Reunification
Avant que le chef de milice Brâkmarien ne reprenne le chemin de la cité Noire, les gouverneurs ordonnèrent aux cinq miliciens d’aller sur les premiers lieux de l’invasion.
Les Bontariens s’étaient équipés à la milice et avaient également rendu les équipements, à contre cœur, à leurs ennemis à présent alliés.
Ils se dirigeaient maintenant vers le quartier des éleveurs pour aller chercher les montures des soldats de la cité Blanche avant de prendre le zaap. Les Brâkmariens iraient retrouver les leurs en passant dans la cité Noire pour ensuite aller au cimetière des Torturés.
La troupe traversa le quartier, qui grouillait de monde qui s'occupait de ses animaux dans les enclos publiques, puis arriva devant les enclos réservés à la milice. Les Iops et le Crâ se dirigèrent vers l’un et entrèrent pour aller chercher leur dragodinde. Elles étaient toutes les trois amandes mais dès que leurs maîtres posèrent leur main sur leurs écailles, celles-ci prirent la couleurs des vêtements qu’ils portaient. La dragodinde de Mesalune prit une couleur rouge comme ses cheveux avec des tâches aigue-marine. Celle de Elbogos était blanche avec des tâches noires. Et celle de Fireknight avait trois couleurs différentes : gris ardoise, jaune or et marron foncé.
Ils les guidèrent en les tirant par leur corde au lieu de les monter. Le zaap se trouvait dans le centre-ville et n’était pas loin.
Dchikter fut surpris et resta bouche bée devant l’incroyable nombre d’habitants et de marchands qui se trouvaient sur la place du portail. On aurait dit des fourmis tellement il y avait de monde. Ils durent jouer des coudes pour attendre le zaap.
-Direction : cité de Brâkmar ! s’exclama Mesalune dans un rayonnant sourire.
Et elle s’élança avec sa dragodinde dans le portail bleu, bientôt suivie de tous les autres.
Dès qu’ils sortirent du portail, l’atmosphère s’opposa totalement à celle de Bonta. L’air était lourd, faisant transpirer les Bontariens dès qu’ils posèrent un pied sur les sombres pavés. Une mauvaise odeur de sang régnait dans l’air et prenait à la gorge des deux Iops et du Crâ.
-Ah, respira à grandes bouffées le Sram en s’étirant. Rien de mieux qu’un bon bol d’air frais.
Dchikter et Cerise marchèrent de bon cœur jusqu’aux étables des dragodindes, à l’ouest du portail zaap, alors que les autres essayaient tant bien que mal à se retenir de régurgiter leur déjeuner.
Les deux Brâkmariens ressortirent des étables avec une dragodinde rouge pour l’Ecaflip, et une monture tout en métal doré pour le Sram.
-Suivez-nous, les incita Dchikter en montant sur sa monture de métal. Le cimetière est à l’est.
Ils traversèrent la ville déserte pour franchir la porte est et continuer à marcher vers le cimetière qui n’était plus très loin. Plus ils avançaient, plus la puanteur du sang s’intensifiait et plus elle finissait par devenir insupportable. Même Cerise, qui était pourtant habituée à ce genre d’odeur, se couvrit le nez de sa main. Les montures qui marchaient dans les flaques de sang laissaient des traces derrière elles.
Ils s’aventurèrent encore un peu plus loin avant d’être interrompus dans leur marche par un cri perçant de Mesalune.
-Aaaaaaaah !!
Ils se retournèrent tous en même temps, prêts à attaquer en cas de danger, pour voir ce qu’il se passait. La Iopette avait le visage pâle et tremblait comme une feuille. Sans bouger le reste de son corps, elle tendit le bras et pointa du doigt quelque chose devant eux. Un squelette gisait par terre, en position de prière.
-Bah quoi ? dit Dchikter qui avait l’air un peu agacé. C’est un cimetière ici, alors t’en verras souvent. Et puis, moi aussi, je suis un squelette, si t’avais pas remarqué.
Dégoûtée, la Iopette le regarda d’un air étrange avant de se reprendre.
Ils reprirent la marche jusqu’à arriver sur un vrai champ de guerre.
Une montagne de cadavres avait été montée près d’une statue de Faucheuse. L’air était si méphitique que cela fit tousser les Bontariens.
-C’est horrible…
Cerise n’en croyait pas ses yeux. Jamais elle n’avait vu autant de morts. En agissant ainsi, les créatures envahissantes avait décimé plus de la moitié de l’armée de Brâkmar.
Dchikter descendit de sa monture et s’approcha des corps pour les inspecter. La plupart avaient les membres arrachés et le visage méconnaissable. Cela ne faisait que quelques heures qu’ils étaient là, mais ils avaient l’apparence de dépouilles pourries depuis plusieurs mois. À sa connaissance, aucune bête du Monde des Douze n’était assez sauvage pour déchiqueter comme pareil -sauf peut être le meulou, mais celui-ci restait toujours bien sagement dans sa tanière.
Le Sram était sur le point de dire quelque chose, lorsqu’un bruit l’arrêta net dans son action.