From Vegas with love

Chapitre 16 : C16: A quoi rêvent les androïdes ?

4584 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 08/11/2016 05:20

CHAPITRE XVI

LE DOCTEUR ET CLARA OSWALD

Dave leur avoua assez vite qu'il n'y était strictement pour rien. Qu'il n'était pas responsable de cette simulation mais il vit bien à leur air dubitatif que ni le Docteur ni Clara ne le croyaient. La vérité n'était pas très compliquée mais il ne pouvait pas lui-même l'expliquer pour autant. C'était Otto qui produisait pour lui ces environnements, il se contentait de les utiliser.

Puisqu'il travaillait beaucoup sur la programmation du module d'intelligence artificielle d'Otto et son interfaçage vocal, il devait être le membre de l'équipe de recherche qui passait le plus de temps à « bavarder » avec lui. A force de tester le module, il s'était rendu compte qu'Otto présentait des sessions de travail étranges durant lesquelles il traitait des données, particulièrement quand il était entre deux tâches. Interrogé sur le phénomène, Otto avait répondu qu'il regardait des images. En plaisantant, Dave lui avait fait remarquer qu'il commençait à s'humaniser beaucoup plus que prévu, s'il commençait maintenant à regarder la télévision au lieu de travailler. Et Otto avait nié en soutenant qu'il ne regardait jamais la télévision.

Il leur expliqua en effet que son moyen le plus naturel n'était plus aujourd'hui de vérifier les dires d'Otto, en regardant s'il avait le moyen d'activer à distance les chaines du réseau de la planète, mais de lui poser les questions, pour tomber sur des réponses qui le fascinaient bien davantage. A la question « D'où proviennent les images que tu regardes » Otto s'était montré hésitant. Dave l'avait taquiné en lui demandant s'il était le premier androïde rêveur et le robot avait répondu qu'il ne savait pas et aimait seulement bien regarder ces images, quand on ne lui demandait rien. Et qu'il pensait qu'elles provenaient de la grande IA brillante parce qu'elles n'étaient pas là avant sa venue.

Je ne sais donc pas comment il fait lui-même pour y accéder, conclut-il. D'autant que ce n'est pas stocké quelque part en lui. On dirait qu'il dispose d'une connexion. Il m'a montré comment faire pour y accéder également, ce qui m'a permis d'avancer plutôt sur la partie de la programmation qui m'intéressait davantage…

Clara, qu'avez-vous vu pendant cette simulation ? demanda le Docteur.

Ce que Dave m'a promis : un petit marché italien au temps de la Rome antique. Seulement je n'ai pas vu que cela, je vous ai vu vous, en train d'expliquer à votre compagne de l'époque (qui soit dit en passant n'avait pas non plus sa langue dans sa poche) que vous ne sauriez avoir perdu le Tardis, en vertu du fait que, je cite « les Seigneurs du Temps ne se perdent pas »…

Le Docteur se rembrunit un peu. Il ne se rappelait pas très précisément cette scène, mais il la sentait plus que plausible.Penser à Donna lui fit mal et il demanda aussitôt, pour ne pas y repenser, s'il était possible d'interroger encore Otto sur « ses rêves ». Il savait bien que le Teselecta du futur était capable de voyager dans le temps, mais en réalité, cela le choquait un peu de comprendre que peut-être, tout cela était dû à River.

.°.

Pendant qu'ils suivaient Dave pour se rendre dans le labo de mécanique où se trouvait actuellement Otto, Clara lui chuchota tout bas :

Toujours pas persuadé que River soit bien le cerveau de la bande ? Otto passe dix minutes avec elle et comprend comment lire des données de l'espace-temps. River sait-elle donc tout sur tout et tout de vous ? A-t-elle pu lui transmettre tous vos souvenirs ?

Non, répondit-il sur le même ton. Bien sûr que non, elle ne sait pas tout, la pauvre… Pas River, mais le Tardis oui ! Et comme vous le savez, les deux ont été en contact étroit… D'une certaine façon, ça me rassure de savoir que la technologie de voyage temporel du Teselecta est finalement de même origine que celle des Seigneurs du Temps, mais il me semble inquiétant de réaliser que quelqu'un puisse avoir un accès direct à toute ma ligne de vie !

Docteur, n'est-ce pas précisément mon cas ? répondit Clara avec une œillade de reproche.

Je voulais dire quelqu'un d'inconnu, qui ne serait pas forcément aussi bienveillant que vous l'êtes, s'empressa-t-il d'ajouter, vaguement conscient d'avoir encore gaffé.

Votre amie avait l'air de vous maltraiter un peu mais je me demande si vous n'aimiez pas cela…

Non, je n'aimais pas cela. Mais j'avais bien suffisamment d'affection pour elle pour l'endurer… Nous y voilà.

Ils débouchèrent dans la grande salle où travaillait Chris qui ressemblait plutôt à un garage qu'à autre chose, mais elle était brillamment éclairée. Otto était allongé sur un établi et branché à tout un tas de câbles, qui le reliaient à des machines qu'elle ne comprenait pas.

Clara observa le Docteur se diriger vers le petit groupe d'hommes présent au centre de la pièce. Il y avait Chris et deux assistants auxquels il accorda une pause. Le Docteur expliqua que Dave leur avait montré les simulations sur lesquelles il travaillait et qu'il avait besoin de demander quelques précisions à Otto à leur sujet. Elle resta légèrement en retrait, un peu triste de constater comme il avait l'air plus naturellement à l'aise en compagnie des scientifiques.

Elle repensait au jeune Docteur qu'elle avait vu et, pour la première fois, elle eut envie de rentrer chez elle.C'était idiot, mais à chaque fois qu'elle pensait qu'elle allait pouvoir se faire à cette nouvelle situation, au nouvel aspect de son ami extraterrestre, l'une ou l'autre de ses incarnations s'interposait. Pourquoi voyait-elle maintenant encore le plus jeune Docteur, plutôt que celui qu'elle connaissait ? Etait-ce parce que cette terrible compagne rousse, qui semblait l'aimer comme une sœur, avait quelque chose à lui apprendre sur la façon de gérer leur relation ?

Elle était perdue dans ses pensées quand elle sentit quelque chose lui effleurer le bras. Elle leva la tête avec surprise et vit Dave qui la regardait, l'air interrogateur.

Tout va bien ? Pourquoi restez-vous là toute seule, au lieu d'être avec les autres autour d'Otto ? Il vous aime bien. Il y a longtemps qu'il ne vous appelle plus « le petit humain femelle au tissu court »… Vous pouvez vous approcher sans crainte… l'encouragea-t-il.

Elle sourit et hocha la tête, mais le sourire n'alla pas jusqu'à ses yeux.

Oh, ils sont en train de jargonner dans une langue que je ne comprends pas et que le Tardis ne me traduit pas très bien, à dire vrai… s'excusa-t-elle.

Je pense pourtant qu'Otto serait ravi de discuter avec vous… ça lui ferait un peu de changement car il ne voit que nous. Il n'y a définitivement pas assez de filles parmi les personnes accréditées à travailler sur le projet…

C'est l'opinion d'Otto ou c'est la vôtre ? demanda-t-elle malicieusement.

Et bien sans doute un peu des deux puisque je participe à sa formation. Christopher lui a mis dans le crâne que toutes les femmes sont des déesses surpuissantes… Je n'ai pas envie qu'il soit trop intimidé par la moitié de l'humanité…

.°.

Otto regardait en direction de Dave et Clara. Il répondait néanmoins aux questions du Docteur avec une désarmante franchise.

Je suis préoccupé par tes « rêves » Otto, lui disait-il. Peux-tu m'expliquer comment ils sont venus ?

Avec la grande IA qui me commandait. Avec la déesse Riversong, précisa-t-il. Je peux vous la montrer à vous car vous avez les fréquences de réception correctes. Les autres humains ne peuvent pas la voir.

Je sais déjà à quoi elle ressemble, merci, ce n'est pas la peine. Est-ce que c'est elle qui t'a donné le moyen de faire ces rêves ?

Ce ne sont pas des rêves, ce sont des lectures animées, c'est la maison de Riversong qui me les donne.

River habite assez loin, objecta le Docteur. Sa maison est puissante mais je ne sais pas si elle peut t'envoyer tout ça…

Sa maison peut téléphoner à la vôtre. Mais puisque vous êtes ici, mes lectures sont plus fortes car je peux les recevoir sans intermédiaire. Votre maison est très puissante. Aucune maison n'est aussi puissante.

Je ne doute pas que ça lui ferait plaisir de savoir que tu penses cela d'elle… Pourquoi, CAL la maison de River Song ferait en sorte que ma maison, le Tardis, t'envoie des images ?

Les requêtes de mes créateurs sont très faciles. Mes processeurs ne sont pas tous occupés. Otto s'ennuie quand cela arrive. Quand la déesse Riversong est venue me commander, elle a laissé le téléphone de sa maison pour rentrer chez elle. La déesse est partie mais ne revient jamais. Alors Otto appelle la maison de Riversong et lui demande de voir la déesse ! CAL n'a pas beaucoup d'images à donner, et il expédie la requête à d'autres entités. Tardis lui répond.

Pourquoi le Tardis répond-il à tes demandes ?

J'ai dit à CAL de demander bien poliment. Les créateurs disent que les requêtes polies ont plus de chance d'aboutir.

Tes créateurs te donnent une excellente éducation, répondit le Docteur en jetant un coup d'œil sourcilleux à Chris qui effaçait un sourire. Mais les images que t'envoie ma maison m'appartiennent, elles concernent mon existence. Elle ne devrait pas les diffuser de la sorte.

Non, répondit Otto, la tête toujours obstinément tournée vers Dave et Clara. Tardis fait attention et envoie des paysages et des promenades dans des mondes partout dans l'univers. Otto apprend ainsi l'univers. Et aussi des images du passé. Otto aime toutes les images du passé où il y a la déesse. Tardis dit que vous n'aimez pas le passé, uniquement le futur, et que ça n'est pas grave de donner quelques images du passé auxquelles vous ne voulez jamais rêver.

Ouille, commenta Chris. Je suis navré, la vérité sort de la bouche des enfants…

Le Docteur eut un sourire mi-figue mi-raisin.

Est-ce que c'est ça qu'on appelle « le soulèvement des machines » ? Je règlerai ça avec mon vaisseau… Toutefois poser des questions, c'est toujours s'exposer à recevoir des réponses, fit-il philosophe. Otto, pourquoi regardes-tu fixement par là-bas ?

Otto apprend, répondit-il sobrement, en clignant des yeux avant de les reporter vers le Docteur et Chris.

Qu'est-ce que tu apprends au juste ? Comment Dave s'y prend pour récupérer le numéro de téléphone d'une jolie fille ? s'amusa Chris.

Non. Otto a déjà le numéro de téléphone de Riversong. J'apprends… Recherche dans la base de données des émotions… la solidarité.

La solidarité ? s'étonna Chris.

Les humaines sont plus tristes que les humains, déclara l'androïde. Otto sait que Riversong est triste car CAL lui a dit. Otto veut apprendre à faire la solidarité comme Dave.

Tu verras ça quand nous te créerons une petite-amie. Tu as encore le temps d'y penser…

Sans transition aucune, Otto ferma les yeux et s'éteignit d'un coup. Il était parfaitement immobile. Christopher vérifia le commutateur principal qui restait inactif à toute sollicitation.

Que se passe-t-il ? demanda le Docteur d'un air intrigué. Pourquoi est-il éteint ?

Chris sourit d'un air embarrassé.

Oui, ça lui prend maintenant. Je crois que c'est comme ça qu'il boude.

Il boude ?

Oui, posez plutôt la question à Dave, c'est son rayon... Eh Casanova, appela-t-il plus fort, le Doc a un truc à te demander…

Dave tourna la tête et balança un œil de travers à son collègue. Il s'excusa d'un sourire auprès de Clara et s'approcha du groupe.

Oui ? Tiens il s'est éteint ? Qu'est-ce que tu lui as encore dit ?

Je crois qu'il n'a pas aimé quand je lui ai parlé de lui fabriquer une petite-amie… Tu peux expliquer ça ?

N'importe qui avec un peu de sensibilité le pourrait, répondit Dave d'un ton lourd de sous-entendus. Otto est amoureux de sa déesse et toi tu lui parles d'un mariage arrangé avec une inconnue d'un rang qu'il considère comme nettement inférieur…

Oona ne sera pas d'un « rang inférieur » mais d'une technologie bien supérieure à la sienne car nous aurons progressé…

Vous voulez programmer une intelligence artificielle féminine ? questionna Clara. Pourquoi diable ?

La décision reviendra à Quentin et à Paul, elle n'est pas de notre ressort, répondit Dave. Elle n'est d'ailleurs pas dans nos projets initiaux. Mais Otto, que nous ne voulions qu'intelligent, est devenu sensible ; en partie à cause de sa confrontation précoce avec sa ravisseuse, mais aussi du fait de nos interactions avec lui. S'il devient un être sensible qui ne se contente pas de comprendre les émotions d'un point de vue analytique mais de les éprouver, tout cybernétique qu'il soit, la question se posera de savoir comment il pourra affronter son existence tout seul, sans véritablement pouvoir rencontrer jamais « un semblable » avant peut-être longtemps… Je ne doute pas que nos concurrents mettent sur pied des androïdes de travail très corrects dans les années à venir. Nous le ferons aussi. Mais la dotation spéciale d'Otto me parait entrer en ligne de compte. S'il ne veut pas de petite-amie, ajouta-t-il un peu plus fort, il pourrait tout à fait avoir une petite sœur.

Otto rouvrit les yeux instantanément, montrant qu'il était fort capable de ne dormir que d'un œil.

Une petite sœur, c'est bien.

Oui, c'est aussi très bien pour apprendre la solidarité, confirma Chris en essayant de ne pas se moquer.

La solidarité ? répéta Clara.

Avant de s'éteindre sous le coup d'une vive émotion, résuma le Docteur, Otto nous expliquait que vous étiez triste, comme apparemment la majorité des femmes qu'il connait, et en bon garçon, il voulait apprendre à consoler… Je crois que c'était le mot qu'il cherchait. Je suggère que vous le rassuriez sur votre optimisme naturel…

Le Docteur la dévisageait de ses yeux clairs qui avaient l'air particulièrement scrutateurs, sans l'ombre d'un sourire sous sa moustache.

Ce n'est pas parce qu'il est jeune qu'il faut lui raconter des mensonges… répondit-elle avec amusement. Otto, la vérité c'est que les femmes cachent seulement moins bien quand elles sont tristes. Mais ce n'est pas un état permanent. La tristesse a des causes. Tout comme la joie. La tristesse n'est pas un dysfonctionnement féminin comme le croient volontiers ces messieurs, et ne saurait être réparée une bonne fois pour toutes, car les émotions humaines sont soumises à des phases de cycle. Nous sommes en quelque sorte programmés comme cela.

Otto est triste aussi.

Fais attention, Otto ! Si tu dis trop souvent que tu es triste, tes créateurs voudront te réparer.

Pourquoi ne pas me consoler plutôt ?

C'est une excellente question… Tes créateurs ne se sentent sans doute pas à l'aise avec cette idée… C'est à mon avis, la raison pour laquelle ils parlent de te donner une androïde. Ils pensent qu'une androïde féminine saurait te consoler mieux qu'eux.

Pourquoi ? Ce sont mes créateurs, qui peut me connaître mieux qu'eux ?

Deuxième excellente question ! Et je leur laisserai le soin de t'apporter des réponses…

Otto aime savoir la vérité plutôt que des réponses.

Sa répartie les laissa piteusement méditatifs un instant.

Hein ? Quand je vous disais que ça lui ferait du bien de parler avec vous, commenta Dave avec un sourire tendre qui flottait sur ses lèvres.

Peut-être que nous devrions vous laisser travailler tranquillement maintenant, suggéra abruptement le Docteur. Vous êtes d'une grande patience et pédagogie, mais si nous voulons saluer Quentin avant d'y aller, je pense qu'il est temps de repasser par son bureau...

Il les salua d'une poignée de main et entraina Clara à sa suite. Elle n'eut que le temps de leur faire un petit signe de la main avant d'être entraînée vivement à sa suite dans les couloirs.

.°.

L'EQUIPE DU LABORATOIRE C.I.S.

Les deux hommes restèrent un instant silencieux.A chaque fois que le Docteur venait, il fallait convenir qu'il se passait toujours un truc extraordinaire, plus extraordinaire que d'habitude, avec Otto.

Quand revient Claraöswin ? demanda ce dernier en brisant le silence.

Qui sait ? répondit Chris. Peut-être bientôt, si Dave a obtenu son numéro de téléphone ?

Oh, ce n'est pas mon genre de demander ça de but en blanc ! maugréa le jeune homme en s'empourprant légèrement.

Oui, ça explique bien des choses, s'esclaffa Chris. Moi je pourrais.

Ah oui, ça, tu pourrais toujours demander…

Ouh, mais c'est qu'il mordrait…

Matty poussa la porte du labo et les rejoignit au son caractéristique un peu lourd que produisaient ses prothèses martelant le sol.

Hey, j'étais avec Quentin, je viens de croiser Clara et le Docteur. C'est quoi ces vannes que vous êtes en train de vous balancer ?

Rien, je suis en train de charrier Dave – qui marche à fond. On dirait qu'il en pince pour la jolie Clara.

Comment lui jeter la pierre ? répondit Matty en souriant. Je comprends tout à fait… Pas toi ?

Holà holà holà, vous oubliez que je suis un homme marié… Je nierai devant ma femme avoir eu connaissance de vos activités…

Quelles activités ? J'ai fait tester à Clara une simulation pour les futures interfaces de commande à distance – justement parce que ces temps-ci je n'ai, comme qui dirait, pas grand monde pour les tester, hein ? Mais le système l'a éjectée deux fois, en moins de dix minutes. Puis le Docteur est venu pour poser des questions très précises, comme il fait toujours, sur leur fonctionnement. On a débarqué ici dans la foulée et j'ai vu qu'elle restait dans son coin au lieu d'aller voir Otto… Je ne vois pas très bien quand j'aurais eu le temps d'entamer ne serait-ce que le commencement d'une conversation personnelle…

Conversation ? se moqua Chris. Tu es trop bavard. J'ai vu comment tu la regardais, et comment tu lui souriais, même Otto s'en est rendu compte !

Contrairement aux créateurs, Otto a le téléphone de Claraöswin, rétorqua celui-ci.

Matty éclata de rire.

Ah ça c'est envoyé !... Chris, je crois que tu l'as vexé…

Chris gloussa et leva les mains en signe de reddition.

Dave, je dois te reconnaître une subtilité qui me dépasse : tu ne lui demandes pas son numéro, mais tu programmes un robot qui lui a les moyens de l'obtenir pour toi…

Et comment fais-tu ce miracle, Otto ? questionna Matty.

Pas un miracle, répondit-il. Il est inaccessible depuis trente siècles, et c'est dans une autre galaxie.

.°.

JACK HARKNESS

Ce n'est qu'en regagnant son petit vaisseau, au moment où il retirait sa veste, que le Capitaine réalisa qu'il avait un message holographique stocké sur son bracelet. Il avait tellement l'habitude de considérer qu'il ne marchait plus qu'il n'avait pas imaginé que John avait pu utiliser la connexion privée qui existait toujours avec le sien. Un vestige du temps où ils étaient partenaires à l'Agence...

Il datait du lendemain de son départ. John lui disait qu'il avait quelque chose à tenter pour essayer d'aller mieux, qu'il n'allait pas très loin, et qu'il ne savait pas si ça marcherait. Il ajoutait qu'il était désolé et qu'il n'avait pas voulu le blesser. Qu'il essaierait de lui faire savoir s'il pouvait revenir vite, ou pas vite. Ou pas du tout. Jack n'aima pas le regard qu'il avait sur la dernière image. Pas du tout. Comme si c'était un adieu définitif.

Il retourna directement vers son manteau qu'il venait de suspendre dès qu'il était monté à bord, pour y chercher l'alcool qu'il y gardait dans une petite fiasque de la poche interne. Il ne se souvenait plus de ce qu'il y avait mis exactement. Un truc qui arrachait sauvagement en tous cas, ce qui lui convenait très bien. Il reprit une gorgée et le rangea. Il savait d'expérience que cela l'enivrerait très vite. Il gagna alors le minuscule recoin couchette dissimulé dans un placard, défit ses chaussures, et s'allongea tout habillé.

Les yeux fermés, il n'avait pas tellement envie de repenser à tous ces événements heureux et qui s'avéraient si malheureux à la fois : comme retrouver enfin un Docteur et un John l'un comme l'autre très différents, le premier qui ne daignait même pas l'aider (ce qui n'était pas prévu), le second qui l'aidait mais qui le fuyait aussi (ce qui n'était pas prévu non plus). Rencontrer une magnifique compagne du Docteur toujours en vie qui l'aimait bien, et une magnifique compagne morte qui ne l'aimait pas assez pour se joindre à lui… Il y avait des années qu'il était seul. Certes pas depuis vingt ans, mais aujourd'hui Torchwood lui manquait. Le travail, l'équipe… Il en avait assez de fuir sans arrêt. Il avait besoin des autres. C'était dit.

Il sentait ses membres s'engourdir et se dit qu'il serait bientôt endormi : cette gnole pirigalienne était meilleure qu'un somnifère. C'était très bien. Très bien pour éviter de penser à ce qui s'était passé avec John après que River soit intervenue pour l'empêcher de mourir, quand ils étaient sur Modarkand. Pour éviter de penser qu'il avait ensuite disparu en le laissant rongé d'angoisse sur ses intentions…

La seule chose à laquelle il voulait bien penser, c'était finalement que de pouvoir enfin se préoccuper d'autres personnes l'entretenait moins dans ce qui n'était pourtant plus depuis longtemps un « délire de persécution ». Depuis lors, il n'avait pas subi la moindre tentative d'agression contre sa personne. Il n'eut pas le temps de se demander pourquoi. Le spiritueux venait de le terrasser.

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