Venomo

Chapitre 2 : Ave de la desgracia

2075 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 29/12/2022 16:09

Après 16h, alors que tout le monde avait quartier libre, en attendant la nuit, la commandante se trouvait dans son bureau, réglant une affaire de dernière minute. Elle fut surprise par un appel.


- Velasquez.

- Almá.

- Kate. Que me vaut cet appel?

- Prête pour cette nuit ?

- Plus que jamais, Laswell. Vous commencez à me connaître.

- C'est bien pour ça que j'ai fait appel à vous sur cette mission. Votre aide m'est précieuse.

- Tout le plaisir est pour moi.

- Comment se passe l'intégration de mes hommes?

- Bien. Nous avons pu faire connaissance en discutant un peu.

- J'espère que Ghost ne vous a pas fait peur.

- Los fantasmas no me asustan.

- Bien. Ils vous seront utiles sur le terrain.

- Je n'en doute pas, Kate. Après les exploits de MacTavish, et le passif du Colonel, ainsi que du Lieutenant, je sais que je suis bien entourée. Surtout aujourd'hui.

- Je le sais, Almá. Aujourd'hui est une dure journée, je ne voulais pas que vous soyez seule. C'est encore trop tôt.

- J'ai une quasi centaine d'hommes à mes ordres, je ne me considère pas seule.

- Commandante, ce n'est pas de ça que je parle.

- ... je sais.

- J'ai chargé le Sergent Garrick de déposer des fleurs en votre nom. Je sais à quel point il est douloureux de vous rendre la-bas.

- Vous comprenez donc ma haine envers El Sin Nombre et sa clique.

- Je comprends. Pour moi aussi, il est dur de réaliser qu'il n'est plus la...

- ...

- Prenez le temps qu'il faut, Almá. C'est ce qu'Antuán aurait voulu.

- Merci, Kate.


A peine raccroché, quelqu'un frappait déjà à la porte du bureau.


- Entrez.

- Commandante.

- Sergent MacTavish. Appelez moi Almá.

- Alors appelez-moi Soap.

- Très bien. Que puis-je pour vous, Soap?

- Un de vos hommes m'a demandé si vous pouviez nous montrer votre technique concernant le nettoyage des fusils de précision?

- Pourquoi n'est-il pas venu directement?

- Vous étiez au téléphone.

- ... Pardon. Oui, j'arrive. Donnez moi deux minutes, le temps que je me débarrasse de cette veste.


Un cri strident provenant de la pièce d'à côté se fit entendre, surprenant Soap qui prit directement son arme de service dans sa main.


- Pirata, callate !

- Pirata? Qu'est-ce que...

- Pirate. Notre gris du Gabon. Enfin...

- ?

- Ce perroquet appartenait à mon bras droit.

- ... appartenait?

- Le Major Antuán Montenegro. Voilà aujourd'hui exactement un an qu'il a été tué sous la torture. Devant mes yeux.

- Je... Je vous demande pardon.

- Vous ne pouviez pas savoir. Seule Laswell le sait.

- ...

- Oiseau de malheur... Laissez moi une minute que je le libère.


Almá se dirigea vers la porte à sa droite, et la déverrouilla, prenant ainsi le perroquet sur son bras.


- Soap, voici Pirata.

- Bel oiseau.

- Sacré pipelette, oui.


Aussitôt dit, Pirata vola directement jusqu'à l'épaule de Soap, qui semblait surpris de cet élan de gentillesse.


- On dirait qu'il vous apprécie. Ce n'est pas le cas avec tout le monde.

- Je me sens privilégié, d'un coup.

- Prenez le avec vous, si vous voulez, le temps que vous restez ici. Cet oiseau de malheur me donne la migraine.


Elle enleva sa veste aussitôt, et suivit Soap dans les couloirs de la base, le menant ainsi vers sa base d'entraînement.


Ghost et Alejandro s'y trouvaient déjà, et Ghost remarquait aussitôt le perroquet.


- Ben alors Johnny, tu t'es transformé en arbre, maintenant?

- Je me suis fait un copain.

- Voyez-vous ça.

- Pirata a toujours eu le chic pour se faire de nouveaux amis.

- ¡Hola, chico hermoso!


Almá et ses soldats se mirent à rire à gorge déployée quand le perroquet s'adressa à Ghost. Alejandro ne put s'empêcher d'esquisser un sourire au même moment.


- Encore un qui a une grande gueule.

- Hé !

- Au moins, vous faites la paire.


Après avoir écouté les informations provenant de la radio, Almâ se dirigeait vers la table centrale sur laquelle se trouvait deux fusils de précision dont son SVD.


- Bien. Messieurs, j'imagine que ceci ne vous est pas étranger.

- Снайперская винтовка Драгунова, СВД. Autrement dit, fusil de précision Dragunov.

- C'est exact. Belle observation.

- Kyle serait fou, s'il voyait ça.

- Je suis sûre que le Sergent Garrick le verra à un moment ou à un autre. Bref, ceci est un Dragunov, conçu par Irvgueni Dragounov. En clair, ce petit bijou est au sniper ce que l'AK-47 est au fusil d'assaut : son représentant le plus répandu. 1300 mètres de portée maximale, tirez une balle, et vous verrez la puissance de ce fusil dans la manière qu'auront vos ennemis de tomber.

- Sympa.

- Ce fusil fut répandu en 1963 par...

- ... les armées russes.

- Exact. L'URSS les utilisaient pour leurs snipers. Et le font encore aujourd'hui.

- Comment se fait-il que vous ayez un SVD ici? Ils ne se font plus au Mexique depuis...

- Depuis plus de 20 ans maintenant. Ceci est un des derniers dans les environs. Mais... pour ma part, celui ci vient directement de Russie. J'y ai opéré il y a quelques années en mission d'infiltration. Croyez-moi que le FSB se souvient encore de moi à l'heure qu'il est.


Quelques hommes présents dans la salle riaient.


- Mon pauvre Antuán, si tu étais encore vivant, tu en aurais des choses à dire. Bien, malgré que le sergeant Garrick ne soit pas présent, il est important de savoir comment démonter un fusil de précision, pour ne pas vous retrouver enrayé, comme le Sergent Martinez. N'est ce pas, Hidalgo?

- C'est pas ma faute...

- Je t'ai dis d'y faire attention.

- Ouais...

- Bref. Veillez à bien regarder ce que je vais faire, ça peut vous être utile. Et si vous êtes attentif, ce genre de technique pourra vous être très utile pour tout autre fusil. Elle s'adapte à beaucoup de fusils d'assaut également.

- On sait comment...

- Croyez-moi, vous serez bien content de connaître ce "truc" par ici. Vous seriez surpris.

- A ce point ?

- Les mercenaires sont plutôt virulents. Je ne sais pas comment ceux de Venomo se comportent, mais à Las Almas, ils sont limite formés dès le plus jeune âge.

- Ici aussi. Le Mexique est petit.


En un sifflement, elle eut l'attention de tout le monde. Et elle put commencer son cours. Tout en démontant son fusil pièce par pièce, elle expliquait chaque détail sur comment désarmer efficacement un sniper. En expliquant aux plus jeunes recrues de ses troupes comment neutraliser un fusil efficacement, elle montrait également une technique pour aller le plus vite possible, pour maximiser ses chances de neutraliser l'ennemi.


Temps record : 1 minute 10, chrono en main.


- Je parie que Gaz ne sait pas faire ça.

- J'ai été bien formée. Soldats, retenez bien ce que je viens de vous montrer. Vous en aurez besoin. Luiz, je compte sur toi, sergent.

- Roger.


Laissant ses recrues en salle d'entraînement, la commandante sortit aussitôt, allumant une cigarette et s'accoudant à la rambarde face à elle.


- Ce n'est pas bon pour vous.

- Si j'écoutais, je serai nonne à l'heure qu'il est.

- Laswell a dit pareil la dernière fois.

- Ben voyons.

- Commandante, una palabra, en privado?


Elle laissa Ghost en compagnie de Soap et Pirata, et suivit le Colonel Vargas un peu plus loin.


- Un souci?

- Je n'ai pas pu m'empêcher d'écouter les récits de vos soldats, tout à l'heure. Et d'après ce que j'ai pu entendre, il me semble qu'aujourd'hui n'est pas un jour facile.

- ... En effet.

- Rodolfó m'en avait vaguement parlé il y a quelques mois.

- Rodolfó... Parra?

- Lui-même.

- Je vois que les nouvelles vont vite à Las Almas. Comment va-t'il?

- Très bien.

- Ravie de l'entendre. En effet, Rodolfó était un ami proche d'Antuán.

- Votre commandant en second?

- Exact. Il était en charge de la troupe 17. Il avait même en tête l'idée de me redonner la Shadow Company après la capture de Graves. Mais ça n'avait pas marché. A la place, lui et moi avons été capturés l'année dernière sur les côtes. Les sicarios ne m'ont jamais particulièrement appréciés.

- Valeria.

- Y Diego. Ces deux-là nous ont trouvés sur le large de Guanajuato, pensant que nous étions sur le point de faire exploser leurs cargaisons. Ce qui devait arriver, mais nous avons été dupés.

- ...

- Antuán et moi avons été retenus prisonniers pendant deux mois. Torturés et affamés chaque jour.

- ...

- Diego a voulu me soutirer des informations confidentielles, mais étant entraînée à ne pas céder sous la torture, je n'ai pas cédé, et Antuán non plus. Le pauvre a fini avec la moitié d'un bras tranché...

- Je...

- Non. Malheureusement, ce fut le prix à payer. Mais il m'aurait tuée lui-même si j'avais parlé. On a servi ensemble. Nous avons suivi les mêmes entraînements, partagé les mêmes douleurs, et les mêmes combats. Donc durant notre capture, Diego a trouvé amusant de couper un doigt d'Antuán à chaque silence de ma part. Mais il voulait que je me taise. Alors je l'ai fait. Valeria, quant à elle, m'a laissé un petit souvenir.


Almâ releva sa manche droite, montrant la gigantesque cicatrice laissée sur son bras, de son épaule jusqu'au pli du coude.


- Elle a cru bon de vouloir me sectionner quelques muscles et tendons, sauf qu'elle ne sait pas viser juste. Quand on ne sait pas l'anatomie humaine, on se contente de peu, vous savez.

Mais je n'ai rien dit. Je n'ai pas cédé. Antuán non plus. Et Diego a fini par craquer, lui tranchant la gorge devant moi, et le laissant se vider de son sang dans mes bras.

- Puta madre...

- Donc, non, Colonel, aujourd'hui n'est pas un bon jour. Vous remercierez Rodolfó de ma part, dans tous les cas, c'est un peu grâce à lui que je suis en vie, aujourd'hui, s'il n'avait pas appelé quelqu'un quand je répandais mon sang dans les rues de Guanajuato, je serai probablement près d'Antuán à l'heure qu'il est.


Cigarette écrasée et soupir au coin des lèvres, ce ne fut qu'une fois qu'elle essuyait une discrète larme au coin de son œil, qu'elle remarquait le visage d'Alejandro.


- Colonel?

- Sí?

- Una problema?

- No. Votre récit fut quelque peu captivant, malgré la tournure des événements.

- Oh. Je me suis laissée prendre au jeu de vous raconter mon histoire, en quelques sortes. Vous êtes la deuxième personne après Laswell à vraiment savoir ce qu'il s'est passé.

- Ah?

- Kate est celle qui m'a rapatriée en hélico.

- Oh.

- Merci de m'avoir écoutée. On se sent un peu plus compris, dans ces moments là. Malgré cette histoire, je me suis jurée d'avoir la tête de Garza sur un plateau.

- On vous aidera.

- Je n'en doute pas, Colonel.

- Alejandro.

- Hmm?

- Appelez-moi Alejandro.

- Très bien. Alejandro. Et appelez moi Almá.

- Si, señora.


Alejandro parti, Almá sentait le poids sur ses épaules diminuer. Au moins, quelqu'un l'avait écouté, pour une fois. Et elle s'était laissé aller à parler, à ouvrir cette page qu'elle croyait avoir oubliée.


Pirata la fit vite revenir à la réalité, cependant.


- Callate, cabròn!

- ¿Qué pasà?

- Ce putain d'oiseau m'a mordu !

- Luiz, je t'ai déjà dit, ne le touche pas, il ne te supporte pas !

- Bon à empailler, saloperie !

- LUIZ !

- Perdona, commandante.

- Hors de ma vue.

- KYAH! MOVER, HIJO DE PUTA!

- PIRATA, ENOUGH! Mierda...

- Sí, señora.

- Il a l'air de vous écouter.

- Il n'a jamais écouté qu'Antuán et moi, de toute façon. Messieurs, si vous avez faim, je vous propose la cantine. Quant à moi, je vous retrouve tout à l'heure.



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