Mary in Wonderland ou Une histoire de la vie
Charles et Helen Kingsley vivaient heureux. Cependant, Helen se sentait seule. Charles partait souvent en navigation pendant de longs mois. Un jour, ils décidèrent d'avoir un enfant. La grossesse se passa sans encombre, et, au bout du neuvième mois, un magnifique bébé aux yeux d'un vert éclatant naquit. La petite Mary grandissait rapidement, mais était faible et tombait souvent malade. Elle avait de longs cheveux blonds cendrés, contrairement à ceux de sa mère, presque blancs. Elle était joyeuse et maline, quoi qu'un peu solitaire. Helen était comblée. Elles faisaient ensemble de longues promenades dans la forêt et se reposaient en dessous d'un grand chêne. Parfois, la jeune fille s'endormait et la fillette poursuivait un lapin blanc qui parlait. Il était mignon et amusait beaucoup Mary. Le soir, en rentrant, elle en parlait à sa mère, décrivant son veston bleu et sa montre à gousset pour la énième fois. Elle le dessinait aussi, avec un talent certain. Tout ce passait bien jusqu'à la chute. L'après-midi de ses 6 ans, Mary avait escaladé le chêne pour voir où se rendait le mystérieux lapin. Une branche céda sous son poids et elle tomba de plusieurs mètres. Elle s'en sortit avec plusieurs blessures plus ou moins grave, une énorme frayeur ainsi qu'un diagnostic encore plus effrayant que celle-ci. Des médecins lui prescrivirent une infection grave de la rétine. La médecine ne pouvait rien y faire. Helen était prête à tout pour soigner sa fille qui avait de la peine à voir sa mère ainsi. Elle alla voir des chamans et des sorciers, des voyantes et des médiums, essaya toutes sortes de drogues et de médicaments, rien n'y faisait. Mary perdait lentement la vue. À ses sept ans, elle ne distinguait plus que les formes, les couleurs avaient disparues de son monde. Alors qu'elle était juste un peu timide et solitaire, elle commença à se renfermer totalement sur elle même. Elle ne parlait presque plus et avait même arrêté de dessiner, sa passion. Ses parents se désespéraient de la voir ainsi et lui offraient toutes sortes de présents pour lui rendre le sourire, en vain. Elle les refusait comme elle refusait de sortir de la maison. Un jour, sa mère lui offrit un service à thé. Elle ne dit rien mais commença à s'en servir. Elle ne quittait plus sa chambre, sauf à cinq heures, heure du thé, où elle allait dans la cuisine se faire une tasse d'un mélange à chaque fois différent ainsi que grignoter quelques biscuits. À ses huit ans, elle perdit totalement la vue. Elle couvrit ses yeux d'un bandage et arrêta totalement de parler. Charles s'absentait de plus en plus, il s'était endurci et n'était doux et sensible qu'avec sa femme et ce qui lui restait de fille. Helen, elle, avait prit dix ans d'un coup. Elle était devenu fatiguée et morose. Il lui arrivait de rester des heures assise devant la porte de la chambre de sa fille, attendant qu'elle, les bras devant elle, sorte pour préparer son thé. Ses moments étaient les plus douloureux mais aussi les seuls où elle pouvait esquisser un sourire. Elle se faisait discrète et observait Mary dans l'ombre. Celle-ci avait prit de l'assurance et commençait à connaître le chemin vers la cuisine. Elle était devenu maigre et frêle, car elle mangeait très peu. Sa peau pâle était diaphane à cause du manque de lumière. Cette situation dura longtemps, tuant à petit feu la famille Kingsley.