Les hommes ne tombent pas du ciel...
La dernière chose dont je me souviens avant d’avoir vu valser Stanislas en compagnie d’une bande de cocottes en papier, c’est de la voix de l’infirmière qui disait « peut-être que sous ses allures de prince charmant, il la bat ». Puis plus rien.
Avant d’avoir la sensation d'être couchée dans le distributeur de mouchoirs de ma grand-mère. J'ai ouvert les yeux, vu se stabiliser un plafond aseptisé, un néon défectueux… et en tournant la tête j'ai compris que je n'avais pas quitté la quatrième dimension.
L'homme que j'avais successivement pris pour un lapin, un agent secret et un bébé de trois mois était allongé dans le lit d'à côté et une aide-soignante penchée sur lui était en train de demander :
- Comment ça va, M. Pearl ?
Le personnel médical est parfois si obstiné.
J’avais trop mal à la tête pour rectifier et puis j’avais une intuition. Une de ces intuitions féminines dont vous parlent les bouquins et qu’il ne faudrait jamais suivre dans la vie réelle. Quelque chose me disait qu’Benjamin était peut-être en danger, que c’était pour ça qu’il cachait son nom sous le mien. S’il s’agissait d’un détective danois en cavale ou d’un espion espagnol chargé de sauver son pays d’une conspiration fomentée par mon propre gouvernement, si son seul espoir de survie résidait dans son mariage avec moi…
Si j’arrêtais tout de suite de délirer. Les agents secrets ont des faux papiers en règle, indétectables. Et ils ne deviennent pas amnésiques juste parce qu’ils ont percuté le capot d’une C3.
Peut-être qu’il fuyait juste sa harpie de femme et comptait enlever ses enfants pour les emmener avec lui dans un paradis exotique ou ils oublieraient la guerre des casseroles et des cuillers en bois.
Ou alors c’était un tueur en série recherché dans plusieurs états. Non, impossible, il avait vraiment l’air trop gentil. Les tueurs n’ont pas le regard du Clochard de Lady and the Tramp, quoiqu’en disent les statistiques.
- Comment vous sentez-vous aujourd’hui, Mrs Pearl ?
- Mal, dis-je avec mauvaise grâce. Vous avez l’intention de nous retenir longtemps, mon mari et moi ?
- Je vois que la mémoire vous est revenue après cette nuit de sommeil, a dit l’aide-soignante en arborant un sourire digne d’une sainte martyre. Contrairement à votre époux, le cher homme, a-t-elle ajouté, cette fois-ci d’un air de vache amoureuse.
Qu’est-ce qu’elle croyait, celle-là, que parce qu’il avait perdu la mémoire Benjamin-Noah allait oublier sa chère femme et se jeter dans les bras de la première groupie venue ?
Enfin, sa chère femme… Tout est relatif. Un accident, c’est bien un truc qui rapproche les gens, non ?
Qu’est-ce que je racontais ? J’ai secoué la tête, ce qui m’a rappelé que j’avais le crâne en compote et je me suis assise.
- Vous n’avez pas le droit de me séquestrer de toute manière, ai-je commencé.
- Mais nous n’en avions absolument pas l’intention, a répliqué vivement la femme, piquée.
J’ai senti comme de l’hostilité et j’ai eu la vague impression que je ferais mieux de me taire et de la jouer pauvre innocente sous le choc. Malheureusement, les fortes émotions me rendent toujours agressives. La dernière fois que mon frère Jay s’est déguisé en Jack l’éventreur, il a fini coiffé avec la soupe au potiron et un œil poché.
- Pourquoi, vous êtes complets ? ai-je riposté. J’ai repoussé le drap et j’ai constaté avec soulagement qu’on n’avait pas jugé utile de me dépouiller de mes vêtements pour me refiler une de ces stupides brassières d’hôpital. « Ce n’est pas tout ça, mais mon mari et moi nous sommes attendus pour un meeting important et… »
- Très bien, a roucoulé cette hyène perfide. Vous pourrez vous éclipser dès que vous m’aurez donné la carte d’identité de votre mari, Miss Pearl.
Oh oh. Ça sentait méchamment le roussi.
- Euh… mais elle doit être à l’hôtel, ai-je bredouillé avec des gouttes de sueur grosses comme des obus coulant sur mon front mal démaquillé (je sentais des particules de mascara séché sur mes pommettes). « Nous l’avons oublié en partant et… »
- Peut-être pourriez-vous aller la chercher, mademoiselle, a appuyé cet extrait de sorcière en faisant semblant de savoir parler français.
Oui, j’allais faire ça et m’enfuir le plus vite possible et le plus loin possible de ces lieux maudits.
- L’un de nos infirmiers vous accompagnera, a ajouté l’infâme d’un air machiavélique.
Elle savait. Elle savait tout. J’étais perdue. Je sentais venir le générique de première partie, le fondu au noir ou l’héroïne coincée entend grincer la porte derrière elle juste avant la pub de la nourriture pour chats.
Je n'aurais jamais pu imaginer ce qui allait me sauver.
- Excusez-moi… Je cherche Benjamin Cooper. On m'a dit qu'il était dans cette chambre…
***
Cette fanfiction est EN HIATUS. Je suis désolée.
Elle a été écrite pour "Sa Lydie", ma très honorée collègue et colocotaire des années terribles en Chine, pour évacuer la pression de nos journées dingues à l'heure du café.
Je vous présente toutes mes excuses pour l'avoir arrêtée au moment où Peter fait son entrée (Oups. Spoiler).
Shérif de Nottingham, si tu traines un jour sur ce site, je sais que tu te reconnaîtras et j'espère que tu verseras une petite larme en repensant à cette époque.
Signé : Robin.
PS : Gisborne est sous la table et je crois qu'il a griffé Will l'Ecarlate. Sus au trésor et vive le beurre de cacahuète !