Ceux qui m’ont appris à sourire (The Dark Love - Cyk version)

Chapitre 15 : Artus Borg

3712 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 06/01/2024 15:36

Chapitre 15

ooOoo Artus Borg ooOoo


Le tintement de la petite clochette accrochée à la porte accompagna l’entrée de Cyk chez le disquaire. Cyril frictionnait ses mains pour les réchauffer. Les vacances de Noël approchaient et la froidure arrivait en prélude.

— Salut Dai, lança-t-il tout en retirant ses gants.

— Salut Cyk. Comment va ton père ? Ça fait un moment qu’il n’est pas passé.

— Ça va, il dit qu’il fait trop froid pour sortir.

— Il va nous sortir que son fauteuil fonctionne au diesel aussi ?

La réplique de Dai lui arracha un coin de rictus moqueur.

— Je suis venu chercher sa commande.

— J’te donne ça tout de suite, gamin.

Gamin, gamin, j’ai seize ans, merde…

Planté devant le comptoir, Cyril fit le tour de la boutique des yeux en attendant que Dai récupère sa réservation dans un placard. Il avait senti une présence dans la boutique en arrivant, il ne s’en était pas préoccupé jusqu’à ce qu’il remarque la familiarité de la silhouette au fond du magasin. Matt le reconnut à son tour, et lui adressa un petit signe de main amical, accompagné d’un de ses sourires enjôleurs. Ses cheveux devenaient de plus en plus foncés. La barbe naissante sous ses pommettes était désormais on ne peut plus visible, même de loin, mais contrairement à Cyk, il n’avait pas encore franchi l’étape du rasoir.

— Tout est là, annonça le propriétaire des lieux dans son dos.

Cyril vérifia rapidement le contenu du sac en papier craft que lui avait préparé Daiki.

— Merci Dai, fit-il distraitement avant d’empoigner la hanse et de s’enfoncer dans les allées étroites pour rejoindre son camarade.

Matthieu était en train d’explorer les bacs de musique classique. Lorsque Cyril arriva à son niveau, les deux garçons s’empressèrent de scruter mutuellement ce qu’ils étaient venus chercher, ni l’un ni l’autre ne faisait l’effort de dissimuler cette curiosité avide. Quatre pochettes en carton dépassaient de la petite ouverture du sachet de Cyk.

— T’écoute des vinyles ? demanda en premier Matthieu.

— C’est pour mon père. Je les écoute aussi, mais c’est lui le gros puriste.

— Cool. Mon père a la fibre musicale d’une méduse.

Une brève seconde, Cyril visualisa la tête de Cray Paris avec un vélum sur le visage et une série de tentacules translucides descendant de son cou.

Étonnant, quand on voit le petit prodige qu’il a engendré…

— Et encore, il paraît qu’elles sont sensibles aux fréquences sonores, elles, au moins, soupira Matt par-dessus son sourire affable.

— Et toi ? Tu écoutes…

Cyril se faisait violence pour faire la conversation. Il n’était toujours pas doué pour ça, mais pour une fois, il en avait follement envie. Il n’avait pas souvent l’occasion d’être en tête à tête avec Matthieu, or chaque rare entrevue s’avérait savoureuse. La vision improbable d’un disque de « La scala di seta » entre les mains de Matt mit à l’épreuve de la surprise sa tentative de badinage.

— De l’opéra ?

— Je cherche un cadeau pour Artus, mais j’y connais pas grand-chose.

Artus… Évidemment.

— Moi non plus, je dois l’admettre !

Cyril jeta un regard en biais à Dai qui venait de brailler. Il avait les oreilles affutées pour surprendre – ou plutôt épier – leur conversation depuis l’autre bout de la boutique. Certes, Matt lui avait demandé conseil avant l’arrivée de Cyk, mais il aurait pu laisser les deux lycéens discuter entre eux sans s’en mêler. Le jeune Willem en vint à se demander si son père n’avait pas évoqué son homosexualité auprès de son vieil ami.

— Y a juste les opéras russes que ma mère écoute, sauf qu’Artus les connait déjà tous, reprit Matt avec bonne humeur. On s’est fait un blind test l’autre jour, il est incollable question musique, c’est impressionnant. J’crois qu’il a une plus grosse culture que moi sur le sujet. Faut le faire !

Quelle modestie… Même si c’est vrai.

— Désolé de ne pas pouvoir t’aider d’avantage ! cria à nouveau Dai.

— Ça ira, vous en faites pas !

— Tu devrais plutôt lui offrir une compil, intervint Cyril en baragouinant, espérant que Dai le fouineur ne les entende plus.

— Ça fait très années 90. Sur radiocassette tant que t’y es, plaisanta Matthieu.

Ça fait aussi très amoureux et très gay, mais vu que tu es les deux…

— Je dis ça comme ça, ronchonna Cyk dans un haussement d’épaules.

— C’est pas con, en fait. J’vais y réfléchir. Merci.

Matthieu reposa finalement son disque d’opéra et offrit un nouveau sourire sympathique à Cyril.

J’ai peur de me faire des films, mais je crois bien que quand il me sourit, à moi, c’est plus sincère qu’avec les autres. Je ne sais pas si c’est parce qu’il m’aime bien ou si c’est parce que je suis le seul à savoir certains trucs… Surtout un truc. Le truc.


oOo


Le lundi suivant, Cyril retrouva Matthieu au club de musique, ainsi que tous leurs compères mélomanes, y compris le nouvel acolyte de Matt.

Le garçon en question était un brun trapus, assez discret, limite hautain. Depuis leur rentrée en première, il fallait se lever de bonheur pour lui arracher un sourire. Il parlait peu avec les autres, hormis Matthieu. À certains égards, Cyril trouvait qu’ils se ressemblaient en termes d’introversion. Pour le reste, ils constituaient tout l’inverse l’un de l’autre.

Artus Borg… Pas mon genre, mais je dois reconnaître qu’il est beau gosse.

Le hasard des options avait placé le nouveau venu dans la classe que Matt. Les deux ados se destinant à une vie d’artiste, ils avaient pris énormément de matières littéraires et artistiques en commun. Matthieu ne le lâchait pas d’une semelle, et l’autre semblait apprécier sa présence. Starsky avait Hutch, Batman avait Robin, Frodon avait Sam, Matt, lui, avait Artus Borg. Quand Cyril les regardait, il ne pouvait s’empêcher de repenser à Alexandre, à l’époque où il lui collait aux basques. S’il se faisait appeler Chewbacca, l’autre n’avait pas l’étoffe d’un Han Solo. Tel un miroir déformant ou un filtre Instagram particulièrement efficace, là où Alex et Cyk constituaient un binôme de gros boloss, Artus et Matt ressemblaient à des héros de yaoï. La chaleur humaine de Matt contrastait bien avec la glaciale élégance d’Artus. Ses beaux yeux d’un bleu céruléen hypnotisaient les demoiselles qui s’en approchaient trop près. Son côté guindé passait pour de la timidité. Il jouait un peu de piano, mais son instrument principal était sa voix. Il projetait de devenir chanteur d’opéra. Cyril estimait qu’il avait la gueule de l’emploi. Il semblait fait pour porter un costume de pingouin et brailler en italien une chanson d’amour vieille de quatre siècles que personne ne comprenait plus. Plus de la moitié des filles du club étaient sous le charme de ce dieu du chant descendu sur terre, elles ne paraissaient toutefois pas aussi éprises que Matthieu… Cher avait Sonny, Yoko Ono avait John Lennon, Courtney Love avait Kurt Cobain, Matt, lui, avait Artus Borg.

Quand ils sont tous les deux, le reste du monde n’existe plus...

Dans leur trip musical, le duo de gandins ne remarquait nullement le regard ombrageux de Cyril figé sur eux et qui n’aurait pas manqué de les mettre mal à l’aise par son insistance. Matt n’avait d’yeux que pour Artus, ce n’était plus des étoiles qui les peuplaient, on y voyait des galaxies entières. Parler de fascination aurait été un euphémisme.

Cyk détestait ce qu’il ressentait. Il avait toujours été un peu envieux des autres garçons, de Théo et de Matt, notamment. Envieux de leur beauté, de leur volonté, de leur facilité à aller vers les autres, de leur capacité à se faire des amis. Lorsqu’il observait Artus et Matt, il ne reconnaissait pas cette vieille aigreur devenue familière. Non, là il montait d’un cran dans la convoitise : il éprouvait carrément de la jalousie. Il se trouvait pitoyable de ne pas mieux contrôler ses ressentiments.

Avec sa voix géniale, il m’a volé son sourire. C’est injuste…

Rongeant son frein en silence, Cyk s’obligea à écarter ses mauvaises pensées pour accorder son attention à leur professeure de musique.

— Comme vous le savez peut-être déjà : le conseil administratif et l’association des parents d’élèves sont tombés d’accord pour organiser un bal de Noël à partir de l’an prochain. J’ai proposé que nous jouions pour l’occasion et ils ont accepté. Dès la rentrée de janvier, nous allons donc préparer ce bal, en parallèle de notre concert de fin d’année.

Elle est vraiment au taquet, Koffler ne nous en demandais pas autant.

— Pour Noël, je veux que chacun d’entre vous choisisse une chanson et la jouer avec ses partenaires. Nous commencerons les répétitions dès la rentrée de janvier. Vous pouvez faire des groupes de deux, trois ou quatre, selon vos affinités et surtout votre courage, car vous allez devoir apprendre les chansons de vos amis en plus de nos œuvres collectives. Je ne veux pas de solo, et seuls les élèves de terminale sont dispensés, puisque vous aurez quitté l’établissement d’ici là.

Fais chier, je vais devoir faire équipe avec quelqu’un, ça va encore être une galère…

— Cyk ! Tu viens ?

Cyril secoua la tête et chercha la provenance de cette voix débordante d’enthousiasme qui venait de l’interpeller. Il l’avait reconnue, il était simplement trop perplexe pour tourner la tête dans la bonne direction au premier essai. Matthieu l’attendait, avec son large sourire confiant. Artus aussi le fixait attentivement, son regard clair demeurait insondable. Cyril s’approcha prudemment du binôme, telle une créature farouche, prête à s’enfuir au moindre bruit suspect. Matt n’attendit pas qu’il arrive jusqu’à eux pour appeler une autre personne.

— Hélène ! J’ai besoin de percussions !

— "Tu" as besoin ? releva la métalleuse en tordant ses lèvres recouvertes de grenat.

— Aller ! On va faire des trucs géniaux avec ma guitare électrique et la basse de Cyk. Il faudrait un clavier aussi. Tu peux jouer Artus ?

— Mal, je dois dire.

— Y a des trucs que tu fais mal ? le railla Matthieu.

— Je n’aime pas le sourire que tu prends quand tu me poses cette question.

— J’vais demander à Sakura.

— Woh woh minute papillon ! objecta Hélène. Si tu rajoutes une cinquième personne, ça veut dire cinq chansons différentes à apprendre.

— Ouais, et ?

Les trois camarades de Matthieu le dévisageaient de la tête aux pieds, son assurance était déstabilisante pour tous. Le leader improvisé auto-proclamé leva le bras avec entrain.

— M’dame ! On peut monter jusqu’à cinq ?

C’était quoi le surnom qu’ils lui ont donné l’an dernier ? Matt le jukebox, je crois.

— Tu veux un orchestre complet ? J’admire ton enthousiasme, Matt, mais vous êtes quatre, c’est déjà très bien, tempéra gentiment sa professeure.

— Dommage.

— Et respectez le choix de vos camarades… Oh, par contre, même si je vous laisse libres, essayez de choisir des morceaux compatibles avec l’esprit des fêtes. Des chansons enjouées et romantiques.

— Le hard-rock et le punk, c’est enjoué et romantique ? lança Matt la canaille.

— J’imagine que oui… répondit l’enseignante en retenant sa grimace.

Cyril jeta un coup d’œil discret à Artus sur le côté. De nature un peu austère, il restait moins radin en affabilités que lui, et chaque ébauche de sourire le rendait hautement séduisant, contrairement à Cyril qui pouvait passer pour un psychopathe lorsqu’il tentait d’avoir l’air aimable. Artus souriait, donc, tout en décortiquant du regard Matt en train de tenter d’embobiner leur enseignante avec son bagout insolent. Cyril finit par imiter Artus et se perdit dans la contemplation de Matthieu.

Comment il fait pour séduire tout le monde comme ça ? Les filles, les garçons, les profs…

Le souvenir de leur baiser échangé à l’ombre d’un grand chêne ressurgit sans crier gare, enflammant son cerveau et tout le reste de son corps à sa suite.

Faut vraiment que j’arrête de penser à ça…

Matthieu fut bien obligé d’admettre sa défaite face à la professeure, elle restait intransigeante sur le nombre. Les équipes furent finalement toutes constituées, et l’audacieux musicien de seize ans revint se planter devant ses partenaires, qu’il avait sélectionnés sans leur demander leur avis, partant du principe que le refus n’existait pas, en mode management persuasif.

— Alors ? Qu’est-ce qu’on joue les amis ? Cyk, ton idée ?

Cyk recula un peu ses épaules dans un sursaut maitrisé, il ne s’attendait pas à ce que Matt lui demande son avis en premier.

— Euh… Californication ?

— Oh oui, excellente idée de jouer Californication à l’école, ironisa Artus les bras croisés. C’est très romantique et très enjoué de surcroit.

— C’est la chanson préférée de mon père, se défendit Cyril ; son argument ne fit qu’empirer le ricanement d’Artus.

— Grand bien lui fasse, moi je ne veux pas de problème.

— Ne joue pas les poules mouillées, intervint Matt. Je valide son choix ! Super ligne de basse, Cyk, et ce sera parfait pour ta voix, Monsieur Ténor.

Artus détourna son attention de Cyk pour toiser Matthieu de son air hautain.

— Je rêve ou tu viens de me traiter de poule mouillée ?

— Je rêve ou tu viens de remettre en cause le choix de Cyk ? La prof a été formelle : chacun choisit sa chanson, les autres suivent.

— C’est un travail d’équipe, c’est ça ? soupira Artus.

— Ouaip. Et au pire, si tu as vraiment la trouille, je chanterai à ta place.

— Arrête de… Rah ! Tu as gagné ! Je la chanterai.

Ils se connaissent depuis quelques semaines à peine et on a l’impression de voir un vieux couple… C’est trop bizarre.

— Et d’ailleurs, quelle chanson d’opérette aurons-nous l’honneur d’interpréter pour le fabuleux Artus Borg ?

— Sky Full of Stars. C’est assez éloigné de la musique classique pour vous Môsieur Paris ?

— Tu sais qu’j’adore Coldplay, mais ça fait chier que la prof nous laisse pas jouer à cinq. J’aurais vraiment voulu un piano, et pt’être un violon.

— Tu te rends compte que tu es un grand malade ? le railla Artus.

— T’aime ça, avoue. Mozart à côté de moi, c’est du pipi d’chat !

— Je n’irais pas jusque-là…

— T’as pas ton troisième bras pour jouer piano et guitare en même temps, l’homme-orchestre ? se moqua Hélène.

— Si seulement ! Sky Full of Stars c’est bon pour vous ? demanda Matt, d’abord à Hélène.

— C’est pas c’que je joue le plus souvent mais pas de souci !

— Génial, et toi Cyk ? Tu pourras gérer ?

— Oui.

Le style télégraphique de sa réponse lâchée par sa voix bourrue jeta un léger froid. Cyril commençait déjà à se maudire intérieurement, mais contrairement à Hélène et Artus qui ne le connaissaient que depuis peu, Matthieu avait l’habitude de ses réactions taciturnes, il savait passer outre.

— Impec ! Ensuite, Hélène, tu veux qu’on joue quoi ?

— Bad romance.

Hein ?

— Ah ouais ? s’étonna Matthieu en traduisant la pensée de Cyk. Pas d’Iron Maiden ? Pas d’ACDC ? Même pas un petit Linkin Park ?

— Hey, j’ai le droit de me la jouer girly de temps en temps ! répliqua la métalleuse.

— Girly, c’est pas forcément l’mot qui me venait en premier.

— Vous me faites marcher ? intervint Artus dans une grimace dédaigneuse. Bad Romance ? Vous voulez que je chante Bad Romance ? Au lycée ?

— Ne fais pas ta poule mouillée qu’il a dit l’chef ! cria Hélène sans un atome de féminité.

On repassera pour le girly… Ma main à couper qu’elle se fout de sa gueule, en effet.

Artus ignora royalement l’intervention d’Hélène pour se concentrer sur Matthieu. D’une voix très lente, chargée de paternalisme, il produisit un :

— Matt…

— Je suis totalement pour ! C’est mieux que tout c’que j’aurais pu envisager ! Hélène, tu es un génie.

— Oh, merci ! Venant de toi, c’est flatteur.

— Tu te fous de moi ? insista Artus.

— Beaucoup moins que quand tu me parles de l’opéra. Ça va être énorme Artus, j’t’assure. Fais-moi confiance !

Artus accueillit sa déclaration avec un certain scepticisme, habilement résumé dans un long soupir plein de dramaturgie.

— Un jour, tu vas me demander de sauter d’une falaise en scandant ton « fais-moi confiance ».

— I believe I can fly, disait R. Kelly.

— Et toi Matt ? Tu as envie de jouer quoi ? fit Hélène en ignorant leurs jérémiades.

— T.G.I.F.

— Katy Petty ? Mais t’es sérieux ? lâcha Cyril.

Ok Cyk, c’est ridicule, mais t’aurais pu y réfléchir à deux fois avant de le dire comme ça, pour une fois que quelqu’un se montre sympa avec toi.

— Je ne m’attendais pas à ça non plus de ta part, reprit Artus avec son air pince-sans-rire. Les Spice Girls, ça ne t’inspirait pas davantage ?

— J’avoue qu’c’est pas trop mon style de base, mais ce que j’veux, c’est mettre le feu. Et là, mes amis, c’est plus un cocktail Molotov, c’est une putain de bombe atomique !

— La recette magique de Matthieu Paris : des chansons sur la drogue, le sexe et l’alcool…

— Vous oubliez le rock’n roll, Monsieur Borg.

— De la grande finesse, conclut l’apprenti chanteur.

— Justement. Pour l’occasion tu me feras le plaisir de sortir le bâton que t’as dans le cul avant de monter sur scène. C’est pas la Traviata.

— Oh, c’est très imagé comme métaphore, ça, bravo. C’est avec ça que tu as gagné ton concours de poésie au collège ? Tu as tenté les concours d’éloquence, sinon ?                                               

— Ne me mets pas au défi. Un jour j’écrirai un opéra, rien que pour toi.

— J’ai hâte de l’entendre.

Y en a un qui va mettre un genou à terre et supplier l’autre de l’épouser ou quoi ? Je sens même la détresse d’Hélène, je suis sûr qu’elle pense comme moi.

— S’il vous plaît ! Les voix ! appela leur enseignante. On va reprendre les exercices en chœurs.

— Madame, Messieurs, si vous voulez bien m’excuser…

Artus inclina abusivement sa tête pour les saluer de manière pompeuse, avant de rejoindre les autres jeunes choristes – hormis Matt, il était le seul garçon du club à oser pousser la chansonnette. Matt suivit du regard les mouvements de son ami. De l’avis de Cyk, il n’aurait pas été moins émerveillé devant les pyramides de Gizeh ou le Taj Mahal. Son sourire charmé se grima de malice lorsqu’il se détourna, enfin, vers Hélène.

— Bon. Maintenant qu’il est parti, tu peux nous dire pourquoi tu as choisi Bad Romance ?

Hélène vérifia à son tour qu’Artus était suffisamment éloigné pour répondre à Matthieu avec un large sourire goguenard.

— À l’origine, je voulais te proposer Thunderstruck, mais quand j’ai vu la réaction coincée de Mister Borg face à Californication, je me suis dit qu’un peu de Lady Gaga ça lui ferait les pieds.

— Ah ah ! Bien joué Hélène ! Excellent !

Matt serra le poing et le tendit à sa camarade pour un check complice.

Gagné, ils se foutent de sa gueule.

— J’ai hésité avec Born This Way, mais c’était too much.

— Ouais, là, j’crois que sa dignité ne s’en serait pas remise. Eh eh…

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