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Chapitre 6 : La reconnaissance de Carl Neely

4770 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 13/06/2023 22:08



Le lendemain, Tricia Berbari, au cours d'une promenade en après-midi avec sa fille Natalie Mylord (qui ne reprend l'école qu'en janvier), rencontre Carl Neely en civil. Lorsqu'il vient de plus près, elle le salue, bien qu'elle soit étonnée du changement de sa physionomie. Étonné, car il ne peut croire de ses oreilles que sa dulcinée l'apostrophe (il reconnaît sa voix entre mille), il lui rend par politesse son salut, un sourire forcé aux lèvres. Sara Blumenfeld-Neely, à la droite du chef policier, encourage son mari à faire le premier pas vers Tricia; Marianne Bazra-Neely, à sa gauche, l'encourage à fuir devant Tricia. Indécis, l'homme baisse les yeux, fixant ses chaussures. Il bredouille : – Madame Tricia Berbari, que me voulez-vous?

– Simplement parler comme de bons amis.

– Nous n'avons rien en commun... Je suis trop impur pour vous! Je vous ai menti! Je ne vous arrive pas à la cheville! Je... Je suis un homme brisé...

Ne pouvant contrôler ses larmes, elles coulent silencieusement des yeux du policier qui pleure sur lui-même.

Tricia, émue, dit d'une voix douce : – C'est précisément dans les moments difficiles qu'il faut parler avec une bonne amie. Je suis là pour ça. La solitude n'est pas bonne conseillère. Et bien, voulez-vous venir, Monsieur Carl Neely, chez moi... Dans mon petit appartement. Je serais contente d'entendre enfin votre voix.

En séchant rapidement ses larmes, il répond timidement : – Merci, noble dame. Votre bonté est infinie. J'accepte votre invitation. J'espère seulement ne pas être un hôte ingrat.

Et Carl Neely, traînant des pieds et fixant le trottoir, suit Tricia et Natalie. Sara Blumenfeld-Neely murmure à elle-même en allemand : « Vas-y Carl, remonte-toi le moral! Ne rate surtout pas une si belle occasion! Que Yahvé te protège, Tricia et toi! » Marianne Bazra-Neely suit aussi son époux. Une fois rendus dans l'appartement où Tricia et Natalie vivent, Tricia envoie sa fille jouer dans sa chambre le temps qu'elle discute avec Carl Neely au salon.

La sémite invite le policier à s'asseoir sur un canapé en face d'elle; il lui obéit. Elle sert du thé, une tasse pour son invité, une tasse pour elle. Carl Neely est encadré par ses deux épouses, qui regardent la scène et qui tentent de l'influencer, la première à sa droite, la seconde à sa gauche. D'ailleurs, chacune observe du coin de l'œil l'autre. À peine assis, Carl Neely voit à ce moment, dans une vision à distance, quatre policiers réunis – il reconnaît Daniel Peterson, Frédéric Constantin, Jack Wrongonski et Denis Emerson, qui sont alors encore vivants – avec un homme masqué en noir, en discussion animée autour de sa photographie, mais en prenant soin de planter un petit couteau suisse sur la photographie. Fin de la vision.

Carl Neely commente à voix haute : « Ces quatre salauds d'espions veulent me blesser. Au lieu de le faire à distance, faites-le directement! Allez, bandes de cons! » Après quelques minutes de silence, au cours desquelles il prend de grandes inspiration et expirations pour calmer sa rage, Carl Neely dit à Tricia : – Désolé, je ne voulais pas vous faire peur, car je viens de voir une vision à distance.

– Ne soyez pas désolé. Seulement, soyez vigilant et faites-vous confiance. Je comprends que vous avez un don. En tout cas, il est fort utile pour éviter des situations malheureuses.

– Merci, noble dame, mais je...

– Monsieur Neely, ne commencez pas à vous culpabiliser! Au contraire, vous m'avez évité un mariage avec un escroc. Ce n'est pas rien!

Comme Carl Neely regarde avec méfiance la tasse de thé, en pensant, influencé par Marianne : « Veut-elle m'empoisonner ? » Tricia dit d'une voix douce : – Soyez assuré, Monsieur Neely, de mes bonnes intentions. Je ne veux que votre bien. Je sais bien qu'un proverbe dit qu'il n'est pas de livre plus fermé que cœur d'une femme, mais ne soyez pas si méfiant. Vous n'avez pas douté sous votre pseudonyme de Hermann Ehrlich de mon amitié, pourquoi douter maintenant?

Honteux, en fixant la tasse de thé devant lui, il bredouille : – Parce que j'ai perdu confiance en l'espèce humaine et en moi-même... Tout le monde est trompeur, toute parole est double et toute promesse vaine... Mon triste cas confirme les propos «L'instinct du mal est caché dans le cœur de l'homme» (Soukka 52 b). Par ailleurs, l'expression « la chair du mort ne ressent pas la lame du couteau » (Chabbat 13 b) s'applique à mon cas; mon infortune m'a endurci le cœur...

Carl Neely soupire d'un air résigné puis ajoute : – Madame Tricia Berbari, si vous voulez clore notre conversation ici, ça me ferais plaisir de ne plus vous déranger! Je comprends très bien que vous ne voulez pas perdre votre temps... avec... un pauvre fou mythomane né sous une mauvaise étoile. Je vous confirme qu'« [u]n homme ne commet de péché que s'il est sous l'emprise de la folie » (Sota 3 a). Merci Madame! Passez une bonne journée!

Il se lève du canapé, mais Tricia se lève à son tour. Elle le retient en lui touchant le bras droit et dit : – Monsieur, s'il vous plaît! Ne dites pas ça! Vous saviez bien que vous êtes normal, seulement, ne prétendez pas vivre en loup solitaire. L'homme est un animal social. Le Tamuld de Jérusalem [Horayot.3] souligne qu'«[u]n homme sans ami c'est comme une main gauche sans la droite». Par ailleurs, une conversation avec une si triste note n'est pas bon signe. Poursuivons-la, s'il vous plaît! Par ailleurs, je vous rappelle le proverbe « L'envie, les mauvaises passions et la misanthropie abrègent la vie. » (Avoth, 2.16)

– Je me moque complètement de ma vie! Elle n'a plus de sens!

Ce contact laisse Carl Neely étonné. Il n'a jamais espéré toucher ou être touché par une femme depuis son divorce d'avec Marianne Bazra-Neely, en février 2004. En vérité, la dernière fois que son corps a touché sa seconde épouse, c'était en 2003, il y a sept ans... En plus, par une femme dont il est secrètement amoureux... Il la trouve douce et charmante.

Et les deux se rassoient sur leur canapé respectif. Le policier, vaincu par sa bonté, lui sourit faiblement et pense : « Tricia, mon étoile inaccessible, vous brillez toujours d'une douceur incroyable, peu importe les difficultés rencontrées. Vous êtes vraiment adorable! Vous êtes précieuse! »

Tricia poursuit : – Par ailleurs, Monsieur Neely, il ne faut pas être désespéré après autant de malheurs. Peut-être la chance vous sourira-t-elle, seul Dieu le sait. Les Psaumes (126.5) ne disent pas vainement que ceux qui sèment dans les larmes, qu'ils récoltent dans la joie. Et l'expression après la pluie le beau temps ne saurait être contredite. Il faut seulement espérer et être patient. D'ailleurs, ce qui a eu lieu a eu lieu [Pssahim 108 b].

– Je vous remercie pour votre optimisme, mais je ne suis pas certain que le beau temps, à mon âge, arrivera... Surtout avec ma misanthropie, mes diverses tentatives de suicide, mes mensonges et mes meurtres, je suis indigne d'un bonheur. L'on ne dit pas que «[q]uiconque a les mains salies par le vol invoquera Dieu et n'en seras pas entendu» [Midrach Rabba sur Exode 22.3]? Sans oublier que l'infidélité, la fausse promesse, le vol, le meurtre et l'arrogance sont cinq des sept péchés que le Très-Haut punit de la lèpre [cf. « Il y a sept péchés que Dieu punit de la lèpre. Ce sont : la médisance, le meurtre, le faux serment, l'adultère, l'arrogance, le vol et l'envie. »] Par ailleurs, les mains qui répandent le sang innocent et la langue mensongère sont deux des sept choses que Dieu a en horreur d'après les Proverbes [6.16-19].

– Je vous imaginais plus combatif et moins pessimiste! Où est parti votre optimisme? Ne lui donnez pas congé!

– D'accord, je voudrais ramener mon optimisme, pour vous faire plaisir... Sauf qu'il est parti, il s'est envolé... C'est un lointain passé, c'est une autre vie... À croire que j'ai plusieurs vies... Mais n'oubliez pas que « [l]a main peut tuer. La langue aussi. » [Arakhine 15 b], ni « [s]elon la grandeur, la chute » [Midrach Rabba sur Genèse 19]! Ne dit-on pas que «[l]e commencement du péché est doux mais sa fin est amère» (Midrach Rabba sur Ecclésiaste 3)? D'ailleurs, à l'heure de la mort, aucun homme ne cherche à tricher (Baba Bathra 175 a)!

– Ne soyez pas si dur envers vous-même... Un proverbe ne dit pas vainement que « [c]haque homme connaît son poids »?

– Vous avez raison. Sauf que moi, je ne connais pas mes possibilités... Je ne suis conscient... que... de ma déchéance certaine, puis de ma mort. Je me moque de crever seul, abandonné de tous, comme un chien! Je suis né seul, moi l'unique, le sombre et le fou Carl Neely! Et bien, je crèvera seul, sans personne qui me pleurera tellement je suis détesté!

Ses yeux, à ses paroles, s'illuminent, comme s'illumine un fou inspiré, sauf qu'il est inspiré par le désespoir que lui communique Marianne Bazra-Neely. Après quelques secondes de silence, il poursuit son monologue : – En parlant du jour de ma naissance, c'est ma mère que je plains le plus. La pauvre qui m'a porté pendant neuf mois, qui m'a gâté pendant mon enfance, a nourri un serpent parricide en son sein! Pourquoi ne suis-je pas mort au moment où je suis sorti de son ventre? Ma naissance est un malheur pour l'humanité: ayant refusé de collaborer avec des agents de renseignements secrets qui cherchaient à me recruter dans leurs rangs en raison de mes visions à distance, j'ai accepté un pacte avec mes ancêtres pendant un an, année au cours de laquelle j'ai été... alcoolique, ce qui se solde par un divorce, en plus de tuer de innocents et de m'auto-mutiler pour... abreuver de mon sang mes sinistres ancêtres...

Carl Neely s'interrompt lui-même pour retrousser les manches de son pull et de sa chemise et tourne ses avant-bras vers Tricia pour lui montrer les cicatrices de ses auto-mutilations. Elle regarde avec horreur et ne peut pas retenir une grimace. Le chef policier baisse les manches et ramène ses bras vers lui.

Il poursuit : – De plus, peu après mon divorce, je me retrouve veuf... Et j'ai eu du travail pour ravoir la garde de mon fils, mon David. Mais, maintenant, avec ma dépression et ma mélancolie, auxquelles s'ajoutent un pseudonyme mensonger, un meurtre et un parricide, je me suis rendu à l'évidence: je suis le plus détestable policier... Euh... chef policier... qui existe dans l'univers. Quel piètre ami je suis! Quel père je suis! Ah, ma pauvre prunelle, mon David chéri! Comment pouvez-vous me croire alors que je me suis présenté avec une fausse identité? De plus, je suis parjure, puisque je me suis promis de ne plus jamais être chef policier de ma vie. Car j'ai exercé cette fonction lorsque j'était possédé et j'ai tué des innocents... Et me voilà, ironiquement, chef de la police de Grandview! Je suis alors vraiment une méchante perle! Heureusement qu'une telle perle est rare! Je n'oublies pas que le nom des méchants tombe en pourriture [Proverbes 10.7], ni qui débite des mensonges n'échappera pas [Proverbes 19.5] ; c'est ma seule consolation! Ah oui! Sans oublier ni « [d]e la mesure dont il mesure, il sera mesuré » (Meguilla 12 b) ni que « Dieu paie à chacun le prix de ses œuvres » (Proverbes 12.14). Ma consolation, c'est d'être une maigre nourriture pour les vers [cf. «La destinée de l'homme c'est d'être la proie des vers» (Avoth 4.4)]!


Silence lourd qui dure plusieurs minutes.

Tricia boit sa tasse de thé, pour fermer les yeux à moitié, afin de Carl Neely ne remarque pas qu'elle est troublée par son terrible aveu... Elle fait des grands efforts pour ne pas pleurer silencieusement, et pense « Il est vraiment désemparé, mon pauvre Carl! Ne te laisse pas abattre par la mélancolie! C'est vraiment une bonne accolade qu'il lui faut! Arh! Tricia, contrôle-toi! ».

La sémite, pour briser le silence, lorsqu'elle ramasse son courage à deux mains (et, d'ailleurs, encouragée par Sara Blumenfeld-Neely), ouvre ses yeux, observant attentivement son interlocuteur et dit d'une voix douce : – Réalisez-vous que cette froideur ne vous sied point? Vous êtes au fond une bonne âme, sauf que vous devez bien espérer que tout n'est pas perdu. N'oubliez pas «[q]ui s'abaisse, Dieu l'élève, qui s'élève, Dieu l'abaisse» [Erouvine, 13 b] et que « [l]'Eternel est proche des cœurs brisés » (Psaumes 34.19). Tous les événements ont un sens, et que le Destin a toujours raison de nous, simples créatures mortelles. « Rien de ce que Dieu a créé dans le monde n'est inutile » (Chabbat 77 b). L'important, c'est de ne point perdre sa dignité même en plein danger [cf. « Même à l'heure du danger, que nul n'abandonne sa dignité » (Sanhédrin 92 b)]. Après autant de malheurs, la joie peut vous sourire à nouveau? «Tant qu'il a la vie il y a l'espoir» lit-on dans le Talmud (Brakhot 9.1). Nehman de Braslaw ne disait-il pas que « [l]a mélancolie et la tristesse empêchent l'homme de réfléchir en toute liberté »? D'ailleurs, Naphtalie de Ropshitz disait : « Le chant ouvre les portes du ciel. La mélancolie les referme ». Pouvez-vous retrouver votre joie de vivre? Ceci vous aidera à demeurer optimiste. Le Talmud de Jérusalem, Soukka 5, dit «L'esprit divin ne peut se poser que sur un cœur joyeux». N'oubliez pas que «[l]e cœur joyeux rend le visage serein» [Proverbes, 15.13] ; que «[l]e juste tombe sept fois et se relève» [Proverbes, 24.16] et que «[l]e juste vivra par sa loyauté» [Habacouc, 2.4]. D'ailleurs, «[l']âme de l'homme est un flambeau divin» (Proverbes 20.27).

Le policier, touché, n'ose pas répondre. Il se contente de soupirer en fixant la tasse de thé devant lui. Il clignote nerveusement des yeux pendant quelques secondes. Un sourire forcé se dessine sur ses lèvres. Il est sidéré.

Après quelques minutes de silence, d'une voix qu'il voulait neutre, mais qui est tremblante, il dit : – Quelle douce réponse qui fait tomber ma mélancolie [cf. «Une réponse pleine de douceur détourne la colère» (Proverbes 15.1)]! Vous êtes étonnante! Vous êtes vraiment bienveillante à mon égard [cf. «Un esprit bienveillant procure sympathie» (Proverbes 13.15)]. Je me rends à votre avis: vous avez raison. Je suis trop noyé dans une mélancolie que je trouve dégoûtante mais que j'ai fait mienne... Mais ça ne change pas au fait que je suis un menteur, un homicide et un parricide. Je voudrais me purifier avant de reprendre contact avec d'autres gens, pour ne pas les souiller par ma présence... Ah! Là, je commence à délirer! Désolé!

Carl Neely, le regard hagard, s'agenouille devant Tricia, les mains levées en signe de supplication et s'écrit : – Noble dame au grand cœur, pouvez-vous me pardonner mes crimes? Voulez-vous me purifier?

Silence lourd qui dure une minute. Le policier s'est même laissé glisser au sol, touchant le sol de son front à quelques centimètres des pieds de Tricia.

La sémite, émue, lui répond : – Bien sûr, mon ami, je vous pardonne, car vous devez savoir que le pseudonyme de Hermann Ehrlich était nécessaire pour ne pas être interné et que ces crimes sont des règlements de comptes de vos vies passées. C'est notre amie Madame Mélinda Eastman-Clancy qui m'a dit cette information, qu'elle détient de votre première épouse et d'un esprit errant qui vous prend en sympathie. Je suis prête à vous purifier. Et ce, dès maintenant! N'est-il pas écrit dans le Lévitique «Enlevez l'ancien pour faire place au nouveau»? Ne dit-on pas «Grand est le repentir: il hâte la libération» (Yoma 86 b)?

Carl Neely, étonné, mais joyeux (la glace autour de son cœur commence à fondre, lui qui se croyait être très dur), relève sa tête vers elle, pus se traîne à reculons pour se rasseoir sur le canapé en face d'elle. Il pense : « Tricia, merci d'être mon brise-glace! Que ma solitude m'a endurci! »

Tricia se lève du canapé et court dans la cuisine, où elle cherche un seau qu'elle remplit d'eau tiède et revient au salon. Elle dépose le seau sur la petite table entre les deux canapés, puis fait signe à Carl Neely de se lever ; il lui obéit immédiatement. Elle lave les mains du policier avec une petite lingette verte en répétant trois fois : « Qu'Allah pardonne vos erreurs et que vous soyez purifié de vos crimes! Pour le reste, au Miséricordieux de décider! » Puis elle verse l'eau dans le lavabo des toilettes. Et les deux se rassoient sur leur canapé.

Après quelques minutes de lourd silence, Carl Neely, joyeux, comme il ne l'a jamais été depuis sa dépression, bredouille un timide merci. Tricia, contente pour lui, dit : « Si vous le voulez, vous pouvez être notre invité pour ce midi. Acceptez-vous ma proposition? »

– Avec plaisir!

En regardant autour de lui, le policier, étonné, demande : – Noble dame au grand cœur, qu'est-ce que cette simplicité?

– J'ai décidé de faire simple, afin de ne pas m'attirer un autre escroc. Je me dis bien que l'homme qui m'aime m'épousera et vivra avec moi dans ce modeste appartement. C'est tout.

Carl Neely baisse les yeux; il n'ose pas croisé ceux de la femme aimée, sans trahir ses sentiments. Il pense : « Carl, espèce de vieux pervers! Honte à toi! À peine tu reprends goût à la vie que tu fantasmes de séduire une femme! Vas-y doucement! »

Tricia Berbari laisse son ami se reposer au salon, puis elle se dirige vers la chambre de sa fille, pour la regarder jouer, le sourire aux lèvres.


Au midi, du kebbé est servi. Le chef policier, heureux de revenir parmi les vivants, mange de bon cœur. Évidemment, tous boivent un verre de jus de pomme, pour tenir compagnie à Natalie Mylord. Les deux adultes sont assis chacun d'un côté de la table, la fillette en face de sa mère. L'atmosphère est joyeuse. Après le café, les deux adultes s'occupent de faire la vaisselle. Ensuite, Carl Neely remercie Tricia Berbari et la salue, elle et Natalie, puis revient chez lui, léger. « Ça fait longtemps... des années... que je n'ai pas ressenti autant de joie! »



Depuis cette rencontre, qui a remonté le moral à Carl Neely, il rend visite à Tricia Berbari une fois par semaine, à chaque dimanche, comme de bons vieux amis. Ceci réjouit la sémite. Seule Natalie ne semble pas l'apprécier, en raison de la présence des mauvais esprits (ceux de ses ancêtres et de Marianne Bazra-Neely) à la gauche de l'ami de sa mère... Par contre, elle apprécie beaucoup la présence de Sara Blumenfeld-Neely, de Lada Bogdanović et de Caitlin Mahoney (avec laquelle elle joue), tandis qu'elle considère Daniel Miloshevitch, Ivan Prorokić, Victor Ferbovani, David Lévêque, Francis Mandeville trop sérieux, mais bienveillants ; elle les salue d'un mouvement de sa petite tête.



Quant au rituel de purification de Tricia Berbari, son efficacité est immédiate : les deux âmes errantes que sont John Wellington et Karl Neely n'osent plus tourmenter Carl Neely, car ce rituel l'a lavé de son péché, en plus d'augmenter l'influence des bonnes âmes qui le protègent. Les mauvaises âmes sont tranquilles, mais attendent avec impatience la période entre le Noël catholique (le 25 décembre) et le Noël orthodoxe (le 7 janvier), période où elles peuvent agir sur Carl Neely...




Le 19 décembre 2010, dernier accident critique pour le chef policier de Grandview: Daniel Peterson, Frédéric Constantin, Jack Wrongonski et Denis Emerson, alors qu'il se promène dans les rues de la ville en civil, le maîtrisent, le traînent dans un cul-de-sac et l'assomment, le laissant presque mort; ils n'ont pas eu le temps de l'achever, car Wrongonski remarque deux passants (l'un est temporairement possédé par Ivan Prorokić, l'autre par Daniel Miloshevitch, qui sont vraiment offusqués du mauvais traitement que subit leur protégé). Les quatre policiers déguerpissent dès que les passants se rapprochent, mais ceux-ci appellent immédiatement les urgences ; les ambulanciers arrivent aussitôt et transportent Carl Neely à l'hôpital Mercy, d'où il en sort au bout de deux semaines. Son fils, David, lui rend une visite, pour s'assurer de son état, mais Tricia Berbari est la plus inquiète et vient à chaque deux jours lui rendre une visite pour l'encourager à tenir bon.


Ainsi, entre le 26 décembre 2010 et le 6 janvier 2011, période encore critique pour Carl Neely, il décide de la passer chez Tricia, car elle-même lui a préparé une chambre d'invité à cette fin. De ce fait, il chasse rapidement les pensées sombres que Romano, ses sinistres ancêtres et sa seconde épouse veulent lui faire passer pour siennes; il préfère penser aux moyens de séduire Tricia. Le chef policier évite ainsi une tentative de suicide; il est plus optimiste. Les ancêtres de Carl Neely et sa seconde épouse, comprenant qu'ils ne peuvent rien contre lui, disparaissent, pour ne plus le déranger. Romano les a attiré à lui et ils sont tous disparus sous la terre, aspiré par le souterrain.






15 janvier 2011


Carl Neely, comme à toutes ses journées libres, fait la cour à Tricia Berbari. Il pense: «  On ne dit pas pour rien que « [l]'amour couvre toutes les fautes. » (Proverbes 10.12). Mon cas le confirme! Que la vie est belle! Aller, Carl, tu es capable de fonder une famille! » Il la courtise jusqu'en avril. Remarquant que les effets secondaires de sa consommation de médicaments antipsychotiques se sont estompés, Carl Neely n'est que plus joyeux. Il a repris sa joie de vivre et montre plus d'intérêt au travail, à la joie des policiers de Grandview, de son supérieur, mais aussi de son fils et de Tricia. Carl Neely accepte avec tout son sérieux habituel les tâches qui incombent à un chef policier.


À la mi-avril, comme Tricia Berbari se montre intéressée, Carl Neely et elle se lancent dans une aventure plus romantique et apprennent à mieux se connaître. L'amour est dans l'air, à la joie du chef policier, qui n'espérait plus connaître de femme de sa vie. Tricia aussi est contente, surtout depuis sa déception avec Robert Langowski/Hunter Clayton. D'ailleurs, elle apprend le serbe, par respect pour son futur mari. Et elle lui apprend quelques rudiments d'arabe. Bien sûr, Natalie Mylord sait l'arabe et apprend quelques mots serbes.



Cependant, dans sa grande joie, Carl Neely ne remarque pas des agents de la Agencja Wywiadu (l'Agence de renseignements extérieurs de la Pologne) qui rôdent autour de lui. Cependant, Daniel Miloshevitch, Ivan Prorokić, Victor Ferbovani, David Lévêque, Francis Mandeville, Sara Blumenfeld-Neely, Caitlin Mahoney et Lada Bogdanović, en tant qu'âmes errantes, les remarquent. Ils en avertissent Mélinda Eastman-Clancy (et ses enfants) et Élie James. Ivan Prorokić, en tant que porte-parole de tous les esprits errants, informe les deux vivants de la présence des agents polonais. Les autres âmes ne font que confirmer d'un mouvement de leur tête. Prorokić ajoute : « Ils le recherchent, car il ont encore des histoires, des très longues histoires, entre eux et Monsieur Carl Neely. Il doit être prudent, car ils sont particulièrement dangereux. Mais il doit comprendre certaines choses pour mieux comprendre d'autres. Da Bog ga čuva [Que Dieu le protège] ! »

Et les esprits errants disparaissent de leur vue et de leur ouïe, laissant les passeurs d'âmes perplexes. Mélinda, deux heures plus tard, appelle Carl Neely (car il a communiqué à ses amis son nouveau numéro de poste au travail depuis qu'il est devenu chef policier) pour lui recommander prudence. Le policier, à l'autre bout du téléphone, la remercie de l'avertissement et chacun raccroche leur téléphone respectif. Cette nouvelle ne gâche pas la joie de Carl.




17 juillet 2011, mairie de Grandview.


Mariage de David Neely et de Katarzyna Nowakówna. Carl Neely, qui s'est occupé de l'organisation, n'accepte qu'un petit nombre d'invités: Jozef Nowak, Elena Gronkowski-Nowakowa, Stefan Nowak, Tricia Berbari et sa fille Natalie, ainsi que Jim, Mélinda et leurs enfants. Comme aucune vision à distance ne se fait menaçante, Carl Neely laisse son gilet pare-balles, son revolver et sa matraque dans son bureau au Département de police de Grandview ; il n'amène que son icône portative de Sveti Mihovil et n'oublie pas de faire cadeau à son fils de la vieille bague avec l'aigle bicéphale serbe gravé sur le chaton. Bien sûr, Sara Blumenfeld-Neely est venue au mariage de son fils aîné. Caitlin Mahoney, Lada Bogdanović, Ivan Prorokić, Daniel Miloshevitch, Victor Ferbovani, David Lévêque et Francis Mandeville sont aussi présents. Ces invités invisibles (qui transmettent leurs meilleurs vœux aux mariés) font sourire Natalie Mylord, Mélinda Eastman-Clancy, Pavle, Aiden et Marie-Anne. Après la cérémonie de mariage, une petite fête est organisée (évidemment, sans alcool, en raison de la présence des enfants). Puis chacun retourne chez soi.






7 septembre 2011, mairie de Grandview.


Carl Neely et Tricia Berbari décident de se marier, au lendemain de la fête en l'honneur de l'Archange Michel pour les orthodoxes. Évidemment, son fils et sa bru (alors enceinte d'un mois) sont invités, de même les parents de Tricia, Jozef Nowak, Elena Gronkowski-Nowakowa, Stefan Nowak, Gérard Jung et sa femme, Paul et Élizabeth Eastman, Jim, Mélinda et leurs enfants. Encore une fois, le chef policier laisse ses armes et son gilet pare-balles dans son bureau. Enfin libre du poids du gilet pare-balles! Et toujours les mêmes âmes errantes sont venues bénir les mariés. Sara Blumenfeld-Neely, après la petite fête organisée en privée (sans alcool, encore une fois), elle part dans la Lumière après avoir déposer un chaste bisou à distance à son mari. Caitlin Mahoney, contente que son beau-père retrouve son optimisme et sa joie de vivre, salue Natalie Mylord, Pavle Clancy, Aiden Clancy et Marie-Anne Clancy, et part aussi dans la Lumière. « Deux esprits errants de moins », pense Mélinda. Mais elle remarque que d'autres esprits, qui ne veulent pas apparaître clairement, sont derrière Carl Neely. Miloshevitch et Prorokić se rapprochent d'eux, les faisant déguerpir. Ainsi, Mélinda remarque qu'ils sont au nombre de cinq. Pavle, Aiden, Marie-Anne et Natalie s'entre-observent pendant quelques secondes et disent à l'unisson en russe : « Mauvais esprits, allez-vous en! Vous n'avez rien à faire ici! » Les esprits, comme s'ils ont entendu les propos, ne sont pas revenus.






En mai 2012, David Neely et Katarzyna Nowakówna-Neely a accouché d'une fille, prénommée Mila. En mars 2013, ils deviennent parents d'un garçon, qu'ils prénomment Branimir. Inutile de dire la joie de Carl Neely lorsqu'il apprend qu'il est grand-père. Le chef policier, pour prouver qu'il n'a pas oublié ses devoirs conjugaux, est père de jumeaux, que lui et Tricia prénomment Samuel et Mariam, nés en juillet 2012. Le chef policier Carl Neely est très content de la tournure des événements et remercie le Ciel d'avoir veillé sur lui. Au travail, tout va bien pour lui ; de même pour son fils. Seulement, Carl se montre un peu prudent en raison de la présence d'espions qui l'observent de loin. Au moins, ils se tiennent tranquilles. D'ailleurs, le chef policier sait qu'il est surveillé, grâce à une vision à distance au cours de laquelle il se voit entouré d'hommes masqués en noir.



Les espions de l'Agencja Wywiadu (l'Agence de renseignements extérieurs de la Pologne) rôdent depuis un certain temps autour de Carl Neely, comme s'ils cherchaient quelqu'un... De même pour les cinq esprits diaphanes qui l'ont repéré. Mais ce calme ne cache-t-il pas une tempête ?





À suivre.



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