Reunification

    Une association avec la cité de Bonta ?! Mais le général et le gouverneur de Brâkmar étaient devenus fous ! Comment pouvait-on s'allier à ses pires ennemis ?

-Les représentants des deux cités ont convoqué les chefs de milice ainsi que leurs généraux, informa Amayiro. Le conseil est prévu à la première heure cette après-midi. Donc pendant ce temps, veiller à ce que ces soldats Brâkmariens soient à leur aise.

    Puis il partit, laissant les soldats seuls.

    Folle de rage, la Iop répondant au nom de Elbogos les quitta elle aussi et les soldats se dispersèrent pour vaquer à leurs occupations.

-On fait quoi, maintenant ? demanda Cerise.

-J'en sais rien, répondit le Sram.

-Vous avez peut-être faim ? leur proposa la Iopette qui était restée sur place. Les cuisines ne sont pas très loin.

-Euh, excusez-moi, mais à qui avons-nous l'honneur ? se méfia Dchikter en la dévisageant de ses orbites vides.

-Mesalune, se présenta celle-ci en leur tendant une main amicale, toute souriante.

    C'était bien là la façon des Iops.

-Cerise, dévoila l'Ecaflip en lui serrant la main. Et lui, c'est Dchikter. Et, oui, je commence un peu à avoir faim, le voyage m'a affamée.

-Suivez-moi.

    La milicienne Bontarienne les entraîna vers le couloir de droite qui donnait sur une salle de conseil des soldats. Ceux qui s'y trouvaient serrèrent le manche de leur épée, se demandant pourquoi des Brâkmariens se promenaient les membres libres ici. Puis ils traversèrent le dortoir qui était aménagé d'une centaine de lits superposés. À cette heure, la salle commune était vide. Ils se dirigèrent vers un escalier en pierres et arrivèrent enfin à la cuisine.

    Elle était grande et spacieuse, pas comme celle de la milice de Brâkmar, ce qui facilitait la tâche aux cuisiniers. Dans un coin, des tonnes d'épluchures de pommes de terre s'empilaient en une immense montagne qui atteignait le plafond. Une douce et alléchante odeur de viande et de légumes montait jusqu'au nez des deux Brâkmariens qui se léchaient les babines -enfin, surtout Cerise qui balançait sa queue de gauche à droite.

-Rei, appela Mesalune. Prépare un bon plat pour ses deux Brâkmariens.

    Un gros bonhomme à la forte carrure et aux yeux totalement blancs sortit de derrière le comptoir. Sa peau était étrangement grise. Il sourit et pointa son pouce vers le haut, en signe d'acquiescement.

-Vous allez voir, Rei est le meilleur cuisinier de Bonta.

    Dchikter remarqua que la Iopette s'était contentée d'étendre la réputation du cuisiner à sa cité et non au monde entier.

    Le trio prit place à une table, non loin d'une autre qui était occupée par un petit groupe de miliciens qui regardaient le Sram et l'Ecaflip de travers en chuchotant des choses incompréhensibles.

-Je sais que vous ne me pardonnerez sûrement jamais, commença la Iop en jouant avec une fourchette, mais je tiens tout de même à m'excuser pour tout à l'heure.

    Ça alors ! Un Bontarien qui s'excusait auprès des ses rivaux. Ce n'était pas courant.

-On a l'habitude, vous savez, dit Cerise en faisant ses griffes sur le bois de la table. C'est ça d'être milicien après tout.

    La Iopette lâcha un sourire timide.

    Rei arriva avec deux assiettes fumantes dans chaque main. Il les posa devant les miliciens ennemis à la nation et repartit derrière le comptoir, à cuisiner. Affamés, ils se jetèrent sur la nourriture qui était délicieuse. Même la Sacrieuse cuisinière de la milice Brâkmarienne ne pouvait pas faire mieux. Le Sram avait rarement mangé quelque chose d'aussi bon.

    Après avoir terminé leur repas, Mesalune se mit à leur parler des entraînements des futurs soldats Bontariens. Certes, c'était intéressant, mais pas aussi utiles que ceux des Brâkmariens qui étaient beaucoup plus intensifs.

-Pour notre entraînement, informa Dchikter, on nous lâche trois mois dans la forêt Maléfique pour en ressortir guerrier imbattable. Enfin, si on est vivant, bien entendu.

    La milicienne l'écoutait avec grande attention, très admirative.

    Mais quelqu'un les interrompit, plantant une flèche avec violence dans le bois de la table.

-Tu veux peut-être voir si notre entraînement ne fait pas de nous des guerriers imbattables ?!

    Dchikter leva précipitamment la tête pour voir qui était assez fou pour lancer un défi à un Sram. C'était un Cra aux longues oreilles pointues et à la peau si foncée qu'on aurait pu le prendre pour un Brâkmarien. Il regardait le Sram dans les orbites, incontournable.

-Je sais pas si t'as remarqué, lâcha Dchikter, se sentant supérieur à l'autre, mais je suis un Sram. Cela va être difficile de me trouver alors que je serai invisible.

-Les Cras combattent à distance, donc ne bougent pas. Dès que l'effet de ton sortilège faiblira, je te tuerai d'une flèche enflammée qui réduira tout tes os en cendre.

-Essaie un peu, pour voir.

    Sans s'en rendre compte, le Sram s'était levé de sa chaise et défiait l'autre d'un regard noir.

    L'Ecaflip et la Iopette sautèrent sur leurs jambes pour éviter un malentendu.

-Si j'étais toi, le prévint Mesalune en empêchant le Cra d'avancer plus, j'éviterais de me battre avec lui. Les Brâkmariens ont besoin de nous.

-Ça alors ? Qui l'eut cru ? se moqua-t-il.

-Ça suffit ! résonna une voix derrière eux.

    Tous se retournèrent vers la porte de la cuisine. Elbogos se tenait là, leur lançant à tous des regards accusateurs.

-La réunion va commencer, on doit y aller. Fireknight, tu seras de la partie aussi.