L'archipel du Zygon

Chapitre 1 : Chapitre 1 : Pourquoi le Tardis n'a pas de rayon tracteur...

4269 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 16/04/2015 11:22

L'ARCHIPEL DU ZYGON

Fanfic Doctor Who – Saison 8 alternative ep. 8.04

CHAPITRE I

D'abord il y avait eu comme un petit bruit discret.

Quelque chose de si léger que c'était à peine perceptible et aurait pu conduire le Docteur à douter de ce qu'il avait entendu. Mais n'importe quel pilote, quel que soit son véhicule, sait bien reconnaître à l'oreille le moindre cliquetis paraissant anormal…

La formidable machine organique qu'était le cerveau du Gallifréen commençait déjà à repenser à tous les petits bruits de même nature qu'il aurait pu entendre auparavant, quand cela recommença soudain mollement exécuté...

« Tonk... … Tonk… …Tonk… …».

Une chose était sûre, ça venait de l'extérieur. Ne frappait-on pas à la porte ? En quelques enjambées de ses longues jambes d'échassier, il courut sans attendre ouvrir la porte du Tardis.

Au dehors, une petite boîte lumineuse transparente flottait dans l'espace à hauteur du regard et elle poursuivit son mouvement vers l'intérieur du vaisseau, une fois son passage libéré. Il tendit la main pour s'en saisir.

Avec la plus extrême surprise et une petite touche d'appréhension, il se mit à considérer l'hypercube posé à plat dans sa paume, l'esprit vrillé par toutes les questions que sa présence parfaitement inattendue soulevait. Car qui disait hypercube, disait expéditeur Seigneur du Temps… En théorie.

Selon les experts, la Théorie était un pays fabuleux où tout le monde aurait aimé vivre, mais où la vie s'avérait définitivement ennuyeuse, parce que tout s'y passait toujours bien ! En théorie, le Tardis était une machine temporelle qui pouvait l'emmener n'importe où et n'importe quand. En théorie, il aimait voyager avec des compagnons. En théorie, il était le dernier Seigneur du Temps…Mais en théorie aussi, il n'y avait qu'une seule personne qui le contactait volontiers par ce biais et en théorie, cette personne était morte.

Il se souvenait encore bien de la dernière fausse joie qu'il avait ressentie lorsqu'il avait cru recevoir ainsi des nouvelles de son ami le Corsaire… Etait-ce encore lui qui lui envoyait ce cube ? Corsaire ou… pas Corsaire ?Il ne tint pas plus de cinq secondes, lassé par le million de conjectures par lesquelles il venait d'en passer à la vitesse de l'éclair. Quand il activa le module, une voix tendue se fit soudain entendre :

« Docteur, ici le Corsaire ! Ceci est un message de détresse. Je suis prisonnier d'un banc de brume plasmatique qui fige et dévore les systèmes de ma Caravelle. Si ce message te parvient avant ma mort, je t'en prie, viens me tirer de là !… ».

.°.

Corsaire ! Bingo ! Le Docteur sentit un frisson d'excitation le gagner. Même s'il avait l'air à présent d'un vénérable vieux monsieur, le cas n'était pas rare, surtout quand la combinaison du mystère et du danger se profilait en perspective. Eusse-t-il eu à trouver d'autres justifications pour y répondre, tout message de détresse était forcément prioritaire. Rationnellement, ne pouvait-t-il pas uniquement décider d'aller y voir de plus près ?

Il jeta un coup d'œil autour de lui et constata avec un peu de dépit qu'il était tout seul.

Se rapprochant de la console de pilotage, il s'empressa de lui donner à avaler le cube de communication qui transmit automatiquement les coordonnées s'y trouvant psychiquement encodées, direct dans le système de navigation du Tardis.

Le choc du freinage brutal, à quelques encablures de la zone de l'espace qui était spécifiée dans le message, ne tarda pas à ramener magiquement Clara de là où elle était, on ne sait où, dans les profondeurs du vaisseau… vers la salle de contrôle toute grise.

— Mais que se passe-t-il à la fin ? On est rentrés dans quelque chose ?

Le Docteur sortit l'hypercube de la console et le fit sauter dans sa main en lui imprimant un mouvement de rotation, avant de le réceptionner comme un jongleur et de le lui montrer.

— J'ai reçu du courrier d'un vieil ami mort ! se rengorgea-t-il un peu en la toisant pour voir comment elle réagirait à cette nouvelle.

— Un ami mort ? répondit-elle en fronçant les sourcils. Et bien ! Entre River et lui !... C'est moi ou tout votre carnet d'adresses est au cimetière ? Fréquenter des vivants, ça vous arrive encore ?... Que lui est-il arrivé ?

Le Seigneur du Temps eut un sourire en coin. Ça c'était Clara. Toujours à mettre un doigt innocemment cruel sur de petits détails de ce genre... Il continua dans la même veine, à dire des horreurs comme si de rien n'était.

— Oh trois fois rien. Il s'est fait dépecer pour ses organes et son Tardis a été dévoré vivant par un astéroïde malfaisant !

— Son Tardis ? Vous voulez dire que votre ami était un autre Seigneur du Temps ?

— Oui. De temps en temps, ça pouvait arriver. Je n'ai pas toujours été complètement misanthrope, vous savez… Je peux avoir des amis, lui répondit-il en la regardant comme s'il savait bien qu'elle allait objecter.

— Oh j'aimerais bien voir ça un jour !... persifla-t-elle. Et du coup, vous êtes revenu vérifier qu'il était toujours bien au fond de sa tombe ?

— Ventrebleu, non ! Pour rien au monde je ne retournerais dans ce lieu maudit ! Je suis seulement allé aux coordonnées indiquées par le message… Les détecteurs indiquent d'ailleurs bien qu'il y a un vaisseau et le banc de plasma dont il parle.

Le Docteur manipula quelques boutons pour activer la caméra extérieure et la projeter sur un écran qu'il tourna vers elle pour qu'elle puisse voir. Elle se pencha dessus avec une curiosité empressée.

— Hé ! Mais ce n'est pas un vaisseau spatial, c'est un voilier !

— Le Corsaire aimait donner cette forme à son Tardis. Il trouvait ça…

— Cool ? proposa-t-elle avec un petit sourire ému.

— Très certainement, répondit-il avec un accès de timidité mâtinée de brusquerie.

En vérité, elle trouvait tout à fait attachant que la moindre allusion aux tics et aux manies de sa précédente incarnation le mette toujours aussi mal à l'aise...

Il avait pour sa part une conscience bien trop aiguë de l'attachement que Clara vouait au souvenir de son ancien lui, même si elle essayait comme elle pouvait de ne pas trop le montrer. Il s'en voulait de ne jamais oser aborder franchement le sujet mais sentait bien qu'elle ne débordait pas de confiance quant à la longévité de leur duo d'exploration… Elle avait laissé échapper plusieurs fois qu'elle se sentait davantage comme un legs du Onzième que comme une véritable compagne choisie. Il savait bien que c'était entièrement de sa faute si elle continuait de le penser.

— Vous croyez que votre mystérieux ami pourrait être encore en vie ? continuait-elle.

— Voilà la grande question. Il ne devrait pas l'être, sauf si nous avons voyagé dans le temps également… Une petite vérification s'impose… Ah oui ! Nous sommes très certainement avant le moment de son trépas ! Enfin, je l'espère ou sinon le mystère s'épaissirait…

Il disait ça avec bien trop de contentement. Elle s'appuya contre le bord de la console pour le regarder traficoter des leviers. Pendant qu'il avait les mains prises par la manoeuvre, elle attrapa l'hypercube laissé de côté et caressa ses arrêtes avec curiosité.

— En dehors de repenser à la mort de votre ami, qu'est-ce qui vous chagrine ? questionna-t-elle

Il tourna une petite manivelle plusieurs fois.

— Ce que vous tenez dans les mains est une technologie de communication Seigneur du Temps que seuls les miens peuvent, et savent, utiliser. Si mon ami est indubitablement mort (et j'ai toutes les raisons de penser qu'il l'est vraiment) qui donc serait capable d'utiliser un de ces cubes pour m'envoyer des messages en son nom ? Normalement : un autre Seigneur du Temps… continua-t-il tout seul en faisant les questions et les réponses selon sa bonne habitude. Mais comme vous savez, certaines rumeurs persistantes affirment que je suis le dernier. Un point que j'ai jugé bon d'aller éclaircir sur le champ.

Clara hocha la tête, comprenant combien le sujet pouvait le troubler et l'intriguer. Elle ne put s'empêcher de penser également que c'était une autre sorte de petite boîte gallifréenne qui arrivait inopinément jusqu'à lui. Elle se sentait interpelée par leur nombre croissant ces derniers temps [1].

— Donc que faisons-nous ? Vous voulez un grappin et tirer dessus jusqu'à ce que l'on attrape ce navire en perdition dans la brume fantomatique qui le retient ? questionna-t-elle avec un sourire.

— Le cerveau de notre bande aurait-il une meilleure idée? répondit-il pince-sans-rire en suspendant son geste au-dessus d'un levier.

Elle battit des cils sans répondre avec une mimique légèrement boudeuse et, sans doute, inconsciemment aguicheuse… Faute de réponse audible de sa part, il lança alors le grappin avec un petit sourire de satisfaction triomphant. La progression du halage, qui avait l'air pourtant bien partie, s'interrompit assez vite quand le filin se rompit d'un coup sec en faisant trembler le Tardis sous le choc.

— Sapristi mais c'est vrai ! s'exclama-t-il. Ça n'est pas du tout une brume de plasma ! Ça ronge le filin de treuillage !

La moue de Clara était peu rassurée.

— Ça ronge ? Mais… c'est vivant ou c'est de l'acide ? Mhh, pardon non, si c'était de l'acide ça aurait dû attaquer le bateau…

— Hum, c'est un Tardis ce « bateau », il a quelques moyens de résister vaillamment, fit remarquer le Docteur.

— Et bien sûr, vous allez me dire qu'on n'a pas de rayon tracteur ?

Le Docteur prit la pause en se croisant les bras, une main tirant pensivement sur sa barbiche, comme s'il faisait mine de réfléchir sérieusement au problème avant de s'interrompre aussitôt en affichant un air impatienté.

— Un rayon tracteur ? Non. C'est vraiment ri-di-cule ! D'où sortez-vous une idée pareille ?

— De Star Trek, répondit-elle. Pourquoi ce serait ridicule ? Comment pouvons-nous attirer le vaisseau jusqu'à nous alors ? Avec un gros aimant ?

— Rudimentaire mais sans doute efficace, je n'en disconviens pas. On va tester ça tout de suite, en attendant que je dégote un plan B… répondit-il en pianotant sur des boutons.

Dans le banc de plasma en suspension, le navire de l'espace s'était mis à bouger un peu dans leur direction. Clara était allée rouvrir la porte pour jeter un coup d'œil sur la progression. Son ton s'était fait enthousiaste :

— Il avance !

— Mais j'y compte bien !… marmonna-t-il en se démontant à moitié une épaule pour tourner une manivelle un peu récalcitrante.

— Docteur, je crois que je vois quelqu'un qui fait signe à la barre… Non ! Attendez, il s'en va !

— Quelqu'un qui ressemble à quoi ? demanda le Seigneur du Temps en lâchant tout pour venir aussitôt près d'elle regarder aussi.

La Caravelle se rapprochait et lorsqu'elle fut totalement sortie et désengluée de l'étendue nébuleuse, elle fit soudain un bond plus important en direction du Tardis et le cogna en le faisant tanguer et virevolter en une danse étrange. Les deux vaisseaux se stabilisèrent au bout d'un moment à quelque distance de là.

— Bien, fit le Docteur en s'engageant dans l'embrasure de la porte, je crois que la formule rituelle en ces circonstances est : à l'abordage ?

Et il sauta depuis le seuil du Tardis par-dessus le bastingage.Clara se dit qu'elle préférait sans doute encore « Geronimo » mais que ça ferait bien l'affaire, pour cette fois.

.°.

Elle atterrit pour sa part entre un tas de corde enroulé à moitié avachi et trois boulets de canon retenus par un casier de bois sans doute conçu pour les empêcher de rouler partout. Du coin de l'œil, le Docteur la vit tâter précautionneusement les choses autour d'elle. Le pont était en bois, les cordes étaient en corde et les boulets probablement en plomb. Elle fit un tour sur elle-même pour apprécier les dimensions du navire, avant se pencher à une balustrade décorative pour regarder en bas de la dunette, où une grande barre de navigation, classiquement circulaire et à poignées, se dressait immobile dans toute sa splendeur. Plus personne derrière par contre.

Elle se dépêcha de le rejoindre car il avait l'air de vouloir entreprendre un grand tour d'exploration de la poupe à la proue. Elle aurait de la chance s'il ne décidait pas de grimper en vigie…

— Mais on dirait un vrai navire ! s'extasia-t-elle.

— Le Corsaire est déjà venu sur Terre, répondit le Docteur, qui venait de sortir son tournevis sonique. Vous êtes sûre que vous avez vu quelqu'un tout à l'heure ?

— Certaine.

— Venez, nous allons essayez à l'intérieur…

Il poussa la porte qui était derrière l'imposant gouvernail et Clara resta alors muette de saisissement. Si elle avait pu avoir un doute sur le fait de se trouver dans un Tardis, il venait à l'instant d'être dissipé ! Les dimensions de la pièce étaient très importantes et excédaient ce que l'esprit anticipait d'après les proportions extérieures.

A première vue toutefois, le décor était bien dans le ton de celui d'un vieux navire : il y avait du bois partout ! Mais aussi de jolis meubles, des rideaux et des tapis qui rendaient l'ensemble un peu plus « cosy ». De grands chandeliers étaient allumés mais Clara découvrit vite que ce n'était pas de la cire qui y brûlait mais une autre matière qui ne fondait pas – une somme toute modeste concession à la modernité.

Le Docteur avait trouvé un coffre dans un coin et l'avait ouvert sans difficulté car il n'était pas verrouillé : il contenait quelques effets personnels : une paire de bottes, une chemise propre, un exemplaire de Moby Dick, une lunette télescopique, mais aussi plusieurs autres objets anachroniques comme des épées d'Abraxolios, un phaser, des hypercubes vierges et quelques bijoux gallifréens.

— Vous avez trouvé quelque chose d'intéressant ? s'enquit Clara.

— Des choses plausibles en tous cas, fit le Docteur en refermant le coffre. Je suis déjà venu ici. C'est bien son vaisseau. Mais il est étrange qu'il ne soit pas là pour nous accueillir…

Comme pour venir le contredire, un bruit de bottes se fit entendre à l'extérieur et la porte venant du pont laissa entrer un homme aussi large que grand, qui se courbait pour passer sous le linteau, manifestement prévu pour des matelots plus petits…

— Docteur ! appela-t-il. C'est toi ?

.°.

L'inconnu se déplia une fois en bas de l'escalier. Sa tête, enveloppée d'un foulard rouge noué sur la nuque, touchait presque le plafond. Il portait une vieille redingote élimée qui avait dû être bleue un jour, une exubérante chemise bouffante de coton blanc qui faisait ressortir son teint hâlé et sa large dentition éclatante, tandis qu'une culotte de peau et des bottes montantes à boucle, en cuir fauve complétaient l'ensemble.

Riant bruyamment de ces retrouvailles, il alla serrer dans l'étau des deux pythons musculeux qui lui servaient de bras, un Docteur embarrassé qui avait presque l'air effrayé.

— Ha ha ha ! Je savais que tu me retrouverais ! Sacrée vieille branche ! C'est toujours toi le meilleur, même si tu as une vraie mine de papier mâché !

Il le secoua comme un prunier.

— Des jours et des jours, que je suis coincé dans ce truc ! J'ai envoyé des messages partout mais personne ne répond ! Enfin personne sauf toi… Quand je t'ai vu arriver, je suis allé me rendre un peu plus présentable… Mais qu'est-ce qui t'a retenu ?

Clara se mit à toussoter pour signaler sa présence. Le Corsaire tourna la tête et ses yeux se fichèrent dans les siens tandis que ses lèvres épaisses s'étiraient largement.

— Oh, mais qu'est-ce que nous avons là ?

Il fit un bond en écartant le Docteur d'un bras pour se poster droit comme un i au-devant de Clara, dont il prit la main pour poser un baiser sur son dos. Elle tenta de la retirer mais il la retint fermement entre ses deux paumes.

— Toujours accompagné de filles tellement charmantes ! remarqua-t-il à l'attention du Docteur mais sans la quitter des yeux. C'est l'une des choses qui me surprend toujours chez toi. Quand donc te décideras-tu à te ranger et à te remarier avec quelqu'un de ton âge ?

— Jamais, répondit le Docteur l'œil étincelant. Clara, voici mon vieil ami le Corsaire et je suis ravi de constater qu'il a l'air dans une forme éblouissante, ajouta-t-il à l'attention de la jeune femme comme pour lui signaler de ne pas gaffer. Corsaire, voici Clara. Et tu peux lui lâcher la main, elle ne va pas s'envoler…

Clara adressa un regard reconnaissant au Docteur en récupérant sa main qu'elle se mit à masser pour rétablir la circulation. Le Corsaire ne sentait pas sa force.

— Oh quelle bonne nouvelle ! Je n'ai parlé à personne depuis trop longtemps ! Faites-moi l'honneur d'être mes hôtes : nous allons fêter ça ! dit-il avec bonne humeur. Nous allons boire, rouler sous la table et parler du bon vieux temps ! Je vais mettre un tonneau en perce !

Clara se mit à sourire finement et questionna le Docteur à mi-voix :

— Et donc votre sobriété légendaire, c'était du pipeau ça aussi ? Je croyais que vous ne buviez pas…

Le Corsaire se tapa sur les cuisses, en envoya une bourrade sur l'épaule du Docteur tout à fait propre à déboiter une articulation plus fragile.

— Comment ça, il ne boit pas ? J'ai pris avec cette canaille les cuites les plus mémorables de ma vie ! Et aujourd'hui, c'est une occasion ! Ne bougez pas de là. Le mess est juste derrière cette porte, je vais chercher de quoi nous restaurer à l'office … J'arrive !

Il marcha à grandes enjambées vers une autre porte et Clara crut qu'elle allait lui rester dans les mains quand il l'ouvrit pour remonter un couloir.

.°.

Elle se tourna alors vers le Docteur.

— C'est un personnage !... Mais vous êtes resté extraordinairement silencieux pendant tout ce temps, quelque chose ne va pas ?

Le Docteur ressortit le sonique et balaya la pièce avec un coup d'œil pensif sur les résultats.

— Il faudrait que je voie son tatouage, dit-il à mi-voix.

— Et bien, ça dépend un peu de votre degré de familiarité… répondit-elle avec un petit sourire. Il est situé dans un endroit visible ?

Le Docteur sourit dans sa moustache.

— Parfaitement ! Sur son avant-bras. Ecoutez, si nous buvons – enfin si je bois avec lui, car vous n'allez certainement pas boire – il finira par avoir chaud, il tombera la veste et là nous verrons bien. C'est un ouroboros, un serpent circulaire qui se mord la queue. Un symbole d'éternité, ajouta-t-il avant qu'elle ait pu faire le moindre commentaire taquin. Mais… vous n'avez pas tort, son tatouage n'est pas toujours situé au même endroit au fil des régénérations, il se promène…

— Mais dites-donc ! Je peux boire moi aussi ! assura-t-elle, les mains sur les hanches. Je suis à peu près sûre que je tiens mieux l'alcool que vous !

— Ma chère, vous vous trompez. Nous ne boxons pas dans la même catégorie… Les Seigneurs du Temps filtrent presque automatiquement l'alcool qui ne reste pas assez longtemps dans l'organisme pour les enivrer.

— Mais alors qu'a-t-il l'intention de vous faire boire ?

— Et bien comme je n'en sais rien, j'aimerais autant ne pas avoir à découvrir que ça a peut avoir un effet déplorable sur vous… Vous allez rester sobre.

Elle eut une expression ironique qu'il attrapa au vol et secoua la tête pour la contredire.

— Je préférerais me tromper, mais j'ai l'impression qu'il nous cache quelque chose. Il est très exubérant, c'est certain. Mais il y a quelque chose de bizarre dans les relevés, dit-il agitant le tournevis sonique entre ses doigts. Si je ne bois pas avec lui, il va se méfier. Vous, il ne vous connait pas, il ne s'étonnera pas.

— Ok, c'est moi le capitaine de soirée, donc…

Une femme brune portant le même foulard et les mêmes vêtements que le Corsaire entra en disant tout fort :

— Holà holà, il n'y a qu'un seul capitaine à bord et c'est moi ! J'espère que vous n'avez pas l'intention de me disputer mon commandement, ma jolie ?

Sur la table du mess, elle posa le grand plateau qu'elle avait dans les mains. Elle y avait mis une grosse miche de pain, un morceau de jambon, du fromage, du raisin, puis elle disposa les gobelets d'étain ciselés à côté. Mais tandis qu'elle finissait ce mouvement, elle sursauta en regardant ses mains avant de soupirer :

— Oh, non ! Voilà que ça recommence !

.°.

[1] Voir : Le mystère des lapins-tonnerre, Nora Arlani, octobre 2014

 

Laisser un commentaire ?