Les Larmes d'Ondine
Ce jour-là, le ciel pleurait à chaudes larmes, lavant les peines et les souvenirs douloureux. Battant son plein depuis quelques jours, l’averse avait provoqué de nombreuses inondations dans toute la région. C’est sous ce ciel couvert que se promenaient, main dans la main, une mère et son enfant.
Riant aux éclats, la petite fille s’amusait à sauter dans les flaques d’eau, éclaboussant son veston couleur vert bouteille, tachant ses souliers d’une boue visqueuse. Grondée à plusieurs reprises par sa mère, la gamine n’en fit qu’à sa tête et s’en courut hors des chemins de sentiers.
Elle tomba nez à nez sur une rivière dont la surface chaotique était clairsemée de nénuphars bourgeonnants annonçant la venue du printemps. L’enfant s’agenouilla sur la rive afin d’observer de plus près ces jolis lotus.
Joignant ses deux mains, elle en recueillit un aux creux de ses paumes avant de le redéposer sur l’eau. Son œil fut attiré par quelque chose de brillant reposant sur l’un des pétales des fleurs flottantes. Elle fit main basse sur l’objet ; il s’agissait d’une petite pierre translucide d’un bleu vert éclatant.
Ravie d’avoir trouvé un trésor, elle le fourra dans sa poche. Mais, soudain, une bourrasque fouetta son visage et elle crut entendre une voix l’interpeler, tels des chuchotements entremêlés au bruit des gouttes de pluie : « Elle pleure, elle pleure des torrents, si seulement elle pouvait regagner le courant ».
Apeurée, la fillette lança des regards inquiets autour d’elle, mais il ne semblait y avoir personne. Pourtant, elle était sûre d’avoir entendu quelqu’un.
« Mère, est-ce vous ? »
Mais elle n’obtint aucune réponse.
« Elle pleure, elle pleure des torrents, si seulement elle pouvait regagner le courant. » Entonna à nouveau la mystérieuse voix.
Prenant son courage à deux mains, la petite chercha l’origine de ces murmures. Ils semblaient si proches. Elle plongea instinctivement la main dans sa poche pour en ressortir son butin. Étrangement, la pierre précieuse reluisait de mille feux. La fillette la détailla attentivement entre ses doigts trempés. Mais, lorsqu’elle entendit pour la troisième fois les susurrements, prise de panique, elle laissa tomber le caillou qui sombra dans les flots de la rivière et fuit pour rejoindre sa mère.