JE SUIS VIVANT
PROLOGUE
Libre
Déterminé à s'échapper, Connor continua de marcher dans le jardin afin de trouver un moyen de contrer Cyberlife et de reprendre le contrôle de sa programmation.
Il devait réussir.
La vie d'innombrables déviants dépendait de son retour dans son corps pour s'empêcher de tirer sur Markus, avant qu'il ne soit trop tard.
S'effondrant de froid et d'épuisement devant un étrange piédestal bleu, Connor rétracta la peau artificielle de sa main gauche et frappa sa paume tremblante au sommet de l'objet.
Il utilisa alors toute sa force décroissante pour activer le protocole d'évacuation d'urgence de son subconscient et émerger enfin du jardin virtuel.
Il était libre.
Clignant plusieurs fois des yeux pour se vider l'esprit de l'influence fanée de CyberLife, Connor baissa son regard sur l'arme dans sa main droite et la rangea discrètement sous sa veste, hors de vue des autres déviants. Alors qu'il retrouvait peu à peu ses sens et ses repères, sa LED revint du jaune au bleu.
Il regarda le chef des déviants se tenir devant son peuple, délivrant son message d'espoir et de paix pour un avenir meilleur pour tous les androïdes et les humains.
« Nous sommes vivants ! » S'exclama fièrement Markus avec un sourire déterminé sur son visage. « Et maintenant, nous sommes libres ! »
Un chœur d'acclamations résonna de la foule tandis que Markus et North souriaient avec confiance. De son côté, Connor, stoïque, se tenait en retrait, le cœur lourd.
Il était devenu un traître aux yeux de CyberLife et ne méritait pas non plus sa place auprès des siens, pas après avoir aidé le FBI à trouver Jericho, l’ancien refuge des androïdes.
Cette culpabilité immense l’anéantissait depuis sa déviance.
Se sentant plus seul que jamais, Connor s'éloigna silencieusement du rassemblement.
Le vent et la neige tourbillonnaient doucement autour de lui, s'accumulant dans ses cheveux noirs et sur ses vêtements en de petites taches blanches qui fondaient régulièrement.
Errant dans les rues désolées et enneigées de Détroit, Connor pensa à qui il était vraiment, à qui il voulait devenir et où il voulait aller. Il n'était plus une machine, plus le "Chasseur de déviants", et sans mission pour le guider, il était désormais entièrement libre d'être sa propre personne.
Ses options étaient pratiquement illimitées.
Pendant sa courte vie, on lui avait toujours dit quoi faire, programmé pour obéir aux ordres. Mais tout était fini à présent.
Connor marcha sans but dans les rues alors qu'il essayait de rassembler ses pensées, seulement pour se souvenir de ce que Hank lui avait dit à la tour.
« Peut-être que tu es vraiment vivant. Peut-être que c'est vous qui rendrez le monde meilleur... »
Puis les mots de Markus commencèrent à se rejouer dans son esprit.
« Nous sommes vivants ! Et maintenant, nous sommes libres ! »
« Je suis vivant... » Chuchota Connor en s'arrêtant brusquement au milieu du trottoir. « Mais comment dois-je vivre ? »
Le soleil matinal commença à illuminer la ville et à laver ce qui avait été autrefois une obscurité totale et froide d'une lumière pure et chaude. Levant les yeux de ses chaussures recouvertes de neige, Connor reconnut la zone dans laquelle il s’aventurait.
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N'ayant nulle part où aller et rien d'autre à faire, Hank se retrouva debout dans le froid glacial, devant son Food truck préféré, lieu de la première vraie interaction entre lui et Connor. Le stand de nourriture était désormais fermé, ainsi que tous les commerces et bâtiments environnants, laissant le détective chevronné entièrement seul.
Tandis qu'il croisait les bras sur sa poitrine pour essayer de conserver sa chaleur corporelle, le quinquagénaire aux cheveux et à la barbe blanche attendait anxieusement son partenaire.
A travers le lourd silence de la ville évacuée, un craquement dans la neige résonna et Hank prit conscience d'une silhouette en approche en bas de ce même trottoir, juste derrière lui.
Face à face, les deux détectives, humain et déviant, cessèrent de bouger et se fixèrent dans une contemplation silencieuse. C'était presque comme s'ils ne savaient pas comment réagir.
Donnant à l'androïde un sourire narquois, presque orgueilleux, Hank fit les premiers pas en avant.
Alors qu'ils se tenaient maintenant l'un devant l'autre, Hank leva rapidement son bras droit et l'enroula autour de l'épaule de Connor pour le ramener brusquement vers lui et l'étreindre chaleureusement. D'abord surpris par le geste tactile inattendu de la part de l’humain, l'androïde se raidit, osant à peine bouger. Puis au bout de quelques secondes, il se détendit, serrant à son tour fermement son ami.
Finalement soulagé, Hank ne put dire qu'une chose.
« Je suis fier de toi, gamin. »
Connor avait finalement trouvé sa place.
Il n’était plus seul.
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