Les mystères d'Eldarya
Chapitre 8 : Chapitre 7 : L'eau de rose
2422 mots, Catégorie: G
Dernière mise à jour 21/02/2017 19:44
J'esquivais tant bien que mal l'étreinte d'Ezarel. Je regardai les membres de la garde d'un air apeuré. Aucun d'eux ne réagissais. Je sentais Nevra sur le point d'exploser et de lancer un coup sur la figure d'Ezarel pour lui refaire une beauté... Et entre temps Ezarel continuait à dire des propos insensés. Soudain, il me prit dans ses bras et murmura:
_ Tes joues ressemblent à deux pommes d'amour...
Il me serra fort contre ses bras, depuis quand était-il aussi fort?! Je n'arrivais pas à me dégager de lui et je voyais ses lèvres s'approcher dangereusement des miennes. Mon coeur battait si fort, j'avait attendu ce moment depuis si longtemps, mais pourtant je sentais que quelque chose clochait. Ezarel n'était pas dans son état normal. Je refusais de lui léguer mon premier baiser dans ces conditions. Car oui c'était mon premier baiser qui allait être gâché. NON. Ca n'allait pas se passer comme ça! Je réussis à dégager tant bien que mal mon bras, et lui assenais une gifle dont le bruit retentit dans tout le QG. Les membres de la garde écarquillaient les yeux, et un silence pesant s'installa. Mais bizarrement le seul dont l'attitude ne changea pas fut Ezarel. Malgré la gifle énorme qu'il avait reçue il ne voulait pas me lâcher et couvrait mes joues de baisers.
_ Vous allez continuer à nous observer encore longtemps?! Aidez moi! m'exclamais-je
Ezarel, chef de la garde Absynthe, n'aurait jamais agi de la sorte! Et recevoir une gifle aussi déshonorante l'aurait refroidi à vie. Et pourtant il ne cessait de me couvrir de baisers et de débiter des propos insensés. Mais que lui est-il arrivé bon sang?! Nevra intervint et réussit à éloigner son corps du mien. Heureusement qu'il était là. Ezarel était dans les vapes, il disait sans cesse "Sélia, feu de ma vie, de mon corps...". Ewelein, venait d'arriver, découvrit la scène avec stupéfaction.
_ Que se passe-t-il ici? s'exclama-t-elle
_ Je crois qu'Ezarel a pété un câble, expliqua Chrome
Ewelein nous regarda, interdite. Elle n'arrivait pas à en croire ses yeux.
_ Que lui es-t-il arrivé? demanda-t-elle à mon égard.
_ Je ne sais pas je... tentais-je d'expliquer. Je ne sais pas. Hier... je n'arrivais pas à dormir et je suis restée un peu avec Ezarel. Et ce matin pour le remercier j'ai voulu faire un gâteau. Et depuis qu'il est réveillé il ne me lâche pas.
Ewelein réfléchit un instant. J'avais vraiment honte d'avoir dit ce que j'ai dit, maintenant tout le monde sait qu'hier soir j'ai passé la nuit avec Ezarel...
_ Je peux voir le gâteau un instant?
Valkyon tendit ce qui restait du gâteau (c'est à dire des miettes), et tout à coup les yeux d'Ewelein se mirent à briller.
_ Qu'as-tu mit dans ton gâteau?! demanda-t-elle d'un ton pressant.
Perturbée par son ton un peu brut, elle d'ordinaire si douce, je lui dis:
_ J'ai mis des œufs, du lait, du miel, des fruit secs, de la farine, du beurre du...
_ Non, qu'est-ce que tu as mis de liquide??
_ Bah, du lait... c'est tout... ah non attends! J'ai mis de l'eau de rose pour parfumer le gâteau.
_ DE L'EAU DE QUOI?? s'exclama Ewelein
_ De l'eau de rose... murmurais-je, ne comprenant pas sa réaction.
_ Vite, aidez- moi à porter Ezarel à l'infirmerie!
Tout les membres de la garde se regardèrent d'un air étrange.
_ Qu'est-ce qui est arrivé à Ezarel Ewelein? Quel est le problème avec l'eau de rose? demanda Miiko
_ L'eau de rose est toxique pour les elfes... elle agit comme une potion d'amour. Et vu que Sélia est la première personne qu'il a vue après avoir pris la part de gâteau, il est tombé éperdument amoureux d'elle. Il faut vite que je concocte un antidote! s'exclama la jeune elfe.
_ Je suis tellement désolée... je ne savais pas je... dans mon monde personne n'est allergique à ça... je ne savais vraiment pas, est-ce qu'il va s'en sortir? balbutiais-je
_ Je ne sais pas, dit l'infirmière d'un ton sec
Mince, pourquoi fallait-il toujours que je fasse des gaffes? Moi qui souhaitais juste le remercier j'ai fini par l'empoisonner. Je vis Valkyon porter Ezarel sur son épaule large et l'emmener vers l'infirmerie. Allait-il mourir? Je me sentais tellement inutile. Pourquoi fallait-il toujours que je fasse des gaffes? Depuis le premier jour, il souffre par ma faute. Je l'ai paralysé avec mon chant, je l'ai inquiété lorsque je me suis fait enlever, je lui ai fait perdre des heures de sommeils parce que je n'arrivais pas à dormir, et maintenant il va peut être mourir d'amour... Et je ne pouvais rien faire. Tous ces éléments firent que je me sentis vraiment inutile. Je vis tous les membres de la garde sortir, et j'eus droit à des regards dédaigneux de la part de certaines personnes. Lorsqu'ils furent tous sortis de la cantine, je m'avachis sur mon siège et me mit à sangloter en faisant le moins de bruit possible, pour me fondre dans le décor, pour qu'on oublie mon existence.
J'étais seule.
Totalement seule.
Depuis mon arrivée, je ne causais que des malheurs, des troubles, je n'arrivais pas à comprendre quelle place j'avais dans ce puzzle. Qu'allais-je faire de ma vie? Des questions sans réponses se bousculaient dans ma tête, et ne faisaient qu'accentuer mon chagrin. Tout le monde me détestait... Je continuais à pleurer doucement, ma tête posée sur la table et encerclée par mes deux bras. Je hoquetais, pensant à Ezarel, pensant à ce qu'il devait subir par ma faute... J'avais empoisonné Ezarel!
Je sentis une main se poser contre mon dos et me caresser amicalement. Je ne voulais pas réagir maintenant, je ne voulais pas que mon statut de "chose insignifiante" se confirme. Je refusais de vérifier qui c'était car je détestais pleurer devant quelqu'un. Cette main inconnue était toujours posée contre mon dos, et elle réussit à calmer légèrement mes pleurs saccadés.
_ Ce n'est pas grave Sélia, murmura une voix familière, il ne faut pas que tu te sentes coupable.
C'est comme s'il avait lu dans mes pensées.
_ C'est... de ma faute! Tout est de ma faute, dis-je entre deux pleurs.
Le parfum sophistiqué que je connaissais si bien vint me chatouiller les narines.
_ Ne dis pas cela. Comment pouvais-tu le savoir? Tout le monde ignorait les effet de l'eau de rose sur les elfes...
_ J'aurais du... j'aurais du faire attention, dis-je d'une voix serratique.
_ Chut, ne pleure plus, ça me rend triste de te voir ainsi, souffla-t-il
Ayant toujours la tête cachée par mes bras, j'avais moins de mal à me confier. C'était la première fois que quelqu'un se faisait réellement du souci pour moi, et ça me toucha. Malgré les circonstances dramatiques je fus touchée par ce geste.
_ Mais tout est de ma faute! dis-je avec colère. Depuis que je suis ici, je ne cause que des problèmes. Je ne sers à rien, je n'ai aucun talent, je ne sais même pas ce que je fais ici! Le peu de choses que j'ai à faire se terminent en échec. Je ne sais même pas pourquoi je suis ici, et je ne sais même pas pourquoi l'Oracle m'a désignée.
Ma tirade s'acheva en un sanglot interminable.
La main quitta mon dos. Il partait. J'en étais sure, personne ne tiens vraiment à moi. Il est d'accord avec tout ce que j'ai dit, je suis un cas désespéré...
_ Lève-toi! s'exclama-t-il
Me lever? Il n'était donc pas parti?
_ Lève-toi Sélia! répéta-t-il sur le même ton autoritaire.
Je ne voulais pas... et je voulais en même temps. J'étais désemparée. Mais je me levais, sachant que je devais faire preuve de force, que je devais vaincre mes peurs.
Je fis face à ce regard gris perle, à cette stature d'homme imposante, à la seule personne qui me soit venue en aide. J'affichais mon visage pâle, mes yeux bouffis, mes joues roses et mes lèvres moins rouges que d'habitude. Je vis dans son visage se dessiner un sourire en coin qui dévoila ses incisives de vampire.
_ Maintenant que tu t'es levée...viens avec moi.
Avant que je ne puisse dire quoi que ce soit, il me prit par la main et me tira avec lui vers l'extérieur du QG. Je me résignais à le suivre.
Il me prit par la main et me on parcourut la totalité du QG. On passa par l'allée des arches, puis on se retrouva hors du QG. J'essayais d'oublier qu'Ezarel était dans un état critique, et me contentais d'espérer qu'il se rétablisse au plus vite. On prit une ruelle déserte, qui débouchait vers des escaliers en spirale. J'essuyais mes larmes en essayant de reprendre des couleurs. La main de Nevra était fermement agrippée contre la mienne, et lorsqu'il faisait un pas je devais en faire deux(merci qui? ma taille de nain<3). Il commença à accélérer et je faillis trébucher. Il s'excusa et ralentit le pas. Je me demandais réellement vers où menait cet escalier...
Quand soudain.
Explosion de couleurs.
Fusion de l'âme et du corps.
Beauté ineffable, indicible.
Méli-mélo de la terre, de la mer, du ciel.
Des émotions confuses retournaient mon corps. Je lâchais la main de Nevra pour épouser des yeux le paysage qui s'offrait à moi, à lui, à nous. Une mer aux reflets multiples décomposait la lumière du soleil, en agissant tel un prisme. Du jaune, du bleu, du vert, du rouge... toutes ces couleurs miroitaient dans l'air et donnaient une aura magnifique à la vue. On voyait des poissons libellules danser de part et d'autre, et nous offrir un spectacle amoureux magique. Tout respirait la féerie, et je me sentis projetée dans un conte merveilleux. Autour de moi tout avait disparu. Il ne subsistait de ce monde que la nature, alliée à mon cœur, mon âme. Le temps s'était écoulé à une vitesse ahurissante aujourd'hui. J'avais l'impression que le soleil venait à peine de se lever, alors qu'il se couchait déjà sous mes yeux. Il était fatigué, mon soleil, fatigué. Il laisse sa place à la lune. Mais avant de m'adresser un au revoir, il dépose un baiser sur mes lèvres tristes. Toutes les histoires ont une fin, même les plus belles. La main de Nevra récupéra la mienne, me tirant de ma demi-rêverie. Sentant que ce moment était important pour moi, il me murmura de la manière la plus douce:
_ C'est ici que je viens lorsque je doute de moi. Je me dis que, finalement, même la nuit la plus sombre se terminera par le lever du soleil. La plénitude que j'éprouve en ce moment à est juste...
_ Indescriptible, complétais-je
Un sourit au soleil, les yeux brillants.
_ Tant de naturel me rends heureux, souffla-t-il
Il serra sa main plus fort, comme s'il avait peur de me perdre. J'étais surprise qu'il se confie autant à moi. Il me faisait confiance.
_ Tu es extraordinaire Sélia. Extraordinaire. Que tu ne sois pas consciente de ta valeur me choque. Mais il arrivera un jour où tu t'en rendras compte. Ce jour là, je ne serais plus rien à tes yeux.
_ Nevra...
_ Non ne dis rien, laisse moi finir. Ce jour là arrivera. Et je ne pourrais que te souhaiter que du bonheur. Tu te mariera avec l'homme de ta vie, pendant que moi je vivrais au jour le jour avec ces filles artificielles d'une nuit. Mais... je ne veux pas de cela tu sais.
Il marqua une pause. Je voyais ces sourcils se froncer, et une main glisser sur ses cheveux de jais. Quand il leva la tête, il fusionna son regard au mien. Mes joues rosirent.
_ Depuis le premier jour, j'ai su que tu n'étais pas ordinaire. Sélia...
Il cessa de parler, et mit derrière mon oreille l'une de mes boucles noires. Son parfum embaumant me donnait envie de le respirer éternellement. Il s'approcha de moi hésitant, presque maladroitement. Voir Nevra perdre tous ses moyens devant moi me fit sourire. Lui d'ordinaire si charmeur en présence des jeunes filles qu'il côtoyait semblait avoir perdu de son assurance. Il était juste... naturel. Il s'approcha encore, jusqu'à ce que nos lèvres ne soient qu'à quelques millimètres l'une de l'autre. Son souffle chaud me chatouillait le cou, ses bras musclés étaient enroulés autour de ma taille, ses cheveux lisses caressaient mes joues. Je me sentais à l'aise avec lui et pourtant... l'image d'Ezarel me bloqua. Je ne savais pas si c'était avec Nevra que je devais faire ma vie.
_ Nevra je... je suis confuse, dis-je ma tête enfouie contre son torse.
Je me dégageait doucement de son étreinte, et il me questionna du regard.
_ Je ne sais pas à quoi on joue, Nevra...
_ Qu'est-ce que tu veux dire par là? demanda-t-il en masquant tout sentiment de déception.
Je cherchais mes mots, comment allais-je lui dire que je pensais à Ezarel quand j'étais dans ses bras?
_ Tu penses toujours à lui n'est-ce pas?
_ Je... je ne sais pas. Je suis perdue.
Nevra détourna rapidement le regard pour observer les derniers rayons du soleil. Il se mordit la lèvre inférieure et serra les poings en signe d'impuissance. Jamais une fille ne lui avait autant résisté. Une vague de tristesse déferla sur lui. En évitant de croiser mon regard, il me demanda :
_ Mais que dois-je faire pour que tu t'intéresses à moi?!
Devant tant de désarroi je ne sus quoi répondre.
_ Tu es la femme de ma vie Sélia, je n'ai jamais éprouvé ce que j'éprouve pour toi en ce moment là.
Il serra ses poings encore plus fort, ne sachant pas quoi faire.
_ Nevra, ne change surtout pas. Mais comprends moi, je ne peux pas me jeter dans tes bras du jour au lendemain... je suis confuse. Laisse moi un peu de temps.
Il daigna enfin me regarder. Je voyais dans ses yeux qu'il voulait me prendre dans ses bras, je sentais qu'il ne pouvait détacher son regard de mes lèvres rouges.
_ Soit, dit-il d'un ton neutre.
Et il partit, sa cape virevoltant dans l'obscurité.
Mon Dieu...
Avais-je pris la bonne décision?