L'Ame des Anges: Incarnation

Chapitre 1 : Une vie dans la foic

8160 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 05/09/2022 15:40

Chapitre 01

Une vie dans la foi



Quand il ouvrit le septième sceau, il y eut dans le ciel un silence d’environ une demi-heure. Et je vis les sept anges qui se tiennent devant Dieu, et sept trompettes leur furent données. Et un autre ange vint, et il se tint sur l’autel, ayant un encensoir d’or; on lui donna beaucoup de parfums, afin qu’il les offrît, avec les prières de tous les saints, sur l’autel d’or qui est devant le trône.

Apocalypse, Chapitre Huit, Versets Un à Trois


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Godbless, une simple petite bourgade comme le Texas en comptait des dizaines et peuplée d'à peine vingt mille âmes, avait tout du cadre rêvé. Située à équidistance de McCarney et San Angelo, elle offrait en effet un petit paradis sur Terre pour quiconque désirait y élever des enfants. Cette ville, fondée par une famille de pasteurs, s'était agrandie au fil des siècles grâce à l'élevage fermier et également à ses grandes sociétés de constructions qui avaient fourni des matériaux à quasiment tout l'état. La seule ombre au tableau pour cette ville fut les différentes crises économiques ayant peu à peu entraîné le déclin de ces usines et des quartiers avoisinants, les plus pauvres de la ville désormais et la seule image de déchéance de Godbless. Le reste de la ville restait cependant resplendissant et concentré autour de l'hôtel de ville, bien loin des quartiers à l'image si triste. Cet hôtel de ville, fondé à la même époque de cette dernière, était une magnifique construction de marbre, un reflet du goût prononcé du fondateur pour le faste et l'opulence mais également de son bien moins prononcé sens de la mesure. Et que dire des allées bordant la petite place menant à ce fameux hôtel de ville, elles étaient toutes aussi fastueuses avec des sculptures d'angelots en marbre qui attiraient beaucoup les touristes étrangers de par leur inspiration digne de la Renaissance Italienne. Face à ce fameux hôtel de ville, il était certain de faire un véritable bond dans le temps pour admirer la modernité du lycée de Godbless. Lui, il ressemblait à un jeux de construction de briquettes encastrables mélangées dans des angles assez improbables. Naturellement, ce lycée aux résultats extrêmement probants au niveau des taux de réussite, avait déjà été de nombreuses fois reconstruits et désormais le préfabriqué avait la préférence. Partant de cette magnifique place, bien équipée en parking d'ailleurs, plusieurs rues pouvaient emmener les habitants dans tous les coins de la ville. Vers l'est, l'école élémentaire attendait les élèves les plus jeunes tout en étant dans le quartier destinés à de petites start-up. Tout au bout de cette route se trouvait également une église, celle de Sainte Cécile, pour les communautés catholiques. Si l'envie prenait et que les visiteurs ou les habitants de la ville se dirigeaient vers le nord, ils arriveraient dans les zones un peu moins fréquentables mais surtout très pauvres. Malgré le côté peu reluisant du quartier, la criminalité de la zone n'était pas si importante pour autant. Il y avait certes des trafics de drogues, quelques cambriolages et surtout des bagarres d'ivrognes ou des violences conjugale; mais le taux d'homicide quant à lui restait inférieur à la moyenne de l'état. Si les visiteurs préféraient partir vers l'ouest de la ville, ils pourraient folâtrer dans les quartiers commerçants avec son lot de tout petits indépendants tel Monsieur Jenkins, un cordonnier comme on n'en faisait plus, ou encore la pâtisserie de Madame Wilde et ses créations très modernes. Puis, tout au bout de la route, juste à la sortie de la ville, les visiteurs pouvaient se rendre au Mall, si grand symbole du capitalisme et du consumérisme intensif avec ses enseignes beaucoup plus répandues. La dernière direction était bien plus discrète, possédant à peine quelques commerces de proximité. Cette zone était bien la plus résidentielle de la ville, comportant de nombreux mélanges architecturaux, que ce soit de style ou d'époque d'ailleurs, même si naturellement les gens vivaient dans tous les quartiers. Mais cette zone était également connue pour son église protestante : L'Eglise de la Lumière Étincelante. À plusieures minutes en voiture de l'hôtel de ville, en descendant toujours vers le sud du quartier résidentiel, il était possible d'arriver dans le quartier résidentiel de Esperanza, un des plus calmes mais surtout le plus fleuri de la ville. Et tout au centre du quartier de Esperanza, il était possible d'arriver dans Goodeed Alley. Et puis, tout au fond de cette allée, jouxtant un parc pour enfants séparé de la parcelle par une palissade, une maison trônait simplement. Nullement fastueuse mais en parfait état, la maison restait typique du quartier. L'allée était double, l'une menant à un grand garage servant également d'atelier au propriétaire, l'autre menant à une porte en bois marron. Le seul et unique petit détail pouvant marquer une véritable différence avec les autres du quartier, hormis qu'elle était la dernière de l'impasse, était bien le petit écriteaux métallique accroché à côté de la porte. Bien que très ressemblant à ceux des fonctions libérales comme les médecins ou les avocats, celui-ci indiquait un métier tout autre. En effet, les magnifiques lettres gravées indiquaient qu'il s'agissait de la maison de la Révérende Edith Simms, représentante de l'Eglise de la Lumière Étincelante dans la ville de Godbless. La porte de cette maison, comme sans doute toutes celles du quartier, n'était jamais fermée mais dans son cas, c'était bien dans tous les sens du terme. Une fois cette dernière passée, un couloir assez sobre malgré quelques œuvres religieuses sur les murs s'offrait aux visiteurs. Ce couloir était équipé d'une porte menant à un petit salon sur la droite, sobre mais chaleureux et qui avait pû voir passer bon nombre de visiteurs, principalement des ouailles en quête d'une oreille attentive que leur prêtait la Révérende Simms. Ce petit salon menait à une grande salle à manger avec sa table en bois brut, massive et chaleureuse grâce au chêne ancien qui la constituait. Prolonger ses pas dans ce rez-de-chaussée menait ensuite à une cuisine quant à elle bien plus modernes et équipées des dernières technologies culinaires à la mode, la Révérende Simms confectionnant bien des plats pour les démunis, le tout dans un mélange de bleu nuit et de blanc du plus bel effet. Trois portes permettaient de quitter cette cuisine, la première ramenait vers le couloir tandis que la seconde menait à un salon bien plus privé pour ses occupants. La troisième menait quant à elle vers le jardin, pas si grand que ça mais qui comportait encore une balançoire ainsi qu'une petite dépendance servant de buanderie à la maîtresse de maison. Revenir dans le couloir, cela permettait ensuite de visiter le premier et seul étage, si on omettait le grenier qui ne servait qu'à stocker d'anciennes possessions matérielles et les décorations de Noël. Ce couloir restait également très sobre même si, à l'inverse de celui du rez-de-chaussée, sa décoration était principalement constituée de photos de famille des occupants de la demeure. Ce couloir desservait les quatres dernières portes de la maison. La première, juste à l'entrée de l'étage, donnait sur une chambre à coucher parentale équipée d'un dressing et d'une salle de bain privative réservée aux parents de la maisonnée. La seconde pièce, bien plus petite, servait de bureau pour la Révérende Simms pouvoir y préparer ses sermons et étudier les associations à aider. Tout au bout de ce couloir, il restait deux portes qui se faisaient face. Celle de gauche en venant de l'escalier donnait sur une petite salle de bain au rangement très précis et qui ne disposait que de très peu de produits destinés à perfectionner une apparence physique tronquée. Enfin, la dernière pièce s'ouvrait sur une chambre équipée d'un magnifique parquet en chevron d'une quinzaine de mètres carrés. Un regard attentif à la décoration principalement constituée de photo permettait de réaliser que cette chambre devait être occupée par une jeune adolescente. Cependant, à la différence de bien des chambres d'adolescentes, aucun poster de chanteurs à la mode ou d'acteurs posant torses nus dans des magazines. Dans cette chambre, seuls des tableaux à motifs religieux étaient présents, la plupart représentant une vision presque paradisiaque et peint par l'occupante de la chambre. Et en ce matin de rentrée, elle était occupée.

Alors qu'une sonnerie de réveil retentissait dans la chambre, une main jaillit de sous la couette pour appuyer sur le bouton.

- Allez Mary... C'est la rentrée, fit la forme sous la couette.

D'un geste ample, cette couette rouge fut repoussée par l'occupante du lit qui se redressa. Une jeune fille de quinze ans, presque seize à trois semaines près, se redressa alors en repoussant ses cheveux d'un blond vénitien qui lui tombaient sous les omoplates. Cette jeune fille n'était autre que la fille unique de la Révérende Edith et de son époux Jason Simms répondant au doux nom de Mary Carol Simms. Elle chercha attentivement et du bout des doigts ses lunettes sur sa table de nuit. Elle n'en avait pas toujours besoin, principalement en cours ou pour lire mais Mary préférait les garder constamment malgré leur grandeur prononcée. Elle jeta ses jambes couvertes d'un pantalon noir hors du lit avant de se hisser sur ses pieds. Elle se gratta rapidement le ventre sous son t-shirt bleu arborant des colombes blanches qui n'y ressemblaient plus trop tant le tissu était usé et se dirigea vers la fenêtre pour en ouvrir les volets. La jeune fille fut saisie par la luminosité extérieure et dû se couvrir un peu les yeux pour observer le parc pour enfant jouxtant la propriété familiale. Naturellement, en ce jour particulier, nul enfant criant ne s'y trouvait, contrairement à ces étés où elle aimait les regarder jouer. Elle bailla un peu.

- Il va encore faire chaud aujourd'hui, fit-elle simplement en grattant sa joue avant de descendre sa main.

Elle toucha du bout des doigts l'un des deux bijoux qui ne la quittait jamais. Il s'agissait d'une croix en argent, symbole de sa foi en Dieu et restait très simple. Naturellement, elle partageait la même religion que sa mère et son père, une variante du protestantisme, ce qui expliquait l'absence de Jésus sur sa croix étant donné qu'il était ressuscité. L'Eglise de la Lumière Étincelante conservait la plupart des principes religieux habituels, prônant respect et l'aide d'autrui. Évidemment, bien des sujets les séparaient des américains moyens, la contraception et l'avortement par exemple, la famille Simms étant contre ces deux choses qui freinaient la création divine. Ils étaient également contre la consommation de drogues et d'alcool, contre les jurons, contre bien des choses qui poussaient à un tel comportement également. La seule différence qui caractérisait l'Eglise de la Lumière Étincelante était que sa mère n'était pas contre l'homosexualité car si Dieu avait fait que les gens aimaient des personnes du même sexe, c'était qu'il l'avait décidé. Cependant, c'était différent pour les mères porteuses car cela allait par contre à l'encontre de la nature. Sa foi, la jeune fille la vivait pleinement comme l'attestait son autre bijou : sa bague de virginité. Elle n'avait pas d'autres bijoux, à part quelques bracelets fantaisie. Elle n'avait même pas les oreilles percées, nullement par fois mais parce qu'elle avait la phobie du sang. Une goutte et elle s'évanouissait, comme l'avait attesté son petit malaise lors de sa dernière prise de sang. Mary Simms vivait sa foi comme elle l'entendait mais ne jugeait jamais les autres, Dieu ayant des projets pour chacun. Elle s'approcha rapidement de son ordinateur portable posé sur son bureau et déplaça Melo qui gênait un peu. Melo n'était rien d'autre qu'un symbole de son enfance, une petite peluche en forme d'oiseau rose qu'elle avait soigneusement conservé. Elle ouvrit son ordinateur en sifflotant avant de faire ce que tout adolescent croyant ou non faisait dès son réveil : consulter les réseaux sociaux. Dans le cas de Mary, il n'était nullement question de s'approcher de réseaux comme Facebook ou Twitter, Instagram ou Snapchat, et ce à cause du déversoir de haine qu'ils pouvaient être. Ce n'était pas une interdiction religieuse, l'église familiale ayant ses propres comptes; mais par goût personnel. En effet, la jeune fille n'utilisait qu'un seul réseau social, celui principalement consacré à la fois : Cross. Ce réseau social était bien moins répandu mondialement et comptait à peine un million d'utilisateurs à travers le monde mais ne comportait que des contenus à caractère religieux. Elle aimait beaucoup ce réseau social, principalement pour ses conseils permettant de vivre sa foi dans un monde moderne sans se montrer désobligeant avec son entourage. Mais Mary adorait surtout la présence importante d'un vaste choix musical où il n'y avait que des artistes qui vivaient leur foi dans la musique. Comme souvent, elle lança la chanson I Still Believe de Jeremy Camp, un chanteur de rock chrétien qui avait perdu sa première femme très jeune d'un cancer des ovaires. Cette chanson, Mary la trouvait tellement belle que souvent elle se sentait triste en l'écoutant.

- Alors... Qu'avons-nous de beau aujourd'hui ? fit Mary en faisant défiler l'écran des débats.

Les intervenants, principalement des pasteurs hommes comme femmes, postaient à intervalles réguliers des vidéos pour aider les ouailles dans la vie de tous les jours. Il s'agissait évidemment de supporter les comportements parfois offensants des autres vis à vis des croyants. Elle découvrit une vidéo intéressante, la suite d'un débat houleux ayant lieu au début de l'été. Elle l'avait regardé ce débat et avait été choquée des propos de certains maîtres du culte plus rigoristes. Il s'agissait d'un débat sur les comportements à adopter en couple quand on était adolescent et certains pensaient que simplement sortir seuls ou s'embrasser pouvaient mener au péché et qu'il était mieux d'avoir un chaperon. Parfois, ils allaient trop loin ces rigoristes et même si elle n'en avait jamais eu, elle n'imaginait pas qu'embrasser son petit copain pousse à ne pas respecter la pureté avant le mariage.

- J'espère que cela sera plus calme, fit Mary en allant sur sa page pour regarder les fils d'actualités.

Naturellement, en ce jour de rentrée, le sujet serait évident mais elle trouva un message diffusé par un révérend de l'État de Washington au nord du pays qui lui plut.

- Magnifique petite prière, fit alors Mary. Seigneur, en ce jour de rentrée, veille sur chacun de tes enfants. Que ta main bienveillante se place au devant des menaces et que ta voix parvienne aux mal intentionnés pour les repousser. Qu'aucun de tes enfants n'ait à verser des larmes pour le fruit de ses entrailles... Amen, fit alors Mary à la fin de son petit moment solennel.

Elle attrapa son téléphone juste à côté de l'ordinateur et vit le message de sa meilleure amie d'enfance, Carla Sanchez, qui l'attendrait pour aller au lycée ensemble comme toujours. Elle lui confirma rapidement avant de voir apparaître une photo envoyée pour son amie. Mary sourit en se voyant dans la chorale de l'église de sa mère qu'avait du prendre Carla en tant que membre de l'église. Mary savait que son amie n'était pas aussi pratiquante qu'elle, suivant principalement ses parents, mais elles étaient très proches. Mary profita de la fin des chansons de son chanteur préféré pour vérifier les vêtements qu'elle porterait pour sa rentrée et qu'elle avait préparé la veille avec sa mère. Elle allait mettre une jupe longue noire avec un chemisier blanc avec des ballerines noires et des socquettes blanches rayées. Ses sous-vêtements allaient être comme toujours extrêmement simple: soutien-gorge de coron blanc suffisant pour la soutenir mais sans plus et une culotte blanche également en coton et avec des fraises dessinées dessus. Son amie Carla avait bien voulu lui faire acheter des sous-vêtements un peu plus jolis mais elle n'en avait pas vu l'intérêt, elle aimait la simplicité.

- Bon à la douche, fit Mary en se dirigeant vers la porte après avoir fait son lit.

Elle vérifia tout de même si il y avait du bruit à l'étage mais elle entendit les conversations provenant du rez-de-chaussée et qui impliquaient ses deux parents. Elle était donc seule et pouvait se permettre de faire du bruit. Elle retourna chercher son téléphone et Jeremy Camp eut droit au rappel pour sa douche. Cela ne lui prit pas une éternité et fut même assez rapide. Elle se dépêcha ensuite de se sécher les cheveux avant de les attacher dans une longue natte. Elle ouvrit ensuite son tout petit placard à pharmacie et attrapa une simple crème apaisante pour la peau, seule petite coquetterie qu'elle se permettait, n'aimant pas trop se maquiller. Enveloppée de son peignoir, elle fonça dans sa chambre et commença à s'habiller. Une fois sa tâche faite, elle retourna poser son peignoir dans sa petite salle de bain avant d'ouvrir les fenêtres de sa chambre pour l'aération et d'embarquer son sac à dos et son téléphone. Elle traversa rapidement le couloir et descendit les marches, posant son sac au pied de celle-ci avant de s'exclamer :

- Bonjour!

Elle avança vers la cuisine où elle savait déjà trouver ses parents et passa sa tête dans l'encadrement. Comme chaque matin que Dieu faisait, sa mère préparait le petit déjeuner. Ce jour là elle était habillée d'un beau pantalon gris rayé verticalement et qui l'agrandissait avec un t-shirt bleu avec un peu de dentelle. Sur l'îlot central où la famille prenait ses repas le matin, se trouvait son père dans son uniforme marron. Jason Simms n'était autre qu'un officier de justice local et, comme l'attestait son badge, il était même adjoint du shérif. Comme son père lui disait toujours : même si il existe une justice divine, il faut également respecter la justice des hommes. Son père tourna la tête vers elle sans que son mug ne quitte ses lèvres.

- Bonjour ma puce, fit-il en souriant.

- Bonjour mon petit miracle, lui lança sa mère. Installe toi.

Mary avait abandonné depuis longtemps l'idée d'empêcher sa mère de l'appeler comme ça, au moins ne le faisait-elle pas en public. Ce surnom tirait son existence des conditions de la naissance de Mary. Sa mère avait en effet eu d'énormes difficultés pour tomber enceinte et surtout conserver le bébé. Mary était sa septième grossesse, la seule a être arrivée à terme mais même là ce fut compliqué. Sa mère avait fait une hémorragie interne et Mary s'était étouffée avec le cordon ombilical. Heureusement, elle avait été prise en charge suffisamment vite par les médecins et grâce au Seigneur, elle avait survécu. Sa mère n'était plus tombée enceinte depuis.

- Tu vas à un entretien d'embauche ? demanda son père avec son humour habituel.

- C'est la rentrée, fit simplement Mary, il faut marquer le coup.

- Je lui ai proposé son beau t-shirt noir, tu sais le même que moi, fit sa mère en le montrant. Elle préférait son chemisier...

- Et puis j'aime être en jupe longue, fit Mary en se servant du café.

Sa mère avait dû calculer le temps qu'elle mettrait pour se doucher car le petit-déjeuner était totalement prêt alors qu'elle venait de s'asseoir. Sa mère posa alors ses ustensiles de cuisine et les assiettes comportant des œufs, du bacon et des pancakes avant de s'asseoir. Elle tendit ses mains, une vers son mari et l'autre vers son unique fille, et ceux-ci les attrapèrent se donnant également l'autre main.

- Ma puce, je te laisse faire, fit sa mère lui indiquant que c'était à elle de dire le bénédicité.

- D'accord, fit-elle avant d'inspirer et de fermer les yeux. Seigneur, bénis ce repas que tu nous permets de déguster en ce jour. Veille sur les mains qui l'ont confectionnée et également sur tes ouailles autour de cette table. Amen.

- Amen, firent ses parents en cœur.

Mary commença immédiatement à attaquer les œufs et le bacon, avec un bon appétit. Elle n'avait jamais fait particulièrement attention à ce qu'elle mangeait, son métabolisme semblant assez bien assimiler tout ça. Son père lisait le journal tout en discutant des informations locales. Mary l'écoutait toujours même si pour connaître la météo, il suffisait de regarder par la fenêtre.

- Tu as beaucoup de choses à faire? demanda Mary à sa mère.

- Je dois voir Bree pour commencer à préparer la cérémonie de mariage, lui répondit sa mère avec un grand sourire.

- C'est vrai que c'est pour bientôt, se souvint alors la jeune fille.

- D'ailleurs, il faudrait que tu viennes un soir avec moi, lui stipula sa mère.

- Ha bon? Mais pourquoi ? demanda la jeune fille étonnée.

- En tant que cheffe de chœur de la chorale, elle aimerait ton avis pour les chansons durant la cérémonie, précisa alors sa mère.

- Pas de soucis, on fera cela, répondit Mary avec fierté.

- Et je dois passer voir Madame Monroe, fit plus doucement sa mère.

- Madame Monroe ? La dame qui me gardait quand j'étais petite pendant que tu allais voir les fidèles de l'église et que Papa travaillait ? la questionna alors sa fille. Celle chez qui je passe assez souvent dire bonjour ? On parle bien de la même ?

- Oui, celle au bout de la rue, précisa sa mère dans un soupir. Un nouveau cancer.

- Ho non..., fit tristement Mary. Je vais prier pour elle ce soir...

- Ma chérie... Selon les médecins..., commença sa mère en laissant la fin en suspens.

- J'ai compris, fit sa fille avec tristesse. Je tâcherai d'aller la voir plus souvent...

- Tu y allais déjà une fois par semaine pour vérifier qu'elle n'avait besoin de rien, tu n'aurais rien vu, la rassura son père.

Soudain, la porte d'entrée s'ouvrit et une voix retentit depuis l'entrée.

- Bonjour la famille Simms, fit une voix familière. Je peux entrer?

- Bien sûr Oncle David! hurla Mary.

Des bruits de pas s'approchant lentement leur provinrent du couloir et apparut son oncle David dans le même uniforme que le père de Mary. La seule différence était sur le badge, ce dernier stipulant que c'était bien David Grant le shérif. David n'était pas réellement de la famille mais c'était tout comme. Les grands-parents paternels de Mary habitaient en Floride et le père de sa mère, Karl, se trouvait dans la ville, à la maison de retraite étant donné qu'il avait besoin de soins constant, un début d'Alzheimer. Sa grand-mère maternelle, de qui elle tenait d'ailleurs le prénom, était décédée d'un cancer du sein fulgurant quatre ans plus tôt. Mais à la maison de retraite, le révérend Karl Simms était comme un coq en pâte et attendait toujours impatiemment les visites de sa petite fille, presque hebdomadaires.

- Une assiette Dave? demanda alors Jason Simms.

- Volontiers, fit David en s'asseyant.

- Je vais te chercher une assiette, lui assura l'adolescente en joignant le geste à la parole.

Elle posa rapidement une assiette devant son oncle qui se servit avec plaisir sans dire de bénédicité. Mary le regarda fixement pour lui faire réaliser.

- Je suis obligé ? demanda David gêné.

- Bien sûr que non, lui assura Edith.

- Dire que j'ai plus d'aussi bon petits déjeuners depuis le départ de ma femme, marmonna David.

Son oncle David avait divorcé de celle qu'elle avait longtemps considéré comme une tante, Meghan, sept ans plus tôt. Cette dernière était partie à Washington avec leur fille Dylan, prénom assez rare chez les filles mais malgré tout la meilleure amie de bac à sable de Mary.

- Et à part ça... Tu passais pour une raison particulière ? demanda rapidement Jason Simms en servant du café à son supérieur mais malgré tout ami.

- Ha oui, fit soudainement David en s'essuyant les mains pour attraper un papier dans sa poche.

- Qu'est-ce que c'est ? demanda rapidement Mary en voyant son oncle le déplier.

- Un avis de recherche, précisa immédiatement David provoquant un petit effroi chez la jeune fille. Pas un criminel, une femme de San Angelo disparue... Tiens, fit-il en lui tendant.

- Tu veux que j'en fasse quoi? demanda Mary en observant l'affiche.

- Il se peut qu'elle ne fasse que fuir la ville, si jamais vous la voyez en distribuant de la nourriture avec ta mère, précisa son oncle.

- On sera observatrices, précisa sa mère en souriant.

- Et à part cela, j'ai une vraie nouvelle, précisa David tout sérieusement.

- Laquelle ? demanda Jason. On a enfin une imprimante qui imprime en moins de dix minutes une photo couleur? ajouta-t-il mesquin.

- Plains toi au maire, précisa le shérif fièrement.

- Vous pouvez prendre la mienne je vous le dis à chaque fois, précisa Edith.

- Vous voulez ma nouvelle ? s'offusqua malgré tout David.

- Moi oui, Oncle David! lança Mary en finissant son assiette.

- Dylan vient vivre avec moi, annonça enfin David.

- Quoi? s'étonna simplement Jason.

- Meghan va bien? demanda Edith inquiète.

- Je le prends comment ? se vexa David.

- Oncle David... Dylan a voulu partir avec sa mère, précisa Mary. Et tu l'as rarement aux vacances...

- Je sais... Bref... Elle a quelques ennuis au lycée, précisa enfin David.

- Grave? demanda juste Jason Simms.

- Non... Oui... Un peu..., hésita David. Enfin bref... Elle arrive début octobre.

- Mais pourquoi elle rate la rentrée ? demanda juste Mary surprise.

- Soucis administratifs, très compliqués... Tu pourras t'en occuper ? De l'intégrer au lycée ? lui demanda son oncle.

- Oncle David... Je ne suis pas la fille la plus populaire du lycée, j'ai deux ou trois vrais amis, les fréquentations de l'équipe de Basket parce que le frère de Clara en fait partie et encore c'est des gens à qui je dis bonjour et euh... Ben c'est tout..., lui expliqua sa nièce.

- C'est juste qu'elle ne soit pas toute seule, précisa David. Je te demande pas d'en faire la reine du lycée... Très jolie ta tenue au fait.

- Merci, je voulais marquer le coup, précisa Mary.

- Un garçon à qui plaire? insista son oncle David dans un petit rire gras.

Mary le regarda en grimaçant et remarqua le regard en coin de sa mère. Son père quant à lui, comme tout père d'adolescente, semblait prêt à tirer à vue.

- Non... Juste pour moi Oncle David, précisa Mary. Je n'ai pas de petit copain et je n'ai pas prévu d'en avoir un.

- Mais euh... Pourquoi ? demanda David. Votre foi ne l'empêche pas... Enfin je crois... Moi et ça... C'était Meghan la croyante...

- On le sait David mais cela n'empêchera pas que tu sois le bienvenu même aux barbecues de l'église, fit Edith en riant.

- Et pour information, parce que les garçons sont bêtes et obsédés, avoua Mary avec un sourire. Ho zut... J'oubliais Clara, fit Mary en se levant brusquement.

- Je t'ai préparé des sandwichs à la confiture, fit sa mère en se levant pour aller les chercher.

- Faites attention tous les deux, dit Mary en prenant son père et son oncle dans les bras.

- Tu ne veux pas que l'on te dépose ? demanda son père. On peut prendre Clara.

- Ça ira, on y va à l'écologie, fit Mary avec un clin d'œil sachant que son vélo l'attendait.

- Jason, à son âge, venir en voiture de police ferait fuir les garçons, précisa David dans un rire.

- Et pourquoi je le propose à ton avis? insista le père de Mary.

- N'écoute pas ces deux là, lui fit sa mère en la prenant dans ses bras.

L'étreinte dura plus longtemps qu'une étreinte normale et Mary n'était pas dupe de la raison. Elle était convaincue que sa mère faisait une petite prière de plus pour sa fille.

- Allez fais attention mon petit miracle, précisa sa mère. Mets ton casque.

- Mais oui Maman, ne t'en fais pas, à ce soir. Bisous!!! fit Mary en sortant par la porte arrière, celle de la cuisine.

La jeune se hâta énormément de rejoindre le petit garage à l'avant pour récupérer son vélo tout en plaçant son sac sur les épaules. Elle se dépêcha également de mettre son casque sur ma tête et l'antivol dans son sac. Elle lissa bien sa jupe longue avant de l'enfourcher et ainsi, quelques secondes plus tard, elle remontait la rue. Dans cette même rue, elle vit la fameuse nourrice qui s'occupait d'elle enfant en train de remonter l'allée pour aller chercher très difficilement son courrier. Mary freina et descendit de vélo.

- Restez là Madame Monroe, je vous l'amène, précisa la jeune fille en récupérant le courrier et l'apportant à la dame.

- Merci ma petite Mary... Tu fais ta rentrée ? demanda-t-elle visiblement difficilement.

- Oui, en dixième degré, précisa la jeune fille.

- Déjà ? Que le temps passe... On n'en a jamais assez, fit la dame en souriant.

- Oui... C'est vrai..., marmonna la jeune fille.

- Ta maman l'a dit c'est cela? demanda Madame Monroe.

- Oui... Je suis désolée, fit Mary avec tristesse.

- J'ai au moins encore assez de temps pour mettre mes affaires en ordre, fit la dame. Et ne pleure pas pour moi, j'étais déjà vieille que tu étais toute petite.

- Je prierai pour vous, lui assura la jeune fille. Je dois y aller...

- Bonne rentrée ma grande, fit la dame en la saluant.

Mary se dépêcha de récupérer son vélo et de grimper dessus avant de pédaler très rapidement. Elle tourna à gauche, puis pris la seconde à droite en vérifiant qu'elle ne risquait rien. Enfin, elle prit la troisième à gauche et même de l'entrée de la rue, elle voyait son amie au teint hâlé hérité de ses ancêtres mexicains la saluer. Elle arriva très rapidement en freinant découvrant le carré dégradé fait récemment par son amie, sans doute en vacances.

- Ben merde t'étais où ? demanda Clara en la prenant dans ses bras.

- Oncle David est passé, précisa Mary.

- Et donc il a fait le con? demanda Clara en riant.

- Non... Dylan revient! lui annonça Mary.

- Trop cool! lui asséna son amie.

Le trio allait être réuni, un trio créé sur les bancs de l'église par leurs mères respectives. Clara et sa famille faisaient en effet toujours partie de l'Église de la Lumière Étincelante même si Clara et son frère jumeau Luis étaient bien moins pratiquant que Mary. Ce détail n'empêchait pas la paire d'être ses meilleurs amis et ce, depuis très longtemps. Étonnement, Luis n'était pas là alors que d'habitude ils allaient au lycée à trois.

- Euh... Et Luis ? demanda Mary.

- Parti avec Tia et sa voiture au lycée, fit Carla en mimant le dégoût et montant sur son vélo.

- J'en déduis qu'ils sont toujours ensemble, avoua Mary en pédalant.

- Elle est même venue avec nous en Arizona... Non mais sérieux ! s'énerva Carla.

- Et ça se passe mal ? demanda Mary sachant qu'entre la cheffe des Pom-Pom Girls et son amie, ce n'était pas le grand amour.

- Ho mon cul de grosse pouffe ne rentre plus dans mon string, fit simplement Carla dans une imitation assez pathétique.

- Tia dans sa splendeur... Et toi ? demanda Mary préférant changer de sujet.

- J'ai été draguée, fit fièrement Carla. Et par un plus vieux.

- Ha..., fit simplement Mary inquiète.

- Te fais pas des films, fit Carla en riant. Il ne s'est rien passé.

- Comme si j'allais juger, fit simplement Mary.

- Je sais bien que tu ne diras rien à personne et c'est tant mieux... Mais bon... Et toi? demanda soudainement son amie de toujours.

- Comment ça moi? fit Mary en perdant un peu le contrôle du vélo sous la surprise.

- Pas les mecs, je me doute que rien à l'horizon... Je te parlais de tes vacances, fit Carla. T'as été évasive.

- J'ai beaucoup aidé à l'église, avoua Mary. Et les deux premières semaines d'août, j'étais au camp Crowley.

- Le camp croyant ? T'y vas encore ? s'étonna Carla.

- J'initiais les petits au dessin, avoua Mary. D'ailleurs Mark y était aussi.

- Mark Ranson hein? s'amusa son amie.

- On est juste amis, précisa Mary dans un soupir.

Mark Ranson était comme elles, un membre de l'église et comme Mary, il avait pas mal d'idéaux. Il était également le capitaine de l'équipe de basket et cela avait permis à Mary de le croiser plus souvent. Il n'y avait cependant jamais rien eu entre eux, ils n'étaient qu'amis même si il correspondait énormément à ce qui plaisait à Mary, hormis le physique grand et élancé et ses cheveux bouclés marrons car sur le physique, elle n'avait aucun critère. Mary était assez réservée sur ce plan là, ne cherchant aucune relation et pensant que cela finirait bien par lui tomber dessus quand cela serait le moment. Elle préférait être très patiente car il fallait bien reconnaître que peu de garçons de son âge partageaient ses idéaux. Cependant, la mesquinerie de Carla poussa Mary à contre-attaquer.

- Et toi? Tu vas tenter ta chance avec Declan? demanda Mary.

Declan Baxter, d'un an leur aîné, photographe et responsable du journal du lycée auquel participait les deux jeunes filles, leur seule occupation extrascolaire au sein de ce même lycée ; c'était surtout l'énorme crush de Carla depuis leur entrée au lycée. Carla avait tellement peur de se prendre un râteau qu'elle n'avait jamais osé.

- Cette année c'est mon année ! avoua son amie dans un rire.

- J'espère ne pas te retrouver en larmes, avoua son amie.

- Je ne suis pas idiote, je me doute que d'autres filles doivent être plus intéressantes, avoua Carla. D'où les hauts dévoilant le ventre, ajouta-t-elle en riant.

- J'ai vu, avoua son amie.

- Pas trop choquée Caroline Ingalls ? demanda Carla.

- Hey, je juge pas alors me juge pas! J'aime ce look rétro, avoua Mary.

- Et c'est le genre à plaire à Mark, fit Carla dans un rire.

- Rhoo... T'es chiante ! s'énerva Mary avant de rigoler.

Les deux jeunes filles, toutes à leur fou rire, progressèrent à travers la circulation pour rejoindre le centre-ville et leur lycée. Il y avait énormément de monde sur la route, rentrée oblige et comme aux États-Unis, il est possible de conduire une voiture dès seize ans, cela faisait encore plus de monde sur la route. Les deux amies montèrent alors sur le trottoir pour poursuivre sur la piste cyclable imprimée sur celui-ci et qui menait au parking des vélos.

- Ha deux places côte à côte, fit Mary en descendant de vélo.

- Cool, fit Carla en commençant à attacher le sien.

- Qu'est-ce qu'il fait chaud sous ce casque, marmonna Mary en l'enlevant.

- Toujours prudente hein ? demanda Carla.

- Papa voit des accidents tous les jours, autant le rassurer, avoua Mary.

- J'avoue... Et ils sont d'accord pour la fête d'anniversaire ? demanda Carla en parlant du sien qui aurait lieu deux semaines plus tard.

- Oui, j'ai même déjà la permission d'une heure du matin... Sauf si ça dérape, avoua Mary.

- Personne appellera le shérif, je te jure, avoua Carla.

- J'espère, je vis avec l'adjoint moi, marmonna Mary.

Les deux filles continuèrent leur discussion, parlant du nombre d'invités qui serait plus nombreux pour Luis que pour Carla plus sérieuse et dont la majorité des amis étaient de l'église. Elles avançaient tranquillement vers l'entrée et Mary pouvait remarquer une légère atmosphère surexcitée. Elle ne pouvait que voir que les conversations allaient bon train et elle se demandait ce qu'il se passait. Elle vit alors au loin Luis qui leur faisait signe, l'autre bras tenant une blonde pulpeuse par l'épaule.

- Salut Luis ! fit Mary en approchant. Tia.

- Ça va? demanda juste le jeune latino aux cheveux courts.

- Chaud, fit simplement Mary en souriant.

- Bah habille toi comme une ado, annonça alors Tia sur son ton d'écervelée.

Peut-être légèrement titillée mais surtout blessée, Mary observa la tenue de l'importune qui venait de la vexer. Il fallait reconnaître qu'elles étaient le jour et la nuit, Tia portait une mini-jupe pour laquelle même le mot était trop long car même une ceinture aurait été plus couvrante. Et que dire de son haut... Tellement transparent que même Mary pouvait distinguer les aréoles de la jeune adolescente en face d'elle. Elle comprenait pourquoi elle ne s'entendait pas avec les autres filles de la bande de pom-pom girls et celles-ci lui rendaient bien à coup de brimades ou d'insultes, même si la raison pour laquelle cela avait commencé échappait totalement à Mary.

- Et je devrais porter... Ça ? demanda Mary en montrant la tenue de Tia.

- Ho... On se calme, fit Luis comprenant que cela allait partir au quart de tour.

- T'as raison... Vais voir mes copines, fit Tia avant d'embrasser goulûment son petit ami. Bye les meufs...

Mary soupira en voyant un tel agissement et tourna simplement la tête vers Luis avec un air de défi.

- J'ai droit à la leçon de morale? demanda celui-ci méfiant.

- Non, tu fais ce que tu veux, avoua Mary. Mais franchement... Tia?

- Pour sa conversation évidemment, précisa la jumelle.

Luis se contenta de soupirer en haussant les épaules. Il était inutile de discuter dans cette situation. Ce fut alors le moment si parfait que choisit Mark pour débarquer avec son air de surfeur californien ou australien.

- Bonjour les filles, j'espère que vous allez bien, précisa poliment Mark.

- Ça peut aller, fit Clara en fixant son frère.

- Je vais bien, et toi? demanda alors Mary.

- Ça va, un peu stressé de la rentrée, répondit Mark calmement.

- Mais c'est quoi cette agitation de malade? demanda Clara.

- C'est la rumeur... Il paraît que..., commença à expliquer Mark avant de se figer à cause d'un bruit assourdissant.

Mary se retourna en comprenant que le bruit provenait de la rue. Une voiture assez ancienne et très cabossée, d'un rouge bien vif arrivait à tombeaux ouverts crachant du Imagine Dragons à pleins poumons via ses hauts-parleurs. La voiture qui semblait totalement possédée s'arrêta juste en face sur le parking et seul un soupir las s'échappa de la bouche de Mary.

- Égal à lui-même, marmonna Mark à côté de Mary.

- Avec discrétion et respect, précisa alors Mary.

Il ne faisait aucun doute quant à l'identité du propriétaire de cet engin qui aurait mérité d'être traité de cercueil roulant. Des bosses et des rayures étaient en effet présentes sur toute la carrosserie et la capote de la voiture même repliée semblait mangée par les mites. Son conducteur sauta tranquillement à terre vêtu d'un jean troué, d'une chemise nouée à la taille et d'un chandail fin à longue manches blanc. Cigarette au bec, pour peu que ce ne soit que du tabac, et petites lunettes de soleil à la John Lennon sur le nez, le cas social numéro un de Godbless arrivait au lycée.

- Cameron Powells est là les petits ! fit le concerné.

- Et c'est pas fait pour nous rassurer, marmonna Carla.

Cameron Powells avait un an de plus que Mary, Carla et Luis, et il faisait partie des nombreuses fréquentations évoquées au petit déjeuner. Mary le côtoyait parce-qu'il jouait dans l'équipe de basketball avec Luis. Tous les lycées possèdent ce genre d'énergumènes totalement réfractaires à l'autorité. Bagarreur, Cameron aimait s'attirer des ennuis mais il était ce que Mary considérait comme une sorte de bible. Naturellement, ce n'était pas une bible sacrée mais la bible de toutes les choses qu'il ne fallait pas faire si on voulait éviter l'enfer. Cameron buvait, fumait et couchait plus que de raison, selon les rumeurs même si son comportement semblait leur donner raison. Il avait aussi un comportement extrêmement irrévérencieux et cela exaspérait totalement Mary. Par chance, il n'était qu'une fréquentation de Luis, présent après les matchs et à quelques fêtes même si il était un peu trop lourd avec elle.

- Je vous ai manqué ? demanda ce dernier avant d'éviter une voiture. Fils de pute !!!

Mary n'osa pas dire que non, il ne lui avait pas manqué mais elle s'en abstint. Elle le vit s'approcher et checker la main de Luis avant de la poser sur l'épaule de Mark.

- Alors toujours une grenouille de bénitier ? demanda Cameron provocateur.

- Toujours un gros lourd ? demanda Mark avec un sourire.

Vu le hochement de tête de Cameron, il confirmait. Il salua d'un mouvement de tête Carla et fixa avec un sourire Mary. Cette dernière soupira sachant déjà que c'était parti pour recommencer.

- Ma petite oie blanche préférée, fit Cameron en posant son bras sur l'épaule de Mary.

- Arrête Cameron, tu pues la cigarette, fit cette dernière en repoussant son bras.

- Là je suis reconnaissant au seigneur quand même, fit ce dernier provoquant un regard étonné de l'assemblée.

- Quoi? s'étonna Mary.

- Ben ouais.. Visiblement t'es pas plus dévergondée qu'avant, merci à lui, fit Cameron dans un rire.

- T'es vraiment pas foutu d'évoluer hein ? lui demanda Mary.

- Tu crois à la théorie de l'évolution maintenant ? s'amusa Cameron.

Cameron avait le don d'énerver Mary en très peu de temps avec des propos toujours extrêmement bien sentis. Carla avait le même soucis même si il était en général moins lourd.

- T'as jamais entendu parler de MeToo? demanda sèchement Carla.

- Euh... Nouveau régime à la mode? demanda Cameron dans un rire avant de passer son bras autour du cou de Mark. Dis-donc faut te dépêcher toi.

- Pour ? demanda le jeune homme assez étonné.

- Si tu te dépêches pas de lui faire sauter la cerise, quelqu'un va te griller la priorité, lança Cameron en regardant Mary.

- T'es vraiment un porc, assura la jeune fille.

- C'était franchement déplacé Cam, lui lança Mark. Respecte les choix des autres.

- Je respecte... Et je fais tout pour faire changer d'avis, lança Cameron en riant et consternant les autres. Bon pourquoi vous allez tous l'air de pucelles qui attendent Christian Grey?

Mary n'avait pas franchement la référence et vérifia le visage de Carla. Cette dernière lui signala que ce n'était réellement pas important.

- Ben il a l'air de se passer un truc, affirma Luis.

- Ça doit être le changement de principal, répondit Cameron.

- Quoi? s'étonna Mary.

- Et ouais le vieux schnock est parti en retraite anticipée, c'est une femme qui prend sa place, avoua Cameron.

- Mais comment quelqu'un qui vient jamais au bahut est au courant ? demanda Carla.

- Parce-que j'ai été convoqué dans la semaine, avoua Cameron. Elle m'a sorti: Monsieur Powells, il est évident que cet établissement n'est pas un moulin ou une colonie de vacances, vous êtes prié d'être un peu plus assidu, sinon plus d'équipe de basket, ajouta Cameron dans une imitation guindée.

Le basketball, c'était peut-être la seule activité où Cameron était extrêmement présent. Malgré sa réputation, c'était l'année où Mary et les autres avaient intégré le lycée qu'il s'était mis à y participer. Il en avait profité pour argumenter sur la possibilité que Mary vienne l'encourager mais évidemment, c'était pour Luis son ami d'enfance et peut-être un peu pour Mark également.

- Peut-être qu'enfin tu suivras les cours, assura alors Mary amusée.

- Surtout que je dois m'en retaper la majorité, grommela Cameron.

- C'est à dire ? s'étonna Mark.

- Devinez qui redouble? s'amusa Cameron. Casse les couilles.

Mary eut un hoquet de surprise, peut-être à cause de la crainte de le supporter à l'année et pas de manière sporadique.

- Calme toi mon chou, on est le premier jour, sois patiente ce sera mieux, fit-il mesquin.

- Cameron... Tu me gonfles, assura Mary. Si tu insistes des heures durant, tu vas tâter de mon casque.

- Ho une protection... J'y pense aussi, fit-il avec un sourire mesquin.

- Il m'énerve!!! s'excita Mary.

Naturellement, cela fit rire les autres car chacun était bien au courant que d'ici cinq à dix minutes, il changerait de cible. Mary trouvait dommage ce comportement extrêmement limite de Cameron car elle savait également que quand on avait besoin de lui, il répondait présent. Son plus gros défaut étant surtout de donner l'impression de devoir se confesser dès que l'on avait parlé avec lui. Mary le fixa méchamment et fut agrémentée d'un clin d'œil. Elle haussa juste les yeux au ciel de lassitude. Leur conversation allait déjà être écourtée, la sonnerie signalant que bientôt les cours allaient commencer retentissant bruyamment. Le petit groupe assez hétéroclite se mit à monter les marches.

- Au fait... Elle est comment ? demanda Mary à Cameron.

- Bandante, répondit ce dernier mesquin.

- Sois sérieux, s'offusqua Mary.

- Elle a l'air serieuse mais aux petits soins avec les élèves, avoua Cameron. Et elle a le même air sérieux que toi mais on sait que c'est une image.

- Comment ça une image ? s'étonna Mary.

- Trop sérieuse... C'est clair que c'est une diablesse au pieu, fit-il dans un rire.

Seul un soupir sonore provoqué par une lassitude profonde de la part de Mary marqua alors l'entrée de la troupe dans le hall du lycée pour ce qui allait être une année assez bouleversante pour la jeune fille.


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