L'Elue

On est à l'entrée du désert. Et le blondinet est devant moi. Certes, il a cessé de rire mais je vois bien au fond de ses yeux bleus profonds qu'il y avait tout de même une pointe de moquerie. Je me retiens donc de lui en coller une et tente de le contourner. Cependant, il saisit mon bras avec agilité et déclare:

"- Je suis désolé de vous avoir fait peur et de m'être moqué de vous."

Sur ses lèvres, je peux nettement apercevoir l'ombre d'un sourire moqueur. J'ai envie de le gifler. Quel hypocrite! Il est en train de se moquer de moi et m'annonce qu'il est désolé. C'est l'hôpital qui se fout de la charité! Je lui fais part de ma façon de penser avec une certaine ironie dans la voix:

"- Vous me dites que vous êtes désolé?! J'y crois pas... Vous êtes vraiment un hypocrite. Votre regard affiche tout le contraire alors vos excuses, vous vous les gardez -pour rester polie-.

- Comment ça? demande celui-ci l'air faussement étonné.

- Vous me dites que vous êtes désolé avec un grand sourire aux lèvres -je le caricature avec ironie- et avec des yeux qui veulent tout dire sauf que vous êtes désolé. Donc excusez moi mais je dois..."

Et là, je m'interromps. Je viens de faire une grosse, mais alors très grosse boulette. J'avais l'occasion rêvée de le remettre à sa place. Et au lieu de ça, je me lance dans un discours qui n'a absolument aucun sens. Je m'explique. Je m'apprêtais à dire que je devais aller quelque part. Seulement, je n'ai nul part ou aller. Bien que je me fous de ce que cet imbécile peut penser, il doit sûrement croire que je suis une grosse mytho pommée (bien sûr, seul le pommée est valable).

Je tourne alors la tête pour regarder les alentours avec une petite (mais alors très petite) pointe de désespoir. Oh, bien sûr, j'ai bien une idée d'un endroit ou me rendre. Je me suis bien souvenue d'un palais de glace. Mais bon, il se trouve en haut d'une montagne enneigée alors étant donné que l'on se trouve dans le désert, je ne fais pas trop d'illusion. Au nom de tous les Dieux, faites que j'aperçoive ne serait-ce que l'ombre d'une montagne enneigée.

Mais bien sûr, rien à l'horizon. C'est pourquoi avec beaucoup d'agacement cette fois-ci, je tourne de nouveau la tête en sa direction. Mon agacement finit par se transformer en colère quand j'aperçois au fond de ses yeux bleus foncés un pointe de moquerie. Il semble vraiment s'amuser de cette situation. Et il me confirme tout ça en demande avec un faux air innocent:

"- Vous devez?"

Raah!! Qu'est ce qu'il me gonfle! Qu'est ce qu'il me veut à la fin?! Parce que quand on regarde bien, depuis le début, c'est lui qui me cherche. OK, zen. Il ne faut pas que je m'énerve. C'est pourquoi j'ignore sa remarque, respire un bon coup et me dégage de son emprise. Suite à ça, je me dirige vers le chemin de la mort (le désert quoi). Action totalement puérile de ma part, vous noterez. Mais je n'ai pas vraiment envie de réfléchir et encore moins envie de me prendre la tête avec un idiot que je ne connais même pas. Je vais peut être mourir, certes, mais c'est toujours mieux que de rester avec lui. Et puis, ce n'est pas comme si je ne sais pas ou aller. Je vais me répéter, je sais. Mais il le faut. J'ai besoin d'oublier l'autre et puis, cela me donnera peut être des pistes qui sais.

Tout d'abord, ce palais de glace. Il doit être sûrement loin. Très loin. Mais si ce palais de glace est dans une montagne enneigée donc par déduction, dans un endroit froid, pourquoi je me retrouve dans le désert? Est-ce possible que j'arrive dans ce palais vivante? Non bien sûr que non. C'est même improbable. Même Liam dit que je n'ai pas assez de forces, sinon il ne m'aurait jamais proposé de rester. Et puis je lui ai dit que je resterais, je ne vais pas partir comme ça, sans même lui dire au revoir. Oula! Je viens de dériver de nouveau vers Liam.

C'est pourquoi je fais demi-tour pour aller me disputer avec l'imbécile. Je préfère à la limite cette situation. Je me suis promise de ne plus penser à Liam et je compte bien tenir cette promesse. Et ce, même si je dois avoir un horrible mal de crâne par la suite. J'arrive à la hauteur du blondinet. Il a dû le pressentir car il me regarde, victorieux. Quoi que... Liam mérite t'il que je me dispute avec un inconnu? Non, bien évidemment car je suis attirée par lui alors que c'est à sens unique. Mais je me suis fait une promesse et je compte bien la tenir. Tiens voila une facette de moi que je découvre -ou redécouvre-, il faut absolument que je tienne mes promesses, même envers moi même. Et là, le crétin me donne tout à coup une bonne raison de partir:

"- Je savais que tu reviendrais, tu ne peux pas te passer de moi, me fait celui-ci avec un clin d'œil.

- Tu veux parier? le défis je alors.

- Défi relevé."

C'est pourquoi je lève ma tête avec beaucoup d'honneur et fais demi-tour, fais ainsi virevolter le bout de chiffon que je porte sur moi. J'ai un peu honte de porter cette chose que moi, vu la sortie que je viens de faire. Mais bon, je me suis habillée à la hauteur de ce type. C'est pourquoi je me dirige vers le désert et essaye d'estimer le temps qu'il me reste à vivre. Deux jours. Ou peut être bien trois sachant que j'ai un peu bu (pas d'alcool je précise, seulement du liquide vraiment très amer). Oui mais si je tiens compte du fait que je n'ai pas encore retrouvée toutes mes forces, je peux m'estimer heureuse si je tiens deux jours et demi. Et encore je suis gentille. Parce que si je tiens compte du fait que je n'ai pas manger, ça peux facilement me faire deux jours. Bon allez deux jours et un quart. Tandis que je songe au nombre de jours qu'il me reste à vivre, je sens que l'on me retiens par le bras.

"- C'est bon, vous gagnez ce pari, avoua le blond. Maintenant, s'il vous plaît, ne partez pas. Je vous assure que je suis vraiment désolé. Seulement, comment pouvais-je deviner que vous étiez si sensible? J'ai beaucoup de talent mais la devinette n'en fait pas partie. Et puis je ne pensais pas que...

- Arrête, ordonne alors une voix dans son dos."

Tout comme moi, il semble surpris. Apparemment, il voulait encore profiter de cette conversation qui l'amuse beaucoup tandis qu'elle m’énerve énormément. Il se retourne, me lâchant ainsi pour dévisager la personne qui vient de lui donner cet ordre. C'est une très belle femme, environ l'âge de Liam. Elle a de très belles boucles brunes qui lui tombent sur les épaules. Elle porte une robe noire, comme quasiment toutes les femmes que j'ai aperçus. Apparemment, il ne semble pas heureux de la voir.

"- C'est bon je rigole avec elle, se défends l'inconnu. Tu connais l'humour avec un grand H?"

Pour toute réponse, elle se contente de le foudroyer du regard avec ses yeux de couleur noisette. Quand à lui, je peux voir qu'il a de nouveau ressortit son sourire moqueur. La femme le menace:

"- Je te préviens, si il lui arrive quoi que ce soit par ta faute, je te fais écarteler. Et tu sais que j'en suis capable.

- Dois-je prendre ça comme une menace? riposta l'imbécile sur un ton mi sarcastique, mi menaçant.

- Prends ça comme tu veux, je m'en fous complètement. Je te préviens c'est tout. Il est hors de question que je risque la vie de quoi que ce soit simplement parce que tu décide de soit disant blaguer avec cette femme. Car je pense que le terme blaguer est un terme très inapproprié étant donné que c'est visiblement à sens unique. Mais une chose est très claire et t'a intérêt à te le rentrer dans le crâne. On a besoin d'elle. Maintenant, va faire ce que tu as à faire. Je pense qu'elle sait se débrouiller.

- Depuis quand tu me donnes des ordres? s'énerve l'inconnu. En plus tu te permet de juger alors que tu n'étais même pas là.

- La seule chose que je juge, c'est ce que j'ai vue. Et là, j'ai vue cette femme sur le point de t'en retourner une alors que tu souriais bêtement. Alors, dis toi que je viens de t'éviter une humiliation."

J'observe avec beaucoup d'attention ce pseudo-duel. Cette femme a beaucoup de répartie et rien que pour cela, elle a tout mon respect. Je vois alors le sourire de l'inconnu disparaître avant qu'il me jette un regard noir. Je le lui rends avec le sourire le plus moqueur que je peux. Sur ce, celui-ci lève la tête, regarde la femme de haut et retourne vers son village. Je le regarde s'éloigner avant d'observer la femme. Elle pousse un soupir.

"- Décidément, c'est vraiment un cas désespéré..."

Suite à cette déclaration, je ne peux m'empêcher d'éclater de rire. La femme fait de même avant de me tendre une main et se présenter:

"- Moi, c'est Caroline.

- Aliyah, enchantée, lui dis je.

- Je suis désolé qu'il vous ait importunée.

- Oh, ne vous en faites pas, au bout d'un moment je me serais défendue.

- Liam m'a expliqué qu'il vous avait retrouvée dans le désert. Je vais m'occuper de vous, ne vous inquiétez pas. Vous n'allez pas rester avec cette serpillière toute la journée, si?"

Tandis qu'elle m'attrape par la main pour m'entraîner en direction du village, je ne peux m'empêcher de sourire. Finalement, je ne vais pas mourir tout de suite...