Life note
Les chandeliers diffusent une lumière vacillante dans l’obscurité de l’église. Sidoh, le shinigami au regard vide et au corps désarticulé, est assis sur une rangée de bancs en bois. Face à lui, le pasteur Oga, un homme aux traits marqués par l’âge et la foi, observe l’étrange créature avec calme, une croix dans les mains. Leur échange débute dans un silence pesant, chargé de mystère.
Sidoh (brise le silence, sa voix rauque et traînante) :
“Pourquoi es-tu si calme, humain ? Tu es face à une créature venue d’un autre monde. Un shinigami. La mort incarnée. Pourtant, tu ne trembles pas, tu ne fuis pas… Pourquoi ?”
Pasteur Oga (posant doucement la croix sur le banc) :
“Parce que la mort, Sidoh, est une compagne que je connais bien. Elle marche à mes côtés chaque jour, et elle m’a appris à ne plus avoir peur. Mais toi… toi qui prétends être la mort incarnée, je vois autre chose dans ton regard. Pas la puissance, ni la terreur. Je vois… le vide.”
Sidoh (ricane faiblement) :
“Le vide ? Peut-être as-tu raison. Dans notre monde, le néant est partout. Nous existons sans but, sans fin, sans véritable vie. On observe, on écrit des noms, et on laisse le temps faire son travail. Voilà ce que nous sommes. Mais toi, humain… Pourquoi t’accroches-tu à la vie, alors que tu sais qu’elle finit toujours par nous échapper ?”
Pasteur Oga (lève un regard serein vers le plafond) :
“Parce que chaque vie, aussi brève soit-elle, est un don. Et ce don, je le crois, vient de quelque chose de plus grand que toi, ou moi. Appelle cela Dieu, si tu veux. Le Christ a marché parmi nous pour nous enseigner que même dans la souffrance et la finitude, il y a de l’amour, de l’espoir, une raison d’être.”
Sidoh (intrigué, penche la tête) :
“Dieu ? Voilà un mot que j’entends souvent chez les humains. Certains l’implorent quand ils craignent la mort, d’autres le maudissent quand elle frappe. Mais dis-moi, pasteur… Où est-il, ton Dieu, quand un humain écrit un nom dans un Death Note ? Pourquoi ne les sauve-t-il pas ?”
Pasteur Oga (ses yeux se voilent légèrement, comme pris dans une profonde réflexion) :
“Dieu ne sauve pas en empêchant. Il sauve en offrant un choix. Le Death Note est une arme, un outil de mort. Mais ce n’est pas lui qui tue. C’est la main qui écrit, le cœur qui décide. Ce carnet révèle ce qu’il y a de plus sombre dans l’âme humaine. Mais il ne force personne à y céder. Même face à la tentation, nous avons toujours une porte de sortie.”
Sidoh (croise les bras, le regard fixé sur le pasteur) :
“Tu parles comme si les humains étaient capables de résister à leur nature. Mais je les ai observés. Ils sont faibles, avides, prêts à trahir pour un peu de pouvoir. Quand on leur donne un Death Note, ils montrent leur vraie couleur : celle du sang. Alors, dis-moi, pasteur, que vaut ton espoir face à cela ?”
Pasteur Oga (serre la croix dans sa main, avec une lueur d’assurance dans les yeux) :
“L’espoir ne réside pas dans la perfection des hommes, mais dans leur capacité à changer. Même le plus corrompu peut se repentir. Le Christ lui-même a pardonné à ceux qui l’ont crucifié. Et toi, Sidoh… Toi qui observes ces humains depuis des siècles, n’as-tu jamais vu un acte de bonté, même dans la pire des situations ?”
Sidoh (hésite, son ton devient plus bas) :
“J’ai vu des humains écrire des noms pour protéger ceux qu’ils aiment. J’ai vu des larmes sur leurs visages, comme si leurs propres cœurs se brisaient en traçant ces lettres fatales. Peut-être… Peut-être qu’ils ne sont pas tous mauvais.”
Pasteur Oga (s’approchant lentement de Sidoh) :
“Et toi, que ressens-tu en les observant ? Es-tu seulement une machine qui note des noms, ou y a-t-il quelque chose, là, au fond de toi, qui t’appelle à chercher plus ?”
Sidoh (replie ses longues mains sur ses genoux, sa voix est presque un murmure) :
“Je ne sais pas… Peut-être que nous, shinigamis, sommes destinés à être ce vide que tu as mentionné. Mais parfois, je me demande… Pourquoi avons-nous ce carnet ? Pourquoi existons-nous ? Si un Dieu a créé les humains, alors qui nous a créés, nous ?”
Pasteur Oga (se redresse, son regard empreint d’une sagesse calme) :
“Peut-être que, comme les humains, vous avez un choix à faire. Vous avez le pouvoir de tuer, mais aussi celui de veiller. Peut-être que même un shinigami peut trouver une forme de rédemption.”
Sidoh (fixe longuement le pasteur, un éclat indéfinissable dans ses yeux vides) :
“Rédemption… Un mot bien étrange pour une créature comme moi. Mais… je vais y réfléchir, humain. Peut-être que tu n’as pas totalement tort.”
Le vent souffle à travers les vitraux brisés de l’église. Sidoh se lève, son corps étrange projetant une ombre mouvante sur les murs. La nuit est tombée. Le pasteur Oga, assis dans son bureau mal éclairé, fixe intensément Sidoh, la créature spectrale aux yeux perçants et au sourire sinistre. Entre eux, le carnet noir repose sur le bureau, comme une présence oppressante. Le silence règne, seulement troublé par le bruit de la pluie qui frappe les vitres de l’église. Oga reprend la parole après un long moment de réflexion.
Pasteur Oga (froidement, ses mains jointes sur le carnet) :
“Tu m’as parlé des règles de ce carnet. De ce qu’il fait. De sa malédiction. Mais tu ne m’as pas encore tout dit, n’est-ce pas ?”
Sidoh (un sourire carnassier étire ses lèvres) :
“Tu es perspicace, humain. Non, je ne t’ai pas tout dit. Parce que tu n’es pas prêt à entendre certaines vérités.”
Pasteur Oga (le regard perçant, défiant) :
“Essaie-moi. Je suis prêtre, après tout. Ma foi repose sur la vérité, même si elle est dérangeante.”
Sidoh (s’appuie contre un mur, ses ailes repliées, l’air amusé) :
“Très bien. Tu veux la vérité ? Ce carnet n’est pas unique. Il y en a d’autres, disséminés dans ce monde….”
Sidoh, lui montre une photo de la détentrice du Life Note.
Sidoh, rajoute : C’est elle…
Le pasteur reste interdit, ses doigts se crispant sur la table. Il ferme les yeux un instant, comme pour repousser un choc émotionnel, mais la vérité semble le frapper de plein fouet.
Pasteur Oga (d’une voix brisée) :
“Lucie, la fille adoptive du vieux mafieux ? Non… Ce n’est pas possible. Pourquoi aurait-elle un tel objet ? Et comment… ?”
Sidoh (croise les bras, observant Oga comme une bête en cage) :
“Je n’ai pas toutes les réponses, jeune homme. Mais je sais que son carnet est différent du tien. Plus sombre, plus puissant. Il ne lui appartient pas, pas encore vraiment. Mais elle l’a entre les mains. Et ça, c’est dangereux.”
Pasteur Oga (les yeux fixés sur Sidoh, le ton tremblant entre colère et désespoir) :
“Qu’est-ce que tu veux dire par ‘plus puissant’ ? Et pourquoi elle ? Pourquoi Lucie ?”
Sidoh (se penchant légèrement, sa voix devenant plus grave) :
“Certains carnets ne se contentent pas de tuer. Ils manipulent, ils corrompent. Ils brisent les âmes avant même que le cœur s’arrête. Celui qu’elle a entre les mains est lié à un autre shinigami. Un rival. Celui-là joue à un jeu différent du mien. Lucie n’a aucune idée de ce dans quoi elle s’embarque.”
Pasteur Oga (serrant les poings, la douleur et la colère dans ses yeux) :
“Et toi ? Pourquoi me dire ça maintenant ? Si tu savais tout ça, pourquoi ne pas m’avoir prévenu plus tôt ?”
Sidoh (ricane, se redressant avec nonchalance) :
“Parce que je ne suis pas ton ange gardien, pasteur. Je suis ici pour ce carnet, pas pour sauver ton âme ou celle de Lucie. Mais… disons que je suis curieux de voir jusqu’où tu iras pour la protéger contre Ryuk et ses malices.”
Un silence tendu s’installe, ponctué par le bruit de la pluie battante. Le pasteur baisse les yeux sur le carnet, son esprit bouillonnant de pensées contradictoires. Sidoh recule dans l’ombre, son regard lumineux fixé sur Oga.
Pasteur Oga (murmure, presque pour lui-même) :
“Lucie… Que t’es-tu laissée entraîner à faire ?”
Sidoh (avant de disparaître dans l’ombre, un ton moqueur et grave) :
“Bonne chance, pasteur. Tu en auras besoin. Et quand tu verras ce que contient son carnet, tu comprendras que ce monde est encore plus cruel que ce que tu imagines.”
Le pasteur reste seul dans son bureau, les pensées tourmentées, le regard fixé sur le carnet devant lui. La pluie redouble d’intensité, comme si le ciel lui-même pleurait l’arrivée de cette nouvelle tragédie.
Scène :
Le soleil du matin éclaire doucement les murs délabrés de la chapelle, où l’on entend les échos des travaux en cours. À l’intérieur, le vieux Kollet, un homme massif malgré son âge, est assis à une table de fortune. Ses lunettes noires couvrent ses yeux devenus inutiles, mais son ouïe et son esprit restent aiguisés. Le pasteur Oga entre, portant une chaleur sincère et familière.
Kollet (avec un large sourire, reconnaissant les pas du pasteur) :
“Eh bien, Oga, c’est pas tous les jours que tu viens traîner dans mon repaire. Tu te perds ou tu veux juste goûter à mon café ?”
Pasteur Oga (en riant, s’approchant pour lui serrer l’épaule) :
“Kollet, tu sais bien que ton café est légendaire, mais c’est surtout ton sale caractère qui me ramène ici.”
Kollet (tapote la table en bois avec malice) :
“Assieds-toi, vieil ami. Je vais te préparer une tasse. Tu bois encore avec trop de sucre, ou t’es enfin devenu un homme ?”
Pasteur Oga (s’assoit en soupirant) :
“Je reste fidèle à mes mauvaises habitudes, comme toi avec ton cigare. Parle-moi plutôt de la chapelle. Elle a l’air… vivante, maintenant.”
Kollet (se lève lentement pour préparer le café, parlant avec une voix chargée de fierté) :
“Vivante, oui. Elle était à l’abandon depuis des années. Un toit qui fuyait, des murs qui s’effondraient. Si tu l’avais vue avant, tu aurais cru que même Dieu l’avait oubliée. Mais grâce à ma petite Lucie et son boulot, on a pu tout remettre en état.”
Pasteur Oga (curieux, observe autour de lui) :
“Lucie, hein ? Comment elle va ? C’était une vraie tornade, cette gamine. Toujours à grimper partout et à poser un million de questions.”
Kollet (rit en versant le café dans deux tasses) :
“Ah, ça, c’est peu dire. Elle était une sacrée chipie. Mais elle a grandi, Oga. Elle a pris des responsabilités, elle travaille dur. C’est grâce à elle si on a pu financer cette rénovation. Je ne sais pas ce que je ferais sans elle.”
Pasteur Oga (prenant la tasse avec un sourire chaleureux) :
“Tu peux être fier d’elle. Mais dis-moi, ce nouveau travail… c’est sûr ? Elle ne se met pas en danger ?”
Kollet (s’assoit en face de lui, l’air pensif) :
“Lucie dit que tout va bien, qu’elle gère. Mais je sais qu’elle fréquente des types louches. Elle n’a pas tout appris de moi pour rien, hein. Mais elle a un bon cœur. Si elle fait des choix risqués, c’est pour moi, pour cette chapelle, pour nous deux.”
Pasteur Oga (boit une gorgée de café, puis hésite avant de poser sa tasse) :
“Tu sais, Kollet… J’ai vu des choses récemment. Des choses que je ne peux pas expliquer. Lucie est peut-être mêlée à quelque chose qui dépasse tout ce que nous connaissons.”
Kollet (fronce les sourcils, tendant l’oreille avec attention) :
“Qu’est-ce que tu veux dire par là ? Arrête tes énigmes, Oga, parle clairement.”
Pasteur Oga (se penche légèrement, baissant la voix) :
“Un carnet, Kollet. Un carnet qui donne le pouvoir de tuer par un simple nom écrit sur ses pages. Et avec ce carnet… une créature, une ombre que j’ai vue de mes propres yeux. On les appelle des shinigamis.”
Kollet (se fige, son visage perd son sourire, et il pose sa tasse lentement) :
“Des monstres, tu dis ? Et ce carnet, il est où ?”
Pasteur Oga (hésite un instant, puis murmure) :
“Je l’ai. Je l’ai pris pour le protéger, ou… je ne sais pas. Mais je sens que ce pouvoir est une abomination.
Kollet (serre les poings, son ton devient plus grave) :
“Oga… Tu es un homme de foi, un homme droit. Mais ça, c’est le genre de chose qui détruit des vies. Ce carnet, brûle-le. Fais-le disparaître. Parce que s’il tombe entre de mauvaises mains, il n’y aura pas de retour en arrière.”
Pasteur Oga (le regard fixe, l’air tourmenté) :
“Je sais, Kollet. Mais je ne peux pas m’empêcher de me demander… pourquoi ce pouvoir existe ? Pourquoi moi ? Pourquoi Lucie ? Et si je détruis ce carnet, est-ce que cela suffira vraiment ?”
Kollet (pose une main ferme sur celle d’Oga, comme pour le rassurer) :
“Écoute-moi bien, vieil ami. On ne peut pas toujours comprendre les ténèbres. Mais on peut choisir de ne pas y succomber. Le simple fait que tu te poses ces questions prouve que tu es encore du bon côté. Alors, fais ce qu’il faut. Libère-toi de cette malédiction.”
Pasteur Oga (serrant la main de Kollet, avec un soupir lourd) :
“Peut-être que tu as raison. Peut-être que je devrais juste mettre fin à tout ça.”
Kollet (se lève lentement, avec un sourire en coin, retrouvant un peu de légèreté) :
“Et après, tu reviendras ici. Et on fêtera ça avec une bouteille de mon meilleur whisky, pas ce café infect.”
Pasteur Oga (riant doucement, se levant à son tour) :
“Toi, Kollet, tu trouverais toujours une excuse pour ouvrir une bouteille. Prends soin de toi, vieux brigand.”
Kollet (lui tendant la main pour une dernière poignée ferme) :
“Et toi, fais attention à toi, homme de Dieu. Si ce carnet revient te hanter, tu sais où me trouver.”
Le pasteur quitte la chapelle en regardant une dernière fois les murs en rénovation, pensif. Derrière lui, Kollet reste immobile, une main sur la table, comme s’il écoutait encore les échos de leur conversation. Dans le silence, il murmure pour lui-même :
“Lucie… Qu’est-ce que tu es allée faire, ma fille ?”