroles de personne, ni celles de ta mère, ni celles de Paul, ni celles de mes parents, ni les miennes. Tout le monde ment, tout le monde te cache la vérité ! Use de ton jugement et ne cherche pas à tout comprendre, tu ignores avec qui certains de la famille ont affaire pour des activités particulières... Si tu fouilles trop sur Paul, j'ai peur que tu t'attires sa colère et qu'il ne veuille te tuer...

Sur ces paroles, l'âme regagne son corps, laissant la future mère très incertaine du sens des propos de son père.




À suivre


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Strophe de la chanson Я никому не верю [Je ne crois personne] du groupe Би-2 [Bi-2].

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