L'histoire d'Éli James

Chapitre 1 : 3 octobre 2008, l'expérience de mort imminente

2350 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 20/05/2023 17:54



« Il faut des forces pour resister au torrent, mais il n'en faut point pour le suivre. »


Bernard Le Bouyer de Fontenelle, Histoire des Oracles, édition critique publiée par Louis Maigron, Paris, Librairie Marcel Didier, 1971, original de 1686, Première Dissertation, chapitre VIII, p. 79, lignes 24-26.






Remarques préliminaires concernant le passé du professeur Éli James.


Éli James est né le 3 août 1962, à Grandview. Il a grandit dans cette ville, où, par ailleurs, il fait toutes ses études. Il débute son Baccalauréat en psychologie à l'Université Rockland en 1982. Il est diplômé en 1985. James est diplômé d'un Doctorat en 1991. Ensuite, il poursuit ses études en Philosophie dans la même université : Éli James obtient son Baccalauréat en 1995, sa Maîtrise en 1998, puis son Doctorat en 2001. Il sait l'anglais, le français et l'allemand, ayant appris ces deux langues au cours de ses études universitaires. Il a alors son bureau au Département de psychologie est le B777.

Éli James se maria en 1987, avec une femme du même âge, un certaine Anna-Maria Johnson. Sauf que ce mariage se termine par un divorce en 2000, parce que leur ménage n'allait pas bien : leurs caractères ne s'arrangeaient point ensemble, faisant en sorte qu'ils ne pouvaient plus vivre sous le même toit.


Ce qui motive les études d'Éli James en Philosophie puis en psychologie, c'est son illustre ancêtre (son arrière-arrière-grand-père), le père du pragmatisme aux États-Unis d'Amérique, le très célèbre psychologue et philosophe William James (1842-1910). Son intérêt pour le paranormal s'explique par le fait que son arrière-arrière-arrière-grand-père, le théologien Henry James Sr. (1811-1882) qui s'intéressait beaucoup au mystique suédois Emanuel Swedenborg (1688-1772). D'ailleurs, Éli lui-même lut les différents écrits de Swedenborg, fasciné comme l'était son ancêtre envers ce mystique.


En 2008, Éli James a quinze ans d'enseignement en psychologie (car, même s'il poursuit ses études en Philosophie, il obtient différentes charges de cours en psychologie pour financer ses études) et d'expérience clinique (puisqu'il a ouvert son propre cabinet). Dans le domaine de la Philosophie, il enseigne des cours d'introduction depuis sept ans.






3 octobre 2008, Grandview, Département de psychologie de l'Université Rockland, 15h00.


Un incendie est déclaré. Les pompiers et les ambulanciers sont heureusement rapidement arrivés. Une fois à l'extérieur de l'université, le corps d'Éli James est étendu sur une civière. Sa respiration et son rythme cardiaque sont très faibles, presque imperceptibles. Jim Clancy essaie diverses tentatives de réanimation, persistant à le ramener à la vie. L'âme du professeur est sortie de son corps, avec un sentiment de paix. Elle a conscience que son corps est mort et qu'elle est à côté de celui-ci. Elle voit les gens qui sont autour de son corps, l'ambulancier, un homme vers la quarantaine, qui s'efforce de le réanimer, mais aussi, un peu plus loin, les gens attroupés, les pompiers qui s'affairent à évacuer l'aile du Département de psychologie. L'âme remarque un peu à l'écart, une jeune femme de 29 ans qui la suit du regard. L'âme du professeur dit, étonnée « Vous me voyez? » La jeune femme (nulle autre que Mélinda Irina Eastman-Clancy) hoche discrètement de la tête. La jeune mère est accompagnée de ses enfants (Pavle, bientôt 3 ans ; Aiden, 2 ans et Marie-Anne, presqu'un an), qui regardent la scène, étonnés. Comme l'ambulancier parvient à réanimer le cœur du blessé, l'âme revient vers son corps. Il est aussitôt transporté vers l'hôpital Mercy, où il n'en sort qu'une semaine plus tard.


Au cours de son rétablissement, le professeur Éli James entend la voix d'une jeune femme à sa droite. C'est l'une de ses patiente, Fiona Raine, 25 ans, en traitement dans sa clinique depuis deux mois pour des problèmes de relations avec ses amis. Elle lui dit : « Monsieur Éli James, vous n'avez pas encore réglé mon cas. »

En ôtant les morceaux de plastique qui protègent ses yeux, il remarque qu'elle n'est pas à ses côtés.

Étonné, le psychologue tourne la tête vers la direction de la voix, vers sa droite. Il lui dit : « Mademoiselle Fiona Raine, êtes-vous un esprit ? Quand êtes-vous décédée ? »

La jeune femme répond d'un air triste : – Hélas, Monsieur le professeur, je suis morte il y a quelques heures, alors que je me trouvais dans le Département de psychologie. Je cherchais votre bureau, mais le feu m'a rattrapé...

– Donc, je peux entendre les esprits ? Au moins, nous pouvons continuer notre séance...

– Oui, exactement, Monsieur le professeur.

– Et bien, mademoiselle la blanche, voyons voir si votre âme est si pure que l'indique votre prénom (puisque Fiona dérive du celtique fionu, qui signifie blanc, ou encore du latin fides, foi). L'expression ne dit pas pour rien nomen est omen (le nom est un présage). J'essaie quand même de respecter l'expression nil nisi bonum (on ne dit rien de mauvais des défunts), sans aucun cynisme.

– Votre sens de l'humeur est très apprécié, comme toujours, Monsieur le professeur.

– Il n'y a de quoi. Mais, pour reprendre notre séance de thérapie, attendez au moins que je revienne au travail. Allongé sur un lit d'hôpital sans papier ni crayon, je ne pourrais pas prendre des notes de vos propos...

– D'accord, je comprends. Votre professionnalisme est vraiment touchant. À la prochaine alors !

Et Fiona Raine disparaît de l'ouïe du professeur James.



Au cours de son rétablissement, plusieurs pensées viennent à l'esprit du professeur Éli James. Il pense : « Il est en effet intéressant de vivre une expérience de mort imminente, au lieu toujours de ne lire les témoignages d'autrui. Je sais pourtant que ces expériences existent depuis que l'homme est homme. On peut dire que dès les débuts de l'histoire humaine, il y a toujours eu des expériences de mort imminente, ce qui n'est pas un phénomène si extraordinaire que ça... Pour avoir récemment vécu une EMI, je ne peux être qu'en désaccord avec les chercheurs qui disent que cette forme d'expérience est une hallucination, ou encore ceux qui affirment qu'elle entraîne une dissociation après. Oui, mais encore? Peut-être que l'expérience de mort imminente est vraiment un état de conscience altéré qui assure ma propre survie? Réfléchissons au sens de cette expérience. Je suis revenu parmi les vivants, car je ne dois pas quitter sitôt le monde ici-bas... Ça fait du sens... Je dois me marier et fonder une famille, en plus d'enseigner mes cours, afin de dénicher parmi les étudiants devant moi des bons futurs psy... D'accord... Comment expliquer que je puisse entendre les âmes errantes? Voyons donc! Les âmes errantes, comme le disait Socrate dans le Phédon, ce sont des âmes qui voltigent autour de leur tombeau car elles sont encore attachées au monde ici-bas. Mais encore? Bien, je peux les entendre, les âmes errantes, mais qu'est-ce que je dois faire? Je ne m'imagine quand même pas dire à mon prochain patient « Monsieur, un esprit vous dit patati et patata ». Il me prendra pour fou! D'accord, c'est vrai, pour être honnête, il faut le reconnaître que je suis psychologue parce que j'espère m'auto-analyser en même temps que je travaille avec un patient. Mais enfin! Éli! Concentre-toi! Qu'est-ce que je disais? Ah, oui! J'entends les âmes errantes, pour de vrai. Youpi! Peut-être que je mérite bien d'avoir un tel don. Sérieusement, je n"ai jamais soupçonné d'avoir un tel don au cours de mes introspections. Ce don ne peut s'expliquer que par mon EMI, car, dit-on, une telle expérience change la personnalité des individus qui la vivent. Une telle explication me rassure à vrai dire. Ainsi, je serais plus spirituel et moins matérialiste, ce qui me permettra d'être moins naïf envers les individus qui m'entourent. C'est bien! Mais revenons aux esprits : le fait que je puisse les entendre confirme les propos de Swedenborg, selon lequel les esprits et les vivants sont en contact réciproques, où les bons esprits influencent positivement les vivants, les mauvais négativement. Donc, il existe le monde visible sensible, matériel, et le monde spirituel, celui des esprits. Ce Monde des esprits est comme le nôtre, mais immatériel... Et nous revenons inévitablement à la dichotomie entre le sensible et le supra-sensible! Là, ça va trop loin! »

Après une courte pause, Éli James se dit à lui-même: « Toute âme est dominée, à chaque moment de son existence et sans interruption, par une tendance personnelle foncière de l'amour et de la haine, » il est question, selon Max Scheler, de « l'attitude fondamentale. » [Max Scheler, Le Saint, le Génie, le Héros, traduction de l'allemand par Emile Marmy, Lyon, Paris, Emmanuel Vitte, éditeur, 1958, p. 22] Et dans mon cas, qu'elle est-elle? Et comment expliquer que je me souvienne de mon expérience de mort imminente? Grâce à la mémoire pure selon Henri Bergson, où il est question de la rémémoration spontanée de n'importe quel événement. Rien n'est oublié et tout est connu. En gros, aucun secret possible! Après tout, Carl Gustav Jung avait raison au sujet de l'Inconscient collectif. »


Une fois sorti de l'hôpital Mercy, Éli reprend ses cours à l'Université. Et le train-train quotidien continue. Il poursuit (et termine lorsqu'il est à son cabinet) le cas de Fiona Raine; le psychologue se comporte comme s'il s'agit d'une conversation téléphonique avec la jeune femme. Heureuse, après trois semaines de séances, elle part dans la Lumière, laissant le psychiatre content d'avoir aidé Mademoiselle Raine.




Le 23 octobre 2008, Grandview, 11h.


Éli James, en route vers l'Université Rockland, car il donne un cours de l'Histoire de la psychologie. Un peu en retrait, dans une rue perpendiculaire, il remarque une jeune femme (Mélinda Irina Eastman-Clancy) et trois enfants en bas âge (Pavle, Aiden et Marie-Anne) en conversation animée avec un esprit errant. Les enfants regardent, étonnés, leur mère et son interlocuteur. Éli James entend la voix de l'esprit errant, une voix féminine, environ vers la trentaine, dire : « Je dois me venger de mon mari ! »

Mélinda : – Pourquoi ?

– Parce qu'il est responsable de ma mort !

Éli James intervient : – Pourquoi vous le tenez responsable de votre mort ?

Mélinda jette un regard étonné au psychologue et lui dit à voix basse : – Vous voyez les esprits ?

Éli James répond : – Je ne peux que les entendre. Je me présente: Éli James, professeur de psychologie et de Philosophie à l'Université Rockland. Et vous, Madame, à qui ai-je l'honneur de parler ?

– Je m'appelle Mélinda Eastman-Clancy et je suis propriétaire de la boutique d'antiquités The Same As It Never Was.

– Enchanté, Madame Eastman-Clancy, de faire votre connaissance ! Mais, si ce n'est pas indiscret, vous pouvez communiquer avec les âmes errantes ?

Mélinda hoche discrètement de la tête. Mais l'âme errante avec laquelle elle est auparavant en conversation a disparu.


Les deux adultes se saluent respectueusement, sous le regard étonné des enfants qui sont, eux, silencieux; cette première rencontre est le début de l'amitié de Mélinda et de Jim avec Éli James, qui trouve la jeune femme sympathique en raison d'un don commun. De plus, il lui demande conseil sur les manières d'aborder les âmes errantes qui recherchent son aide (compte tenu qu'il ne peut que les entendre, ce qui, par moment, le déconcentre dans ses cours). Mélinda lui donne certains conseils. Ainsi, Éli James peut accompagner les âmes errantes, car parler avec elles, c'est encore différent qu'avec un individu vivant, lorsqu'une âme est encore dans un corps.



Par la suite, comme le professeur ne se montre pas si arrogant, comme le sont habituellement les professeurs à l'université, la famille de Jim Clancy se lie d'amitié avec lui en novembre 2008. Éli James remplacera en quelque sorte Richard Payne, qui est entre-temps parti pour un voyage d'étude au Proche-Orient. Par ailleurs, Jim Clancy se confie à sa femme concernant son impression envers les deux professeurs : il trouve Éli James plus sympathique que Richard Payne, qui lui inspire une certaine méfiance, étant donné qu'il est quand même amoureux de Mélinda et qu'il est susceptible de pencher vers l'occultisme (ce qui expliquerait sa fascination pour l'anthropologie de l'occulte). Sa femme se rend à son avis : d'ailleurs, elle a remarqué depuis ses derniers temps que lorsqu'elle rendait visite à Richard Payne, les enfants pleuraient beaucoup et se comportaient de manière quelque peu malpolie à son égard, ce qu'un mal de tête après chaque visite lui confirme. De plus, elle voyait des sombres esprits autour de lui. « Au moins », commente Jim, « Éli James sera un ami universitaire plus fiable. Et nous avons le policier détective Carl Neely. » Et Mélinda l'embrasse sur les lèvres pour toutes réponses.


L'ambulancier présente plus tard, en avril 2009, Éli James au détective Carl Neely. Il s'étonne que le policier de Grandview a été le patient de son collègue Andrew Blackwood, car il sait qu'il a interné en psychiatrie la plupart de ses patients, alors que dans les faits, il soutire des informations des individus doués d'une capacité parapsychologique, afin de savoir des choses qu'il ne devrait pas savoir, puis les réduit à rien, en les tuant à petit feu avec des médicaments. Éli comprend ceci à partir d'une série de synchronicités qui surviennent lorsqu'il rencontre le policier : lorsqu'il revient à son bureau à l'Université, son collègue Blackwood déambule dans les couloirs du Département, comme une âme errante. C'est pourquoi Éli James craint pour Carl Neely et partage ses inquiétudes à Jim Clancy. Ce dernier le dit avec précaution à son ami policier, qui est perplexe.

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