Olwë : Les chimères Oniriques
Katelyn rouvrit les yeux doucement. La vision trouble, le souffle court, elle eut un haut-le-cœur qu'elle réprima de toutes ses forces. Désorientée, elle regarda autour d'elle, pour essayer de retrouver ses repères.
_Ce n'est qu'une hallucination Kat ! Se rassura-t-elle à haute voix. Ce sont sûrement les toxines de ces champignons qui ont dû te faire délirer, tu es juste tombée dans les pommes. Tout va bien ! Tu vas retrouver Eos, et rentrer à la maison !
L'atmosphère de la forêt avait changée. La jeune femme se redressa, leva les yeux, et s'aperçut qu'elle était sous un autre arbre. Un énorme vieux chêne aux racines entremêlées, couvert de lierre et de mousse, aux branches crochues garnies d'un épais feuillage étrangement pourpre. Des sphères lumineuses de diverses couleurs pendaient tels des fruits, répandant une lueur douce qui lui permettait de voir dans la pénombre. Elle ramassa son sac et fit un pas en arrière. Elle sentit que le talon de sa botte s'enfonçait légèrement dans la terre meuble recouverte d'herbes fraîches. Sous sa chaussure, la parcelle de sol se mit à briller telles des milliers de petites lucioles.
_Je...je dois rêver ! Balbutia Katelyn, émerveillée par ce spectacle.
Elle recula de nouveau son pas s'éclaira, tandis que le précédent commençait déjà à se ternir. Elle jeta un coup d'œil circulaire à cette fantastique forêt.
« C'était peut-être une hallucination, mais tout me paraît si réel ! » Pensa la jeune fille.
Une brise légèrement tiède aux effluves de violette, fit bouger les sphères lumineuses. Elle se sentit soudain légère. Mais une boule se forma au creux de son estomac, une angoisse s'empara d'elle. Son souffle s'accéléra, son cœur s'emballa.
« Je dois sortir d'ici, et vite ! » Se dit-elle, paniquée.
Elle commença à avancer quand une étrange créature passa devant elle, s'arrêta puis la regarda fixement. Elle ne put savoir de quoi il s'agissait, même dans ses rêves les plus fous elle n'aurait pu imaginer une telle chose, d'une beauté surnaturelle. Son corps gracieux tel ceux des félins était entouré du sol lumineux. Sa queue couverte d'écailles d'ivoire se balançait lentement. Son long pelage d'une blancheur immaculée couvrait l'intégralité de son corps mince. La petite bête était pourvue d'une longue paire de cornes de cerf, blanche comme recouverte d'une fine pellicule de givre. La face de l'animal se rapprochait d'un lévrier afghan avec une délicatesse irréelle, son museau finement allongé lui donnait une expression de sagesse. Ses yeux bleu glacier dépourvus de pupille fixaient la jeune femme, comme si cette créature voulait lui communiquait quelque chose. L’étrangère remarqua que la bête avançait vers elle, en lévitation. Sous chacun de ses pas gracieux, le sol s'illuminait. Katelyn n'osa plus bouger, de peur de faire fuir cet animal fantastique. La divine créature n'était plus qu'à quelque centimètres de la jeune fille aux cheveux d'ébène. Elle leva le museau vers l'humaine. Des dizaines de petites lucioles et de petits lézards volants luminescents prirent leur envol. Une danse de lumière fantastique se fit autour de la jeune femme émerveillée par un tel spectacle, rempli de poésie. Soudain, les oreilles de l'animal se mirent à bouger frénétiquement. Une vague de panique s'empara de la sublime créature, qui regarda plus intensément Katelyn. Celle-ci comprit que quelque chose allait se produire, une menace allait surgir d'un instant à l'autre. La mystérieuse bête fit un rapide demi-tour, et s'enfuit à travers les arbres. La botaniste eut le pressentiment qu'elle devait la suivre coûte que coûte. Elle se mit à courir en suivant les pas lumineux de la créature. Esquivant les troncs d'arbres morts, les gigantesques fleurs aux couleurs phosphorescentes, dans la pénombre de la forêt dense. Kat prit plus de vitesse, ne voyant plus que les pas brillants de la créature qui était déjà bien loin devant elle.
« Attends-moi ! » Cria intérieurement Katelyn.
L'animal sembla ralentir sa course, donnant plus de courage à la jeune étudiante qui regagna de la vitesse. Elle ne voyait plus les détails du décor, elle était obnubilée par les pas de la bête fabuleuse. Son parcours lui semblait durer une éternité. À bout de souffle, elle s'arrêta et remarqua que la forêt avait changé. La lumière naturelle traversait à présent les feuillages devenus moins drus, quelques rayons de soleil illuminaient les troncs couverts d'une épaisse couche de mousse verdoyante. La créature irréelle semblait avoir disparu par enchantement. Katelyn trouva un tronc assez épais pour qu'elle puisse s'y asseoir. Elle dégagea les quelques morceaux de feuilles mortes et les bouts de terres, et s'y reposa. Elle jeta un coup d'œil aux alentours. Deux petites créatures se réchauffaient à la lumière d'un rayon de soleil qui éclairait l'écorce d'un arbre. L'une d'elles ressemblait à une reinette verte, recouverte de taches brunes et ocre. Elle possédait une paire d'ailes à la membrane délicate, ainsi qu'une fine queue de lézard. Ses yeux globuleux jaunes à la pupille horizontale fixait la jeune adulte aux cheveux d'ébène. L'autre était un petit iguane pourvu lui aussi d'une paire d'ailes à la couleur bleu lavande, une rangée de petites cornes déterminait l'emplacement de la colonne vertébrale de l'animal. Les yeux fermés, le reptile profitait du soleil qui réchauffait sa peau écailleuse. L'étudiante fut stupéfaite, des petits dragons se trouvaient près d'elle. Elle essaya tant bien que mal de sortir son carnet à croquis et son crayon de papier sans faire trop de bruit, pour ne pas faire fuir ces créatures fantastiques. Les bruits de feuilles, ainsi que de coups de crayons se mêlèrent aux chants mélodieux et gutturaux des oiseaux de cette faune exceptionnelle.
Cet instant de plénitude lui fit le plus grand bien, quand elle eut finit son œuvre, elle regretta de ne pas avoir pris ses pastels pour saisir leurs couleurs exquise. Elle rangea son carnet dans son sac. Elle fit trop de bruit pour l'iguane bleu qui lui adressa un regard noir, ouvrit la gueule et feula agressivement. La jeune femme se releva, en serrant son sac contre elle prête à s'en servir comme arme. Le reptile déploya ses ailes en avançant vers elle d'un air menaçant.
_Du calme petite bête, je ne te veux pas de mal, reste tranquille lui dit-elle d'une voix douce.
Mais l'animal ne laissa pas attendrir, son acolyte la grenouille aillé émit à son tour un grognement proche de celui d'un cochon. Katelyn sentit qu'elle devait se défendre, sinon ces petites choses allaient l'attaquer. Elle brandit son sac, frappa contre l’écorce de toutes ses forces. Les deux agresseurs s'envolèrent et se posèrent juste derrière elle. La fille ne se découragea pas devant la faune qui se montrait hostile.
_ Je ne vous aies rien fais ! Pourquoi vous m'attaquez ! leur cria-t-elle.
La grenouille lui sauta à la face, par réflexe Kat lui asséna un grand coup, la créature couina, tomba au sol en gémissant. L'amphibien émit un cris déchirant, comme une plainte, un appel au secours. La botaniste se mit à genoux devant la petite bête qu'elle avait blesser sans le vouloir.
_Je suis désolée, je ne voulais pas te faire de mal. lui chuchota t-elle d'un air coupable.
Elle toucha le petit animal aillé, elle remarqua que sa patte formait un angle anormal. Elle défit ses bandages qu'elle avait à la main, ramassa une brindille, et saisit le membre cassé de la grenouille.
_Ça risque de faire très mal ! Avertit Katelyn.
Elle fit un geste vif, un craquement sourd, les plaintes de la créature. La jeune femme fit une atèle de fortune à l'amphibien blesser.
« Je suis contente que tout ce que m'enseigne papa ne me sert pas à rien » pensa-t-elle le sourire au lèvre.
Elle prit la bête qui se tortilla comme un ver, elle le redressa sur ses pattes, et l'aida à prendre son envol, qui partit comme une furie vers les bois.
« Surtout, ne soit pas reconnaissant envers moi ! » Pesta intérieurement la jeune femme.
Elle remit son sac en place, se retourna pour reprendre sa route quand soudain, elle sentit le sol trembler sous ses pieds.
_Un tremblement de terre ? Demanda-t-elle à haute voix. Non, un galop !fit-elle en écarquillant ses yeux violet.
Les buissons se mirent à trembler, le sol s'illumina, la secousse se fit plus forte. Un rugissement assourdissant retentit. Kat écarquilla les yeux. D'énormes yeux jaunes l'observait dans l'ombre. La peur. La jeune femme se retourna. Courir. Fuir. Survivre ! Elle fuyait, se protégeant le visage avec ses bras. Le feuillage la fouettait au sang. Des larmes vermeilles coulèrent sur ses joues pâles. Elle se retourna pour voir la créature. Un énorme crapaud de couleur ocre, la gueule béante hérissait de crocs acérés, la poursuivait. La créature était plus haute et plus large qu'une vache. Ses ailes pourpre brassait l'air, lui donnant plus de vitesse, sa queue fouettait le feuillage avec rage. Katelyn prit plus de vitesse, elle distança la créature. A bout de souffle elle continua sa course folle. Elle fut stoppée net par un précipice. La jeune femme s’aperçut qu'elle avait quitter la forêt, le soleil l'éblouissait, elle sentit la brume rafraîchir son visage. Elle était à côté d'une cascade à l'eau turquoise qui se jetait 20 mètres plus bas. Elle leva la tête vers le ciel, regarda le soleil, en se protégeant les yeux. Elle vu un spectacle inimaginable. Deux planètes remplaçait la lune, la première était comme le satellite de la Terre, et l'autre, à l'identique de Jupiter. Elle fut choquée. Elle regarda à l'horizon, vit une cité, avec un phare blanc, et des remparts. Elle estima qu'elle devait être à une vingtaine de kilomètres de ce signe de vie. Sa stupeur se changea en joie à la vue de cette ville fortifiée.
« Je vais pouvoir rentrer chez moi ! » Se dit-elle émue aux larmes.
Un cris terrifiant, un mélange entre un rugissement de tigre, et le hurlement d'une coq déchira le ciel. Une ombre enveloppa la jeune femme. Elle se recroquevilla, la créature la frôla de peu. Le volatile se redressa dans la ciel, Katelyn se releva, et regarda l'étrange oiseau.
_Un Cocatrix ! Comment c'est possible ! Hurla-t-elle.
La créature mythique plongea vers elle en piquer, son bec de coq remplit de crocs était largement ouvert. Kat l'esquiva, en faisant une roulade sur le côté. L'animal se posa à une dizaine de mètres de la fille dans un fracas de bois brisé, et de hurlements. Elle regarda la bête un bref instant. Le Cocatrix avait une tête de coq noir, un bec remplit de dents acérées, dont un liquide violet coulait, chaque goûte qui touchait le sol le brûlait, tel de l'acide. Ses yeux de serpent rouge feu, dévorée l’Étrangère. L'animal était sur quartes pattes, une paire d'ailes munies de griffes acérées, marchant comme une chauve-souris, et une paire de pattes de dragon à l'arrière. Une longue queue fessait siffler l'air.
_Ne le regarde pas dans les yeux ! Souviens toi de ce que maman te disait ! « Le Cocatrix, ou le coq de Méduse, comme on l’appelle est une créature qui pétrifie ses proies d'un seul regard. C'est ce que disait Pline l'Ancien dans son ouvrage l'Histoire naturelle . » Se remémora la jeune femme.
Elle regarda en arrière vers la cascade, elle se retourna, la créature hurla de nouveau. Kat couru, accrocha son sac de toutes ses forces et ce jeta à corps perdu dans l'eau sous les cris terrible de la créature.