WILD GOTHAM 3 : LE SOURIRE DU FOU

Chapitre 6 : Un retour et un adieu

1699 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 29/09/2018 10:14

Le lance-grapping, le boomerang, la boule à fumée, l’extension auditive, la longue-vue rétractable... Tout était parfaitement à sa place dans la ceinture à outil quelque peu retouchée. S’en était fini des réticences. Il était temps d’accepter l’urgence de la situation, et d’endosser de nouveau le rôle de Batman. Bruce regarda le costume accroché à un mur. Il avait à peine eu le temps de prendre la poussière depuis sa dernière utilisation. Et dire que Bruce pensait en avoir fini avec lui.

    

    « Tu n’es rien.» Lui dit brusquement la tenue. « Sans moi tu serais incapable de respecter les espoirs, que tes parents plaçaient en toi. »

    

    « C’est toi qui n’est rien. Tu n’es que le produit de mon imagination. »

    

    « Même pas. C’est ton père, qui m’a conçut. Tu sais l’homme assassiné sous tes yeux sans que tu fasses quoique se soit. »

    

    « Je n’étais qu’un enfant ! »

    

    « Et tu l’es toujours. Un adulte sait se débrouiller seul sans son père pour le prendre par la main. »

    

    Non ce n’était pas le moment. Des vies étaient en jeu. Bruce devait se concentrer. Au prix d’un certain effort, il parvint à se fixer sur ce qui était vraiment important : le Joker. Qui était-il ? Que préparait-il ? Où se trouvait-il actuellement ? Bruce détenait certaines réponses, même s’il refusait de l’admettre. La docteur Quinzel ne parvenant pas à soigner son patient et ayant entendu parler d’une guérisseuse à Blackgate, était allée à sa rencontre. La guérisseuse était parvenue à soigner l’inconnu, qui par reconnaissance avait rejoint ses rangs. Ça tenait debout. Sauf qu’aux yeux de Bruce les indiens étaient des primitifs sans véritable culture ou science. Par conséquent il lui était inconcevable, qu’une indienne ait pu surpasser une femme formée à la médecine occidentale.

   

    Par chance d’autres pistes demeuraient comme la maison des Arkham. Harleen était vraisemblablement mêlée à la visite des ou de l’indien. On avait utilisé sa clé et dérobé du matériel médical sans procéder à une fouille. Ce dernier point sous-entendait que le responsable savait où chercher. Rien ne prouvait que la participation de Harleen était volontaire. De toute façon quelle raison aurait-elle poussé une respectable docteur à rejoindre des indiens renégats ? Sans doute la séquestraient-ils quelque part, et la forçaient à les soigner ? Bruce ne voyait pas d’autre explication. L’indien qu’il avait vaincu, était resté muet sur ce point. Bruce provoquait au choix l’admiration, la jalousie, ou la sympathie, mais jamais la crainte. De toute manière il n’avait pas l’âme d’un tortionnaire. Par conséquent il s’était contenté de ligoter dans un coin le messager du Joker. Il s’en occuperait plus tard.

    

    Un autre point intriguait l’enquêteur : la vitesse et l’efficacité de l’encerclement de la ville par la tribu. Au moins il disposait d’un semblant d’explication. Les indiens étaient natifs des environs, et savaient donc s’y déplacer. Puis un cri se fit entendre. Ce simple son suffit à faire trembler Bruce. Il était arrivé, ce qu’il craignait tant. La demeure des Wayne étant excentrée, représentait une cible facile pour les indiens. La cave disposait d’un accès dissimulé au réseau souterrain du comté. Il était encore temps de fuir. Sauf que Bruce n’était pas seul. Alfred avait catégoriquement refusé de quitter les lieux. Et Lucius accompagné de trois ouvriers parmi les plus anciens de la mine, avait offert (ou plutôt décidé) de monter la garde dans le vestibule. C’était la première fois que ces deux hommes désobéissaient à un Wayne. Bruce ne voulant pas perdre d’autres proches, aurait préféré les savoir en sécurité au milieu de la ville. Il s’empara de la ceinture, et tout de suite après réalisa sa bêtise. Comment n’avait-il pas reconnu immédiatement la voix de Sélina ! Elle répétait son prénom à tue-tête tout en arpentant les couloirs.

    

    La bâtisse était à présent barricadée, et sous surveillance. Comment avait-elle fait pour y pénétrer sans être repérée ? Même un chat n’y serait pas parvenu. Qu’importe ! Dans l’immédiat Sélina ne devait pas découvrir la cave. Bruce en sortit immédiatement, et ferma à clé derrière lui. Ensuite il vint à la rencontre de l’intruse. Il laissa s’échapper un soupir de soulagement en la croisant dans un couloir. Elle allait visiblement bien. Sélina portait sa tenue d’amazone, comme la surnommait Bruce. A la différence qu’il s’y ajoutait un sac en bandoulière. Et surtout Sélina n’arborait pas son air malicieux habituel. Elle qui paraissait si sûre et si déterminée habituellement, était à présent nerveuse, peut-être même apeurée. La situation était si particulière. Bruce ne sut pas vraiment quoi dire, ni faire. Au contraire Sélina se précipita vers lui, et le serra doucement dans ses bras. Jamais elle n’avait preuve d’une telle tendresse auparavant.

    

    Bruce en oublia toute cette folie. Le Joker, les indiens, les morts à venir, tout cela pouvait bien attendre. Soudain Sélina se retourna. Même en arrivant dans son dos, Alfred s’était fait repéré. Lui aussi avait été attiré par les appels de la jeune femme.

    

    « Alfred ! Tout va bien. C’est une... amie. Vous pouvez nous laisser. » Cafouilla Bruce revenu à la réalité.

    

    « Vous êtes sûr, maitre Bruce ? » Répliqua le domestique en plissant les yeux

    

    « Oui certain. Vous pouvez disposer. »

    

    « N’oubliez pas où vous vous trouvez, ni qui vous êtes. »

    

    « Je vous ai dis de partir ! »

    

    Jamais auparavant Bruce n’avait élevé la voix envers son majordome. Malgré cette nouveauté le serviteur s’exécuta. Décidément plus personne n’agissait normalement. Comme si la folie du Joker se déversait partout. Sélina fit rapidement abstraction de l’incident. Elle était redevenue vive et énergique.

    

    « Bruce, on part tous les deux. »

    

    « Mais je ne peux...» Bredouilla Bruce surpris par cette proposition si abrupte.

    

    « Je comprends. » Dit Sélina radoucie tout en lui caressant le visage. « Tu as des obligations ici. Mais cette mine tournait déjà avant que tu reviennes. Et tu pourras même y laisser tout ton argent. J’ai les moyens de nous offrir une nouvelle vie. »

    

    « Pourquoi partir ? »

    

    « Enfin Bruce ! On fait face à une révolte indienne menée par un espèce de fou sanguinaire. »

    

    « Il peut être vaincu. » Répliqua Bruce dans un mélange de fierté et d’agressivité.

    

    On se serait attendu de la part de Sélina, qu’elle crie plus fort. Pourtant elle se montra douce ou plutôt professoral.

    

    « Et après ? Il y a eu Crane, Double Face, et maintenant ce Joker. Ce n’est pas normal que tous ces cinglés apparaissent juste dans ce malheureux comté. »

    

    « Ne sois pas superstitieuse. »

    

    C’était la phrase à ne pas dire. Sélina vexée le repoussa brusquement.

    

    « Je n’ai peut-être pas ton érudition, mais je suis pas stupide. Quelque chose ne va pas à Gotham. Et je ne risquerai pas ma vie pour le découvrir. Surtout que je peux enfin refaire ma vie... avec toi. »

    

    Elle voulait vraiment partir avec lui. Pas avec sa fortune, pas avec son nom prestigieux, rien que lui. Ça méritait réflexion. Jusqu’ici écrasé par la culpabilité il n’avait fait que suivre la volonté de ses défunts parents : les études d’ingénieurs, la reprise de la mine, et même Batman. Sélina avait-elle raison ? Une autre existence lui était-elle accessible ? En tous cas il désirait la suivre. Jamais il n’avait rencontré une femme pareille. Puis la cave lui revint à l’esprit avec ses plans et son arsenal capables de sauver des vies.

    

    « Plus tard... peut-être. » Parvint à articuler Bruce.

    

    « Il n’y aura pas de plus tard. L’occasion c’est uniquement maintenant. Et je ne la louperai pas. »

    

    « Je ne peux pas. Je suis désolé. »

    

    Bruce craignit qu’elle ne trouve la réponse un peu courte. Pourtant Sélina se contenta juste d’un baiser avant de disparaitre, comme elle en avait le secret. Bruce savoura longuement ce goût salé avant de s’engouffrer de nouveau dans la cave. Il n’était pas en mesure de se permettre plus.

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