Tu le paieras un jour William Afton
Michael poussa la porte du bureau de son père, dépité. William, occupé à travailler sur la paperasse, leva un œil vers lui et tira la grimace. L'uniforme rose de son fils était couvert d'une bouillie verdâtre où transparaissait encore quelques morceaux. Le vomi d'enfant, c'était une tradition familiale dans la pizzéria. Tous les employés y étaient passés. William se rappelait encore de la tête de Scott la première fois où une petite fille avait régurgité sa pizza fraichement avalée au moment où il la montait sur scène pour faire une photo avec Fredbear. Le bon vieux temps où tout était plus facile...
Le jeune homme attrapa une lingette et ramassa, dégoûté. William le regarda lutter pendant un moment avant de prendre la parole.
"Il me reste une chemise de rechange dans mon casier. Tu peux la prendre."
Michael lui lança un regard sombre qui hurlait "Et tu ne pouvais pas le dire plus tôt ?" qui fit jubiler son père pour quelques secondes. Il s'avança vers le casier et en sortit une chemise violette. William n'avait jamais remarqué à quel point il lui ressemblait avant qu'il ne l'enfile. Les cheveux noirs qui bouclaient au bout, le profil au nez trop pointu et au menton proéminent... C'était son portrait craché. Il resta un instant songeur.
"Eh, et si tu laissais tomber la salle pour le moment ? Ça te dirait de m'aider à faire la maintenance de Toy Chica ?
— Pour de vrai ? Tu ne vas pas t'énerver si je raccroche mal un câble ? se moqua-t-il.
— Il faut bien démarrer quelque part, pas vrai ? Et puis j'en ai marre de ces papiers. Si j'ai embauché Scott à la base, c'est pour qu'il s'en charge à ma place. J'avais besoin d'un larbin.
— Ne sois pas méchant avec, le pauvre fait ce qu'il peut.
— Oui, tu as raison... Au moins, lui ne tamponne pas ma voiture dans des panneaux publics.
— Ah, ah, très drôle."
William lâcha son stylo de manière dramatique et accompagna son rejeton vers la salle principale. Depuis qu'il avait jeté la Marionnette au sous-sol, il y avait de ça trois jours, il se sentait plus détendu et avait retrouvé le sourire. L'activité nocturne des robots n'avait pas cessée, ça aurait été trop facile, mais ils étaient beaucoup moins actif. Les vieux robots restaient dans leur réserve, les autres erraient sans rien faire de pièce en pièce. Ils saluaient brièvement Jeremy avant de disparaître ailleurs. Pour quelqu'un sans intelligence, il était quand même vachement doué pour les repousser. Comme lui, il avait opté pour le masque de Freddy. Il fonctionnait parfaitement contre les Toys, mais un peu moins contre les autres. Une chance pour lui qu'ils s'étaient calmés. Ce n'était de toute manière pas comme s'ils lui en voulaient vraiment. William savait parfaitement qu'il était leur cible.
La salle était presque vide en ce milieu d'après-midi. Les plus jeunes étaient encore à l'école. Seul un groupe d'adolescents était attablé et se chamaillait joyeusement, sous le regard bienveillant de Scott qui se pliait en quatre pour les aider. Une mère et ses deux petites jumelles jouaient avec les restes de Mangle. L'une d'elle était recouverte de tâches vertes-jaunes caractéristiques. Au regard que lui lança Michael, il comprit qui était la coupable.
Les deux hommes s'arrêtèrent devant la scène principale. Ils récupérèrent la malle à outils cachée derrière les rideaux et s'approcha de Chica. Récemment, un magazine pornographique l'avait élu "Robot sexy de l'année 1987". William s'en était un peu offusqué et leur avait collé un procès aux fesses pour avoir ne pas que son nom soit attaché à une secte de fanatiques fantasmant sur des relations sexuelles avec des morceaux de métal. Quand on savait de plus ce qui se cachait dans les dits-morceaux de métal... Il en frissonna encore de dégoût.
"Tu commences ? demanda-t-il à Michael. On va faire une maintenance de ses parties internes. Ouvre-la."
Michael hocha la tête. Il détacha le bec de Chica, puis appuya sur un bouton localisé dans sa mâchoire. Un petit "clic !" se fit entendre et son ventre s'entrouvrit. Le jeune homme tira la pièce de métal pour révéler l'endosquelette. William le laissa faire le nettoyage et se contenta de lui donner quelques conseils pour s'améliorer. Après ça, le roboticien s'occupa de changer quelques pièces obsolètes. Il préférait encore se charger de ce côté-là pour éviter les mauvais branchements qui pouvaient parfois bloquer la boîte de commandes vocales du robot. Enfin, il laissa Michael opérer la réinitialisation.
Il referma le ventre du robot, puis attrapa son bec. Au moment où il leva les bras pour le remettre sur son visage, le robot leva le bras et l'attrapa au cou.
"Criminel ! Criminel ! Criminel ! commença-t-elle à hurler."
Le groupe d'adolescents se retourna, curieux. William frappa le bras du robot avec sa clé à molette, sans succès. Toy Chica serra la prise sur la gorge du garçon, alors que ses yeux viraient au rouge. Toy Freddy et Toy Bonnie tournèrent à leur tour la tête vers eux.
"Merde, merde, merde... murmura William. Putain, pas encore..."
Michael suffoquait, quelques centimètres au-dessus du vide. William se retourna. Il courut contre le mur et arracha la hache à incendie du mur. Il l'écrasa ensuite sur le bras du robot et lui trancha net l'avant-bras. La prise se relâcha et Michael retomba à terre. William l'agrippa par un bras et le fit reculer. Toy Bonnie ne les quitta pas du regard puis, tranquillement, quitta la scène. Scott, qui avait rejoint les deux hommes, prit rapidement les choses en main.
"Sortez d'ici, cria-t-il aux clients encore présents. Allez attendre dehors. Nos robots ont actuellement un problème technique, mais ce n'est rien de grave !"
Au loin, une porte claqua. Des pas rapides se firent entendre avant que Foxy, à quatre pattes, ne se jette sur William. Le gérant tomba à la renverse. Les adolescents se mirent à hurler de peur, tout comme la mère et ses deux enfants. William évita un coup de crochet et donna un grand coup de pied dans la carcasse métallique pour se dégager. Scott attrapa un extincteur et arrosa Toy Freddy qui avait lui aussi commencé à bouger sur scène. C'était un cauchemar.
"Il y en a d'autres qui arrivent ! cria Michael. Les anciens se sont activés !"
En effet, Freddy, Chica et Bonnie arrivaient du hall principal. Ils coupèrent toutes retraites aux clients paniqués, qui rebroussèrent chemin pour revenir au milieu de la salle. Jeremy choisit pile ce moment pour entrer par la porte de la cuisine. Toy Bonnie le saisit au col et le balança à travers la pièce aux pieds de Scott.
Toujours au corps à corps avec Foxy, William essayait désormais d'éviter les coups de dents. Du coin de l'œil, il aperçut Mangle se redresser de l'autre côté de la pièce. Il ne céda pas à la panique et attrapa à deux mains le crochet. Il le plia sur la gauche, le brisa, et le jeta à l'autre bout de la pièce. Cela ne ralentit pas le renard pour autant. Scott déboula de nulle part, un balai à la main, et l'utilisa comme bélier pour faire fuir le robot. Foxy tomba sur le côté, le balai planté dans sa poitrine. Il grésilla et ne réussit plus à aligner ses mouvements correctement. William attrapa la main de Scott et se remit sur ses pieds.
"On doit partir d'ici ! Ils sont devenus fous !"
Toy Chica continuait de hurler "Criminel" dans sa direction avec son unique bras. A ses côtés, Toy Freddy commençait lui aussi à s'exciter et regarder autour de lui. Les adolescents hurlaient alors que Bonnie traversait calmement le hall vers eux.
"Tous dans la cuisine ! Prenez la sortie de secours !"
Les clients ne se firent pas attendre. Ils évitèrent Bonnie et tracèrent leur chemin, encouragés par Michael qui tenait Toy Bonnie à l'écart avec un extincteur allumé. L'eau et le métal produisaient des étincelles, mais ce n'était pas le plus urgent pour l'instant. Scott attrapa les bras de Jeremy et de William et les tira à leur tour vers la sortie. Une ombre passa au-dessus d'eux, trop rapidement pour que William n'eut le temps de bien la voir. Alerté, il fit volte-face.
Mangle avait disparu. Il tourna la tête dans tous les sens, à la recherche du robot, quand Jeremy se mit à hurler.
"Mike ! Attention !"
Le rouquin se jeta sur le jeune homme et lui rentra dedans pour l'écarter du chemin au moment où Mangle, accrochée au plafond comme une araignée, attaquait à une vitesse fulgurante. Les crocs d'acier se refermèrent sur le crâne de Jeremy dans un bruit d'œuf cassé. Scott hurla d'horreur et recula d'un pas, tremblant. Abasourdi, William ne put lâcher des yeux le corps qui s'écroula à terre. Le haut de sa tête avait été broyé. Il était mort. A côté de lui, Michael, les mains sur la bouche, pleurait. Choqué, il avait reçu les éclaboussures de sang sur le visage et regardait maintenant le gardien de nuit au sol, inanimé.
"On ne peut rien faire pour lui, venez, répliqua froidement William."
Il poussa Scott vers la sortie, puis aida son fils à se relever. Il l'accompagna dehors et referma la porte derrière lui, juste au moment où Freddy, au bout de la pièce, lâchait un rire guttural.
La police arrivait, alertée par un des clients qui avait foncé vers la cabine téléphonique la plus proche. Secoués, les adolescents et la mère célibataire étaient assis dans un coin, tremblants. Michael se laissa tomber contre le mur et éclata en sanglots, Scott s'installa à côté de lui et essaya d'essuyer le sang sur son visage avec un vieux mouchoir. Seul William se tenait debout, complètement déphasé avec leur réaction. Il les regardait tous, choqués et en larmes, mais ne ressentait rien. Comme eux, il devrait pourtant bien ressentir quelque chose ! Un homme venait de mourir sous ses yeux ! Et pourtant... Il s'en fichait. C'était exactement le terme. C'était comme si rien ne s'était produit. Ou plutôt comme si tout ce qui s'était produit était normal.
Ce qui l'intéressait davantage était ce qui avait poussé les robots à agir aussi violemment d'un seul coup. Il ne mit pas longtemps à faire le rapprochement et un fin sourire étira ses lèvres. Ils n'avaient pas apprécié que William se débarrasse de leur gourou. Tant mieux. Ça voulait dire que ça fonctionnait. Il avait réussi à obtenir une nouvelle réaction de leur part. Il ne restait plus qu'à analyser et s'adapter, comme toujours.
Clay Burke se précipita dans leur direction dans son costume d'officier.
"Tout va bien ? Il y a des blessés ?
— Tous les clients sont sortis, répondit William d'une voix froide. En revanche, il y a un employé qui s'est fait mordre au visage à l'intérieur par un des robots. Mais ce n'est pas une bonne idée d'envoyer vos hommes à l'intérieur tout de suite."
Comme pour appuyer son propos, quelque chose donna un coup dans la porte de métal fermée. Scott sursauta, tout comme le policier. Il n'écouta pas et courut appeler ses hommes en renfort. William secoua la tête. En quelques minutes, des coups de feu et des cris envahirent l'espace. Le gérant garda le silence, yeux dans les yeux avec Scott, qui le dévisageait, les sourcils froncés. William ne dit rien, mais il sut que quelque chose venait de changer dans ses yeux. Quelque chose qui ne pourrait pas être réparé.
"William, qu'est-ce que tu as fait ? murmura-t-il à voix basse."
Le gérant l'ignora et tourna les talons pour gagner le parking, où les premiers policiers, gravement blessés, se repliaient. Il resta un moment yeux dans les yeux avec Freddy, qui l'observait à travers la vitre. Il lui sourit et s'approcha tranquillement du verre. Les yeux de l'ours virèrent au rouge et il tenta de le saisir, en vain. William se tenait trop loin.
"Profitez bien, dit-il à l'ours. Si je suis arrêté aujourd'hui, vous ne pourrez plus jamais m'atteindre. Vous resterez coincé ici à jamais, et c'est tout ce que vous aurez mérité. Et tu veux que je te dise, mon vieux ? Je vivrai parfaitement avec ça sur la conscience. Si je devais le refaire, je n'hésiterais pas une seconde."
Un grognement de colère retentit. Il se retourna. Georges, Golden Freddy, se tenait en face de lui. William ne cilla pas, contrairement aux policiers qui bondirent en arrière.
"Je n'ai plus peur de toi, dit William. Je n'ai plus peur d'aucun d'entre vous."
L'ours le regarda encore quelques instants, puis disparut. Alors que le chaos continuait de se répandre autour de lui, William sourit, comme encore jamais auparavant. Après tout, c'était une merveilleuse journée. Ils avaient passé tout ce temps à le faire passer pour un monstre alors que demain, aux yeux du monde, ce seraient eux que l'on pointerait du doigt. Il se fichait bien de ce qu'il allait advenir. Tout ce qui allait se produire était entièrement de la faute des enfants.