The Life Eaters

Chapitre 1 : Ka mea i ulu wikiwiki

10246 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour il y a environ 2 ans

CHAPITRE I

Ka mea i ulu wikiwiki

[La fille qui a grandi trop vite]


Les sons nombreux et inquiétants me parvinrent depuis l'obscurité. Indénombrables, innommables, il n'étaient que peine et tristesse. Quelques bips sonores émis par une machine aux ronflements artificiels, d'autres bips émis par une machine dessinant la mort approchante, des pleurs incessants, des tremblements de nervosité, des bips s'accélérant, des pas sur un sol lisse, une agitation nerveuse d'abeilles désireuses de faire leur métier, des bruits violents, des chocs électriques, des pleurs toujours plus nombreux, un bip répétitif qui quelques instants plus tôt était ponctuel devenant continu et alors surgirent les cris...

- Fern... Fern, fit une voix qui m'appelait à travers les ténèbres. Fern... Chérie..., ajouta cette voix rassurante et apaisante tandis que l'obscurité s'estompait.

Mes yeux, je les ouvris soudainement, lentement car saisie par l'éclairage artificiel. Mes oreilles entendirent immédiatement le ronflement mécanique constant. Elles relevèrent également le bruit caractéristique de l'agitation des personnes dans la même situation que moi. Devant moi, me regardant légèrement inquiet, apparut un homme aux cheveux très courts et à la barbe parfaitement taillée, le tout d'un noir corbeau qui ne pouvait égaler que le mien.

- Papa? appelai-je alors en le regardant.

- On va atterrir ma puce, me dit-il doucement. Tu dois t'attacher...

- Euh... Ok... Ok, répondis-je à mon père sur un ton plutôt embrumé.

Encore un cauchemar, j'en faisais souvent à l'époque, surtout en cas de stress. Mais quand je précise "encore un cauchemar", je devrais dire encore le même. C'était souvent, trop à mon propre goût, beaucoup trop. Ce cauchemar n'était rien d'autre que le pire événement de ma vie.

- Encore un cauchemar? demanda alors mon père en me regardant.

- À ton avis ? répondis-je immédiatement, un peu rapidement et froidement. Pardon...

- C'est pas grave, assura mon cher père plutôt compréhensif.

Me redressant dans mon siège, j'avais pû me consacrer au bouclage de ma ceinture, comme une bonne passagère d'avion de ligne se devait de le faire. J'avais également pris soin de replacer mes cheveux noirs plus longs du côté gauche, coupés très courts du côté droit; le tout, pour ne pas avoir l'air débrouillée. J'avais immédiatement penché la tête de l'autre côté du siège de mon père pour observer Jason, mon petit frère de presque six ans, une décennie de moins que moi. Il était assis sur son siège, fixant celui devant lui. Je m'étais ensuite penchée pour tendre le bras et lui toucher la jambe. Il tourna alors ma tête vers moi et me sourit, content de voir sa grande sœur se soucier de lui. Il avait l'air d'aller bien, tant mieux; peut-être avait-il dormi après tout, sans cauchemarder, du moins je l'espérais.

- Chers passagers et passagères, nous amorçons notre descente vers l'aéroport international d'Honolulu, lança soudainement la voix du personnel naviguant. Veuillez rejoindre vos sièges, rabattre les tablettes devant vous et vérifier que vos ceintures soient bien fixées. N'hésitez pas à signaler tout problème à notre personnel de bord. Notre atterrissage se fera à l'heure prévue.

Dès l'instant où j'avais eu tout le loisir d'enregistrer ces propos, je me suis quelque peu dépêchée de vérifier la solidité de la ceinture. Ce n'était pas la première fois pour moi que je prenais l'avion, peut-être la cinquième en réalité. D'ailleurs, j'étais venue à Hawaï à l'age de trois ans, en vacances mais cela ne m'empêchait pas pour autant d'être dans un état de stress avancé lors du décollage et de l'atterrissage... Ne dit-on pas que c'est là qu'il y a le plus d'accident? Et c'est prouvé ! Mon père, connaissant cette peur primale chez moi, saisit doucement ma main gauche et la serra en me regardant.

- Ne t'inquiètes pas Fern, dit-il doucement. L'expérience d'un pilote lui permet de tout gérer.

- Alors pourquoi on applaudit quand il réussit ? Lui signifier qu'on est vivant ? grommelai-je alors entre mes dents.

Je réalisai immédiatement avoir provoqué un petit rire chez mon père. Il tourna soudainement la tête vers mon jeune frère et j'en fus honteuse. Lui, il n'avait pas peur, il fixait le hublot avec impatience. Lui, c'était son premier vol et il n'avait pas l'air de comprendre que c'était définitif... Pas que ce soit son seul vol évidemment mais plutôt que nous ne partions pas en vacances. Je sursautai immédiatement quand je sentis les amortisseurs gigantesques de cet oiseau de métal encore plus gigantesque qui ne volait que par la volonté de ses immenses turbines. Je fermai alors les yeux et entamai une respiration contrôlée et constante, la fameuse respiration du petit chiot, la même que celle des femmes en plein accouchement.

- Les poussées contraires sont entrées en fonction, m'assura mon père. Les freins s'enclenchent également... Nous ralentissons, la piste est très longue, nous ne la dépasserons pas...

Heureusement qu'il était solide, je devais clairement m'atteler à lui broyer chacune de ses phalanges avec force et peur. Je pouvais bien évidemment sentir l'avion ralentir mais que se passerait-il si un des trains d'atterrissage exposait ? Nous mourrions sans doute... Ces peurs étaient naturelles, je ne devais pas être la seule passagère à l'imaginer. La carlingue ralentit alors de plus en plus avant de stopper complètement son mouvement, laissant les applaudissements prendre la place sonore des moteurs. Je soupirai de soulagement. Mon père passa sa main dans la partie longue de mes cheveux et m'embrassa le front.

- Tu vois? Ça c'est bien passé, m'assura mon père.

- Mesdames et Messieurs, nous sommes arrivés à Honolulu. Il est treize heures dix et la température extérieure est de trente-deux degrés. Pensez à visiter la plage de Waikiki et le cratère du Duamond Head. Bon séjour dans l'archipel d'Hawaï, nous souhaita le commandant de bord.

Je détachai immédiatement ma ceinture, comme si l'avion pouvait redécoller, avant de me lever. J'avais laissé à mon père le loisir d'ouvrir le réceptacle de cabine et me tendre nos sacs à moi et mon petit frère. Je pris immédiatement celui de ce dernier, un tout petit sac à dos majoritairement bleu et rouge et à l'effigie de son super-héros préféré, membre de l'écurie Marvel et connu sous le nom civil de Peter Parker. Depuis le fameux film d'animation, Spiderman faisait partie intégrante de nos vies. Je posai alors le sac sur les frêles épaules de Jason avant de saisir le mien. Aucune marque sur ce dernier, un simple sac à dos petit budget et vendu dans une grande enseigne de produits de sports bon marché sur lequel j'ai dessiné au feutre indélébile noir un symbole punk: le fameux No Future. Naturellement, je l'avais également agrémenté de quelques symboles de groupes de rock en tout genre. Je l'avais posé sur mes épaules en regardant mon père sortir le sien. Le sien laissait peu de doute quant à son passé militaire. En effet, il s'agissait tout bonnement d'un sac kaki typique de l'United States Marine Corps dans lequel il occupait le poste de Major. Major Hank Turtlebaum, affecté au NCIS, le Naval Criminal Investigative Service, celui mit en vedette dans la fameuse série éponyme. Et c'est d'ailleurs suite à une mutation de ce dernier au NCIS de Hawaï que nous avions quitté la Virginie où il travaillait dans le bâtiment principal du NCIS à Quantico. Nous l'avions suivi sans hésitation, et il nous en était reconnaissant. Je posai mes mains sur les épaules de Jason pour le retenir et l'empêcher de filer dans les travées de l'avion, patientant tout deux pendant que mon père vérifiait que nous n'avions rien oublié.

- On y va les enfants, précisa mon père en nous faisant signe d'avancer.

Je poussai alors doucement mon petit frère mais ce dernier préféra largement nous donner la main à notre père et à moi-même. Il devait sans doute être très largement inquiet quand même. Nous avions ensuite avancé vers les hôtesses près de la porte d'embarquement et nous la passâmes en saluant nos hôtesses. Cela devait être un métier difficile même si j'étais convaincue qu'elles ne vivaient pas toutes des aventures incroyables comme dans la série Flight Intendant. Le long cordon ombilical déversa alors ses passagers dans l'aéroport de l'île d'Oahu. Comme dans toutes les œuvres mettant en vedette cet archipel magnifique, seul état non relié au continent, nous fûmes accueillis par des danseuses plaçant des colliers de fleurs.

- Aloha! nous firent d'ailleurs ces fameuses danseuses.

- Merci, dis-je poliment.

- Restez près de moi, ordonna mon père préférant tenir ses enfants près de lui.

Nous avions donc dû continuer d'avancer avec la foule, nous dirigeant ainsi vers les bureaux de contrôle. Mon père chercha immédiatement son passeport dans ses poches.

- La poche arrière de ton sac, lui signifiai-je donc en soupirant et peu désireuse de rester là des heures.

- Merci ma puce, me fit mon père en attrapant son sac.

- Tu perdrais ta tête si elle n'était pas fixée, lui dis-je en riant.

Je fis avancer encore un peu mon frère quand je réalisai que notre bureau de contrôle comportait deux employés. Il s'agissait d'un homme et d'une femme, tout deux assez jeunes mais la mixité devait être utile en cas de fouilles.

- Venez les enfants, nous fit alors la dame.

Mon père, habitué à obéir à la hiérarchie en général, nous fit un simple mouvement de tête pour nous y autoriser et je poussai donc Jason vers le comptoir de la jeune femme.

- Bonjour Madame, dis-je poliment en retirant mon sac.

Je l'ouvris assez prestement, cherchant rapidement nos passeports à tout deux, c'était bien moi qui les transportait. Je les tendis tout deux à la dame en souriant poliment.

- Merci Mademoiselle, fit alors la dame avant de taper nos noms dans son ordinateur.

Il ne fallut que peu de temps pour qu'elle marque un temps d'arrêt. J'en compris immédiatement la raison en réalisant qu'elle était sans doute connectée aux services d'immigration et de population du gouvernement des États-Unis. En effet, elle devait avoir lu sur la ligne destinée à notre mère qu'elle était tout bonnement décédée. Cela avait été le plus grand drame de ma courte vie, survenu quatre ans auparavant. C'était sa mort qui hantait mes songes, provoquant des milliers de cauchemars depuis. Ma mère, Sandra, était décédée des suites d'une maladie douloureuse, la maladie du siècle : un cancer. C'était plus précisément un cancer au cerveau, plus précisément près de l'hypothalamus et totalement inopérable... Elle était décédée dans d'horribles souffrances que seules les analgésiques pouvaient enrayer. Cela m'avait alors plongée immédiatement dans le monde des adultes, il l'avait fallu. En réalité, je ne supportais plus les regards emplis de pitié que les gens nous jetaient, à nous les pauvres petits orphelins de mère. Je devais faire quelque chose et cela avait été de tenir ma famille à bras le corps, du haut de mes douze ans. Je devais m'occuper de Jason mais également des tâches ménagères à cause du métier de mon père, souvent en déplacement. Le ménage, la cuisine, les devoirs, tout y était passé... Je m'étais même mise à gérer les comptes et à remplir les déclarations d'impôts, prenant la suite de ma mère. Avec mon père, nous avions même dû lutter juridiquement contre mes grands-parents maternels qui voulaient nous obliger à partir vivre chez eux dans l'état de Washington. Une lutte dont nous nous serions bien passés mais qui avait poussé à mon isolement social. Je n'avais plus le temps de m'amuser et mes amis et amies m'avaient peu à peu tourné le dos. Je n'avais pas non plus de vie sentimentale, aucune place pour un petit ami n'était possible, ma vie de famille était bien trop compliquée ensuite. Et même mo' loisir fut abandonné alors que j'adorais pourtant la gymnastique rythmique et artistique que je pratiquais déjà en compétition. Je m'y entraînais encore parfois, en privé quand j'avais un moment de libre. C'était bien pour ça que j'étais contente de venir vivre à Hawaï, je ne perdais rien et j'allais même gagner une présence plus importante de mon père qui ne devrait plus quitter sans cesse le domicile familial pour ses enquêtes, elles auraient toutes lieu sur l'archipel. Malheureusement, ces regards remplis de gêne, je les vivrai sans doute encore longtemps.

- Fern, tu as seize ans et ton petit frère Jason, six ans, nous signifia l'employée de l'aéroport en faisant son travail.

- C'est bien ça, confirmai-je immédiatement.

- Tous les documents sont en ordre dans le dossier, précisa la femme avant de nous regarder.

Heureusement qu'ils l'étaient, j'avais passé un temps fou à les remplir tous ces documents, regroupant nos actes de naissance, nos certificats de domicile, les papiers de mutation de notre père, les dossiers médicaux également ainsi que des documents d'inscription dans les écoles locales. Un nombre d'heures assez effrayant, heureusement que je n'avais rien d'autre à faire en réalité.

- Je vais devoir vous poser des petites questions, dit-elle en sortant les documents remplis dans l'avion sur ce que nous transportions et s'agenouillant devant Jason après avoir fait le tour du bureau. Alors dis-moi Jason, tu ne transportes pas de nourriture ?

Jason la regarda avec attention et ne répondit pas, me poussant à grimacer. L'employée mit sans doute cela sur le compte de la timidité et posa une autre question.

- Dans ton joli sac, dit-elle immédiatement, tu n'as pas mis des fleurs ou de la nourriture fraîche ?

Je soupirai immédiatement avant de me placer à côté d'elle et devant mon frère, posant mon sac au sol. J'inspirai profondément avant de lever les mains devant moi. J'agitai alors mes mains et mes doigts, formant bien des formes devant lui.

- {La dame demande si tu as de la nourriture dans le sac}, signai-je alors dans le langage des signes que j'avais appris.

Voilà bien ce qu'était l'autre difficulté de notre vie de famille : Jason était sourd de naissance. Nous avions tous appris du mieux que nous pouvions et le plus rapidement possible le langage des signes, mon père avec beaucoup plus de difficulté et ne le maîtrisant toujours pas. Moi et Maman, nous l'avions assimilé très rapidement même si aujourd'hui, j'étais seule à pouvoir aider Jason. Je lui avais appris ce langage du mieux que je pouvais, ainsi que la lecture et l'écriture. Bon, Jason n'avait que six ans donc cela restait encore basique mais son langage des signes restait assez compréhensible.

- {J'ai que des gâteaux}, me signa rapidement Jason en réponse.

- Ho je..., hésita l'employée de l'aéroport.

- Mon frère est sourd de naissance, dis-je rapidement. Je vais traduire... Il a des gâteaux dans son sac.

- D'accord... Ils sont faits maison ? me demanda l'employée.

- Non, dis-je rapidement sans le demander vu que je n'en avais pas fait depuis un moment. Industriel.

- C'est parfait... Il n'a pas pris de plantes? demande ensuite la dame en regardant vers moi. Les petits prennent parfois des souvenirs.

- Ho d'accord, dis-je avant de fixer Jason. {Tu n'as pas pris de fleurs dans le jardin? Ou dans celui de Madame Pernell?} signai-je alors en évoquant notre voisine qui nous gardait lors des longues enquête de Papa.

Mon frère hocha simplement la tête. Au moins, les gens pouvaient le comprendre. Je regarde vers l'employée et j'attends la suite.

- Vous ne transportez rien de frais ? Des fruits ou des légumes ? Cela peut être dangereux pour l'écosystème à cause des éventuelles bactéries et insectes, me précisa l'employée.

- Non, j'avais bien lu les documents, précisai-je quand même. Jason a juste une bouteille d'eau mais elle est déjà vide.

Mon frère appuya sur mon bras pour m'alerter et je tournai la tête immédiatement.

- {J'ai fait une bêtise ?} demanda-t-il légèrement inquiet.

- {Mais non mon cœur, t'as rien fait... Elle fait son travail} précisai-je à mon petit frère.

- Un soucis ? demanda donc l'employée.

- Mon frère pense avoir fait une bêtise, dis-je en souriant et passant ma main dans ses cheveux blonds hérités de Maman. Mais vous pouvez lui parler vous savez? Parlez lui lentement pour qu'il puisse lire sur vos lèvres. Il apprend à le faire mais c'est encore difficile avec des étrangers.

- Ho... Tu es très sage, dit-elle en articulant trop chaque mot malgré tout et parlant un peu fort.

- Il ne vous entend pas, dis-je alors en le voyant sourire. Il est totalement sourd. Il ne peut pas être appareillé.

- Merde, je m'en veux..., dit elle en me faisant grimacer.

- Inutile Madame, j'ai l'habitude...

- J'ai vu l'année de décès de votre maman, tu as l'air d'être courageuse pour ton âge, me fit la dame en touchant mon bras avec sollicitude.

- Je n'ai pas eu le choix, dis-je simplement. { Jason, reste sage ok?}

- { D'accord} fit mon petit frère avant de signer un truc.

- { Jason... Signe plus lentement, s'il-te-plaît} fis-je immédiatement car il n'était pas ordonné dans ses signes.

- { Dois faire pipi!!!!} signa mon frère énervé.

- Vous avez des toilettes ? demandai-je immédiatement.

- Oui, viens, dit-elle doucement.

J'attrapai mon petit frère, passant derrière mon père en prononçant simplement le mot "toilettes" pour qu'il ne s'inquiète pas. Nous filâmes avec l'employée qui nous mena aux toilettes. Je laissai naturellement mon frère y aller tout seul, il était assez grand quand même.

- C'est facile à apprendre ? demanda l'employée pendant qu'on patientait.

- C'est un coup à prendre, ça se mémorise vite quand vous le pratiquez tous les jours.

Une fois le besoin pressant de Jason assouvi, nous retournâmes tout trois au bureau et mon père avait fini.

- Bienvenue à Hawaï, me précisa l'employée.

- Merci Madame, j'espère m'y plaire, précisai-je alors en rejoignant Papa.

Mon père nous regarda attentivement et nous sourit. Il souriait toujours quand il me voyait attentionnée envers Jason. Je savais aussi que je lui rappelais Maman tout simplement parce qu'après bien des évènements où elle lui manquait plus que d'habitude, comme le dernier anniversaire de Jason, il pleurait tout seul. En fait, il était tout simplement comme nous, perdu sans elle et complètement abattu. Un jour, je lui avais même dit qu'il pouvait essayer de rencontrer quelqu'un. Je ne le voulais pas en réalité mais je savais aussi qu'il pouvait en avoir besoin, ou au moins de savoir que je n'étais pas fermée à cette idée. Ce ne fut jamais le cas, j'ignorais même si il n'avait ne serait-ce qu'une aventure.

- Encore un peu de temps, précisa mon père en s'agenouillant devant Jason. {On doit attendre qu'on vienne nous attraper} signa mon père.

Je le regardai dubitative, cherchant à comprendre ce qu'il signait. Jason ne semblait pas franchement comprendre non plus.

- Mais non Papa, comme ça, dis-je en réalisant le propos et modifiant la position de ses mains, pour placer ses doigts devant son nez et les plier deux fois. {Chercher} Chercher, dis-je alors.

- Je suis vraiment nul... Je suis incapable de parler à mon fils, grommela alors mon père.

- Papa, quand tu rentres du travail, Jason est presque couché, précisai-je à mon père. C'est normal que tu ne pratiques pas...

- Oui mais toi, tu y arrives, dit-il simplement.

- Papa, je passe tout mon temps avec lui, je pratique constamment, assurai-je à mon père. Et Maman m'avait appris...

- Je sais, fit mon père avec un pincement aux lèvres.

J'avais alors levé les yeux vers la foule, histoire de ne pas voir sa tristesse si profonde. Je vis alors, au beau milieu de la foule de passagers et d'accompagnants, un homme en uniforme et portant un panneau. Dessus, écrites en majuscules, figuraient les lettres suivantes : Major Turtlebaum et famille. Je dévisageai alors le jeune homme portant ce panneau : il semblait jeune, une vingtaine d'années tout au plus, caucasien mais sans doute un habitant de longue date de l'archipel car sa peau était parfaitement bronzée qui achevait le tableau de ses yeux sombres. Il semblait également assez musclé mais portait par contre une coupe de cheveux réglementaires.

- Euh Papa... Ils ont envoyé un soldat, dis-je en le montrant du doigt malgré que ce soit quand même très impoli.

- Hein? fait-il étonné en se retournant. Ha ben voilà notre taxi. Je prends vos sacs?

- Ça ira Papa..., dis-je avant de regarder Jason qui fixait la foule et de lui tapoter la tête. {Arrête de rêver Jason, on y va}

- {C'est un soldat !} signa-t-il enjoué.

Mon père vouait un culte au métier de Papa, peut-être parce qu'il était tout simplement notre père mais il fallait reconnaître que Jason aimait se déguiser en soldat. Ce n'était pas trop important, nous devions rejoindre cet homme. Mon père leva la main pour attirer son attention et il se mit au garde à vous avant de décliner son identité.

- Second Lieutenant Zane Carmichael, Major, fit-il en posant sa main devant son front. J'ai été affecté à votre service Monsieur.

- Repos Second Lieutenant, fit mon père pour l'obliger à rompre le garde à vous. À mon service ?

- Je suis votre équipier dans l'unité du NCIS Monsieur, dit-il calmement.

- D'accord... Première affectation au sein du NCIS? demanda mon père.

- Oui Major. J'étais affecté à bord du USS North Carolina basé à Pearl Harbor, confirma le jeune soldat.

- Sous marinier? Affectation difficile, fit mon père avant de regarder vers nous. Ma fille Fern et mon fils Jason.

- Enchanté, fit le soldat en nous regardant et souriant devant le salut de Jason. Un futur soldat hein?

- Mon frère est sourd, précisai-je. Il ne pourra pas.

- Veuillez me pardonner Mademoiselle Turtlebaum, fait alors le soldat.

- Ce n'est rien... Fern suffira, dis-je alors amusée.

- Je vous emmène directement à votre domicile Major, fit-il ensuite à mon père en se plaçant sur le côté.

- Est-ce bien à Honolulu? demanda immédiatement mon père.

- Oui Major, depuis la découverte des niveaux de pollution de la baie de Pearl Harbor, il est monnaie courante d'héberger les familles hors base, expliqua le second lieutenant d'un ton robotique.

- Carmichael..., marmonna mon père. Au NCIS, nous ne sommes pas aussi protocolaire, nous restons des militaire mais la voie hiérarchique est allégée.

- Bien Major..., fait-il avant de réaliser.

- Appelez moi Hank, fit mon père. Je préfère et si vous me permettez, je vous appellerai Zane.

- Bien Monsieur, fit simplement le second lieutenant.

C'était une habitude qu'il aurait sans doute beaucoup de mal à perdre, selon moi bien évidemment. Le fameux Second Lieutenant nous proposa de prendre nos affaires mais nous n'étions pas vraiment chargés. C'était de la politesse bien sûr et cela ne l'empêcha pas de nous mener au parking de l'aéroport. Le véhicule du futur équipier de mon père était une jeep de type militaire. Je trouvais cela un peu cliché mais je montai quand même à l'arrière pour me faire conduire à ma nouvelle maison.

- Major, voici le manifeste de vos affaires livrées à votre nouveau domicile, précisa le Second Lieutenant. Certains cartons ont pu encaisser quelques dégâts.

- Le carton numéro un est en parfait état ? demandai-je immédiatement en me penchant vers mon père.

- Oui ma puce, rassure toi... Par contre le douze et le vingt et un ont été enfoncé, précisa quand même Papa.

- Ouf... Le douze c'est à moi et le vingt et un, c'est le linge de maison, précisai-je en plus.

- Quelle mémoire ! fit alors notre chauffeur assez admiratif.

- Merci mais c'est bien moi qui ai rempli les cartons, assurai-je.

- Puis-je vous demander pour quelle raison vous étiez inquiète du carton numéro un? demanda le second lieutenant.

J'écarquillai les yeux et je regardai vers mon père. Il se mordit la lèvre et regarda le second lieutenant.

- Il s'agit des affaires de ma défunte femme, précisa mon père.

- Ho veuillez m'excuser, dit alors le second lieutenant.

- Ce n'est rien, fit mon père en me regardant. Dites moi Zane, vous êtes natif d'Hawaï ?

- Non, je un haole, précisa le second lieutenant.

- C'est quoi? demandai-je rapidement.

- Oui pardon... En réalité, il y a trois mots pour désigner les habitants d'Hawaï..., précisa le jeu homme.

- Mettez nous au parfum, Zane, précisa mon père en souriant.

- Bien Maj... Bien Monsieur, fit-il en se rattrapant sans que ce soit vraiment parfait. Déjà il y a le Kamaina, ce mot signifie "enfant de la terre" désigne par extensions tous les habitants de l'archipel d'Hawaï, par opposition aux Malihini, les touristes qui viennent à Hawaï pour la première fois. Ce qui est drôle c'est que dès la deuxième fois, on dit touriste selon les locaux, ajouta-t-il en riant. Puis les haole donc... Mais techniquement vous serez considéré comme Kamaina. D'ailleurs, sur présentation d'un justificatif de domicile, vous aurez droit à des réductions importantes sur presque tous les tickets d’entrée des musées, dans certains hôtels et pour la plupart des attractions sur l’archipel.

- Cool! dis-je contente de pouvoir visiter des musées pour moins cher.

- Vous aurez des documents chez vous pour vous familiariser, précisa le second lieutenant.

- Merci Zane... Et vous venez d'où personnellement ? demanda mon père.

- D'un peu partout en réalité, mon père a toujours été militaire mais j'ai grandi au Texas, précisa le second lieutenant.

- Je n'ai jamais été muté au Texas, précisa mon père.

Je les avais donc laissé à leurs nombreuses discussions sur les mutations nombreuses et variées de leurs vies respectives. J'avais même relevé le détail de l'histoire de mon père, impliquant sa rencontre avec ma mère, une employée civile du NCIS, bossant aux archives. Moi, je m'étais alors contentée d'observer le panorama qui défilait. Cet archipel était franchement sublime, de véritables décors de cartes postales pour les touristes. Je pouvais même admirer les touristes déambuler dans les rues en tenues légères. Je m'étais renseigner sur cette île et je n'étais pas très rassurée quand j'avais découvert qu'il existait des périodes de l'année où il pleuvait énormément, de véritable moussons. Par contre, je commençai rapidement à repérer un panneau assez répétitif sur lequel quatre lettres étaient écrites.

- Mais Hawaï et Pearl Harbor sont vraiment une belle affectation, précisa le second lieutenant.

- Excusez moi..., les interpellai-je.

- Oui Mademoiselle Turtlebaum ? me répondit le second lieutenant.

- Fern suffira... Je voulais savoir... C'est quoi le mot Kapu? demandai-je alors.

- Ho vous le voyez sur le bord de la route... Vous le verrez aussi à l’entrée de certains sentiers dans les parcs naturels nationaux, affirma le second lieutenant. Ce mot hawaïen signifie "interdit". Cette idée d’interdit qu’on retrouve sur tout le triangle polynésien est d’origine religieuse. Jusqu’à l’abolition de la religion hawaïenne, en dix-huit cent dix-neuf, les kapu régissaient véritablement la société. Entre autres kapu célèbres, on sait que les hommes et les femmes ne pouvaient pas manger ensemble et que les pauvres ne pouvaient pas approcher les nobles, ou "alii ". Ne pas respecter un kapu, c’était briser l’ordre établi par les dieux. Les coupables d’un tel acte étaient mis à mort par strangulation afin que la communauté ne subisse pas de vengeance des dieux par la faute du pécheur comme des tsunamis, éruption volcanique, tremblement de terre, etc.. Certains parvenaient cependant à prendre la fuite, échappant ainsi à la condamnation sans appel de leurs semblables, mais ils étaient alors bannis de leur village à tout jamais... Depuis c'est juste pour dire de ne pas passer...

Je le regardai en écarquillant les yeux, ignorant beaucoup de la culture locale. Cette culture était assez ancienne et très intéressante en réalité, du moins à mes yeux. Les rues continuèrent de défiler les unes après les autres, palmiers après palmiers, vues sur la plage après vues sur la plage. Les maisons semblaient par contre toutes se ressembler, j'allais avoir clairement quelques difficultés à me repérer dans la ville. Je pensais déjà à m'installer une application de cartes locales dès que la connexion serait branchée. À un moment, le second lieutenant tourna à droite et c'était une rue comme led autres, finissant par un petit parking et un parc pour enfants. Au moins, j'allais pouvoir laisser Jason jouer dans la rue et ne pas trop m'inquiéter de la circulation. Zane, notre gentil chauffeur se gara et je pus enfin admirer notre maison. C'était une maison blanche, aux planches de bois peintes soigneusement. Elle arborait également des volets de bois d'une couleur orange assez moche. Elle avait également un étage et un perron. Ce n'était pas gigantesque naturellement mais j'étais convaincue que c'était un petit nid douillet pour les prochaines années. En effet, mon père m'avait affirmé que ce serait sans doute la dernière mutation. Autant croiser les doigts.

- Jolie maison, fit alors mon père en regardant la demeure.

- Vous serez bien, toute la rue est constituée de famille de militaires, l'armée a fait l'acquisition de quelques quartiers comme ça... C'est un peu plus facile que de vivre sur base..., précisa le second lieutenant. Mais des rondes de sécurité ont quand même lieu.

- Parfait, ce sera très bien, assura mon père en prenant Jason dans ses bras.

- Désirez vous un peu d'aide? demanda le second lieutenant.

- Non, rentrez Zane, cela ira, précisa mon père. Je pense que nous avons besoin de nous retrouver dedans.

- Voici vos clefs, dit alors le Second Lieutenant. Un dossier complet d'informations sur l'île a été déposé dans la cuisine au milieu des cartons. Il y a également un double, précise-t-il ensuite.

Mon père le salua et je lui fis un signe de main quand il s'éloigna, nous laissant tout trois à notre nouvelle vie.

- Il est sympa ton nouvel équipier, dis-je en regardant mon père.

- Un peu jeune mais il va devoir s'y habituer, répondit mon père avant de regarder Jason. {On est chez nous}.

Je souris en voyant mon frère s'en amuser. Mon père m'invita d'un signe de tête à avancer dans l'allée parallèle à celle du garage. Nous arrivâmes devant la porte et mon père l'ouvrit. Je le vis se figer avant d'entrer et je le regardai choquée de son comportement.

- Papa? l'appelai-je doucement.

- Désolé, entre ma puce, me dit-il doucement.

- Ça va Papa? demandai-je ensuite assez inquiète.

- C'est la première fois que j'entre dans une maison sans ta mère..., marmonna doucement Papa.

- Je sais... Tu me l'avais déjà dit, assurai-je en évoquant nos discussions sur Maman.

J'avais en réalité pensé à la même chose. J'avais pris la décision de passer devant et je découvris ainsi en première l'intérieur. Tout le rez de chaussée était ouvert à côté d'un escalier. Les pièces semblaient assez grandes, suffisamment pour trois personnes en tout cas. Mon père déposa Jason qui partit tout content qu'il était au milieu des cartons.

- Je crois qu'il pense à un château, précisa mon père en riant.

- Ce ne serait pas surprenant, dis-je en souriant avant d'avancer vers l'îlot de la cuisine.

La cuisine semblait assez bien équipée, j'allais pouvoir mitonner de bons petits plats. Le frigo était également assez grand pour contenir plus d'une semaine de vivres. Je me retournai alors vers les pièces de vies et je réalisai que nos canapés prenaient un peu de place. Notre table basse était recouverte de cartons. Forcément, l'armée avait amené nos affaires mais nous allions devoir tout brancher. Mon père regardait la pièce en soupirant déjà à l'idée de devoir défaire les cartons. Moi, je cherchais quelque chose, quelque chose d'important et je le vis immédiatement. Je fonçai immédiatement vers la table basse, esquivant Jason qui courait partout. Je lui signai de se calmer un peu et je retirai deux cartons de celui qui attirait mon regard.

- Papa, t'as vu le cutter qu'ils sont censés avoir laissé ? demandai-je en le cherchant.

- Oui, tiens, fit-il en me tendant un cutter au caoutchouc vert posé près d'une caisse à outils.

Je le pris rapidement et j'en sortis la lame après m'être assurée que Jason n'était pas collé à moi. Délicatement, je posai la pointe sur le scotch marron et je fis glisser la lame. J'ouvris les deux pans du carton et j'en sortis un des biens les plus précieux à mes yeux. Une photo de nous quatre, faite le jour de la naissance de Jason.

- Donne ma puce, je vais l'accrocher, fit mon père en attrapant un marteau.

- Il faut qu'elle soit avec nous, dis-je en le laissant faire.

Il fallut peu de temps à Papa pour l'accrocher et je le vis en être un peu ému. Je n'en menais guère plus large à cet instant alors je sortis quelques affaires de Maman. Sa chouette en carton, création de ma mère qui était fan de travaux manuels; son plaid préféré que je posai alors sur le canapé, ses cahiers de dessins, sa boîte à bijoux qui finirait dans la chambre de Papa.

- Bon, l'essentiel est fait... Qu'est-ce qu'ils ont laissé pour nous ? demandai-je alors en retournant près de l'îlot pour observer le dossier.

Je tournai immédiatement les pages, regardant divers documents locatifs, les numéros de secours locaux, des numéros de contacts utiles comme des plombiers ou des électriciens et même quelques artisans locaux. Il y avait également de nombreux plans nous indiquant les commerces de proximité, les transports en commun, les écoles, etc.

- Il y a tes cartes d'accès Papa, dis-je en lui tendant.

- Merci ma puce, fit mon père.

- Alors nourriture italienne, japonaise... Française... Mexicaine? Surprenant, dis-je en tournant les flyers des différents restaurants livrant dans le coin.

- On pourra commander pizzas ce soir, on fera les courses demain, assura Papa.

- J'ai des pâtes et des conserves, j'avais fait un peu de stock dans les cartons, dis-je alors.

- Tu n'es pas obligée de tout faire dans la maison... Déjà que tu perds tes amis, dit-il doucement.

Mon père ignorait totalement ma vie de recluse que j'avais volontairement choisie. Il ignorait aussi clairement que rien n'allait me manquer à part les lieux familiers que j'avais partagés avec Maman.

- Les papiers pour les factures, dis-je en les posant délicatement. Dis-donc la vie est chère dans le coin, marmonnai-je en inspectant ceux-ci. Qu'est-ce qu'il y a d'autres... Concessionnaire ? Tu n'as pas de véhicule de fonction ?

Mon père m'observa et sourit doucement en me regardant. Moi, j'attendais ma réponse en surveillant Jason du coin de l'œil.

- Tu as passé ton permis avant de venir, dit-il en me surprenant du fait qu'il soit au courant.

- Oui... Comment tu as su? demandai-je immédiatement.

- Le père d'un collègue était ton examinateur, félicitons ma chérie, dit-il en me touchant l'épaule.

- Je pensais que ce serait utile pour ne pas te déranger, dis-je honnêtement.

- Et on va te trouver une petite voiture pour toi, dit alors mon père.

- Mais d'occasion, ne nous ruinons pas, précisai-je alors.

- Une vrai contrôleuse des dépenses, fit mon père en riant.

Je fus assez heureuse d'apprendre qu'il était fier de moi, cela faisait toujours plaisir. Je ne pensais pas vraiment qu'il allait m'offrir une voiture, je pensais économiser pour me l'offrir, quelques centaines de dollars permettant largement de s'offrir une voiture d'occasion en état de rouler. Je vis soudainement, tandis que je continuais de parcourir le dossier, une petite carte de visite que je pris dans ma main.

- Tu as précisé vouloir continuer ta thérapie, m'assura mon père avec gêne. Je me suis renseigné et j'ai trouvé quelqu'un ici à Honolulu, précisa mon père après un petit silence.

- Oui... Je préférerais en fait..., dis-je en regardant mon père. Comme depuis la mort de Maman.

- Je sais mon ange... Elle semble compétente, précisa encore mon père.

- Docteur Jaymes Carter... C'est une femme ? demandai-je alors. Étrange son prénom mais avec un truc comme Fern, je suis mal placée pour juger...

- Tu regrettes vraiment ce prénom ? demanda mon père.

- Non, j'ai toujours trouvé cela assez atypique, dis-je en souriant. Ça te rassure hein ?

- Pourquoi tu dis ça ? demanda mon père surpris.

- Maman m'avait dit que c'était toi qui avait choisi ce prénom... Avoue que tu es coupable, ordonnai-je amusée. Avouez Major!

- J'avoue Mon Général! dit-il en me saluant.

- Bon c'est pas tout ça mais occupons de la chambre de Jason, on fera le reste ensuite, précisai-je alors.

Tous les trois, l'un nous suivant par obligation, nous montâmes nous occuper des chambres. L'étage était très simple, trois petites chambres et une salle de bain commune mais tout de même équipée d'une douche et d'une baignoire. Il y avait également des toilettes séparées. À trois, cela irait. Je n'étais pas une adolescente très coquette qui passait des heures et des heures dans la salle de bain, j'avais bien d'autres choses à faire de ma journée. La chambre de Jason étaient peinte d'un vert très pâle qui ne prenait aux tripes. Nous commençâmes donc par remonter son lit en forme de voiture, celle de Cars, le film d'animation. Cela ne prit pas trop de temps à Papa qui l'avait démonté avant notre départ. Moi, j'en avais profité pour commencer à déballer ses vêtements et à les installer dans ses armoires, remplissant tous ses tiroirs de ses petits vêtements. Les vêtements plus hivernaux, qui ne serviraient pas beaucoup voir pas du tout. J'avais longuement hésité à les donner à des associations, l'hiver dans l'archipel, il faisait quand même vingt degré en moyenne. Mais je devrais le faire, dans quelques semaines, certains seraient sans doute trop petits, on grandissait vite à six ans. Tandis que je rangeais ses affaires scolaires, je me mis à espérer qu'ils aient du personnel pour un enfant avec son handicap. C'était déjà assez dur de l'élever à mon niveau mais si l'école ne disposait pas de personnel, il serait très vite largué. Cela nous prit une heure tout au plus d'organiser la chambre de Jason. Maintenant que ses jouets étaient déballés, nous redescendîmes au rez-de-chaussée en lui donnant un cahier de coloriage. C'était peut-être le seul avantage de sa surdité, il pouvait ainsi rester concentré dans son coin sans faire de bêtises, ne venant nous déranger que pour avoir quelque chose à boire ou à manger. Moi, je m'occupais de la cuisine, occupée surtout à faire la vaisselle.

- Tu sais quand même que tu as tout nettoyé avant d'emballer les cartons ? demanda mon père en sortant le linge de maison.

- Oui, mais dans le container, quelque chose a pû couler où je ne sais quoi, marmonnai-je alors. Je préfère que tout soit sain et non, je ne suis maniaque...

- Je disais ça comme ça..., marmonna également mon père.

Je sentis qu'on tirait sur mon pantalon et je baissais les yeux vers Jason qui traînait son livre de dessin. Il me regardait d'un air suppliant, proche du Chat Potté de Shrek. Le petit ange me faisait déjà craquer.

- {Sœur, j'ai faim!} signa Jason.

Je souris alors sachant qu'il utilisait le mot "sœur" pour ne pas épeler mon prénom lettre après lettre. Et en regardant l'heure déjà avancée, je sus qu'effectivement, c'était normal que la faim puisse le tenailler. Je dus enlever un de mes gants de cuisine pour signer distinctement, trop compliqué avec du caoutchouc.

- {Bientôt mon cœur} répondis-je par signe. Papa... Tu veux bien commander à manger... Jason a faim.

- Oui, pas de soucis, dit alors mon père. Euh...

- Pas d'anchois pour Jason et pas de pepperonis pour moi, dus-je donc préciser à mon père.

- Je sais, fit-il en réponse sans franchement me convaincre.

- Ho je n'en doute pas vr..., commençai-je à répondre avec un air mesquin quand j'entendis quelqu'un frapper à la porte.

- Je m'en occupe ! fit mon père.

Je le dépêchai quand même d'enlever mes gants, au cas où il s'agirait de collègues de mon père. Quand il ouvrit la porte, je saisis mon petit frère au passage en m'approchant de mon père. Je découvris ainsi une femme d'une quarantaine d'années, blondes et dans une tenue basique mais tenant dans ses bras un gros plat en verre.

. Un esprit mesquin comme le mien aurait pû estimer que les célibataires du coin étaient déjà en train de sortir les griffes mais cette femme n'était pas venue seule. À côté d'elle se trouvait effectivement une version rajeunie de sa mère, plus fluette et toute aussi blonde, vêtue d'un short en jean et d'un débardeur bleu, qui arborait un petit détail plus moderne : les deux mèches de cheveux tombantes de chaque côté de son visage étaient d'un rouge vif. Elle me vit immédiatement et me fit un signe de main.

- Bonjour Monsieur, fit alors la femme blonde très poliment.

- Bonjour..., répondit min père étonné.

- Je sais que vous emménagez et j'ai pensé que sans doute vous n'auriez rien à manger, j'ai préparé un grand plat de lasagnes pour vous accueillir, dit-elle en souriant.

- Ho merci... Ça tombait bien les enfants commençaient à avoir faim, dit alors mon père. Les nouvelles vont vites.

- Pas vraiment en fait, assure la dame blonde en riant. Je m'appelle Livia Carmichael et voici ma fille Maya.

- Salut! fit simplement celle-ci en me faisant sourire quand sa mère la fixa méchamment pour son manque de politesse.

- Carmichael ? répéta alors mon père. Comme Zane Carmichael ?

- Oui, il s'agit de mon fils aîné. Mon mari Murdoch est en opération, précise la femme.

- Voilà donc... Hank, fit-il en se montrant. Fern et Jason, dit-il en nous montrant. Entrez donc.

L'adolescente qui avait à peu près mon âge ne se fit pas prier longuement et fonça vers moi.

- Bienvenue à Hawaï ! fit-elle en souriant. T'es tout mignon toi, t'es à croquer...

Mon frère la regarda attentivement et forcément, en silence. Je souris en voyant cela car je sentais venir la question habituelle.

- Mais t'es tout timide..., lança-t-elle en touchant les cheveux de Jason.

- Il est sourd, dis-je tout bas.

- Ho merde... Enfin je veux dire... J'ai l'air conne, là..., argumenta l'adolescente.

- C'est pas grave, dis-je en posant mon frère. Je vais lui épeler ton prénom, précisai-je en m'agenouillant devant lui. { Cette fille s'appelle M-A-...} Euh... Maya c'est avec un i ou un y?

- Un y, précisa donc Maya.

- { M-A-Y-A} signai-je donc en épelant chaque lettre.

Mon frère fixa attentivement Maya et ne cessait de la regarder de haut en bas.

- Heureusement qu'il est petit, dit-elle en souriant. Je jurerai qu'il me mate sinon...

- Il cherche comment te signer, lui expliquai-je en riant.

- Hein? s'étonna l'adolescente.

- Cela prendrait beaucoup trop de temps à une personne sourde d'épeler les lettres de chaque prénom de ses proches, imagine entre amis..., expliquai-je donc. La plupart cherche un signe distinctif pour te montrer... Moi il utilise parfois le signe sœur ou passa sa main sur le côté droit de ses cheveux, dis-je en montrant ma coupe.

- Elle est géniale ta coupe, tu... Tu es gender queer? demanda-t-elle.

- Non, dis-je en souriant. J'aime juste la coupe depuis que j'ai vu le film Rebelles adolescences.

- Ho jamais vu... Faudra le mater ensemble, on habite juste en face... Ha il fait coucou, dit-elle alors.

Je me tourne vers mon petit frère et je le vois s'agiter, il a trouvé un signe distinctif. Il montre ainsi Maya et mime les deux mèches.

- Cool, je suis la fille aux mèches, dit-elle en souriant et touchant les cheveux de Jason. Euh... Tu peux lui dire que j'aime bien?

- Articule distinctement devant lui, dis-je en souriant.

- J'AIME... BEAUCOUP ! cria Maya.

- Maya! s'énerva sa mère pendant que je m'étais mise à rire.

- Pardon... Pourquoi tu te marres? demanda-t-elle étonnée.

- Parce que je t'ai dit d'articuler pas de crier... Tu ne ferais aucun son que pour lui ce serait pareil, dis-je en souriant.

- Mais maintenant je peux plus changer, dit-elle en montrant ses mèches.

- C'est comme un surnom, c'est pas grave, dis-je en souriant.

- Fern, si tu veux emmener Maya dans ta chambre pour déballer tes cartons, tu peux. Madame Carmichael va m'aider un peu.

- { Toi, tu viens avec nous!} signai-je à mon petit frère qui était enjoué et avait oublié sa faim.

Je fis alors signe à l'adolescente de me suivre et nous montâmes, mon petit frère dans mes bras, jusque ma chambre. Mes cartons étaient déjà dans tous les coins et je savais que je n'aurais pas à monter mon lit. En effet, j'avais découvert la culture japonaise et l'idée de dormir sur un futon, certes de grande taille, me plaisait énormément.

- Wahou... Comment ça se fait que t'as rien défait? demanda Maya. Moi je vide direct mes cartons.

- Parce que je défaisais les affaires familiales d'abord, dis-je en regardant mon frère se jeter sur mon futon.

- Bon ben... Tu veux de l'aide ? demanda Maya.

- Vas-y hésite pas, dis-je alors la voyant rejoindre des cartons.

- Au fait, j'ai seize ans et toi? demanda-t-elle en ouvrant le premier carton.

- Pareil, dis-je en sortant mon linge de lit du carton devant moi et jetant mon oreiller sur Jason qui s'installa dessus.

- Cool on sera peut-être en cours ensemble, fit soudainement Maya. Je te présenterai mes potes... Ha merde...

- Quoi? dis-je en me retournant rapidement.

- T'as une coupe qui a morflé..., fit-elle en me la montrant. Premier prix... Gymnastique rythmique et artistique...

- C'était il y a longtemps, j'aimerais en refaire mais bon, j'ai pas le temps, dis-je alors avec honnêteté.

- C'est toi qui gère toute la maison? s'étonne Maya en ouvrant un autre carton.

- Mouais mais c'est pas gênant, dis-je quand même en sortant des affaires scolaire pour les ranger.

- Et t'as laissé un mec là où t'étais ? demanda Maya.

- Non, aucun mec à l'horizon, dis-je alors en souriant.

- Ho c'est tes affaires de salle de bain... Je risque pas de tomber sur des sextoys au moins? fit alors Maya attirant mon regard choqué. Merde ton frère, dit-elle en panique.

- C'est peut-être le seul avantage de sa surdité, tu peux jurer, dis-je en souriant. Et non... J'ai rien de ce genre.

- Ouf... Tant mieux, dit-elle en empilant le peu de maquillage que j'avais.

- La salle de bain est dans le couloir, dis-je en sortant mes pantalons.

- J'y vais! dit Maya en emmenant des affaires.

Ensemble, il était clairement plus rapide de ranger mes affaires, j'en avais beaucoup. Maya me parlait de ses amis qu'elle allait me présenter. En fait, elle me couvrait d'un tas d'anecdotes marrantes.

- Mais tes amis sont tous des enfants de militaires ? demandai-je quand même.

- Non et heureusement... Ce sont mes équipiers de Flag Football... Club du lycée, m'avertit immédiatement Maya.

Je connaissais ce sport, souvent mixte dans les lycées. Il se jouait avec le même ballon que le football de base et comportait les mêmes règles. La différence principale et qui permettait de jouer en équipe mixte était l'absence presque totale de contacts physiques. Un "plaquage" se réalisait en attrapant les tissus autour de la ceinture du porteur du ballon.

- Tu y joues? demanda Maya.

- J'y ai joué au lycée mais c'est tout, avouai-je.

- Bah faudra venir nous voir et puis on n'est pas difficile, tout le monde est le bienvenu, précisa Maya. Bien sûr dans les matchs avec les autres lycées de l'archipel, on fait jouer les meilleurs.

- Je m'en doute...

- Tu me montreras des trucs de gymnastique ? demanda Maya.

- Pourquoi pas... Mais je n'ai plus vraiment pratiqué depuis un moment, dis-je en la voyant attraper un carton. Attention c'est lourd.

- La vache! souffla Maya en soulevant un carton. Tu planques des armes?

- Non! dis-je en riant. Je suis assez douée au tir, Papa m'a appris mais ça, ce sont mes livres.

- Hoooo... Voyons voir ce que tu aimes lire... Trucs cochons? demanda Maya en riant.

J'avais rapidement réalisé que l'humour était pour Maya un bon moyen de rompre la glace. Il était un peu graveleux mais il m'avait permis de la découvrir. Comme beaucoup de jeunes dans le coin, ses principaux loisirs étaient de traîner à la plage. Elle fumait aussi de l'herbe, à titre récréatif, prenait parfois quelques autres trucs mais toujours légers et buvait parfois de l'alcool. Cela ne me rassurait pas car j'étais beaucoup plus sérieuse mais peut-être que si je n'avais pas toute ma maison à gérer, j'aurais eu la même adolescence qu'elle. Elle avait aussi un petit copain, un certain Wyatt, qui jouait dans son équipe. J'avais cerné durant nos conversations qu'ils n'étaient pas encore allés bien loin à part quelques séances de pelotage, ils étaient ensemble depuis le début de l'été.

- Voyons Voyons... Ho des contes... Eurk... C'est quoi ce truc? demanda-t-elle horrifiée et tournant le livre vers moi.

Je découvris alors un livre appelé Les Trois Petits Cochons avec une couverture figurant trois têtes de porcs coupées et un immense œil rouge entouré de poils noirs.

- Ce sont des livres canadiens, dis-je alors. Cela s'appelle les Contes Interdits... C'est une relecture des contes dans un monde moderne et un peu plus dark... Façon American Horror Story.

- Alors... Écrit par Christian Boivin, dit-elle en lisant avant de le tourner. Trois individus qui trempent dans le voyeurisme, la pornographie, le cannibalisme et la nécrophilie. Une étudiante universitaire menant une vie bien rangée qui se retrouve à la morgue après avoir consommé du Flakka. Un tueur à gages qui revient dans sa ville natale afin de mettre sa soeur en terre et qui découvre de troublantes vérités à son sujet. Une rousse excentrique à la libido débridée et dénuée de tout sens moral, capable de pervertir les âmes les plus pures... Putain c'est joyeux...

- C'est spécial mais j'adore les trucs horrifiques...

- Alors t'as quoi d'autre ? demanda-t-elle en plongeant dans le carton et sortant les livres. Story of A Girls... Moi Christiane F, treize ans droguée et prostituée... The Perk of Being a Bellflower... Speak... L'attrape cœur... The Girls... Dis donc...

- Ouais je sais..., dis-je alors emplie de gêne.

- T'es pas suicidaire au moins? demanda Maya.

- Pas du tout! me défendis-je. T'as aussi des Harry Potter, des Lord of The Ring, des Song of Ice and Fire, j'ai même les romans écrits d'après Stranger Things...

- Plus connu, fit Maya en riant. N'empêche tes lectures sont pas marrantes... Même pas un petit Fifty Shades..., ajouta-t-elle en explosant de rire.

Je vois Jason s'approcher de Maya et la regarder étonné de son comportement. Celle-ci le regarde attentivement et Jason se met à signer.

- Oula... Euh... Je comprends pas..., dit-elle à Jason.

- Il demande si tu te moques de moi, dis-je en souriant avant d'essayer d'attirer l'attention de Jason.

C'était toujours assez compliqué mais Maya m'indiqua du doigt, poussant ce dernier à m'observer.

- { Elle ne se moque pas, on s'amuse} signai-je alors.

- { On dirait qu'elle est folle!} signa Jason me faisant rire.

- { C'est pas gentil} répondis-je.

- { Elle va être ton amie?} enchérit Jason.

Je me contentai alors de hausser les épaules et il partit se rasseoir dans son coin. Maya le regarda alors et ensuite tourna tête vers moi, me suppliant presque de traduire.

- Jason demandait si on était amies, dis-je en souriant.

- Ho oui! T'as l'air sympa... Sauf si tu transformes tes bouquins en réalité..., marmonna Maya.

- Aucun risque, dis-je en riant.

- Tu crois que je peux sympathiser avec lui? fit-elle en montrant mon frère.

- Comment ? dis-je étonnée.

- Haha! Surprise! fit-elle en s'approchant de Jason.

Je la regardai faire avec méfiance et je ris quand je réalisai que sa méthode consistait à chatouiler Jason. Cela amusa bien ce dernier et il finit dorloté dans les bras de Maya.

- Ça c'est une pause sympa, dit-elle en le serrant.

- Tu n'as qu'un grand frère ? demandai-je au cas où.

- Ouais, je voulais une petite sœur, marmonna Maya. Mais j'ai mieux maintenant... Je peux repartir avec?

- Vu que tu ne comprends pas ce qu'il signe, ce sera dur, dis-je en riant avant d'attraper un carton. Euh... Tu peux me l'envoyer ?

- Je te le lance? demanda-t-elle en riant avant de soulever mon frère et de faire l'avion.

Mon frère faisait des bruits d'amusement, des rires principalement. C'étaient presque les seuls sons qu'il pouvait émettre. En effet, incapable d'entendre, il ne pourrait jamais reproduire les sons des mots. Je ne pourrai jamais l'entendre me parler, c'était dommage. Maya le posa alors devant moi et Jason se retourna, signant en boucle le mot "encore". Je posai immédiatement ma main sur son bras et je l'obligeai à me regarder.

- { On se calme!} signai-je avec un air sévère. { Tu peux aller lui faire un joli dessin dans ta chambre ?}

- { Je peux aller lui dessiner notre ancienne maison?} me demanda le petit garnement.

- { Vas-y mon cœur} signai-je en réponse.

Jason fila dans sa chambre et Maya me regarda gênée en grattant sa tête. Elle me fixait d'un air plutôt perdu.

- Désolée... Ça te gêne peut-être..., marmonna Maya.

- Non tu peux jouer avec lui, mais je voulais l'éloigner, dis-je alors.

- Pourquoi ? demanda Maya.

- Je me vois pas déballer mes sous-vêtements devant lui, dis-je en ouvrant la caisse.

- Hooo... Alors qu'est ce qu'on a de beau? demanda Maya.

- T'es du genre à échanger tes sous-vêtements ? demandai-je alors avec mesquinerie.

- Non! dit-elle en riant. Mais j'aime bien savoir...

- Tu vas être déçue, dis-je en déballant mes sous-vêtements tous très simples ou presque.

- Ha ben y a quand même un ou deux strings, dit-elle en les sortant.

- Non mais oh ! dis-je en les attrapant. C'est gênant.

- C'est pour attraper les garçons ? demanda-t-elle en riant. Par contre faudra t'acheter des maillots de bain... T'es sur une île.

- Je... Hum...

- Quoi? Me sors pas que t'es complexée, t'es canon! fit-elle sévèrement.

- Merci... Mais euh... Je ne sais pas nager, avouai-je gênée.

- C'est pas un crime, on peut rester sur la plage... Tu pourras te rincer l'oeil sur les mecs ! fit elle en ajoutant un clin d'œil à son propos.

- J'ai pas le temps pour ça, dis-je alors.

- Tu le trouveras quand tu auras de magnifiques tablettes de chocolat devant les yeux, ajouta-t-elle en riant.

- Mouais... Bien sûr..., marmonnai-je.

- Bon d'accord en tant que fille de militaire, il y a des inconvénients, précisa Maya.

- Lesquels ? demandai-je avec méfiance.

- Les mecs ont tendance à croire que ton père va les abattre façon American Sniper! exploqua-t-elle en riant. Et c'est vrai!

- Pfff, n'importe quoi, dis-je en riant de bon cœur.

- T'as jamais eu de mecs? T'as jamais embrassé quelqu'un ? Même une fille ?

- Non... Non... Et pourquoi une fille ? demandai-je surprise.

- Pour apprendre ! Je déconne ! ajouta-t-elle en me voyant complètement surprise. Quoique j'avais une amie qui a essayé les deux, juste pour comparer... Sa mère a été mutée en Californie.

- C'est vrai que c'est chiant de se faire des amis dans cette situation, dis-je alors en y repensant.

- Ouais mais maintenant, tu ne te débarrasseras plus de moi! fit-elle en riant.

- Ha merde ! Je suis condamnée ! ajoutai-je pour plaisanter.

- Méchante...

- Mais honnêtement, je t'apprécie pas mal, on se connait peu mais c'est naturel, dis-je alors avec honnêteté.

- Ouais c'est vrai... Ça doit être le fameux coup de foudre amical, fit-elle pensivement. En fait, je sympathise très vite.

- C'est super... Au moins je connais quelqu'un, précisai-je.

- Ouais... Ben tiens passe ton téléphone, je vais t'ajouter mon numéro et on pourra se faire une sortie d'ici la rentrée, me proposa Maya.

- Ok, tiens, dis-je en lui tendant mon téléphone.

- Maya! On y va ! appela sa mère depuis le rez-de-chaussée.

- La générale en chef a causé ! me lança Maya en me rendant mon téléphone.

Je partis chercher Jason avant qu'elle ne puisse descendre, ce qu'elle fit ensuite en emmenant un petit dessin. Je saluai sa mère qui partit avec elle. Mon père referma la porte et me sourit.

- Ça avait l'air de bien rigoler là-haut, me dit-il simplement.

- Cette fille est sympa, dis-je en réponse.

- Sa mère aussi, elle m'a précisé beaucoup de choses sur l'organisation, les endroits à voir, m'expliqua mon père. Elle m'a demandé de veiller sur son fils.

- J'en doute pas, assurai-je en riant. On va peut-être se plaire ici.

- En plus tu pourras profiter, elle s'est proposée de garder Jason si tu en avais besoin, me signifia mon père.

- Ça, on verra après la rentrée... Bon on se les goûte ces lasagnes ? proposai-je en riant.

- Et comment !

Ce fut donc sur des lasagnes délicieuses et succulentes, tellement que j'en repris trois fois, que commença ma nouvelle vie à Hawaï.















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