Divalis : l'éveil

Chapitre 36 : Question

4489 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 24/05/2024 22:29

Hormis Aziel et Aéon qui dorment pour récupérer de leurs blessures, les autres vaquent à leurs affaires.

Vlase et Dagan sont en montagne. En marchant dans l’épaisse couche de neige, ils ont flairé et trouvé un groupe de faisans. Vlase est rapide, mais cela ne veut pas dire qu’il peut aisément attraper ses proies, en particulier quand celles-ci sont petites, agiles et capables de voler. Il doit contrôler sa vitesse, car plus il est rapide, moins sa vue est bonne. Il n’attrape pas de faisans à chaque saut, bien souvent il se manque en accélérant de trop, en sautant trop tôt, trop vite, trop haut, trop à gauche. Il en est de même pour Dagan qui, en plus de ne pas être aussi agile que le renard, est lourd dans ses déplacements et se retrouve à chaque fois à tomber sur le dos ou le flanc dans l’amas floconneux.

Pour la énième fois, le divalis rouge se relève, s’ébroue pour enlever la neige prise dans sa crinière et revient vers le renard, qui reprend son souffle. Les faisans ont tendance à fuir en courant, mais ils s’envolent pour mettre de la distance, puis ils s’accroupissent dans la neige pour se faire oublier.

 

— Je suis étonné que tu aies du mal à les choper, déclare Dagan tout en venant s’asseoir près du renard.

— Je n’ai pas l’habitude d’attraper des oiseaux, j’ai cru que la vitesse m’aiderait.

— On le tente encore une fois ? propose le rouge.

 

Vlase hoche la tête, se relève tout en se secouant et les voici à reprendre leur activité.

De leur côté, Abysse et Buntar sont restés plus près de la maison d’Aziel. Même si elle met son manteau, une fois que ses pattes deviennent trop froides, la coïste préfère tout de même retourner au chaud.

Les jeunes s’amusent dans la neige, ils se coursent en faisant exprès de foncer dans les branches pour se couvrir de poudreuse. Comme Fafnir et Silva ne sont jamais loin, Vlase ose les laisser sans surveillance. Les drakes jouent volontiers avec les jeunes, comme ils le font là, en secouant les branches.

Finalement, les endormis s’éveillent enfin. Ce n’est pas la grande forme pour Aziel qui grimace à cause de la douleur, bien que ses plaies aient été refermées. Il se redresse, soulève son pyjama et regarde son ventre présentant des hématomes. Aéon, qui a suivi son mouvement, se crispe à la vue de ses bleus.

 

— Désolée, je ne sais pas faire mieux, dit-elle, ennuyée.

— Tu m’évites des semaines de guérison. Tu en as fait plus qu’assez, répond Aziel en venant glisser sa main derrière la tête d’Aéon pour poser son front contre le sien.

 

Aéon lui sourit, bien que le malaise lui revienne. Avec l’inquiétude de ces derniers jours, la divalis s’est laissé porter par ses sentiments. Ils quittent le lit, Aziel commençant par téléphoner à Ulrick pour le rassurer, vu les messages qu’il lui a laissés. Les drakes n’ont pas réclamé leurs nourritures, ce qui étonne le bicolore qui regarde par la baie vitrée. Il entend les petits et les créatures jouer.

Après qu’Aéon et Aziel aient mangés, Aziel s’installe sur son ordinateur, ouvrant le programme pour se lancer sur une orthoprothèse pour un jeune drake de deux ans. Il a un souci aux ligaments, il sait marcher, mais sa patte ne se place pas correctement et celui-ci flanche et tombe souvent. C’est un souci qu’Aziel peut facilement rectifier, si la créature reçoit le soutien adéquat. Motivé, il se lance sur la conception du modèle, cela ira plus vite que la prothèse faite pour sa camarade.

Aéon, allongée au fond du divan, observe le divalis, visiblement charmée par la dévotion de ce dernier. Il a une multitude de notes à côté de lui, notamment les mesures et poids de l’animal et des termes plus techniques qu’elle ne connaît pas.

 

— Il y a beaucoup de drakes qui ont besoin d’une prothèse ? demande la dorée.

— Non, cela reste rare, mais des jeunes qui naissent avec des problèmes de ligaments, il y en a quelques-uns. Souvent, ça se rectifie naturellement, mais on les aide avec des orthoprothèses faites à l’arrache. Comme les drakes ont tous la même taille, excepté Fafnir, faire un standard est simple. Tu es la première à tester une vraie prothèse, il y aura sans doute des modifications à apporter, mais tu retrouveras la mobilité que tu as perdue, dit Aziel en lui souriant.

 

Abysse et Buntar sont de retour. Avant même que le bicolore ne se lève, Aéon anticipe pour aller à l’écurie nourrir les drakes. Le renard et la coïste entrent et referment la porte coulissante. Ensuite, ce dernier aide son amie à se défaire de son manteau sous le regard amusé d’Aziel. Il savait qu’elle arrivait à le mettre et à le retirer seule, mais il n’avait pas encore vu comment elle y parvenait.

 

— Elle est où maman ? demande la bleue.

— Elle nourrit Fafnir et Silva, répond Aziel.

— Ils ont joué avec nous, c’était drôle !

 

Aziel se contente de lui sourire, Aéon revient dans le salon où Abysse ne tarde pas à lui sauter dessus. La divalis a mal partout, mais cela ne l’empêche pas de jouer avec elle, jusqu’à avoir la mauvaise idée de la soulever pour la retourner au sol.

Abysse avoisine le mètre quatre-vingts, mais Aéon ne s’attendait pas à ce qu’elle soit devenue aussi lourde ! C’est elle qui s’en retrouve par terre, Abysse et Buntar allongés sur elle. Elle les repousse gentiment, sursautant par moments puisque les deux s’amusent à lui attraper les bras entre leurs mâchoires. Sans compter qu’Abysse pique avec ses épines dorsales.

Aziel a les yeux sur eux, Aéon, assise en tailleur, fait semblant de se battre avec eux. Il sauvegarde sa progression, puis se tend vers la patte d’Abysse, qu’il attrape pour la tirer vers lui.

La petite se trémousse comme un vers, bien sûr amusée, et se retourne sur Aziel pour l’imiter. Il sursaute à cause de la longueur de ses canines, mais elle parvient à agripper sa cheville sans le percer. Abysse tente de le tirer, mais se retrouve entravée entre les jambes d’Aziel qui lui attrape les pattes pour l’empêcher de bouger.

 

— Attrapée !

— Ce n’est pas du jeu, vous avez des pattes qui agrippent ! ronchonne Abysse.

 

Buntar regarde Aziel, encore un peu effrayé par le divalis. Aéon l’attrape au museau, entourant le cou de son autre bras pour le renverser. Il est presque aussi grand que son père, elle est plutôt portée par le renard que l’inverse. Abysse appelle Buntar à la rescousse, celui-ci, hésitant, voit alors Aéon attraper la jambe d’Aziel et le tirer pour le faire tomber du divan. Il se retient en tenant d’une main les pattes avant de la bleue et de l’autre Aéon.

Aziel regarde Aéon, narquois, tout en serrant des dents. Il les tire d’un coup, cherchant à les maîtriser, Buntar, moins impressionné du fait que les filles jouent elles aussi, leur vient en aide. Ils en profitent pour retourner Aziel, qui n’avait rien demandé à la base, face contre le sol, les trois s’asseyant sur lui.

 

— Aziel, il est tout plat ! plaisante Abysse.

— Ouais, ça va, vous m’avez eu, réplique le jeune en regardant Aéon avec un petit sourire qui annonce une vengeance à la dorée.

— Mais que faites-vous ? intervient la voix de Vlase derrière eux.

— On écrabouille Aziel, répond Abysse tandis que Buntar le relâche.

— Abysse, t’es pas légère, réplique Aziel tout en se redressant, les filles s’en retrouvant les fesses sur le carrelage.

 

La petite se relève et le divalis humain en profite pour agripper Aéon avant qu’elle ne se relève et qu’il ne vienne lui croquer la nuque. Celle-ci en pousse un hoquet de surprise tandis qu’elle devient écarlate !

Aziel, s’apercevant de son geste, reprend immédiatement ses distances sous les regards moqueur de Vlase et agacé de Dagan.

 

— On ne se sent plus, Aziel ? ricane le canidé.

— Je me suis laissé emporter, réplique le bicolore, gêné.

— On s’attrape tous de cette façon, pourquoi vous réagissez comme ça ? demande Buntar, confus.

— Cela m’a surpris, réplique Aéon.

— Vous avez trop pris des humains, ricane Vlase.

— Je ne voulais pas être déplacé, s’excuse toutefois Aziel.

— Pff, tu n’es pas humain, Aziel, et à ce que je sache, tu ne lui as pas fait mal. En plus, on est entre nous, ce n’est pas comme si une morsure allait nous indigner, réfute le renard.

— Peut-être pour toi, Vlase, mais nous n’avons pas eu la même éducation, nous n’avons pas les mêmes codes, explique Aziel.

— Vous vous compliquez la vie, oui ! Tu veux lui faire un câlin, fais-lui un câlin, elle n’en a pas envie, elle mord et tu recules ! C’est aussi simple que ça. Et, je vous rappelle que l’on a des oreilles, des crocs et une queue qui sont là pour parler, ainsi que vos phéromones.

— J’estime qu’il est normal, même pour un cryptide, de comprendre l’intimité et l’espace personnel, ajoute Aziel.

— Et je le répète, nous pouvons nous imposer, comme nous pouvons répliquer face à ce comportement. Et ce n’est pas différent pour les humains. Jillian s’appuie souvent sur Mathias et Hector, qui lui râlent dessus sans pour autant le repousser et il continue de le faire.

 

Le garçon se gratte la tête tout en regardant Aéon, qui elle est franchement perdue avec tout cela.

 

— Ce que je veux dire, c’est qu’il faut tout de même faire attention à ce que l’on fait. Après, ça nous conduit à avoir des comportements envahissants et agressifs, dit Aziel en regardant Dagan.

— Tu t’éloignes, Aziel, vous ne faisiez que jouer. Il n’y a rien de grave à ce que vous ayez par moments un comportement séducteur, rétorque Vlase.

 

Vlase observe les divalis, Aziel discute avec Aéon. Il peine à se faire au point de vue d’Aziel, à cette histoire de sentiments, d’amour et de vouloir une femelle qui refuse de se reproduire.

 

— Quel est l’intérêt pour toi de vouloir Aéon comme partenaire ? demande Vlase.

— Il n’y en a pas, répond Aziel sur un ton plutôt sec.

 

Vlase penche la tête de biais face à cette réponse dénuée de sens.

 

— Tu n’es donc pas intéressé par une descendance ?

— Je préfère une famille.

 

Aéon plisse les yeux tout en fixant Aziel qui, pour le coup, l’évite.

 

— C’est quoi la différence ? rétorque Vlase, narquois.

— Le point de vue, dit-il en regardant brièvement Aéon.

— Les divalis vivent en famille, c’est normal pour toi, répond Vlase.

— Et toi ? Tu n’as pas envie de voir grandir Buntar et les petits qu’il aura ? demande Aziel.

— Ce n’est pas dans nos mœurs, répond Vlase en regardant son fils.

— Moi je préférerais voir mes petits grandir et vivre avec eux et leur famille, intervient Buntar. Et ça ne me dérange pas qu’Abysse soit ma femelle, même si on ne peut pas avoir de petits.

 

Vlase en penche la tête, un rictus à la fois amusé et intrigué se dessinant sur sa mâchoire. Aziel souffle du nez quant à la réponse du jeune renard et passe sa main devant sa bouche alors qu’il bâille à s’en décrocher la mâchoire. Il est encore épuisé et il en est de même pour Aéon. Le divalis est en congé, autant en profiter et se reposer, surtout que d’ici une bonne semaine, ils vont être de corvée d’Halloween.

 

— Papa, on retourne dans la montagne chercher Chillak ? demande soudain Buntar.

— Vous la suivez ? demande Aéon, surprise.

— Nous l’avons croisée hier avec Buntar, elle était d’humeur joueuse, explique Vlase.

— Moi aussi, j’aimerais jouer, dit Abysse en se plaignant.

— Elle reste dans le massif, Abysse, là où il fait le plus froid, et Buntar s’entraîne à la traquer. Tu chasses bien, mais tu n’es pas aussi rapide que nous, explique Vlase.

— Ce n’est pas ma faute si je ne sais pas courir à votre vitesse, rechigne la bleue.

— Buntar a le droit de faire une activité où il peut s’entraîner à courir vite, il ne se plaint pas quand toi tu nages, intervient Aéon.

— Profitez-en pour prendre un bain, elle jouera dans l’eau, ajoute Aziel qui s’est assis dans le fauteuil.

 

Abysse adore prendre des bains avec Aéon. Vlase, Buntar et Dagan s’en vont dans la montagne et Aziel, lui, s’écroule sur le divan.

Aéon fait couler l’eau chaude, Abysse est tout euphorique, elle sautille dans l’eau, puis se tourne vers Aéon, assise sur le rebord, à seulement tremper les jambes.

 

— Dis à Aziel de venir avec nous, propose Abysse.

— Il n’est pas très à l’aise, il est plus humanisé que nous.

— J’ai un peu de mal à tout comprendre, mais d’accord, dit-elle en plongeant sous l’eau.

 

Aéon la regarde faire… Un vrai poisson dans l’eau, Abysse se redresse, gardant seulement sa tête hors du liquide chaud.

 

— Il y a une chose que je ne comprends pas, déclare Abysse.

— Qui est ?

— Dagan t’a fait mal, mais Aziel non, alors pourquoi tu as peur de lui ? dit-elle en penchant la tête, ses oreilles tombant sur le côté.

— Qu’est-ce qui te fait penser ça ?

— Tu en avais l’odeur tout à l’heure quand il parlait avec Vlase, ajoute la petite.

— C’est difficile à expliquer, Abysse, mais je n’ai pas peur d’Aziel, répond Aéon en lui souriant.

— Je ne comprends pas toujours tout, mais je sais quand tu es mal, bougonne la bleue.

 

Aéon rit face à la franchise de la coïste, elle l’attrape par les joues pour poser un bisou sur son museau.

Aziel est allongé sur le fauteuil, les bras croisés derrière la tête. Il regarde son ordinateur, il n’a plus parlé aux personnes de la fondation depuis son réveil et il n’a toujours pas lu les messages que Iaur lui a envoyés. Il se redresse et se connecte sur le site pour aller les vérifier, remarquant que Firiel lui a également fait un message. Il le lit en premier, son cœur s’emballant de la nouvelle que la centauresse et cheffe d’Evergreen lui a transmise. L’individu qu’ils ont repéré est bien un divalis accompagné d’un très jeune enfant, possiblement son petit. Ils l’ont croisé à plusieurs reprises, mais celui-ci les fuit et est difficile à approcher.

Comme Firiel ne tient pas Iaur dans son estime, elle ne lui en a pas fait la communication. Aziel se décide à ouvrir le mail du vampire, celui-ci demande des nouvelles d’Aéon, de son rétablissement et également une entrevue avec celle-ci par caméra vidéo. Aziel soupire, Firiel est connectée, il lui parle directement pour l’informer qu’Aéon va aller vers Evergreen et qu’il fera partie du voyage. Firiel les invite, de ce fait, à venir jusque dans son village. Il se tourne vers la salle de bains, Aéon est en peignoir, elle doit changer de vêtements puisqu’Abysse a trempé toute la salle de bains en jouant. Enroulée dans sa parure, elle regarde Aziel qui a toujours les yeux sur elle.

 

— Un problème ?

— Abysse a arrosé mes vêtements. J’ai essuyé tes meubles, j’espère qu’elle ne va pas tout remouiller.

— J’irai mettre le petit chauffage quand elle sortira pour l’humidité, ne t’en fais pas, répond Aziel.

 

Revenue près d’Aziel tout s’en épongeant les cheveux, celui-ci lui fait part du mail laissé par le vampire.

 

— Qu’en penses-tu ? Il est connecté, tu veux lui répondre ?

— Heu… oui.

 

Le garçon informe le vampire, qui ne tarde pas à répondre et même à proposer directement un appel vidéo avec la divalis. Encore une fois, Aziel demande son avis à la dorée, qui hoche la tête et lance la conversation.

L’image se fait, projetant le vieux vampire et la divalis l’un à l’autre. Enfin, vieux, cela reste relatif. Iaur a plus de trois mille ans, mais celui-ci apparaît sous les traits d’un homme dans la quarantaine. Il a un visage carré, des yeux au regard perçant et froid. Une barbe entretenue qui lui donne un côté distingué, noire comme sa chevelure longue et soignée. Il est vêtu comme un aristocrate, ce vampire fait à la fois personne restée dans l’ancien temps, mais tout de même accordée au temps moderne.

Il remue les lèvres, mais aucun son ne semble en sortir, Aziel lui écrit pour le lui faire remarquer. Le vampire cherche avant de se tourner vers une personne qui apparaît de ce fait devant l’écran. Une femme vampire, aux cheveux noirs plutôt courts, active le micro.

 

— Voilà, ils t’entendent, dit la vampire.

— Merci, Ravan. Je me présente à vous, chers divalis, je me nomme Iaur Immortals. De ce que j’ai compris, vous êtes la descendante d’Aérin ?

— Bonjour, oui, c’est bien ça, je m’appelle… Aéon, répond la jeune.

— Pourquoi cette hésitation ?

— Aéon est mon nom de divalis, j’ai également un nom humain, répond la dorée.

— Donnez-moi celui qui vous convient, répond simplement le vampire.

— Aéon et voici Aziel Stats, c’est avec lui que vous avez échangé.

— Fort bien, avez-vous une idée de ce que vous comptez faire pour les vôtres ? demande Iaur en la coupant presque.

— Comment ça ? répond Aéon tout en regardant Aziel, confuse.

— Vous êtes l’alpha de votre espèce, il serait sage de votre part de retrouver le plus vite possible vos sujets et d’établir votre nouveau territoire. Vous êtes encore jeune, mais vous devriez endosser votre rôle de matriarche le plus rapidement possible. Si ce n’est pas le cas, je ne pourrai décemment pas laisser Kiria, ma protégée, vous rejoindre sans être certain qu’elle sera entre de bonnes mains, explique le vampire.

— Aéon a déjà pour projet la recherche des nôtres, chaque chose en son temps, réplique Aziel.

— Ce n’est pas à vous que je m’adresse, mais à votre cheffe, rétorque Iaur.

— Si vous vous adressez à moi, vous vous adressez également à Aziel et je ne suis en rien une cheffe. Ma mission est de nous rassembler, pas de les commander, répond sèchement Aéon.

— Certes, mais une meute a besoin d’un chef pour les mener et, ma chère, que cela vous plaise ou non, vous êtes la prochaine du fait de votre lignée. Ne commettez pas l’erreur de votre grand-mère en refusant votre place de monarque ou vous aussi perdrez les vôtres et, cette fois, vous n’aurez peut-être pas la chance qu’elle a eue en cachant les bébés parmi les humains, dit Iaur.

— C’est tout ce que vous comptez me dire ? réplique Aéon.

— Je vous l’ai dit, j’ai dans ma famille une demie divalis, elle a autant sa place parmi les miens que les tiens, et je lui octroie le droit de choisir celle qui lui convient le mieux. Pour cela, je veux être certain qu’elle quitte mon foyer pour un mieux.

— Nous ne vivons pas derrière des remparts et mon clan décide ensemble de ce qu’ils veulent faire, si Kiria veut nous rejoindre, libre à elle de le faire, dit Aéon.

— J’y réfléchirai, sa présence pourrait vous être bénéfique. Sur ce, je retourne à mes occupations, bonne continuation… Ravan, je n’arrive pas à couper.

— Pousse-toi, papy… dit la personne en se glissant devant lui pour couper la conversation.

 

Aéon et Aziel se dévisagent dans un premier temps, il s’assied au fond du canapé où Aéon vient à l’imiter. Que penser de cette conversation ? 

Que ce soit dans les clans, les meutes ou même dans son village, une personne donne des directives. Elle ne peut pas dire que leur clan est sans chef, même s’il n’est pas défini. Vlase dirige quand ils sont hors de la propriété d’Aziel et c’est le bicolore qui le fait lorsqu’ils sont chez lui.

Aéon a toujours été une suiveuse jusqu’à maintenant, elle se repose soit sur le renard, soit sur le divalis. Elle a beau avoir son statut, elle ne se voit vraiment pas devenir cheffe.

Aziel s’allonge tout en passant une jambe derrière la dorée qui regarde dans le vide. Il lui attrape la main, ce qui fait sursauter celle-ci, prise dans ses pensées. Elle dévie les yeux vers le garçon, qui doucement l’attire à lui et la guide pour qu’elle s’étende, tout en posant les bras dans son dos.

 

— C’est une idée ou tu deviens plus câlin ? demande doucement la jeune.

— Ça te dérange ?

— Non, tu es moins froid, mais je ne pensais pas que tu serais du genre affectueux, dit Aéon.

— Ça te surprend ? plaisante-t-il.

— Oui et non, c’est bizarre, mais j’aime bien…

— Vraiment ? Tu n’es pas obligée de me dire oui pour me faire plaisir, répond le bicolore en se redressant pour la regarder dans les yeux.

— C’est vrai et… la façon dont tu m’as mordue tout à l’heure… c’était agréable, avoue-t-elle en déviant les yeux.

— Ah bon ? souffle-t-il du nez.

 

Aéon hoche la tête, et les joues du garçon s’empourprent, il sourit bêtement tandis qu’il réitère son geste, venant doucement croquer la peau de son cou. Aéon se raidit soudain en laissant passer une sorte de plainte retenue qui a pour effet de les surprendre tous les deux.

 

— Pardon ! panique Aéon, devenue aussi rouge qu’une pivoine.

— Ce n’est rien, plaisante le divalis. C’était mignon.

— Ne dis pas ça, c’est gênant, réplique la dorée en se cachant contre son épaule.

 

Aziel caresse sa chevelure encore humide, la main qu’il a dans le dos de la jeune imite celle dans ses cheveux.

 

— Tu en penses quoi de ce que t’a dit Iaur ? demande alors Aziel.

— Qu’il n’a pas à se mêler de la façon dont je veux gérer ma vie, réplique Aéon.

— C’est certain.

— Que penses-tu de tout ça ? dit-elle en se redressant pour le regarder.

— Aucune idée. Dagan a sa vision des choses, nous avons la nôtre. On pourra se faire une meilleure idée de ce qu’attendent réellement les autres quand on les aura rencontrés. Nous n’avons pas eu l’éducation des divalis, peut-être qu’ils se ficheront de l’esprit de ruche et de cette histoire d’alpha et qu’ils suivront celui qu’ils voudront.

— C’est aussi ce que je me dis. Nous n’avons pas eu la même éducation, les mêmes connaissances. Ce sont des informations, pas une ligne de conduite à suivre.

— Je ne suis pas doué pour obéir et, dans notre groupe, personne ne commande réellement l’autre. On se retourne l’esprit pour rien, laissons les choses venir et se faire au lieu de se mettre une pression inutile, déclare Aziel. Enfin, Firiel nous propose de passer par son village quand nous nous remettrons en route.

— Pourquoi pas, je vais instinctivement aller vers le prochain divalis, on peut y faire un détour. Je me demandais, mais est-ce vraiment une bonne idée de parler de nous sur les réseaux de la fondation ? Cela pourrait être dangereux, dit Aéon tout en replaçant l’une des mèches de cheveux au bicolore.

— Ils peuvent parler des cryptides et poster des photos, mais toutes informations plus personnelles doivent-être envoyées à Firiel, Iaur ou David, le fondateur. Firiel est une ancienne asservie des cryptides enlevés et dressés pour se battre les uns contre les autres. Evergreen est un village où presque tous les membres ont été sauvés. Elle lutte pour libérer les asservis, explique Aziel.

— Cela ne doit pas être facile de protéger autant de monde, dit Aéon.

 

Aziel répond en secouant sa tête de côté…

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