Wastelanders
Chapitre 5 : Chasse sauvage vers Junktown
2583 mots, Catégorie: M
Dernière mise à jour il y a 6 mois
Après nous être assurés que Trudy pouvait se débrouiller seule, nous quittâmes le Red Rocket en direction de Junktown. Nous empruntâmes une ancienne route goudronnée, entièrement fissurée et qui aujourd'hui tenait plus de la piste que de la chaussée.
À la fin de notre première journée de marche, nous décidâmes de camper à l'orée du bois bordant la ravine que nous suivions depuis un moment déjà. Nous mîmes en place des tours de garde et nous prîmes un repos bien mérité. La nuit se déroula sans encombre, animée par la luminosité radioactive de la nature environnante et par les cris de la faune. Au matin nous fûmes réveillés par le bruit d'un attelage.
- Hola ! Nous salua le marchand en arrêtant sa charrette, tirée par deux gros radboeufs.
Comme pour la plupart des nomades, l'homme était accompagné par des mercenaires chargés d'assurer sa sécurité. Le premier des deux gardes était un homme de type caucasien au visage balafré. Il portait du cuir dans le pur style motard de l'Ancien monde. Il ne nous adressa même pas un regard mais ne relâcha pas pour autant sa prise sur le fusil à canon scié qu'il tenait fermement. Le second était afro-américain et portait un chapeau de cow-boy ainsi qu'un revolver à la ceinture. Il possédait en plus un fusil à lunette. Lui non plus ne semblait pas s'intéresser à nous.
Se présentant sous le nom de Roger, le commerçant entama les négociations. John fit l'acquisition de dix conserves de fangeux en échange de seize caps. Lucy acheta une batterie d'ustensiles de cuisine, deux bouteilles d'eau purifiée et de l'allume-feu pour trente-six capsules et elle troqua ses dix-huit cigarettes contre trente-six cartouches pour revolver de petit calibre. Prise au jeu du négoce, elle s'arrangea pour que Sly puisse obtenir quelques cartouches pour son « widow maker ».
Tandis que Long Fellow discutait avec le nomade de la provenance de ses conserves, je m'approchai de Sly Yu qui était resté en retrait. Je lui fit les yeux doux dans le but avéré de récupérer le « Lucky star » que je lui avait donné précédemment et dont il n'avait pas usage. Gêné et désireux que je le laisse tranquille, il me le remit sans faire d'histoire.
Enthousiasmé par ce qu'il venait d'apprendre, notre vieux loup de mer proposa qu'après notre mission à Junktown, nous passions par Pirate Bay. Il désirait jeter un œil à sa fameuse conserverie à fangeux. Roger nous conseilla alors le « Perroquet bourré » pour allez boire un verre en son nom. Puis après ces belles paroles le nomade et son attelage reprirent la route non sans nous avoir préalablement demandé de lui faire un maximum de publicité.
Une fois nos affaires empaquetées, notre quatuor se remit en marche. Sous la chaleur écrasante de cette seconde journée de voyage, nous tentâmes, autant que faire se peut, de nous déplacer à l'ombre. Mais sur cette route vallonnée celle-ci se faisait rare. Une demi-journée à suer sous un soleil de plomb plus tard, nous fîmes une pause pour attendre que l'astre solaire baisse à l'horizon. Alors que je montais la garde pour permettre à mes compagnons de prendre un peu de repos, j'aperçus à quelques dizaines de mètres un homme assez âgé en grande difficulté. Vêtu de haillons et s'appuyant sur un bâton, le vieillard se mouvait à grand-peine.
Lorsque nous l'apostrophâmes, il nous parut à moitié lucide. Confondant Lucy avec Aline sa petite fille, il nous demanda à boire. Il nous confia s'appeler Bernard mais ne put se souvenir de pourquoi il arpentait cette route. Dans son délire il prit John Long Fellow pour Hervé, un gars avec qui il aurait fait une guerre d'un autre siècle. Notre capitaine rentra dans son jeu car le pauvre vieux était complètement sénile. Mais soudain ce dernier attrapa Lucy par le poignet et l'expression de son visage couvert de rides changea du tout au tout lorsqu'il fixa ma petite protégée.
- Le diable te poursuit ma pauvre ! S'exclama-t-il.
Puis ses yeux redevinrent vagues et il replongea dans son délire. À la suite de cette étrange rencontre, nous reprîmes notre chemin et lorsque la pénombre vespérale commença à s'installer, nous recherchâmes un endroit sécurisant pour dresser le camp. Le soleil se coucha à l'horizon tandis que nous préparions le bivouac. Nous étions sur la défensive comme toutes les nuits depuis notre départ du restoroute. La griffemort qui nous poursuivait n'ayant pas l'air de vouloir abandonner si facilement la partie. Nous allumâmes un feu et décidâmes de goûter les conserves de fangeux. La viande s'avéra caoutchouteuse et très salée mais au moins nous avions l'estomac plein. Après nous avoir aidé à remballer le matériel ayant servit pour le souper, Sly prit le premier tour de garde.
Malgré sa vigilance, six raiders nous tombèrent dessus, balançant une bouteille incendiaire dans les braises encore fumantes de notre feu de camp. Une pluie de grenades fit exploser les arbres tout autour de nous et pour sauver notre peau, nous sautâmes dans la ravine. Notre dégringolade nous mena bien vingt à trente mètres plus bas et il fut vite évident que nous étions incapable de remonter ! Bien que sans gravité, la chute nous avait laissé blessés et contusionnés. L'explosion avait provoqué un éboulement, bloquant le passage dans la direction que nous suivions initialement.
En contrebas de la ravine, s'écoulait un torrent aux eaux tumultueuses et grondantes atteignant en moyenne une largeur d'au-moins cinq mètres. Le vacarme était terrible entre les cris des animaux nocturnes, les tourbillons de l'eau et les grognements plus rapprochés de la griffemort. Tout ça s'ajoutant aux acouphènes de nos tympans suite à la terrible déflagration. Heureusement ceux-ci finirent par s'estomper et nous pûmes mieux nous entendre.
Les cadavres de deux de nos assaillants avaient roulés au bas de la cuvette et Sly ramassa sur le premier corps, deux mètres de fine corde, un couteau ainsi que quatorze capsules. Lucy fouilla le second et mit la main sur une montre à gousset en bon état, une grenade miraculeusement intacte et quatorze caps planquées dans une des bottes du macchabée.
John prenant la tête de notre petit groupe remarqua sur le sol des traces de créatures reptilienne. Nous avançâmes et le hurlement de la matriarche qui nous poursuivait retentit plus fort. Le cri était puissant et semblait se situer au devant de nous. Outre des clapotements bizarres, Sly perçut un vrombissement de plus en plus intensif. Ce dernier provenait du feuillage sur notre flanc gauche. Tandis que Long Fellow apercevait sur l'autre rive ce qui ressemblait à une caisse, le bourdonnement se rapprocha. Les deux hommes avancèrent l'un vers l'autre au moment où plusieurs essaims sortirent des buissons. Il s'agissait de grosses mouches bouffies. Bioluminescentes et hautement radioactives, elles étaient aussi capable de cracher des larves qui foraient la chair de leur victime pour s'en repaître de l'intérieur. Il semblait que nous aillons dérangé leurs nids et leur agressivité était à son comble.
Elles se focalisèrent sur John qui empoigna à deux mains son harpon et faucha quelques insectes au passage. Lucy fabriqua deux bouteilles incendiaires. Je voulu lancer la première mais Lucy bougea à ce moment précis et le projectile l'atteignit nous blessant toutes les deux. Sly quant à lui reçut des larves perforantes qui se mirent à lui dévorer la jambe droite. Notre capitaine se débarrassa d'un essaim et Yu malgré sa jambe blessée tua plusieurs mouches provenant d'un second essaim. En désespoir de cause, je tentai de brûler des nuisibles avant de rejoindre Lucy dans la boue où nous nous roulâmes pour éteindre les flammes sur nos vêtements. Sly parvint à se débarrasser du second essaim mais pas avant que John n'ait reçu lui aussi un cracha de larves qui s'attaquèrent à son bras droit. Désormais dans l'incapacité d'utiliser son arme avec ses deux mains, il continua cependant avec une seule et nous débarrassa d'une nuée de mouches supplémentaire. Une fois qu'elle eut éteint le feu de ses vêtements, Lucy rejoignit le combat et causa de lourdes pertes au dernier essaim.
Le bourdonnement infernal disparut à l'instant où d'une balle j'éliminai la dernière mouche. Sly réussit à extraire les larves de sa jambe, se fit un bandage puis s'occupa de John ainsi que de Lucy et moi. Une fois nos blessures traitées, nous reprîmes la route. Notre capitaine vit un chemin menant à un vieux campement abandonné mais ne perçut pas la chausse-trape avant d'avoir marché dessus. Il fut légèrement blessé mais continua d'avancer. Nous vîmes de nombreuses empreintes de bottes nous signifiant la possibilité de traverser à cet endroit, le torrent à gué. Une fois que John eut repéré plusieurs autres pièges, nous fouillâmes les tentes que les intempéries avaient usée et que les animaux sauvages avaient lacérées. Les cendres du feu étaient froides depuis longtemps déjà. Dans la première tente, Long Fellow trouva les effets personnels dans anciens propriétaires. Il tenta sans succès d'ouvrir une boîte en métal verrouillée. Lucy prit alors des outils et en força l'ouverture. À l'intérieur il y avait une photo de famille représentant un homme, sa femme et leur chien ainsi que quarante capsules. Sly Yu obtint deux poudres de soin et un med-x tandis que je récupérai sept épingles à cheveux.
Sly inspecta la seconde tente et récupéra une tenue des Terres Désolées en excellent état, un chapeau de cow-boy en cuir sombre ainsi qu'une arbalète de chasse munie d'une poulie. Il trouva aussi une hache prévue pour le corps à corps et une clé métallique permettant d'ouvrir un coffre. Dedans se trouvait du Moonshine, un alcool frelaté plutôt fort, deux doses d'anti-venin, une cartouche de cigarettes complète et pour finir deux étuis de ceinture pour arme à une main. Il en garda un me donnant le second. Il y avait aussi les notes d'un prospecteur expliquant son souhait d'utiliser de la dynamite pour creuser dans la large corniche friable se trouvant de l'autre côté du ravin. Il expliquait également comment traverser à gué le torrent grâce à un ingénieux système de cordes. Les grondements de la griffemort se faisant de plus en plus oppressants, nous nous enfonçâmes dans l'eau , luttant contre le courant en nous tenant fermement à la corde. Arrivé sur l'autre rive, notre vieux loup de mer repéra une caisse mais en nous approchant, nous vîmes qu'elle était détruite. Il y eut du remue-ménage en haut de la corniche. Nous fîmes demi-tour et je me retrouvai en tête du groupe. En examinant la paroi, je pus voir qu'elle avait été aménagée par le prospecteur. Les autres me suivirent et je tentai sans succès de grimper sur la corniche. Lucy n'eut pas beaucoup plus de chance que moi contrairement à Sly qui escalada l'obstacle sans difficulté. Au sommet il put voir que le chemin sur sa gauche était bouché. Il vit aussi une caisse et un baril mais en s'approchant, il déclencha un piège à ours qui se referma sur sa jambe. Notre ami grogna de douleur alors que John le rejoignait. Ce dernier aida Sly à sortir du piège tandis qu'à mon tour, je posai le pied sur la corniche. Il y eu un terrible bruit d'arbres brisés et les grognements furieux de la matriarche retentirent bien trop proche à notre goût. J'ouvris précautionneusement la caisse sur laquelle on pouvait lire :
Attention danger d'explosion
Elle contenait de vétustes bâtons de dynamite malheureusement complètement inutilisables. John s'avança et vit un ancien détonateur tandis que Sly lui aidait, grâce à sa corde, Lucy à escalader. Alors qu'il la réenroulait pour la ranger dans son sac, la pluie se mit à tomber et la griffemort que nous savions de plus en plus proche, apparut soudain.
Je voulus la ralentir mais mon tir échoua et ma flèche se perdit dans les fourrés. John inspecta rapidement le détonateur et vit que ce dernier était relié à des explosifs mais ne parvint pas à situer l'endroit où se trouvait la dynamite. Sly tira lui aussi vers la créature mais ne réussit qu'à produire quelques étincelles quand la balle effleura la peau cuirassée du monstre. Lucy quant à elle, réussit à déstabiliser la matriarche en lui balançant une grenade. Poursuivant sa route, notre vieux loup de mer aperçut cette fois un tonneau d'explosifs un peu plus loin près du bord du torrent.
J'encochai une autre flèche qui partit rejoindre sa jumelle dans les taillis puis emboîtai le pas aux autres pour tenter de fuir. Seul Sly Yu resta en arrière, s'emparant de l'arbalète qu'il venait de trouver. Le carreau vint se planter dans la patte antérieure gauche de la bête qui stupéfaite d'avoir été blessée ralentit un peu. Cela donna le temps à Lucy d'actionner le détonateur après y avoir rattaché un des fils.
Une explosion, un éboulement accompagné par les terribles hurlements de la griffemort firent que nos oreilles se remirent à siffler. Profitant de ce répit providentiel, nous fonçâmes vers le tonneau et surtout le large tronc d'arbre situé juste à côté et qui surplombait le ravin.
Long Fellow passa le premier. Le bois craqua sous son poid et il avança avec prudence car la pluie l'avait rendu extrêmement glissant. Nous le suivîmes mais au moment où Lucy commençait la délicate traversée, la matriarche enragée surgit du flanc de la colline juste à quelques pas d'elle. Sly se rapprocha autant qu'il le put et tira à l'aide de son arbalète, blessant la bête qui ralentit sa course avant d'entamer la traversée du pont improvisé, à la suite de Lucy. Le temps que ma protégée nous rejoigne, la griffemort avait atteint le milieu du tronc. Sly prit pour cible le tonneau remplit d'explosifs mais le manqua. Le « pont » flancha sous la masse imposante de la matriarche mais ne rompit point. Saisissant mon propre revolver, je visai à mon tour la barrique. L'impact la fit exploser, envoyant l'arbre mort et sa monstrueuse passagère dans le torrent. Poussant un atroce cri de détresse, la griffemort tenta de remonter à la surface mais sans succès. Elle finit par être emportée et aspirée par l'énorme tourbillon que les flots rapides et violents de la rivière avaient engendrés.
Un peu sonnés par notre course contre la mort, nous reprîmes notre souffle et quand nous inspectâmes les alentours, nous pûmes apercevoir s'ouvrant devant nous, un large plateau découvert. Comme il nous restait encore deux jours de marche pour atteindre Junktown, nous décidâmes de monter le camp et de nous reposer un peu avant de repartir.