Mes mémoires

Chapitre 35 : Réfléchis

2494 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour il y a 2 mois

Une fois arrivés chez Vander et Vi, ma grande sœur et moi nous installions sur le canapé pendant que nos parents faisaient des boissons chaudes. Je voyais très bien que Vi bouillonnait, son genou tremblant, alors qu’elle se tenait le menton avec ses mains, regardant dans le vide d’un air assassin. J’allais ouvrir la fenêtre puis revenais près de ma sœur, allumant deux cigarettes, dont une que je tendais à la louve. Cigarette sur laquelle elle prit une longue taff avant de recracher la fumée dans un souffle tremblant. Que pouvais-je lui dire ? Sa petite amie avait été droguée, battue, coupée et presque violée, et elle n’avait pas pu attraper son auteur. Je pouvais comprendre sa colère, sa rage même ! Il fallait que je fasse quelque chose, mais impossible, j’étais comme paralysée, je ne savais pas comment aider ma sœur ce soir. J’entendais mes parents revenir dans le salon et ils s'installaient tous les deux. Ma mère ayant un regard compatissant et mon père sérieux.


«Vi… »


«Quoi? » dit ma sœur en serrant les crocs et en tapant toujours du pied.


« Ne fonce pas la tête baissée, ma fille… Ta mère, ta sœur, Cait en seraient les plus touchés… Tu as réussi à faire fuir Taric comment ? Seulement parce qu’il a vu que tu n’étais pas seule, regarde dans quel état il t’a mise. » La voix de mon père était calme, emplie d’un ton doux malgré sa voix grave et chaude.


« Hors de question, je…»


Elle fut coupée.


« Fille! Écoute-moi, il ne faut pas que tu t’en mêles plus, tu fais partie d’un gang, oui, mais cela ne te servira à rien de le trouver et de réagir à chaud comme là !»


La louve grogna et se tourna vers notre mère.


« Et toi, maman? T’es flic… Ils vont le laisser tranquille, hein?! C’est ça!? Soit honnête !»


« Hé bien…» Angelina hésita, visiblement gênée.


Vi serra le poing.


« Ouais, n’en dit pas plus! Il aura rien cet enfoiré de mes deux!»


Notre mère reprit la parole.


« Vi, il n’a que dix-sept ans. Il ne peut pas faire de la prison. Il aura des travaux d’intérêts généraux, aura une amende et une injonction d’approcher Caitlyn. Nous ne pouvons pas faire plus et cela prendra du temps… Je suis désolée. »


Vi prit l’une des tasses et la jeta à travers la pièce, la faisant s’exploser contre le mur. Nous nous levions tous d’un coup et mon père attrapa le bras de Vi.


« Ça suffit maintenant, Vi ! Tu n’as plus à t’en mêler, ce n’est plus ton affaire !» La voix de mon père se fit plus menaçante et grave. Vi avait les lèvres qui tremblaient et les poings toujours serrés.


« Il aurait fallu quoi pour qu’il soit mis en taule ? Qu’il la viole ? Bordel, vous vous foutez de moi ou quoi !!» 


« Vi ! Ne gueule pas comme sur ton père ! »


Angelina avait pris, elle aussi, un ton menaçant. Ton qui fit écarquiller mes yeux et ceux de ma sœur. Vraisemblablement, notre père n’était pas surpris. Ma mère serait-elle une fausse calme et me l’aurait caché depuis ma naissance ? Elle m’a bien caché Vi et Vander alors… Peut-être que ça aussi ?


« Donc tu s’rais resté sans rien faire si t’avais été dans le même cas que moi c’est ça ?» Vi regardait notre père dans les yeux, presque en le défiant, même si elle savait qu’elle perdrait toujours face à lui.


Notre père soupira et secoua la tête de gauche à droite lentement, reprenant la parole, visiblement plus calme.


« Exact, je ne serais pas resté sans rien faire, mais… J’ai appris qu’il ne fallait pas réagir à chaud, ce n’est et n’a jamais été la bonne solution. Même si c’est tentant, oui, même si moi aussi j’aurais fait comme toi dans cette situation. Tuer cette personne, oui, je sais que tu l’aurais fait parce que… Moi aussi, je l’aurais fait pour ta mère et elle le sait. Si je suis allé en prison, ce n’est pas pour rien, mais là n’est pas la question. Tu vaux mieux que lui, même mort, il aura su que tu t’es rabaissée à son niveau. Ne risque pas d’aller en prison comme je l’ai fait, malgré la noblesse de la cause. Tu vas devoir être encore plus présente pour Caitlyn à présent. Elle doit être traumatisée et tu dois la sortir de ce traumatisme. Ce qui sera une chose éprouvante autant pour elle que pour toi. »


Ma sœur s’avoua vaincue et laissa tomber sa tête sur le torse de notre père alors qu'il l’étreignait tendrement. Ce qui pouvait paraître bizarre pour un hybride grizzli, mais… Ce grizzli était en réalité un véritable nounours, se servant de ses poings seulement pour les bonnes raisons et en dernier recours. Il savait trop bien que cela n'apportait que des ennuis et avait à présent choisi la voie de la sagesse. Vi murmura à notre père un « je l’aime», étouffé.


« Je sais, ma fille… Je sais… Raison de plus pour être à ses côtés le temps qu’il faut pour l’aider et évidemment, ne pas la laisser partir après ça… Alors fais-moi une promesse, ma fille. S’il te plaît. Ne te venge pas pour un salaud comme ça. »


Vi soupirait. Cette promesse…


«Je… Je peux pas… Vraiment.» Secouant la tête de gauche à droite lentement, les yeux vers le sol, elle partait ensuite dans sa chambre. J’allais la rejoindre, mais mes parents recommencèrent à parler d’elle. Ma mère étant inquiète.


« Tu penses qu’elle va t’écouter, Vander?» demanda Angelina, visiblement inquiète.


«Non… Elle ne va pas m’écouter, je sais qu’elle va le chercher et le faire souffrir, mais elle va réfléchir sur comment le faire. Et à tête reposée, je lui fais confiance sur ce point-là. Mais rester sans rien faire ? Elle est comme moi, Angelina… Et c’est ce qui me fait peur. »


À la fin des paroles de mon père, je me décidais à aller dans la chambre pour rejoindre ma sœur. Je savais pertinemment que bientôt nous allions avoir une nouvelle mission. Et j’étais aussi sûre que toutes les personnes présentes aujourd’hui, ayant vu l’état de ma sœur, feraient partie de cette mission. Je refermais la porte derrière moi et voyais ma sœur au balcon en train de fumer, la tête dans les étoiles, auprès de Caitlyn sûrement. Je prenais une clope et l’allumais, faisant sursauter Vi qui me fit doucement sourire.


«Tu penses à ce point à elle ?»


Je la vis serrer les poings et les crocs.


«À ton avis Jinx…»


À questions bêtes, réponses bêtes. J’aspirais sur ma cancerette.


« Oui… Pardon grande sœur. On va mettre Loïc et Ekko sur le coup. Ils ont vu à quoi ressemblait Taric.» Je m’arrêtai un instant, songeuse. « Jacob a dit l’avoir déjà vu à la Voie de Cuibre. Je peux le mettre sur le coup aussi ? T’en penses quoi ? »


Cependant, je ne lui parlais pas de notre rencontre. Celle du refuge, où j’avais retrouvé mes bas instincts, à savoir me droguer et me scarifier. Il avait été là… Pour moi. Alors même qu’il ne me connaissait pas. Il m’a hébergé sans rien demander en retour, alors oui, je pouvais croire en lui, les yeux fermés même.


« Je te crois dans ce cas. Demande-lui, je te fais confiance, à toi et à lui, mais ne la trahissez pas… Surtout lui. Si tu n’as plus entendu parler de Johnny et d'Ezreal ce n’est pas pour rien...» dit-elle d’un ton sérieux.


J’avais ouvert la bouche légèrement, il était vrai que je n’avais plus eu affaire à ces deux idiots. Ma sœur les aurait-elle ?


« Tu veux dire que…»


« J’ai fait ce qu’il y avait à faire, c’est tout…» dit-elle d’un ton froid en recrachant la fumée grisâtre de sa cigarette qui était presque entièrement consumée.


Elle n’était pas la leader d’un gang, qui est le plus craint de Zaun, pour rien. Mais penser qu’elle pouvait tuer sans se faire prendre ? Mon père le savait-il ? Avait-il mis notre mère au courant ? Je ne pensais pas. Cela dit, je savais que par sa violence, elle avait fait beaucoup de passages devant le juge, mais seulement pour de simples choses comme du vandalisme et des bagarres. 


« Je sais que ce n’est pas le sujet, mais… Je dois t’en parler…»


Les oreilles de Vi tressautèrent.


« Quoi ?»


« Je n’ai pas envie de revoir Mylo…»


« Attends quoi? Tu déconnes ? Tu oses dire ça ? Pourquoi?» dit-elle en se retournant vers moi.


«Je… Le voir me fait penser à Lizzy à toute cette histoire, je… Je suis pas soignée Vi…»


« Pourtant, tu es sous médocs… Et tu as le docteur Donovan… Nous…» répondit-elle visiblement perdue.


« Non tu comprends pas…» Je soufflai et reprise la parole. « Je pense à cette histoire chaque jour qui passe, je… Fais ce que tu veux, mais… J’ai envie de reprendre de la Devil’s… C’est pour ça que j’ai tant confiance en Jacob, il sait ce que ça fait, ce qu’est cette drogue. Sa sœur est morte à cause de ça…»



Elle fronça les sourcils, mais je ne savais pas à quoi elle pouvait penser. Je la regardais, attentive à ses moindres gestes, cependant elle ne me dit rien. Évidemment, je ne lui avais pas parlé ni de mes réelles hallucinations ou encore de comment j’avais réussi à prendre contact avec Jacob. De plus, je n’avais pas dit que j’avais repris de cette drogue et que je m’étais scarifiée. 


« Tu m’as encore menti?»


« Comment ça ?» je clignais plusieurs fois des paupières.


« Ne fais pas l’innocente Jinx! Le jour où je t’ai attrapé parce que maman nous avait prévenus que tu repensais à la tongue…»


Je baissais les yeux.


«Ou.. Oui… Mais j’osais pas te le dire, j’avais peur de ta réaction, j’ai même encore peur de ta réaction… »


Je la regardais alors qu’elle prenait la parole.


«J’ai une question… Et cette fois, tâche d’être honnête pour de bon… »


« Oui? Quoi ?»


« Tu me diras si tu reprends toutes tes conneries? Au moins qu’on puisse en parler ?»


« Je ne t’en fais pas la promesse, tout comme tu ne l'as pas faite à papa… Du moins... Tant que je ne sens pas prête à t’en parler, ni aux autres. Mais si je te différencie des autres… C’est surtout parce que j’ai plus confiance en toi, car tu es ma sœur.»


Les oreilles de ma sœur s’étaient baissées. Pourtant, je ne savais pas à quoi elle pensait, c'est pour cela que lorsque je vis sa main se rapprocher de moi je fermais les yeux, prête à recevoir une gifle. Cependant, elle ne vint pas, j'eus le droit à une caresse sur la joue qui me fit un bien fou et me donna du courage, mais avant, j’écoutais ma sœur.


« Tu en parlerais à Jacob? Étant donné qu’il connait mieux cette drogue et que tu sembles lui faire confiance, assez en si peu de temps du moins…»


«Oui… Je lui en parlerai, mais… Cette nuit… Je veux te dire et te montrer quelque chose que Jacob a vu et que je pense pouvoir te montrer ce soir, à têtes reposées, bien que la journée ait été dure…»


J’inspirais un long moment et soulevais mon pull, montrant mes nouvelles scarifications à ma sœur qui fondit en larmes alors qu’elle me serrait fort contre elle.


«Oh Jinx! Par pitié ne le refais plus…»


Je m’accrochais à elle et soupirais.


«Vi… C’est bien trop dur. C’est aussi dur que de résister à de la Devil’s… J’essaye, j’ai essayé… Je n’arrive pas à résister, la scarification est une des drogues les plus dures au monde… Et je suis tombée comme une conne dedans… Pardon, ma sœur. Je ne suis pas soignée… Je ne suis pas guérie, je ne sais pas si je le serai un jour et je m’en excuse du plus profondément de moi…»


Les larmes de ma sœur mouillaient mon cou alors que je l'entendais ravaler ses sanglots pour me parler d’une voix étouffée et tremblante.


«Je… Je comprends pourquoi tu ne veux pas revoir Mylo et… À présent, je m’en veux encore plus de ne rien avoir fait à Lizzy, mais… J’en veux aussi à Mylo… C’est pour lui que tu es tombée dans ce piège. Je suis désolée…»


Je la serrais un peu plus fort dans mes bras, je ne voulais pas qu’elle pense ça et voilà qu’à présent elle se sentait coupable !


« Ce n’est pas ta faute, Vi, tu ne pouvais pas savoir que j’allais tomber dans son piège. Moi-même, je ne le savais pas…»


« Même! C’est moi qui aurais dû intervenir ! Pas toi, je t’ai indirectement livrée à elle.»


« Elle connaissait ton visage, tu n’aurais jamais pu aider My’!»


«Si… J’aurais pu… Lui briser chaque os de son corps et le donner aux cochons une fois qu’elle aurait assez souffert ! Je n’aurais pas dû laisser la justice lui foutre une aussi petite peine. Regarde où tu en es !»


« Ma sœur… Arrête de penser à tout ça pour ce soir, d’accord ? On va essayer de dormir et tu vas te détendre, ok? Tu peux le faire pour moi ? S’il te plaît ?»


Je la regardais d’un air triste. Je savais que cette nuit allait être dure. Pas qu’elle d’ailleurs. Tant qu’elle n’aurait pas trouvé Taric et ne l’aurait pas fait payer, elle ne serait pas en paix. Sur ces paroles, nous allions nous mettre en pyjama et allions au lit pour dormir. Et la nuit fut interminable.




Note: TW pour le chapitre suivant qui passe en MA car mention de viol.





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