♠ ♦ Alice in Wonderland ♥ ♣

La journée touche à sa fin. J'ai raconté mon ''rêve'' dans les moindres détails. Et à ma grande surprise, tous mes potes étaient fous de joies. Ils étaient complètement absorbés par l'histoire, ont littéralement bu mes paroles et se sont plongés dans ce fol univers qui m'entoure. Ce qu'ils ignorent, c'est que rien de tout ce que j'ai dit n'est faux. Ça peut paraître étrange, mais je suis heureuse et soulagée que mes seuls amis sur Terre connaissent mon secret. Certes ils ne se doutent pas que tout ceci existe, mais ils s'y sont intéressés, et ça m'a beaucoup touché.

L'heure des adieux a malheureusement sonné. Je décide de ne rien dire à personne concernant mon départ définitif et de laisser Mme. Kingston leur expliquer que j'ai été ''adoptée''. Je ne veux pas les voir tristes avant de les quitter.

Les Trois Canailles foncent vers moi, me câlinant un par un. Je sens les larmes monter, mais je les dompte du mieux que je le peux.

« Elle était trop géniale ton histoire Alice ! S'exclame Marto en sautillant.

-J'aimerais trop aller au Pays des Merveilles moi aussi dans mes rêves ! Lance Bowser Jr. de son fidèle air malicieux en ricanant.

-Tu nous raconteras d'autres histoires ? Demande Skelerex en me faisant des yeux si mignons que même Kotaro, je le pense, ne pourrait pas y résister.

-Je ne vous promets rien, mais j'essaierai de trouver de nouvelles idées toutes aussi folles que le Wonderland ! Dis-je en ébouriffant leurs cheveux, veillant à ne pas faire tomber leurs riches chapeaux. »

Ciel s'avance vers moi, le menton relevé et de sa démarche assurée et quelque peu snobinarde. Il me lance solennellement :

« Ton histoire était étonnement passionnante en plus d'être folle, Alice.

-Ah bon, tu trouves vraiment, Ciel ? Je demande, un peu surprise que ça lui ait plu.

-Pourquoi te mentirais-je ? Je suis ravi d'avoir pris connaissance de ce monde farfelu qui te rend si imaginative et originale, Alice Wonderchess. »

Il esquisse un très léger sourire, ce qui est extrêmement rare venant de lui. Il incline ensuite son chapeau pour me saluer, et j'effectue alors une petite courbette polie en tenant les pans de ma jupe. Il lance à la cantonade, en s'avançant vers un carrosse qui l'attend, dirigé par un grand homme élégant et mystérieux tout vêtu de noir : « À demain, chers amis. »

Alors que la calèche s'en va progressivement, Honey tire ma manche ballon pour que je me tourne vers lui. Lorsque c'est chose faite, il s'écrie joyeusement :

« Tu racontes trop bien les histoires Alice ! Il se blottit contre moi. Je suis content que tu ne fasses pas attention à ce que Alois et ses copains disent. Tu dois rester forte.

-Crois-moi Honey, je le resterai. Tu n'as pas de soucis à te faire de ce côté-là. Je lui fais un grand sourire, qu'il me rend avant de s'en aller en courant et en me faisant un dernier signe de main.

-Bon, je vais devoir y aller aussi, je vais raccompagner les petits bouts chez eux. Murmure Sena en s'approchant de moi, grattant sa nuque timidement. En tout cas, j'ai adoré que tu nous racontes ton rêve Alice. Les personnages que tu y rencontres sont si fascinants que tout paraît presque réel ! »

Ah... si il savait. Je plonge mon regard dans le sien. C'est dingue ce que les yeux reflètent l'âme d'une personne. Sena est un garçon profondément gentil. Je lis en lui qu'il serait prêt à mourir pour moi et nos amis, tant il est loyal. Et moi je vais l'abandonner, lui et tous les autres. Ça me crève le cœur... mais je ne suis pas à l'aise sur Terre. Sans un mot, je câline Sena, qui semble étonné puisqu'il rougit. Mais il me rend maladroitement mon étreinte, avec un sourire. J'ai l'impression qu'il a envie de pleurer.

« Merci pour tout, Sena... Je chuchote, tentant de faire taire mes sanglots.

-Merci à toi Alice, de rendre notre vie plus jolie et plus dingue. »

Doucement, il se défait de notre accolade, me sourit adorablement et s'en va en ayant pris Skelerex sur son dos et en tenant les mains de Marto et Bowser Jr., qui agitent leurs petites mains pour me dire ''au revoir''. Cette phrase qu'il vient de me dire... je crois qu'aucune phrase ne m'a jamais plus émue et fait du bien de toute ma vie.

Je sens la main de Monta se poser sur mon épaule et frissonne légèrement, en espérant qu'il n'ait pas remarqué ça. Je me tourne vers lui et lui souris. Il lance :

« Tu vois que ça valait le coup de nous raconter ton rêve ! Il était génial un MAX ! »

Je ris légèrement. ''Max'' est son mot depuis que nous sommes tout petits, et il l'utilise dans n'importe quelle situation. Il va atrocement me manquer, lui et ses ''Max''...

« Tu as vraiment l'air triste Alice... Tu es sûre que ça va ? »

Je ne peux pas lui dire la vérité mais... c'est mon jumeau, mon ami le plus proche sur Terre, et je me dois de lui annoncer mon départ. Je pense que c'est la moindre des choses. Je lui en cache déjà assez. Prenant mon courage à deux main, je murmure :

« Monta... j'ai été adoptée. Demain, je m'en vais, loin d'ici, et je ne reviendrai pas...

-Quoi ? Attends, c'est une blague ?! Crie-t-il d'une mine horrifiée. Mais pourquoi tu ne me l'as pas dit plus tôt ? Non, ça ne se peut pas, tu peux pas partir...

-En réalité, je l'ai su tout-à-l'heure quand je suis allée dans le bureau de la directrice... Elle m'a annoncé qu'un couple voulait m'adopter et qu'ils viendraient me chercher demain matin avant même que je n’aie le temps de vous dire adieu... Laissant une larme s'échapper, je continue. Je ne voulais pas le dire aux autres, afin de ne pas garder une triste image d'eux... mais toi, tu es mon plus fidèle allié, je ne peux pas partir comme une voleuse sans te dire ''au revoir'', je t'aime trop pour ça... »

Sans un mot, Monta me serre contre lui, versant quelques larmes qui m'ont fait l'effet d'une balle en pleine tête. Il caresse mes cheveux et lâche entre ses dents :

« Moi aussi je t'aime... Je veux pas que tu partes... Tu es la sœur que j'ai jamais eu... »

Cette phrase... C'est tellement dur pour moi, ce que je ressens est indescriptible...

« Je suis désolée Monta... Je caresse ses joue pour essuyer ses larmes. Je te promets que je t'écrirai régulièrement des lettres, je ne veux pas perdre le contact avec toi.

-Je répondrai à chacune d'elles, je te le jure. Dit-il en essuyant ses larmes en frottant ses yeux avec son avant-bras.

-Jure-moi autre chose, Monta : ne perds jamais ton beau sourire malgré mon départ. Sois heureux. Une page se tourne mais le livre continue, autant de mon côté que du tien. Ne t'arrête jamais de croquer la vie à pleines dents. Je lui souris entre mes larmes. Détermination MAX ! »

Il esquisse un grand sourire et répète mon « Détermination MAX » à son tour, ce qui a vraiment réchauffé mon petit cœur. Je le câline de nouveau, mourant d'envie de le mener avec moi. Mais il risque de perdre la vie au passage entre les deux mondes, et je ne veux risquer ça pour rien au monde. Il prend mes mains et me regarde longuement.

« Ne m'oublie pas hein... Moi je t'oublierai jamais...

-Moi non plus, crois-moi sur parole. Je suis folle, mais jamais je ne pourrai balayer tous ces bons souvenirs en ta compagnie, mon frère. »

Nous nous sourions, en nous regardant tendrement dans les yeux. Rien ne nous entoure, si ce n'est notre amour fraternel. Si il savait que nous sommes vraiment liés par le sang... je n'ose même pas imaginer sa réaction. Au bout d'un léger moment, étant plus courageux que moi, Monta retire ses mains des miennes et chuchote : « Adieu Alice...

-Adieu Monta... »

Et il s'en va, sans se retourner, pleurant très certainement en me laissant là, toute seule.

Traînant des pieds, je me dirige dans la clairière où se situe le terrier menant au Wonderland. Kuro est assis dans l'herbe, les bras derrière la tête, les oreilles baissées et les jambes croisées. Il a également les yeux clos et tique légèrement de ses lèvres pulpeuses, comme si il s'impatientait. Lorsqu'il sent ma présence, il ouvre un œil, laissant apparaître une petite tâche d'un rouge profond dans ce décor verdoyant, puis ouvre le second en se levant avec un sourire. Il avance vers moi. Je baisse les yeux et serre les poings.

« Alors, ma frangine, t'es prête ? Me demande-t-il tout heureux en remuant ses oreilles. »

Mon regard doit me trahir, puisqu'il perd progressivement son sourire en prenant mes mains.

« T'as fait tes adieux auprès de tes amis... c'est ça qui t'fait si mal ? »

Pour toute réponse, je me blottis contre lui, écrasant mes larmes contre son gilet grenat. Je maudis toutes ces larmes que j'ai versé au cours de ma vie, et espère être moins sensible à l'avenir. Kuro relève mon menton vers lui en me lançant un triste regard. Je lui explique :

« Monta... mon meilleur ami d'enfance... c'est lui qui est de notre famille, qui a aussi le sang de Jefferson dans les veines. Il a été adopté très jeune et ne le sait même pas. Il est le seul à qui j'ai dit que je ne reviendrai plus, sans plus de détail. Je hoquette douloureusement. Je ne lui ai évidemment rien dit concernant notre lien de parenté. J'essuie ma joue humide.

-Alice, tu peux toujours revenir sur ta décision... Murmure Kuro, baissant la tête.

-Jamais ! Je pose mes mains sur ses joues et lui souris tant bien que mal. Ma place n'est pas sur Terre. Certes, j'ai des amis ici, et mon propre frère jumeau. Mais ma famille complète est au Wonderland. Je veux y vivre. C'est là-bas que je vais être heureuse. Chez moi. »

Mon frère-lapin me rend un beau sourire éclatant et prend mes mains en me regardant affectueusement. Il s'approche ensuite du terrier en tirant mon poignet pour que je le suive. Debout devant l'immense trou noir, il chuchote :

« Alors, t'es prête cette fois, Alice ?

-Attends, Kuro, j'ai juste une petite question...

-J't'écoute, sœurette.

-Est-il possible que, depuis le Wonderland, j'envoie des lettres à Monta et que ses réponses me soient directement retournées au Pays des Merveilles sans qu'il ne le sache ?

-Laisse-moi te répondre par une autre question... Y a-t-il souvent des choses impossibles et irréalisables au Wonderland ?

-Tu marques un point. Je souris à pleines dents. Allons-y, Kuro. »

D'un commun accord, nous hochons la tête, puis nous sautons dans le terrier, cette fois-ci définitivement. Pour une fois, le vide ne m'a pas fait peur.

Je m'appelle Alice Wonderchess et j'ai 16 ans. J'ai grandi à Londres, dans un orphelinat, dans l'ignorance, dans le mensonge. Depuis ma naissance, je connais mon nom, et le répète sans cesse pour me présenter. Et pourtant c'est au bout de seize années d'existence que je comprends qui je suis vraiment. Je suis enfin moi-même.

Ma curiosité, mon imagination, ma sensibilité et ma folie font de moi ce que je suis, quelqu'un d'unique. Pour rien au monde je ne renoncerai à ma personnalité, et je ne changerai pour les yeux de personne. Qu'importe si je suis folle ? Les meilleures personnes le sont.

Le passé est derrière nous. C'est lui qui nous a forgé, qui a fait de nous ce que nous sommes. Mais je décide à présent de l'oublier. Je balaie ces affreuses visions de solitude, de peine et de colère, pour garder uniquement les souvenirs qui me réchauffent le cœur.

Le Pays des Merveilles est à présent ma maison, mon refuge, mon monde. Avec cet univers étrange, je ne suis jamais au bout de mes surprises. Rien n'y est impossible. Et c'est justement la raison pour laquelle je m'y sens chez moi.

Auprès de mes amis, je suis épanouie et heureuse. Les Rebelz sont tout simplement nécessaires à mon bonheur. Je file le parfait amour avec Hiruma, toujours aussi diaboliquement fidèle à lui-même depuis que sa montre a été refabriquée. Je ne me lasse jamais des dingues journées passées avec les Trois Fous, j'ai nommé Edge, L et Marshall, autour d'une bonne tasse de thé. Les Tweedle ne cessent jamais de me faire rire en toutes circonstances. Jumonji et Togano, souverains des Zones Pique et Cœur, veillent continuellement sur le Pays des Merveilles tout entier avec bienveillance et respect. Kotaro, éternellement enfermé, devient peu à peu complètement taré, prétendant même qu'il souhaite se repentir. Blue veille constamment à ce que je ne perde jamais mon identité de vue. Quant à Kuro, il est véritablement ma force. Nous sommes inséparables lui et moi.

Il n'y a aucun doute là-dessus : ma place est ici. Dans ce mystérieux pays aux multiples secrets. Il ne se passe pas un jour sans que je vive de folles aventures avec mes amis. Je ne m'ennuie jamais tant que je suis avec eux. Longue vie aux Rebelz.

Une page se tourne à jamais. Si le livre continue pour Monta et tous les élèves de Cloverjack's School dont j'ai croisé la route, si les récits loufoques s'entremêlent pour les habitants du Wonderland, de mon côté, c'est une toute nouvelle histoire qui commence.

Fin