Histoires entre vivants et esprits

Chapitre 10 : Suite des enquêtes sérieuses de famille, celle de Jim, première partie

3878 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 27/10/2023 20:22





Rappel de la généalogie de Jim Clancy.


Francis Clancy (1945) + Vera Radojčić (1950), mariés depuis 1971 = Daniel (1974) et Jim (1975)


Daniel Clancy (1974) + Nora Sutherland (1976), mariés depuis juillet 2002 = Jacques et Emmanuel (jumeaux nés le 19 mai 2003)


Du côté paternel

James Clancy (1920-1994) + Meredith Hope-Clancy (1926-1979) = Francis (1945), Augustus (1946) et Jennifer (1947).


Augustus Clancy (1946) + Patrizia Cerbo-Clancy (1947), mariés depuis 1968 = Marc Clancy (1968) et Joey Clancy (1969)


Jennifer Clancy-Gladestone (1947) + John Gladestone (1930), mariés depuis 1969 = Amadeus (né en 1970)






2 décembre 2003, salle d'attente du personnel de l'Hôpital Mercy, 13h30.


Jim Clancy attend une intervention. Pour passer le temps, il joue aux cartes avec Tim Flaherty, Bobby Tooch et Bahman Mīzrā. Tout à coup, au milieu du jeu, les cartes glissent par terre, comme si une main invisible a frappé sur la table. Étonnés, les quatre ambulanciers s'entr'observent et Jim s'empresse de ramasser les cartes. Ils recommencent le jeu. Et encore une fois au milieu de la partie, une main invisible déplace les cartes. Jim pense : « Clairement un esprit qui veut faire passer un message... Mais qui est-il ? » Comme si l'entité a lu ses pensées, elle déplace devant lui la carte du roi. Notre ambulancier est perplexe. Il pense : « Si vous avez quelque chose à dire, vous pouvez le dire à ma femme, Irène Gordon-Clancy. Elle saura vous aider. » Depuis, les ambulanciers jouent tranquillement sans être interrompus.


L'épouse de l'ambulancier, elle, à ce moment, fait la vaisselle; Aiden (trois ans), Mary (deux ans) et Nicolas (un an) jouent avec leur insouciance enfantine au salon avec leurs peluches. L'esprit qui s'est manifesté auprès des ambulanciers apparaît devant elle : un septuagénaire vêtu d'un complet bleu marine avec une chemise blanche. Sur son nez, des lunettes rondes en or qui accentuent avec élégance ses yeux bleus, d'un bleu comme ceux de Jim, pense Melinda Irène. Elle dit en anglais : – Qui êtes-vous et pourquoi vous restez encore ici parmi les vivants ?

L'esprit, dans la même langue, sans aucun accent, répond d'une voix calme : – Je suis James Clancy, le grand-père de Jim. Et je veux qu'il sache certaines choses à propos de la famille. Il serait dommage que mon fils et mon petit-fils ignorent les origines de notre famille.

Pourquoi ne pas l'avoir dit de votre vivant ?

Je ne voulais pas paraître d'influencer Jim dans le choix de son épouse. Mais le Destin a son dernier mot à dire... Vous savez très bien que les secrets ne sont pas éternels...

Oui, j'en ai la preuve avec ma propre famille.

Très bien ! Vous savez alors ce qui vous reste à faire !

Puis l'esprit errant disparaît de sa vue. Melinda Irène est perplexe. Elle en parle à Jim lorsqu'il revient du travail. Celui-ci lui rapporte l'ingérence de l'esprit dans le jeu de cartes. Et il dit pour seul commentaire : « Génial ! On dirait une enquête... En espérant que ma famille n'est pas aussi folle que la tienne... » Elle l'embrasse en signe d'encouragement.


Le soir est bizarre pour l'ambulancier. Dans son rêve, il se trouve dans une maison. Il reconnaît la maison de son grand-père paternel. Il est comme un garçon qui entend son père parler en russe. Sauf que l'homme assis à la table de la cuisine n'est pas son père, mais un autre homme de la famille qu'il ne parvient pas à identifier. Le seul détail qui le caractérise : un complet noir cravate. L'homme dit : « Будь осторожен ! [Fais attention !] » Jim se réveille alors, perplexe. Il se rendort. Le rêve se poursuit. L'homme en noir dit en anglais : « Tu dois sérieusement éviter de creuser certaines histoires de famille... Laisse tes ancêtres en paix ! Tu sais que ça ne changera rien à ta vie... » Un autre homme apparaît : son grand-père paternel. Il dit : « Laisse-le ! Ne l'écoute pas ! » Étonné, Jim voulait demander pourquoi. Et il se réveille avant d'avoir la réponse à sa question.



Le lendemain matin, Jim Clancy raconte son rêve à sa femme. Tous les deux sont perplexes. Mais ils concluent que c'est forcément son arrière-grand-père ou son arrière-arrière-grand-père qui le visite en rêve. Rassuré, l'ambulancier se rend à l'Hôpital Mercy en après-midi.

Melinda Irène, elle, regarde leurs enfants jouer; elle les a amené dans le parc le plus proche. Elle salue, chemin faisant, Tricia, qui a aussi amené ses enfants, Natalie (trois ans) et Daniel (deux ans), jouer dans le même parc. La jeune veuve est triste, mais seulement en la présence de ses enfants et des autres habitants de Grandview, elle s'efforce de ne pas pleurer; pour les premiers, afin qu'ils soient tristes à leur tour; pour les seconds, pour éviter leurs fausses condoléances. Le soir, seule dans son lit, elle permet à ses larmes de laisser libre cours; au fait de ne plus avoir son mari à ses côtés, son confident, son complice, par la faute de salauds qui se prennent pour Dieu... Il ne lui reste qu'à penser : « Que les pédés qui sont responsables de la mort de John brûlent en Enfer pour l'éternité ! » Au moins, comme sa fille aînée voit l'âme errante de son mari, Tricia sait qu'il veille sur elle, ce qui la rassure. Mais elle sait très bien qu'il lui faudra du temps avant de se remarier, pour ne pas paraître de le tromper (son amour pour lui ne s'oublie pas sitôt). « La vie continue ! » s'encourage-t-elle. Ainsi, les deux femmes échangent de leurs dernières nouvelles, tout en regardant discrètement les enfants s'amuser dans le module à jeux. Ainsi, Melinda Irène sait qu'elle s'est trouvée un emploi et elle la félicite.

Après la conversation des deux femmes, un esprit errant se manifeste à côté de Melinda Irène, à sa gauche, comme s'il est assis sur le banc : un septuagénaire vêtu d'un complet noir. Les mêmes yeux bleus caractéristiques de la famille Clancy et des lunettes à la monture des années 1950. Il l'observe en silence pendant quelques minutes puis dit dans un anglais impeccable sans accent : « Madame, vous saviez très bien que creuser les racines d'un arbre peut le déraciner ! » Puis il disparaît comme il est venu. À la droite de la passeuse d'âmes, James Clancy apparaît. Il dit : « Mon salaud de père qui vous menace ! Il ne veut pas que Jim sache pourquoi il parlait le russe... »

Mélinda Irène, étonnée : – Pourquoi ?

Probablement parce que c'est sa langue maternelle... Mais je vous laisse le soin de mettre en évidence les faits. Il m'a menti toute ma vie en disant que notre famille, les Clancy, était d'origine irlandaise. Sauf une fois, je l'ai attrapé en conversion en russe avec son frère Alexander... Ceci m'a mis la puce à l'oreille, sauf que je n'ai jamais réussi à mettre la main sur les documents qui prouveraient mon hypothèse. Je vous laisse régler ça. Une fois cette recherche terminée, je pars dans la Lumière.

Quel est le prénom de votre père ?

Andrew.

Puis l'esprit du grand-père paternel de Jim disparaît de la vue de Melinda Irène. Une fois revenue avec les enfants dans leur appartement, elle téléphone à Paul Eastman pour lui soumettre une enquête sur Andrew et James Clancy. Et le policier fait son travail avec sérieux. En deux mois, il parvient à trouver les documents les plus pertinents. Si le délai est si long, c'est le temps que les documents arrivent d'outre-Atlantique, mais aussi le temps de les vérifier, de les contre-vérifier puis de formuler les bonnes conclusions en reliant les différents éléments.



5 décembre 2003, appartement de Radoslav Neely.

Le poète, ayant surpris la veille sa femme, Marianna Radziwiłł, avec un autre homme dans leur lit, réclame le divorce officiel. Marianna quitte son appartement. Leur fils sera, jusqu'à sa majorité, en garde partagée. Et le père versera la pension alimentaire, bien entendu.


5 janvier 2004, Grandview, marché principal, 9h00.

Carl Neely, trente-et-un ans, fait ses commissions, pour laisser la travailleuse sociale surveiller les enfants dans le parc. Ils apprécient l'hiver, car ils peuvent jouer dans la neige pendant des heures. Lui, il déteste cette saison, car il est difficile de bien rouler sur son fauteuil roulant dans une montagne de neige... « Je devrais peut-être songer à placer des pneus d'hiver comme sur une voiture », pense-t-il avec humour.

Alors qu'il déambule dans le marché, avec son panier sur ses genoux, Carl Neely rencontre une jeune mère vers la vingtaine, qui gronde sa fille de deux ans qui voulait prendre une sucrerie. Cette voix, tellement mélodieuse, il lui semble l'avoir déjà entendue... « C'était où, déjà ? » pense Carl, « en tout cas, une voix d'ange.. C'était probablement la jeune adolescente lors de son enquête à l'école primaire My Lord School il y a trois ans. »

L'apparition soudaine de ses parents le sort de sa rêverie. Milena commente : « On dirait que l'amour est dans l'air... »

Hana Nasan-Neely apparaît à son tour. Carl soupire. Il préfère ignorer leur présence, ce qui fâchent un peu les esprits errants. Il continue sa pensée : « Ah! C'était la jeune qui me fixait lorsque je suis passé... En tout cas, la même odeur d'esprit qui l'accompagne... Et il y a aussi apparemment un autre esprit errant, à l'odeur de menthe... »

L'esprit à l'odeur de menthe commente : « Merci, Monsieur... C'est vrai que j'aime beaucoup le thé à la menthe. Mais un conseil: n'approchez pas cette vipère. Elle paraît douce, mais elle est vraiment méchante, très méchante... »

Carl Neely pense : « Vous dites ça pour me dissuader de commencer une aventure après plusieurs années sans rien faire, car même si je voulais m'approcher de certaines, elles me fuient en raison de mon handicap... »

Hana Nasan-Neely commente ironiquement : « Je comprends que tu n'es pas insensible aux belles femmes, mais celle-là semble être une vipère... À moins que ce soit une crise de la trentaine ? »

Carl lui réplique mentalement, froissé : – Merci du commentaire !

David ajoute : – Fiston, n'oublie la présence des esprits errants aux côtés de la jeune femme...

La jeune femme à la voix mélodieuse, ayant vu notre pauvre Carl Neely, le prend en pitié. Elle passe près de lui, lâche un stylo bleu près de lui; l'ayant entendu, il approche sa main droite pour ramasser le crayon que l'esprit à l'odeur de menthe s'écrie : – N'y touchez surtout pas ! La sorcière vous a repéré !

La passeur d'âmes ignore ses propos en pensant « Ça doit être les propos d'un premier mari jaloux! » et remet à la jeune femme le stylo. Elle le remercie timidement; il la salue, elle et la fillette. Puis chacun continue ses commissions.

L'esprit à l'odeur de menthe, Hana Nasan-Neely, David Neely, Milena Vladikin-Neely soupirent à l'unisson. Maurice Solms apparaît, inquiet pour son protégé. Dragomir Vladikin marmonne un extrait de son Évangéliaire. L'esprit pilote commente : – Est-ce que tu as pris un verre de trop pour tomber amoureux d'une vipère, ou bien tu es resté coincé dans un banc de neige, ou bien tu es tombé sur la tête ?

Carl Neely, vexé : – Merci des insinuations ! Je me passerais de ton avis !

Et il se dirige vers la caisse puis revient chez lui, avec l'espoir d'un second mariage. Voilà à peu près quatre ans qu'il est veuf. La douleur de la mort de sa Hana est passée. Enfin une femme qui s'intéresse à lui ! Il ne voudrait surtout pas rater sa chance !

Les journées suivantes, il apprend le nom de la jeune femme: Melody Spengler. La fillette s'appelle Caitlin Mahoney. La jeune femme est veuve de son premier époux depuis un peu moins d'un an. « Au moins, » pense Carl Neely, « Nous formons un joli couple; deux veufs réunis par je-ne-sais quelles circonstances, dont chacun traîne avec soi ses enfants du premier mariage. La petite Caitlin est mignonne... Elle me rappelle ma Maria et ma Sara... » Il apprend aussi que l'esprit à l'odeur de menthe est le premier mari de Melody, Ralph Mahoney, qui l'accuse d'être responsable de sa mort. Le passeur d'âmes ignore ses propos, les tenant pour ceux d'un homme jaloux que sa femme connaisse un autre; de même pour les commentaires ironique de Hana. Comme quoi, l'amour fait perdre la tête... Les deux veufs débutent alors timidement un jeu de séduction, pour finalement se décider à une aventure un peu plus romantique en février. C'est la travailleuse sociale qui est contente de la tournure des événements; elle n'a plus besoin à venir pour s'occuper de Maria, Sara et Samuel. Seulement Ralph Mahoney avertit Carl Neely d'être prudent, s'il ne veut pas le rejoindre rapidement... Mais le concerné fait fi de sa remarque, au grand désespoir de ses esprits errants protecteurs... Ils craignent le pire dans les années à venir... Melody est par ailleurs charmée par Carl Neely. Évidemment, il lui révèle son don, ce qu'elle semble accepter de bon cœur, comme son handicap (malgré que pendant une fraction de seconde, elle semble inquiète ; sauf que le passeur d'âmes préfère ignorer cette expression déplacée, en la mettant sur le compte de l'excentricité de son don). Elle lui facilite la vie et fait les tâches ménagères. Les enfants de Carl Neely, à la nouvelle d'une belle-mère, ne sont pas contents du tout, surtout après avoir vu les deux esprits errants autour d'elle. Sans parler des tentatives de Ralph Mahoney et d'Hana Nasan-Neely pour gâcher leur relation, en tentant d'influencer Carl Neely d'abandonner son plan de mariage avec Melody et en l'encourageant à faire une enquête sur elle. Il hésite et finalement se rend à leur avis. Il soumet à Paul Eastman une enquête sur Melody Spengler-Mahoney.


Entre-temps, son frère, Radoslav Neely, s'inquiète beaucoup pour lui. Le poète a compris que son benjamin doit éviter d'épouser en secondes noces une vipère. Il l'avertit. Carl, depuis quelques mois, influencé par Andrew Lewis qui revient occasionnellement autour de lui, commence bien à penser que son frère serait un poète de malheur, pensée qu'il trouve confirmée par son récent divorce... De ce fait, il prend à la légère les avertissements...



3 février 2004, station de police de Grandview, bureau de Paul Eastman, 13h.

Le policier a terminé son enquête sur la famille Clancy. Il appelle Jim et Melinda Irène pour les informer. Quinze minutes plus tard, le policier se pointe à leur porte, leur remet les documents et leur souhaite une bonne journée.

Voici les conclusions auxquelles Jim est parvenu, entre la lecture des documents et ses rêves (entre-temps, il a eu des rêves énigmatiques qui concernent une cave à vodka). Son grand-père, James Clancy, né en 1920 en Irlande et mort en 1994 à Grandview, est le fils benjamin d'Andrew Clancy (1885-1956) et d'Anna Ferguson-Clancy (1900-1967). Il est précédé de deux frères, prénommés Alexis et Matthew, respectivement nés en en 1918 et en 1919. James se maria en 1944 à Meredith Hope, de six ans sa benjamine. Le couple déménagea trois mois après leur mariage au Canada, pour fuir la guerre. Cette information au sujet de son grand-père, Jim la savait déjà. Mais un détail intéressant concernant Andrew Clancy : il est né le 20 octobre 1885 non pas en Irlande (au temps de la Grande famine irlandaise), mais dans l'Empire russe (alors gouverné par Alexandre III), dans la petite ville de Kлин (Kline), à 85 km au nord-ouest de Moscou. Le vrai nom d'Andrew Clancy est Андрей Михайлович Кленси (Andreï Mikhaïlovitch Klensi). Il est le fils aîné de Михайл Ильич Кленси (Mikhaïl Ilitch Klensi) (1860-1922) et de Екатери́на Панина-Кленси (Catherine Panina-Klensi) (1867-1931). Andrew a aussi une sœur et un frère, à savoir Милана Михайловна Кленси (Milana Mikhaïlovna Klensi) (1886-1950) et Александр Михайлович Кленси (Alexander Mikhaïlovitch Klensi) (1887-1967). Pour le détail, les Panine sont une famille de militaires russes, des ardents défenseurs de la patrie qui ont toujours été fidèles au Tsar. Seulement, Михайл Ильич Кленси déménage avec sa famille en octobre 1917 pour fuir les Bolcheviks. Et ils se rendent en Irlande, où ils anglicisent leurs prénoms et noms de famille. C'est ainsi que Михайл Ильич Кленси devient Michael Clancy ; Екатери́на Панина-Кленси, Catherine Panina-Clancy ; Андрей Михайлович Кленси, Andrew Clancy ; Милана Михайловна Кленси, Melonie Clancy ; et Александр Михайлович Кленси, Alexander Clancy. Par ailleurs, le nom de famille Clancy est une transcription latine du russe кленси, qui signifie «Clémence», ou encore de кленс, qui signifie «érable», ou de клан, qui signifie «clan». Dans tous les cas, tous ces éléments renvoient à la ville natale des Clancy, car Kline a des parcs avec des érables. Et en tant que militaires fidèles au Tsar par alliance avec les Panine, ils forment un clan établit dans cette petite ville. C'est par la Clémence divine que la famille s'est sauvée du danger des Bolcheviks. Et cette origine russe explique aussi pourquoi Andrew Clancy avait dans la cave de sa maison des bouteilles de vodka importées qu'il buvait pour les occasions et pourquoi il célébrait Noël le 25 décembre et le 7 janvier; seuls les orthodoxes le fêtent au 7 janvier. Comme il s'est converti au protestantisme, il le fête le 25 décembre. L'important pour lui, c'est le fond de verre de vodka !


« Dans tous les cas, » dit Jim à sa femme en guise de conclusion, « cette découverte explique trois choses : premièrement, les yeux bleus de ma famille paternelle dont j'ai fièrement hérité; deuxièmement, pourquoi j'ai toujours voulu apprendre le russe; troisièmement, la mystérieuse cave à vodka de mon arrière-grand-père que j'ai vu dans mes rêves... Et dans ce cas, la carte du roi a été retournée pour signifier la fidélité de ma famille paternelle au Tsar. »


Le couple éclate de rire à cette conclusion, car il imaginait déjà Dieu-sait-quoi...


Au moment où l'ambulancier formule la conclusion, deux esprits l'encadrent : Andrew et James Clancy, contents que leur descendant sache la vérité au sujet de la famille. Et ils rient avec les deux vivants. Une fois le fou rire calmé, Melinda Irène, étonnée du changement de comportement d'Andrew, lui en demande la raison. L'esprit lui répond qu'il s'est rendu à l'avis de son fils et que rien ne peut être caché. Les deux ancêtres saluent respectueusement la passeuse d'âmes et partent dans la Lumière, sereins. Elle murmure à son mari que son grand-père et arrière-grand-père sont partis dans la Lumière. Ils sourient et s'enlacent tendrement; ils rejoignent leurs enfants au salon, qui jouent joyeusement avec leurs peluches.



Le lendemain, Paul Eastman, après sa patrouille routinière, débute l'enquête sur Melody Spengler. Guidé par l'âme errante de Ralph Mahoney, il parvient rapidement aux conclusions. Et il s'inquiète pour son ancien collègue. Mais bon...

En avril, il lui transmet les résultats de son enquête; le policier les lui remet à son lieu de travail, pour être certain que Melody ne doute de rien... Carl Neely lit les papiers pour passer le temps de ses pauses. Il est très étonné. Elle a empoisonné son mari, Ralph Mahoney, de trois ans son aîné, le 4 septembre 2003. L'autopsie est très claire à ce sujet : empoisonnement au mercure. Le couple a une fille, Caitlin, née en décembre 2002. « Clairement pour hériter de son compte bancaire », pense l'agent de sécurité. « Là, je comprends les craintes de Monsieur Ralph Mahoney... » Carl Neely hésite sérieusement à poursuivre sa relation avec Melody, mais lorsqu'il revient chez lui, il n'arrive pas à faire l'équation entre la douce jeune femme et la cruelle vipère qui tua son premier époux. Néanmoins, il se montre vigilant, car il se doute bien qu'elle n'apprécie pas Maria, Sara et Samuel. Mais ceci le laisse indécis, partagé entre les deux idées, sans oublier l'influence des esprits errants autour de lui, il ne sait plus sur quel pied dansé. Parmi les esprits errants, qu'il identifie à leur odeur, il y a ceux qui veulent qu'il poursuit sa relation (l'esprit qui accompagne Melody, Lorenzo Romano, Giovani Baldini, Andrew Lewis et François Janet) et ceux qui veulent qu'il rompt définitivement avec elle (Ralph Mahoney, Hana Nasan-Neely, David Neely, Milena Vladikin-Neely, Dragomir Vladikin, Karl Pulluow et Maurice Solms). Mais Carl Neely est tombé amoureux de Melody, et serait à nouveau seul s'il la chasse de son appartement... Il trouve son dilemme déchirant, mais il élude de le résoudre en se contentant pour l'instant d'une aventure avec elle. C'est plus pour ne pas être seul... Mais une telle solution ne réjouit pas du tout les esprits errants qui veulent le protéger de l'influence de la sorcière anglaise.

« Ça n'annonce rien qui vaille pour lui » dit Ralph Mahoney, « J'étais aussi optimiste lorsque j'ai rencontré Melody... Il serait dommage que ce pauvre homme soit sa prochaine victime, car elle est très sournoise et se laisse occasionnellement possédée par l'esprit sombre qui l'accompagne. »

Dragomir Vladikin réplique : « Que Dieu éclaire mon petit-fils avant qu'il soit trop tard ! »

Les bons esprits se signent et tous suivent les événements avec intérêt.



En avril 2004, Grandview.


Myriam Eastman, la fille aînée de Paul Eastman, à vingt-quatre ans, est toujours célibataire. C'est pourquoi elle travaille comme caissière dans la librairie The Antique Book, où elle se lia d'amitié avec Tricia Mizrahi, sa collègue. Par une belle journée ensoleillée d'avril, la jeune femme, de retour de son travail, rencontre un jeune homme, qu'elle trouve tout à fait charmant avec ses yeux bruns et cheveux bruns clairs. Les deux jeunes se font timidement la cour et apprennent à mieux se connaître pour se lancer dans une aventure un peu plus amoureuse en septembre. Ainsi, à la fin du mois de septembre, Myriam présente à ses parents son petit copain : Zakarie Salama, un Juif ashkénaze du même âge qu'elle. Il travaille comme caissier dans le magasin kasher de son père, le seul à Grandview. Sara, la mère de Myriam, n'est pas contente du choix de son gendre. Elle est séfarade et n'apprécie pas les ashkénazes. Paul Eastman mène discrètement une enquête, mais ne trouve rien de suspect. Il est content que sa fille ne soit plus seule. Et les jeunes tourtereaux vivent ensemble dans un petit appartement depuis octobre.



À suivre.

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