Les mystères d'Eldarya

Sélia sentait Ezarel grommeler depuis quelques minutes.Il arrêta un instant de se plaindre pour observer cette jeune fille. Son teint était caramélisé par le soleil, et ses boucles noires ondulaient dans tous les sens. Ses joues avaient repris leur couleur rosée, et sa bouche était teintée d'un rouge naturellement profond. Cet alliage de couleurs  étrange rendait Sélia unique. Son visage n'était pas distingué sur Terre, mais à Eldarya ses traits étaient très rares. Ezarel se souhaitait pas s'avouer qu'il trouvait cette petite humaine insignifiante mignonne. Il continua donc à grommeler.Sélia battit des paupières et ouvrit ses grands yeux violets.Ezarel écarquilla les yeux. Ce violet... Sélia s'étira le corps puis s'assit au bord du lit.

_ Tu es ENFIN réveillée! J'ai cru que tu étais morte. Quoique ça ne m'aurait fait ni chaud ni froid,  dit Ezarel en reprenant sa moue sarcastique.

_ Ca fait plaisir de se faire réveiller par un elfe grincheux! riposta Sélia.

_ Chuut, ne dis rien, mes oreilles sont  fragiles, dit-il en plissant les sourcils.

Un sourire diabolique vint orner le visage de Sélia.

_ Prépare toi à souffrir! dit-elle

Et elle se mit à chanter.Le son de sa voix ondulait dans l'air d'une manière majestueuse. Elle tintait d'une manière cristalline, épurée. Ezarel était tétanisé. Il n'arrivait pas à bouger ses membres. Sélia était surprise par sa propre voix, qui avait gagné en douceur, en puissance, et en couleurs. Elle n'avait jamais aussi bien chantée. Son chant s'effaça tranquillement, et perdit de son ampleur pour redonner à la pièce son espace.Ezarel sauta de sa chaise et commença à bouger ses membres dans tous les sens.

_ Qu'est ce que tu m'as fait?? demanda-t-il d'un air théâtral

_ Rien, de quoi tu parles?!

_ Je n'arrivais plus à bouger, presque plus à respirer, tu veux ma mort, femme!Sélia étouffa un rire.

_ Tu hallucines mon pauvre

_ Tu essayes toujours de tuer les gens qui sont la CONTRE LEUR GRE et qui te protègent?

_ Mais je te rappelle que tu voulais me jeter au cachot! C'est moi qui devrait être en colère!

_ C'est qui qui a voulu manger mon miel? Je protège juste ce que j'ai de plus précieux.

_ Mais j'avais faim!

_ Ce n'est pas une excuse!

_ Tais toi ou je chante!

_ Tu crois pouvoir me menacer ainsi, chose. Tes menaces n'ont aucun effet sur moi, Ezarel, chef de la gare Absynthe!

Sélia faillit exploser de rire en voyant le torse bombé de fierté et d'orgueil d'Ezarel. La modestie n'était décidément pas son fort, songea-t-elle.

_ Explique moi maintenant pourquoi ta voix m'a enchainé, tempéra Ezarel

_ Comment est-ce que je suis sensée le savoir?! Je ne reconnais pas ma propre voix!Ezarel s'apprêtait à répondre quand Miiko et Kero firent leur apparition. Ils prirent place devant elle. Miiko s'exprima en premier:

_ Pourquoi est-ce que tu ne m'as pas appelée plus tôt Ezarel? Elle est réveillée depuis longtemps?

"Elle s'exprime comme si je n'étais pas là..."

_ Je ne pouvais pas bouger, figurez-vous!

_ Comment cela? demanda Kero perplexe

_ Cette humaine m'a immobilisée! s'exclama Ezarel.

_ Cette humaine a un nom figure toi! C'est Sélia! Séliaaaaa, c'est pas dur à comprendre non? dit-elle en rougissant de colère. Ca te plairait que je t'appelle Elfe? Je ne pense pas. Alors appelle moi par mon prénom.

Kero murmura à Miiko "Je crois qu'elle a bien récupéré".

_ Mais qu'est ce qui s'est passé? demanda Miiko.

_ Son chant m'a paralysé, cette fille est dangereuse.

_ Tu es fatiguant Ezarel... soupira Sélia.

Kero fronça les sourcils. Timidement, il dit à Sélia:_ Si ce qu'Ezarel dit est vrai, tu sembles avoir des pouvoirs de faelienne. Des pouvoirs de sirène pour être plus précis... On te fera passer un test pour confirmer ou non nos conjectures. Est ce que tu as déjà eue l'occasion de vivre une même situation sur Terre?

C'en était trop. Trop de pression, trop d'accusations.

_ NON! Je ne sais pas où je suis, je ne sais pas qui je suis, et je ne sais pas d'où me vient ce pouvoir. Je ne sais pas pourquoi l'oracle m'a choisi, et je me fiche de le savoir. Je veux juste rentrer chez moi, et je veux juste que vous me lâchiez ! Je m'en vais!Elle joignit le geste à la parole et sortit de l'infirmerie. Elle courut à s'en arracher les poumons, quand elle se heurta à une personne. Elle leva les yeux et vit un beau jeune homme blond avec une mèche noire.

_ Ou vas-tu comme ça? demanda-t-il en souriant.

_ Je veux rentrer chez moi, dit elle en retenant ses larmes. Elle se sentait réellement petite face à lui.

_ Je sais que c'est difficile pour toi d'être ici, tout t'es étranger. Mais sache que les personnes différentes ne sont pas forcément tes ennemis, mais de nouveaux alliés.

_ Mais personne ne m'a fait part de sa sympathie, personne n'a pris le temps de me renvoyer chez moi, personne ne me fait confiance.

_ Ne t'inquiète pas, tout cela va venir avec le temps. Personne n'est bien méchant ici.

Sélia ne dit rien et songea à Ezarel.

_ Tu vas t'habituer à Ezarel, dit-il en lisant dans ses pensées. Mais si tu as  réellement réussi à le faire taire, je t'en prie je suis tout ouie.

Sélia sourit et se sentit soudainement moins triste.

_ Je me nomme Leiftan d'ailleurs, excuse moi de ne pas m'être présenté plus tôt. Je dois te laisser malheureusement Sélia, nos chemins se recroiseront surement.Sélia observa sa silhouette se diriger vers le corridor des gardes en se demandant comment il connaissait son prénom.***Kero passa des heures et des heures à expliquer à Sélia comment fonctionnait Eldarya. Elle apprit qu'ici la nourriture était rationnée, car Elarya ne produisait que de la nourriture non nutritive. Elle apprit également que la garde d'Eel se divisait en quatre gardes: la garde Etincelante, Absynthe, de l'Ombre, et Obsidienne. Chaque garde était dirigée par l'un des hommes qu'elle avait rencontrées. Elle comprit que le grand cristal était la source d'énergie vitale de tous les habitants d'Eldarya, et que l'objectif de la garde d'Eel est de restaurer les cristaux manquants, ainsi que de maintenir la cohésion du peuple et rationner la nourriture. Mais ce qui l'abattit, c'était de savoir qu'elle ne pourrait plus rentrer chez elle. Cette nouvelle lui fendit le cœur. Mais elle ne souhaitait pas s'apitoyer sur son sort: elle allait vivre chaque instant de sa vie comme si c'était le dernier. Elle fit le test de Kero et rejoignit la garde Absynthe d'Ezarel ( a son plus grand bonheur...). Celui ci tâcha d'exprimer son bonheur et lui dit qu'il "allait bien s'occuper d'elle", en lui signalant que si elle n'avait aucune base en alchimie, il lui ferait vivre le pire des cauchemars... Les tests avaient montré qu'elle possédait bien des origines faeliennes, mais nul ne saurait dire à quelle espèce elle appartenait. Ezarel  lui avait décoré sa chambre sur sa demande, et tout était sensé se passer pour le mieux. Mais en fait, personne ne savait réellement quoi faire de Sélia, ils sentaient qu'elle était importante, mais ignoraient en quoi elle allait pouvoir les aider...***Je me suis blessée comme une grosse gourde. Je devais simplement ramener de la sève liquide disponible dans la clairière à Ezarel... et voilà que je me retrouve avec les mains et les genoux écorchés. Mais ce n'est pas de ma faute si la sève est inaccessible! C'est sûr qu'avec mon mètre cinquante cinq je ne pouvais pas aller bien loin. Mais j'ai réussi à avoir cette sève! J'était teeellement fière de moi,  que s'en était pathétique... Avec une joie nouvelle, je courus vers la salle d'alchimie en parcourant l'allée des arches, le kiosque central, le refuge d'Eel, pour finalement arriver devant cette salle. Mon coeur battait fort contre ma poitrine, et j'avais peur qu'Ezarel me lance de nouveau des remarques d'un humour noir, et briser ma joie ridicule. J'entrais donc avec mon Graal, et vit Ezarel bouger dans tous les sens, avec une expression de concentration extrême. J'avais tellement envie de poser ma tête sur son épaule pour la taquiner, mais je détestais qu'on me fasse cela quand je travaillais, donc je m'abstins. Mais ça me piquais vraiment...Je réalisais qu'il était vraiment mignon lorsqu'il se concentrait en fait. Il fronçait les sourcils intensément, et une mèche bleue venait se poser devant ses yeux avec folie. Pourquoi était-il si attirant et repoussant à la fois... Si  seulement il était plus aimable, peut être que ça aurait pu marcher entre eux.Ezarel acheva l'étude de son grimoire et se rendit compte de ma présence. Un peu étonné, il me demanda:

_ Ca fait longtemps que tu es là?

_ Mmmh peut être une bonne vingtaine de minutes.D'un air suspicieux, il dit:

_ Ca m'étonne que tu ne sois pas venue me déranger, qu'est ce que tu veux?

Je souris

_ Rien je t'assure, c'est juste que je déteste être dérangée quand je travaille, et donc je me suis dit que ça ne te plairais pas trop.

_ Tu as bien fait, dit-il honnêtement

_ Voici la sève d'ailleurs! dis-je en présentant mon trésors.

_ SELIA! espèce de disciple insignifiant! regarde tes mains!! Qu'est ce que j'ai fait pour avoir un disciple aussi incompétent... Mon Dieu sauvez moi de ce calvaire! s'exclama Ezarel d'un air exaspéré.

A ce moment là je me fis toute petite. Je savais que je m'étais loupée, que je manquais d'entrainement et de force.

_ Couche toi ici, ordonna-t-il en désignant un lit.J'obtempérais un peu angoissée. Ezarel s'agitait de nouveau dans tous les sens et semblait concocter une pommade. Une odeur agréable d'eau de rose et de fleur d'oranger avait gagnée la pièce. Ezarel posa une chaise et s'assit en face de moi. Silencieusement, il prit ma petite main et grimaça lorsqu'il vit que la plaie était plutôt profonde. Il murmura:

_ Ca va un peu piquer.

Je n'avais jamais été aussi près d'Ezarel. Il sentait la nature, les fleurs, la violette. Ses doigts longs prirent possession de ma main et enduirent les écorchures de pommade. Sa douceur m'intriguait. J'étais tellement gênée que mes joues auraient pu servir de phares. Quand il finit de soigner mes mains, il remarqua mes genoux et se frappa le front. Il grommela une phrase qui semblait dire "et ça se dit disciple...". J'étais morte de honte. Il posa de la crème sur mes genoux  également, et je me retins de rire, ça chatouillais! Finalement, il banda mes blessures vite fait et me dit:

_ Tu peux y aller maintenant, ne sois pas en retard demain. Je veux te voir ici avant cinq heures du matin.Je me contentais d'hocher la tête, je n'allais pas me plaindre après tout ce qu'il avait fait pour moi.Encore sous le choc, je sortis de la salle d'alchimie en calmant mon petit cœur d'artichaut. Tout en lui me faisait fondre... mais il étais hors de question que je lui fasse part de mes sentiments. Je n'ai pas envie. En plus c'est le genre de personne qui risque de me blesser. Et puis je n'ai pas envie de penser à lui... et... et...JE M'EGARE! Je m'égare tellement que je me suis encore cognée sur quelque chose, et ça a fait souffrir mes blessures. Je palpais la chose... puis j'ai vite fait enlevé mes mains du torse de Nevra. Pourquoi je devais tomber sur Nevra? Pourquoi?

_ On cherche du réconfort? murmura Nevra

_ Lâche moi Nevra, dis-je en voyant ses mains s'approcher dangereusement de ma taille.

_ Ne t'inquiètes pas, tu ne risques rien, fais moi confiance, susurra-t-il en laissant apparaitre ses incisives pointues.

Il posa un baiser brulant sur mon cou et me plaqua contre le mur.

_ Lâche moi Nevra! répétais-je de ma voix qui ne portait plus.

Son souffle chaud faisait virevolter mes mèches. Je sentais son corps chaud collé au mien, la forme de ses abdominaux creusés modeler mon corps. Je voulais qu'il s'éloigne de moi, mais mes bras n'étaient pas assez puissants. Je n'arrivais plus à respirer, son parfum emplissait mes poumons, et la panique avait gagné mon corps. Je ne faisais pas le poids.

_ Elle t'as demandé de la lâcher!Nevra s'éloigna d'un millimètre pour toiser celui qui avait osé l'interrompre. Quand je vis la silhouette élancée d'Ezarel, mon coeur fit un bond dans ma poitrine.

_ Ce ne sont pas tes affaires Ezarel! siffla Nevra.Voyant que l'affaire était à mon avantage, je posais mon regard fuyant sur Nevra et lui dit:

_ Lâche moi Nevra. Je ne veux pas que tu me touches.Nevra me regarda d'un air déçu. Après un long silence, il finit par dire:

_ Dommage, j'aurais bien aimé te croquer.Puis sourit et me rajouta:

_ Tu ne pourras pas résister à mon charme! Ce n'est qu'une question de temps, ma belle Sélia.Il me regarda une dernière fois puis partit, en laissant derrière lui son parfum si distingué.Je me retrouvais seule avec Ezarel, qui avais assisté à la scène... Vous ne pouvez pas imaginer la gène que j'ai ressenti à ce moment là. Curieusement, Ezarel ne semblait pas en colère. Ses yeux d'ordinaires si vifs étaient teintés de tristesse.

_ Je...

_ N'en parlons plus, dit-il sèchement. Demain, 5h, aucune excuse. Sauf si tu es occupée avec Nevra.

Il ne me laissa pas le temps de répondre et partit d'un pas pressé.