Arthur: La Vraie Malédiction
Ce qui devait être à la base une simple vidéo d'urbex venait de basculer en un putain de film d'horreur en temps réel. Alors que Valentin et Sacha, ce dernier portant Lucie gravement blessée dans ses bras, arrivaient à l'orée des bois, d'autres flèches les manquèrent de peu, frôlant leurs têtes ou venant se planter dans les troncs des premiers arbres. Sans prendre le risque de regarder en arrière, le trio continua sa course paniquée sur le petit sentier battue près de la lisière afin de rejoindre l’endroit ou la voiture, leur seul moyen de se sortir de ce cauchemar, attendait. La blessure ouverte de Lucie posait un problème supplémentaire, le mollet lacéré continuant de laisser couler le sang et la jeune femme continuant de lutter pour ne pas s’évanouir à cause de la douleur.
_ On y est presque bébé, tiens le coup ! supplia Sacha en vérifiant constamment tout en courant qu’elle restait consciente.
_ Je vois la voiture ! On y est ! s’écria Valentin qui courait devant et aperçut enfin le véhicule apparaître dans le faisceau de la torche.
Sans perdre un instant, il déverrouilla la voiture et tous se précipitèrent à l’intérieur. Pendant que Sacha avait allongé Lucie sur la banquette arrière et s’attelait à lui couvrir son mollet avec des mouchoirs pour stopper un maximum le saignement, Valentin se mit au volant et mit le contact, le ronronnement du moteur se faisant entendre et les phares avant s’allumant.
_ Faut faire vite ! Elle est toute pâle ! Lucie, accroche toi, on va t’amener à l’hôpital ! Sacha paniquait, voyant sa petite amie continuant de souffrir le martyr, son visage devenu aussi blanc qu’un linge.
Il prit son téléphone de sa poche pour essayer d’appeler à l’aide, mais encore une fois, le réseau se montra inexistant. Valentin essaya de faire avancer la voiture, mais celle-ci ne parvint qu’à faire à peine un mètre en avant, maladroitement, et le moteur se mit à faire un drôle de bruit. En regardant le tableau de commandes, il constata avec horreur que le niveau d’essence était… pratiquement vide ! Comment était-ce possible ? Il se souvenait parfaitement que Sacha avait fait un plein à la petite station service dans le coin peu avant de venir ici.
_ Que… oh non, non, non, pas ça ! Nous fait pas ce coup là, pas maintenant, allez avance ! s’agita Valentin au volant.
Mais rien à faire, le véhicule s’immobilisa de nouveau sur le sentier battu, ses phares fonctionnant néanmoins encore et éclairant la piste devant eux.
_ Qu’est-ce qui se passe ?! Pourquoi on avance pas ?! demanda Sacha alors qu’il épongeait le front en sueur de Lucie.
Valentin, malgré la peur qui l’animait, se décida à sortir de la voiture, armé de sa lampe torche et fit vite le tour pour vérifier ce qui clochait. Et il le découvrit très vite. Les quatre pneus de la voiture avaient été dégonflés, leurs surfaces recouvertes de marques profondes de lacérations, comme si quelqu’un s’était amusé à taillader avec un couteau. Il comprit également d’où venait la disparition soudaine de l’essence, le réservoir à l’arrière ayant été percé par… ce qui se présenta dans le faisceau de la lampe comme une sorte de petite lance d’aspect tribale, et qui arracha un frisson d’effroi à Valentin. Dans la panique et l’envie de partir d’ici, ils n’avaient même pas remarqué ça en arrivant. Continuant d’entendre ces bruits de tambours résonner plus loin dans les bois, mais aussi des bruits de mouvements rapides comme si plusieurs choses se déplaçaient à grande vitesse dans les fourrés et les arbres, le jeune homme se dépêcha vite de retourner se mettre à l’abri à l’intérieur de la voiture.
_ Valentin putain, qu’est-ce que tu fous ? Faut qu’on se barre, maintenant ! Sacha demanda.
_ On peut pas ! Les quatre pneus sont morts et le réservoir est crevé. On est coincés !
_ Quoi ?! Tu te fous de ma gueule, comment c’est possible !
_ Je sais pas, ok ?! J’ai aucune putain d’idée de ce qui se passe !
Valentin et Sacha commençaient à se prendre la tête, la peur et le stress leur faisant perdre pied, sous le regard souffrant de Lucie, qui luttait pour ne pas s’endormir suite à une perte assez importante de sang.
Soudain, quelque chose fut violemment jeté depuis l’obscurité sur le pare-brise de la voiture qui prit les trois jeunes gens par surprise et les fit hurler de peur. C’était le cadavre du chat sauvage vu plus tôt, décapité et s’étant éclaté contre le pare-brise, répandant une flaque de sang sur le verre. Ils n’eurent même pas le temps de dire ouf qu’un choc brutal fut entendu juste au dessus d’eux, la tôle du toit se pliant légèrement juste sous leurs regards terrifiés.
_ Oh putain, c’est quoi ça ?! s’écria Sacha, en prenant Sacha contre lui.
_ Sacha, au secours ! J’en peux plus ! gémissait Lucie avec terreur et désespoir.
Quelque chose se trouvait sur le toit de la bagnole et frappait dessus avec frénésie, laissant entendre des grognements et hurlements inhumains et stridents. La panique augmenta lorsque plusieurs flèches surgirent de l’obscurité des bois et vinrent se planter dans le capot de la voiture. L’une d’elles traversa même le pare-brise et se planta sur le siège passager, heureusement vide. Non loin, des silhouettes humaines apparaissaient, se faufilant furtivement entre les arbres et laissant voir les lueurs de torches enflammées, et faisant entendre leurs cris dégénérés.
_ Oh merde ! Mais c’est qui ces tarés ?! hurlait Sacha.
Les flèches continuaient de pleuvoir, ainsi que quelques lances tribales, venant cribler le capot et percer le moteur qui se mit à cracher de la fumée. Les trois jeunes hurlèrent de plus belle quand la pointe d’une lame, comme une sorte d’épée, transperça le toit, frôlant le nez de Sacha qui bondit en arrière, et commença à lentement mais sûrement découper la tôle comme le ferait un ouvre-boites avec une conserve. Ne pouvant rester ici dans ce véritable piège à rats, et même si cela comportait un risque des plus élevés, Valentin et Sacha prirent Lucie avec eux et s’extirpèrent hors de la voiture, et sans même prendre le temps de vérifier ce qui pouvait se trouver sur le toit de la voiture ni aux alentours, se mirent à courir sur le sentier comme des forcenés, entendant derrière le hurlement bestial de quelque chose exprimant sa fureur de voir ses cibles s’enfuir.
La caméra d’épaule saccadée, Valentin courait à s’en vider les poumons, talonner par Sacha qui heureusement grâce à sa corpulence trapu, pouvait porter Lucie sur son dos sans être trop ralenti. D’autres cris inquiétants résonnaient derrière eux, ainsi que des bruits de course dans les fourrés.
_ Ils sont juste derrière putain ! hurla Sacha.
_ Te retourne pas et cours ! lui répondit Valentin.
Alors qu’il courait depuis de longues minutes avec la trouille aux tripes, le trio aperçut finalement la lueur de phares s’extirpant des ténèbres au loin, et venir dans leur direction. Reprenant espoir, ils hurlèrent à l’aide à plein poumons, faisant de grandes signes des bras et agitant les faisceaux de leurs lampes torches. Un pick-up gris s’arrêta face à eux, les aveuglant presque avec ses phares puissants, et un homme d’une quarantaine d’années en sorti précipitamment. Il portait une casquette sur la tête et était habillé un peu comme un vigile, portant même un fusil dans sa main. Ce dernier éclaira aussi avec une torche, déconcerté de voir devant lui trois jeunes gens en panique totale, les larmes aux yeux, et l’un d’eux étant visiblement blessé.
_ Nom de dieu, je peux savoir ce que vous foutez ici vous trois ? C’est une propriété privée ici ! leur clama le gardien d’un ton vraiment autoritaire et colérique.
Valentin et Sacha, Lucie étant trop affaiblie pour s’exprimer, se précipitèrent vers le gardien comme un miracle, le suppliant de les aider, de venir en aide à leur ami gravement blessée à la jambe, que quelque chose les poursuivait, etc.
_ Eh eh, du calme, pas tous en même temps, je comprends rien ! Un seul à la fois ! leur ordonna le gardien pour faire cesser cette avalanche de mots mélangés qui lui parvenaient aux oreilles.
_ Monsieur je vous en supplie, sortez-nous de là ! On s’est fait attaqués et ma copine est salement blessée ! dit Sacha en larmes et montrant effectivement la morsure sanglante et moche au mollet de Lucie, que le gardien put constater, surpris, avec sa lampe.
_ Quoi ? Comment ça attaqués ? Qui vous attaque ? demanda l’homme encore plus confus.
_ On...on n’en sait rien, monsieur, dit Valentin à son tour dans le stress encore très présent. On a vu… on étaient venus dans la maison abandonnée pour filmer, et des trucs ont commencé à nous poursuivre dans les champs et dans la forêt… Ils nous ont tirés dessus à coup de flèches et ils ont détruits notre voiture ! S’il vous plaît, faut que vous appeliez des renforts ! Appelez l’armée s’il faut ! Il y a vraiment quelque chose de pas normal, ici !
Le gardien écouta mais le regarda comme s’il avait affaire à un cinglé, mais dans le même temps, il pouvait lire une détresse et une peur plus que véritable sur leurs visages, et la blessure de la fille était aussi là pour prouver que quelque chose de sérieux s’était produit.
_ Bon, vous bougez pas de là, j’arrive, leur ordonna l’homme en se dirigeant vers son pick-up.
_ Mais…
_ VOUS BOUGEZ PAS J’AI DIT !
Ils n’eurent d’autres choix que d’obéir, mais vérifiant partout autour d’eux avec des sauts de nervosité. À leur grande stupeur, les bruits derrière eux avaient cessés depuis un moment et personne ne les poursuivaient. Pendant ce temps, le gardien attrapa son talkie-walkie sur le siège passager de son pick-up et l’enclencha pour appeler un collègue à lui, aussi en patrouille dans le secteur.
_ Adrien ? Hé, Adrien tu me reçois ? J’ai chopé trois jeunes qui se sont introduits sur la propriété, et l’un d’eux a été blessé. Je vais les ramener à la gendarmerie et… Adrien, tu m’entends ?
La seule réponse qu’il obtint fut les grésillements et parasitages de son talkie. L’homme marmonna des insultes, agacé et vérifia plusieurs fréquences pour voir si l’une d’elles marchaient au milieu de ces arbres.
Tout à coup, une sorte de longue liane tressée et humide, à la manière d’un fouet, surgit depuis l’obscurité entre les arbres, claquant et venant s’enrouler à pleine vitesse autour du cou du gardien, se faisant étrangler. Valentin, Lucie et Sacha bondirent et hurlèrent de plus belle à la vue de l’homme se faisant tirer violemment en arrière par une force énorme et traîner à toute vitesse jusqu’à disparaître totalement dans les fourrés en criant et perdant son fusil qui tomba sur le bord du sentier. Mais ses appels à l’aide se transformèrent vite en cris de souffrance et d’agonie, accompagnés de bruits épouvantables de chair déchirée et d’explosions de sang, ainsi que des grognements et des ricanements anormaux.
_ VITE, ON SE CASSE ! beugla Valentin en courant dare-dare jusqu’au pick-up, ramassant le fusil au passage et s’engouffrant dans le véhicule avec ses deux amis.
Heureusement, les clés étaient encore sur le contact. Mais alors que Sacha aidait Lucie à se hisser sur la banquette, il fut à son tour attraper par une de ces lianes, qui le saisit autour de la jambe, et le tira avec force vers l’arrière.
_ SACHA ! s’écria Lucie avec horreur.
_ OH MERDE ! AU SECOURS ! appelait le jeune homme en détresse, s’accrochant de toutes ses forces à la portière pour ne pas être entraîné hors du sentier, dans l’obscurité totale des bois.
_ PRENDS MA MAIN ! lui dit Lucie en se penchant et lui tendant. VALENTIN, AIDE MOI !
En proie à la panique la plus dévorante, Valentin perdait ses moyens, ne sachant que faire, et décida dans le feu de l’action, d’attraper le fusil du gardien ramassé quelques secondes avant, et bien que n’ayant aucune expérience avec les armes à feu, tira maladroitement en direction de l’obscurité, là d’où partait cette liane. La détonation résonna avec puissance, déchirant les tympans de tout le monde et avec le recul du tir, Valentin bascula violemment en arrière contre la portière. Suite à ce tir, plusieurs hurlements terrifiants résonnèrent autour, mais l’emprise sur Sacha ne faiblit pas du tout.
Lucie le retint de toute la poigne qu’elle pouvait, mais finit par perdre la lutte et dans un hurlement de désespoir, contempla impuissante son petit ami se faire emporter et s’évanouir à son tour dans les ténèbres.
Un choc violent secoua le pick-up et Valentin et Lucie crièrent avec horreur en voyant le corps déchiqueté et éventré du gardien, jeté contre le capot, sa tête manquante, ses entrailles et son sang encore frais répandus sur la moitié du pare-brise. S’en fut trop pour Valentin, qui craquant psychologiquement, bondit hors du véhicule, la caméra et le fusil encore dans les mains, et commença à s’enfuir à toutes jambes en plein milieu des bois, sans savoir ou aller.
_VALENTIN ! NON, REVIENS ! ME LAISSE PAS ! se fit entendre la voix hurlante et implorante de Lucie en pleurs, de plus en plus loin.
Mais Valentin était déjà loin. Il ne pensait plus, n’écoutait plus. Courir, courir toujours plus loin, ses jambes répondaient toutes seules. Il courait presque à l’aveugle au milieu de cette forêt inconnue, le pauvre faisceau de la lampe secoué sans cesse par la course n’aidant pas à bien se repérer. Il décida alors d’activer la vision nocturne de sa caméra principale pour mieux voir.
Tout en courant, il pouvait entendre ces déplacements rapides et des craquements de branches résonnant derrière lui. Il regardait brièvement derrière lui quelque fois, pour apercevoir vaguement, grâce à la vision nocturne de la caméra, il pouvait entrapercevoir une forme humanoïde et élancée, d’environ de la taille d’un homme et d’allure féminine, bondissant avec une grande agilité d’arbre en arbre et le poursuivant sans relâche. Elle semblait avoir des sortes d’oreilles longues, fines et pointues et surtout, deux yeux brillants inhumains fixés sur lui. La chose se déplaçait encore plus habilement qu’un singe, s’accrochant aux troncs, sautant et courant sur les plus branches les plus épaisses, et laissant entendre ces grognements et ces sons stridents et bestiaux. Valentin n’arrivait pas à croire ce qu’il était en train de vivre, si ce n’est un monstrueux cauchemar dont il espérait se réveiller à tout moment. Ce truc le traquait, mais pire que tout, semblait s’amuser avec lui, de le voir cavaler comme un pauvre petit lapin effrayé pourchasser par un loup.
Trop effrayé et obnubilé par ce qui pouvait bien le poursuivre, Valentin ne prit pas garde ou il courait et chuta dans une pente de laquelle il roula jusqu’en bas avec fracas sur un tapis de terre et de feuilles mortes, jusqu’à arriver vers le bord d’une petite rivière endormie, ou il perdit connaissance après que sa tête ai violemment cogné contre une vieille souche.