♠ ♦ Alice in Wonderland ♥ ♣
Chapitre 1 : ♠ ♦ La folie n'a pas sa place ♥ ♣
1912 mots, Catégorie: T
Dernière mise à jour 06/09/2017 22:39
Je suis dans la salle de classe. En même temps, je ne peux pas me trouver ailleurs. Installée à ma place, près de la fenêtre, je contemple le ciel, mon menton appuyé dans ma main gauche, tenant mon stylo de la main droite. Je suis tellement absorbée par ce qu'il se passe au dehors que je pourrais presque le lâcher. Ce que dit le professeur ne m'intéresse absolument pas... D'ailleurs, je ne l'écoute jamais celui-là...
Pour me présenter vaguement, je m'appelle Alice. Alice Wonderchess. Je suis âgée de 16 ans et vis depuis ma naissance une vie d'incessante routine qui m'ennuie au plus haut point. Pour tout vous dire, je n'ai jamais connu mes parents et ne sais rien d'eux. Recueillie à l'orphelinat Cloverjack's House, j'y suis aussi scolarisée. Seulement, sans vous mentir, le côté internat de cet établissement n'a strictement aucun rapport avec le coté école. À Cloverjack's House, les internés sont tous des orphelins, la plupart étant très pauvres. J'ai eu la chance de toucher tout-de-même l'héritage de la famille Wonderchess, restant éternellement un mystère à mes yeux, et qui était apparemment aisée dans le passé. C'est la raison pour laquelle j'ai le droit d'être scolarisée à Cloverjack's School.
Mais bon, je ne sais pas vraiment si il s'agit là d'une chance : bien évidemment, la scolarité n'est réservée qu'aux enfants de sangs nobles, voire royaux. Alors, je suis dans une classe de garçons, tous aussi riches les uns que les autres, vêtus de vêtements somptueux à m'en rendre folle de jalousie, issus de familles aristocratiques réputées à Londres.
Et dans cette classe, entre les princes et les vicomtes, il y a moi. Alice. Cette misérable brune aux robes d'un bleu ciel éclatant, au nœud papillon dans ses cheveux longs, aux yeux couleur chocolat, et aux réflexions toutes aussi absurdes que sensées. Par ma différence, je ne suis acceptée que par la moitié de la classe, mais j'estime que c'est déjà un exploit monumental, étant donné mon imagination qui en inquiète plus d'un...
« Mademoiselle Alice ! Serait-ce trop demandé un minimum d'attention de votre part ? »
Je me retourne lentement vers le professeur, peinant à quitter le ciel des yeux, et en particulier les oiseaux qui volent librement dans l'étendue azurée.
« À quoi pensiez-vous encore ?! »
C'est à l'entente de cette phrase que la classe entière se retourne vers moi. Ce ne sont que treize élèves, mais bon, dans ces moments-là, ça parait beaucoup trop.
-Pour vous dire la vérité, Monsieur... J'esquisse un sourire taquin. J'étais en train de me demander quelles sensations le fait de voler pouvait procurer »
Des rires fusent dans la classe, ainsi que des soupirs d'exaspération. Un peu gênée d'avoir une fois de plus fait preuve de beaucoup trop d'imagination au moment où il ne le faut pas, je baisse les yeux, me cachant derrière ma mèche. Le comte Alois Trancy, qui me hait pour une raison qui m'échappe, pianotant le bureau du bout des doigts et les jambes croisées, lâche avec un air cruel :
« T'as surtout perdu une belle occasion d'fermer ta grande gueule, Alice ! »
Je lui lance un regard noir. Mais en voyant le soutien que lui apportent le rire du prince Vivien Wright et le regard espiègle du jeune marquis Honey, je comprend qu'il sera toujours pour fort que moi. Assis derrière moi, le comte Taro Raimon, mon ami d'enfance que je surnomme Monta, pose sa main sur mon épaule et me murmure : « L'écoute pas, il en vaut pas la peine... » Je hausse les épaules pour bien montrer que je n'en ai strictement rien à foutre, repose mon menton dans ma main et retourne à mes rêveries.
Bien sûr, lorsque je me remets à regarder par la fenêtre, il n'y a plus aucun oiseau dans le ciel... C'est à cause de ce Alois de malheur ! Toujours en train de foutre la merde, c'est pas possible ça ! Et le prof'... Il est pas chiant lui aussi, sérieusement ?!
Heureusement, parmi les treize mecs de la classe, il y en a sept qui me soutiennent. Enfin, six, en vérité. Mais Honey ne prend aucun parti, donc il est du coté d'Alois comme du mien. Je lance un furtif regard au comte Ciel Phantomhive, avec sa tenue bleue majestueuse, son éternel air indestructible, jouant avec la riche bague ornée d'un diamant bleu à son pouce. Puis, je me retourne vers le vicomte Sena Kobayakawa, plutôt discret, gribouillant sur son cahier de cours, avec son somptueux manteau rouge éclatant, décoré d'arabesques noires brillantes et de chaînes d'or et d'argent. Je souris rien qu'en pensant à quel point ces garçons-là sont adorables avec moi. Puis, j'admire leurs vêtements, si élégants et nobles. Je les envie. Je jette un regard écœuré vers ma robe bleue céleste, certes très belle avec ses quelques motifs damiers sur la jupe et ornée de résille, mais si... simple...pauvre... en comparaison avec les tenues de mes camarades de classe. Soudainement, une pensée farfelue me traverse l'esprit. Venant de moi, cela n'a strictement rien d'étonnant. Imaginez une seconde tous les garçons de Cloverjack's School portant des robes ! Ce serait tellement... excentrique, et mortellement amusant ! … Mais bon, tout bien réfléchi, étant donné que leurs tenues habituelles sont déjà monstrueusement féminines, avec leurs talonnettes ridicules et leurs rubans encore plus nombreux que sur les pans de ma robe, la différence avec la réalité est en fait assez faible...
Cette pensée si délirante me fait lâcher un petit rire enfantin, qui attire les regards de mes ennemis vers moi. Par « ennemis », j’entends ici le marquis Ikkyu Hosokawa qui me regarde les yeux grands écarquillés, comme si j'étais un extraterrestre, avant de replacer son petit chapeau en satin marron sur ses cheveux noirs en bataille. Ensuite, il y a Vivien, le Prince de la Connerie, immature à en mourir, qui me regarde en me montrant du doigt, se moquant de moi, trop puéril pour se rendre compte du mal qu'il cause autour de lui. Il y a aussi le duc Sasuke Kanagushi, qui entortille sa longue tresse autour de son doigt en levant les yeux au plafond. Sans oublier ceux que j'appelle Les Faux Jumeaux, le prince Riku Kaitani et le vicomte Kamiya Taiga. Contrairement à ce que tout le monde pourrait croire, ils ne sont pas frères, mais se ressemblent et s'assemblent... dans presque tous les cas. Ils me regardent de manière peu discrète et se chuchotent comme des gamins :
« -Je te dis que Alice est folle !
-Tout au contraire, moi je pense qu'elle a des visions. Elle doit voir des choses que l'on ne voit pas !
-Non ! Elle rigole toute seule ! Elle est juste pas finie dans sa tête, j'te dis !
-N'importe quoi ! Elle doit entendre des voix qui la font rire...
-J'espère parce que si c'est pas ça, c'est grave... »
Je me retourne vers eux, faisant valser mes longs et raides cheveux bruns, et leur lance en dressant mon majeur vers eux : « Vous le voyez celui-là ? »
Ils me regardent longuement, puis Riku finit par lâcher : « Elle est pas tranquille... ».
Kamiya réplique : « Tout au contraire, elle est juste d'une surprenante vulgarité... ».
Pour ne pas vous mentir, ces deux-là me feraient presque pitié... Presque...
C'est enfin l'heure de la pause. Je me dirige dans la cour de récréation, croquant à pleines dents dans une pomme bien rouge qui me sert de goûter. Mais soudain, ma pomme est projetée sur le sol. Surprise, je la regarde chuter, et me tourne. Alois, suivit de toute sa bande, me fait face. Il a encore la main levée, du coup qu'il vient de donner au fruit. Hautaine, je la ramasse. Elle est toute couverte de terre. Je la dépose dans la main d'Alois, en prenant soin de salir son gant de soie noire, et murmure en lui faisant un clin d’œil : « C'est toi qui l'as faite tomber, c'est toi qui vas la jeter. »
Je tourne les talons, et m'apprête à m'en aller, lorsqu'une main retient mon bras. Il s'agit de celle d'Alois, celle qui ne tient pas la pomme pourrie. Il me jette un regard assassin en laissant le fruit tomber une nouvelle fois à nos pieds. Honey, qui vient tout juste de sortir de la classe, court avec son lapin rose en peluche à la main, et met un brusque coup de pied dans la pomme qui atterrit habilement dans la poubelle. Content de cet exploit (ou devrais-je dire de ce véritable hasard), il sautille de joie, puis lorsqu'il aperçoit les regards haineux que Alois et moi nous échangeons, il calme soudainement son euphorie et penche la tête sur le coté.
Les mains sur les hanches, Alois avance dangereusement vers moi de façon à me faire reculer. « Comment oses-tu me manquer de respect ?! »
C'est ce qu'il a lâché entre ses dents en me menaçant du regard. Faible, je me laisse faire, en regardant les élèves présents à ses cotés.
Kamiya et Riku sont côte à côte et commentent les bras croisés, me regardant de haut.
Ikkyu, tenant fièrement son sceptre, me contemple de la tête aux pieds en laissant échapper un « Tss » d'exaspération. Honey essaie de retenir la jambe d'Alois en suppliant « Arrêtez de vous disputez ! » avec des larmes perlant aux coins de ses yeux. Vivien, avec son insupportable tête de fouine, me tire la langue avec un air espiègle. Puis, Kanagushi regarde ses ongles d'un air indifférent, murmurant : « Cette petite sotte n'a même pas l'intelligence d'assumer qu'elle est complètement tarée... »
Mais... C'est ça ! Je suis complètement tarée ! Et, en réalité, je l'assume complètement !
Déconcentrée par ma soudaine pensée, je suis éjectée au sol par Alois qui m'a violemment poussée. Assise sur les fesses, je frotte mon dos endolori en serrant les dents.
Alois réplique en rapprochant son visage cruel près du mien.
« Ta folie n'est pas permise, cinglée ! »
Dégageant lentement ma mèche de devant mon œil droit, je lance avec un sourire en coin empli de sarcasme : « Peut être, mais mon imagination oui ! »
Je vois Sena, Monta et Ciel débarquer en courant vers nous. Ils sont aussi suivis des Trois Canailles, j'ai nommé le marquis Bowser Junior, le vicomte Frère Marto et le duc Skelerex, hauts comme trois pommes et leurs âges compris entre 5 et 6 ans. Ils me viennent en aide. Je profite du soutien qu'ils ne vont pas tarder à m'apporter pour dire brutalement à Alois, de la haine dans la voix comme si je lui crachais ma phrase au visage :
« Et puis qu'importe, si je suis folle ? Les meilleures personnes le sont ! »