A Galaxy Railways Story : Reiko
Chap 8 : Heavy Melder - partie 1
Ça y’est, c’était ce moment.
Toujours le même.
Reiko s’avança dans la gare, tous ses sens aux aguets.
Elle avait fini par connaître cet environnement par cœur.
Le train violet et bleu, n°621.
Le clocher qui sonnait les coups de 16 heures.
Les murs roses immaculés de la station et ses parterres fleuris parfaitement entretenus.
Les voyageurs : la mère qui tenait son fils par la main. Le vieil homme avec sa canne. Les enfants qui jouaient à la balle. Le chat qui les surveillait depuis son perchoir.
Bientôt, ils mourront tous, soufflés par une explosion retentissante
1er son de carillon.
Reiko inspira profondément. La réponse était forcément là, quelque part.
2ème son de carillon.
Elle leva les yeux vers l’horloge centrale.
Un point de vue panoramique.
“Prends de la hauteur et tu verras loin.”
C’est vrai que Bruce lui avait dit ça un jour.
Elle l’avait entendu mais pas écouté.
Sûrement encore une des nombreuses raisons pour lesquelles il la détestait.
Reiko s’élança vers le clocher.
3ème son de carillon.
Elle avala les marches deux à deux et enfonça la porte d’un puissant coup de pied.
L’homme se retourna, prêt à enclencher la bombe qui détruirait la gare.
4ème son de carillon.
- Trouvé, dit-elle en pointant son arme.
Le rayon lumineux traversa la tête du terroriste. Celui-ci la fixa un bref instant puis s’évanouit dans une nuée de pixels.
La station, les passagers et l’horloge monumentale disparurent à leur tour, remplacés par l’entrepôt d’une blancheur éblouissante.
“Level 8 succeed. Level 9 unlock. Congrats”, déclama une voix robotique.
Reiko s’immobilisa quelques secondes, interdite, puis laissa éclater sa joie.
- Yataaaaa ! J’ai réussi !
Elle entama une danse de la victoire à grands renforts de gesticulations et de mouvements du bassin.
Les heures consacrées à cette maudite simulation avaient enfin porté leurs fruits.
- C’est qui la meilleure ? C’est qui-la-mei-lleure ? Yata ! Yata ! Yataaaaa !
- Bien joué, approuva une voix dans le haut-parleur.
Reiko se stoppa aussitôt et reporta son attention vers la cabine de simulation. Son cœur rata un battement lorsqu’elle reconnut la personne qui venait de la féliciter.
- Salut, Moritz.
- Tu montes ou tu continues ton show ?
- Ouais, j’arrive.
La jeune femme fit irruption dans la cabine.
- T’es là depuis quand ?
- Suffisamment longtemps, répondit-il avec un sourire goguenard.
- Ah, je vois…
Deux semaines s’étaient écoulées depuis le week-end sur Robunte Roldo.
Deux semaines durant lesquelles elle s'était remise de ses blessures et avait soigneusement évité certains de ses coéquipiers de la SDF.
Moritz inclus.
- C’est ton premier jour de reprise et t’es déjà en retard ?
- Hein ?
- Ton unité a été appelée pour la sortie mensuelle d’entretien de Big1.
- Oh non ! Le Commandant est furieux ?
- Pas si tu te dépêches.
- Merci !
Elle récupéra son cosmo-gun et, alors qu’elle s’apprêtait à rejoindre son train au pas de course, Schneider la retint par le bras.
- Je t’attends ce soir. On pourra parler si tu veux. Je reste à terre aujourd’hui.
- D’a.. D’accord.
Reiko se détacha de son emprise et s’enfuit comme un félin qui avait été pris au piège. Tandis qu’elle sillonnait le Quartier Général en quatrième vitesse, elle essaya de mettre de l’ordre dans ses pensées.
Elle appréciait beaucoup Moritz, c’était un fait.
Il ne la laissait pas insensible et il avait toutes les qualités qu’une femme pouvait souhaiter chez un homme.
Oui, mais tout cela était trop précipité.
Tout juste rétablie, elle s’était jetée à corps perdu dans les entraînements de simulation pour récupérer sa forme physique avant de réintégrer sa section, tentant par la même occasion de trouver un moyen de surmonter ses soucis personnels.
Schneider et sa demande improbable.
Bruce et son caractère de cochon.
La pilote sauta à l’intérieur de Big1 et se précipita vers la voiture de commandement.
- Vraiment désolée, s’excusa-t-elle en s’inclinant profondément devant Schwanhelt Bulge. J’ai pas entendu l’alerte ni vu les indications sur ma montre.
- Sois plus vigilante à l’avenir. Décollage immédiat !
Sans demander son reste, elle s’installa à sa place.
- Bon retour parmi nous, lui glissa David avec un clin d'œil.
Le Commandant afficha un hologramme de Big1 sur lequel plusieurs points lumineux se mirent à clignoter.
- Comme d’habitude, vérification de l’ensemble des systèmes de contrôle, de radar et d’armement. Akatsuki s’occupe de la salle des machines et des eagles. Pour l’occasion, nous allons nous diriger vers la nébuleuse du cheval. Des questions ? Non ? Au travail !
Reiko, qui n’avait jamais effectué cette manipulation, fit le tour de ses partenaires. Elle réalisa que le chien de la garde de la galaxie fourmillait de fonctionnalités hautement technologiques.
- Impressionnant.
- N’est-ce pas ?, s’enthousiasma Manabu. Et tu n’as pas tout vu.
Le dispositif d’artillerie complexe rassemblait tourelles, canons pulsars et…
- Cosmo Matrix ?
- Il fait des ravages. Tu le vois sur ce schéma de la locomotive ? Au-dessus du bissel ?
- Intéressant. Vous l’utilisez souvent ?
- Non, car il nécessite l’arrêt temporaire de tous les systèmes, bouclier compris, intervint Bruce.
Reiko, concentrée, acquiesça.
- Problématique, en effet.
Elle abandonna Manabu et Bruce pour s’asseoir près de Louise qui avait démarré une calibration des radars.
- Je te montre ?
- Avec plaisir.
Louise se lança dans une explication compliquée concernant le fonctionnement de ses détecteurs longue portée qui ne tarda pas à assommer Reiko. Raison pour laquelle, elle ne remarqua par la balise qui pulsait légèrement sur l’écran.
- Commandant ! Je capte un signal de détresse ! Il ne provient pas d’un train de la compagnie mais d’un cargo de liaison entre planètes il semblerait.
- Loin d’ici ?
- Non, on est tout proche.
Schwanhelt Bulge considéra ce dilemme à la hâte.
- La SDF a pour mission de protéger les voyageurs spatiaux. Nous ne pouvons pas ignorer un appel à l’aide. David, entre les coordonnées. Nous allons voir ce qu’il en est.
- Je ne peux pas donner plus d’informations pour le moment, mes radars sont en plein “reboot”.
- Tiens-nous au courant.
Le sifflement de Big1 retentit bruyamment tandis qu’il filait vers la nébuleuse du cheval.
***
- Je les ai en visu !
Louise projeta l’affrontement sur l’écran central.
- Ils sont décidés à le descendre, siffla Reiko.
Un cargo de transport civil était pris sous le feu de deux vaisseaux spatiaux de taille moyenne. La navette étant équipée d’un armement rudimentaire, ce n’était qu’une question de temps avant que ses multiples avaries engendre sa destruction.
- Canons pulsars opérationnels. Tourelles verrouillées, déclama Bruce d’une voix froide et déterminée.
- Je n’ai aucune correspondance dans la base de données, annonça Louise. Ils sont inconnus au bataillon.
Reiko bondit sur ses pieds, voyant là une bonne occasion de prouver qu’elle méritait sa place au sein du peloton Sirius.
- Permission d’utiliser mon eagle ?
Schwanhelt Bulge fit mine de réfléchir, jaugeant du regard sa nouvelle recrue.
- Tiens tribord. Suis mes ordres et pas d’imprudences ou je te cloue définitivement à ce siège.
- Bien reçu !, concéda-t-elle sur un ton un peu trop enjoué.
- Bruce, arrose les. Louise, entre en communication avec le cargo. Manabu, support tourelle. David, je compte sur toi pour nous éviter le maximum de dégâts.
Reiko sortit du wagon aussi vite que ses jambes le lui permettaient, pendant que les premiers rayons lasers fusaient de Big1. Elle prit à peine le temps de saluer Akatsuki, enfila sa combinaison cosmo, vissa un casque sur sa tête et referma sèchement le cockpit.
Elle enclenche tous les systèmes et bascula en mode automatique pour être efficiente le plus rapidement possible.
- Demande autorisation de décoller !
- “Accordée.”
Un sourire d’excitation étira ses lèvres alors que le jet s’élançait vers l’espace.
- Parée au combat. Je vais leur offrir mon plus beau feu d’artifice.
- “On ne s’emballe pas”, l’avertit Bruce dans son oreillette.
- Rabat-joie, marmonna-t-elle.
- “On t’entend toujours.”
Reiko vira sur tribord, fit sauter la sécurité au-dessus de son levier et appuya résolument sur le bouton de mise à feu.
Les rayons lasers transpercèrent l’un des vaisseaux agresseurs, provoquant de nombreux dommages dans la coque.
Elle le survola, en effectuant une manœuvre en immelmann, et tira exactement au même endroit. À sa grande satisfaction, la rupture de la carlingue entraîna la cessation de l’offensive contre le cargo.
- On fait moins les malins, hein ?
Dans le même temps, l’ennemi la prit pour cible et elle esquiva sans difficulté les tirs des tourelles, s’accordant même le luxe d’une succession de tonneaux.
De son côté, Big1 criblait le bâtiment principal mais l’artillerie de celui-ci étant nettement plus performante, elle constata que son peloton était en difficulté.
- Commandant, besoin d’un support aérien ?, interrogea-t-elle en catastrophe.
- “Le bouclier peut résister. Tiens ton poste.”
- Compris…
Reiko redoubla d’efforts et une nouvelle vague de ses rayons lasers causa des déprédations au niveau des propulseurs. Elle évita les grenades incendiaires et se repositionna dans son axe.
- “Trois chasseurs ennemis en provenance de l’astronef principale !”
- Super, grogna Reiko. C’est après moi qu’ils en ont ?
- “Ils t’arrivent dessus.”, reprit Bruce. “Permission de changer de cible ?”
- Pas la peine, les assura-t-elle. Je m’en occupe.
- “Capacité du bouclier réduite à 62%. Moteur et locomotive endommagés à 38% !”, les informa Louise d’une voix anxieuse.
- “Maintenez le cap !”
Dirigé par David, Big1 virevoltait autour du vaisseau amiral qui commençait à dégager une inquiétante fumée à hauteur de ses réacteurs. Reiko vira de bord au moment où les trois appareils l’engagèrent.
Elle descendit en piqué et remonta avec une chandelle qui la riva à son siège. Renouvelant la technique de l’immelmann, elle réussit à se placer derrière ses ennemis.
- Vous vous y attendiez pas à celle-là, hein ?
- “Commandant, puissance du bouclier en berne à 15% !”
- Feu !
Reiko bombarda les jets avec toute la puissance dont elle disposait. Deux d’entre eux n’eurent pas le réflexe de chasser sur bâbord ou tribord et ils furent grièvement touchés. Le troisième était plus habile et la pilote pesta lorsqu’il se retourna et qu’elle se retrouva dans sa ligne de mire.
- Alors là, c’est même pas la peine d’y penser.
Elle enchaîna les exercices de voltiges aériennes mais se débarrasser de son adversaire se révéla plus ardu que prévu.
Ce qui la sauva fut l’explosion du vaisseau amiral que Big1 avait finalement réussi à abattre. Elle profita de l’effet de surprise pour exécuter une demi-boucle.
- Game over.
L’appareil éclata en mille morceaux et elle le traversa à pleine vitesse.
- Big 1 ? Big 1 ? Rapport avaries ?
- ”Bouclier HS, On n’est plus en mesure de poursuivre l’affrontement !”
- ”Des renforts potentiels à proximité ?”, demanda la voix tendue du Commandant.
- “Aucune autre unité dans le secteur.”
- “La chaudière ne tiendra plus longtemps !”, s’alarma Akatsuki. “Bulge, il faut désengager ! Sans réparation, on risque l’implosion.”
Reiko raffermit la prise sur son manche, prête à repartir à l’attaque, galvanisée par sa réussite.
C’est à cet instant que des traits lumineux jaillirent au-dessus de son cockpit et perforèrent de part en part l’aéronef restante.
Elle explosa quelques secondes plus tard et la pilote dû chasser à bâbord pour ne pas recevoir de fragments tranchants dans la coque.
- “Qu’est-ce que c’était ?”
- “Un vaisseau vient d’arriver par saut warp”.
- Par tous les dieux…
Reiko observa l’immense bâtiment qui la dépassait par tribord.
- “Bruce recharge les canons pulsars !”
- Non !, s’étrangla la jeune femme. On ne risque plus rien.
- “Comment tu le sais ?”, la questionna l’artilleur.
- Parce que si Harlock avait voulu nous descendre, ce serait déjà fait.
Son cœur s’emballa à la vision du mythique Arcadia.
Elle ne pouvait pas en croire ses yeux.
-”Transmission sur le canal principal !”
La respiration de Reiko se bloqua.
- ”Accepte la.”
- “Ça fait longtemps, Bulge.”
- “Harlock. Merci du coup de main”.
- “Nous sommes dans l’orbite d’Heavy Melder. Vous pouvez la rejoindre ou vos dégâts sont-ils trop importants ?”.
- “Ça ira. Nous devons réaliser des réparations en urgence à terre.”
- “Je vous attends là-bas.”
La communication prit fin et Reiko regagna Big1, l’esprit embrumé et les jambes en coton. Le toit de la voiture hangar s’ouvrit et elle s’enfila à l’intérieur du train.
L’équipage de l’Arcadia était là.
Ils étaient vraiment là.
Elle débloqua le cockpit et quitta son eagle tel un zombie.
- David, le système de navigation est-il encore opérationnel ?
- Il tiendra jusqu’à Heavy Melder, lâcha l’ingénieur entre ses dents.
- Bruce, Louise, analysez tous nos dysfonctionnements. Manabu va voir si Akatsuki a besoin d’aide en salle des machines.
- Compris !
Reiko pénétra dans la “control room” au moment où son équipier en sortait précipitamment. Bruce lui accorda un bref regard et, constatant qu’elle était entière, se focalisa de nouveau sur son travail. D’accord elle savait piloter mais, comme Manabu, elle avait laissé la notion de prudence sur Destiny.
Et ça l’énervait car il tenait à elle.
Robunte Roldo lui avait asséné une gifle monumentale et il avait décidé de ne plus se voiler la face.
Cette prise de conscience ne résolvait cependant pas tous ses problèmes et il n’en était que plus confus.
- Entrée dans l’atmosphère de la planète dans trente secondes.
- Accrochez-vous, ça va secouer, les prévint Schwanhelt Bulge.
Big1 entra violemment en contact avec les rails de la gare, les freins étant en partie hors service.
Reiko s’accrocha à ses accoudoirs jusqu’à ce que le train s’immobilise enfin. Elle se rendit compte qu’elle avait fermé les yeux, lorsque le Commandant posa une main bienveillante sur son épaule.
- Tout va bien ?
- Oui.
- Et vous autres ? Parfait.
Louise et Bruce ne tardèrent pas à fournir le rapport de dégâts et il était sans surprise, plutôt inquiétant.
- Allons-y, je veux en discuter avec Akatsuki.
Reiko se leva et marcha tel un robot jusqu’au quai. Un bruit de moteurs familier lui fit se dévisser le cou pour scruter le ciel.
Sans réfléchir, elle démarra au quart de tour en direction des aires d’atterrissage de Gun Frontier.
- Hé ! Tu fais quoi ?, l’apostropha le sniper en s’élançant à sa poursuite.
Elle dévala la rue principale de la ville avant d’emprunter un petit passage adjacent sans détacher une seule fois son regard du vaisseau pirate.
- Reiko ! Attends-moi ! Qu’est-ce qui lui prend, bon sang ?, haleta Bruce.
Elle déboucha enfin sur l’immense terre-plein, complètement survoltée. Son partenaire arriva à sa hauteur, le souffle court.
- T’es complètement allumée ? Tu veux te faire buter par ce hors-la-loi ?
À son grand étonnement, elle lui adressa un sourire lumineux. La passerelle de l’Arcadia s’étira jusqu’au sol et Bruce dégaina son cosmo-gun, sur le qui vive. Reiko abaissa le canon en secouant la tête.
Le pirate, suivi d’un homme et d’une femme, mit pied à terre.
Bruce voulut retenir Reiko mais il ne réussit qu’à effleurer ses cheveux.
- Ottoooo-saaaaaan !
Le Capitaine eut tout juste le temps d’ouvrir les bras pour accueillir Reiko qui l’enlaça de toutes ses forces, les joues inondées de larmes.
- Harlock, hoqueta-t-elle…
Il la contempla avec douceur.
- Je suis heureux de te voir aussi.
L’artilleur manqua de se décrocher la mâchoire tant le choc fut extrême.
- Je n’en reviens pas que vous soyez tous ici.
- Et moi ? Tu m’oublies ?
- A-NI-KI !
Reiko sauta littéralement sur un jeune homme qui manqua de basculer en arrière. Il réussit toutefois à l’attraper sous les cuisses pendant qu’elle nouait ses jambes autour de son ventre.
- Nee-san, t’as plus huit ans, t’es lourde.
- C’est pas gentil, ça !, s’exclama-t-elle en le faisant pivoter d’un coup de talon. Kei ! Comment vas-tu ?
- Bien, bien, répondit -elle en riant. À peine de retour et tu martyrises déjà Tadashi-kun ?
Schwanhelt Bulge, accompagné du reste du peloton Sirius, s’approcha d’un Bruce sidéré.
- Je comprends mieux, maintenant.
Harlock le salua en portant deux doigts à sa tempe.
- La dernière fois que je l’ai vue, elle se cachait derrière ta cape et elle avait quoi, dix ans ? J’étais encore sous les ordres du Commandant Yuuki.
Reiko, que la voix de Bulge ramena à la réalité, relâcha Tadashi de son emprise.
- Voilà pourquoi je ne l’ai pas reconnue.
- Pourquoi tu n’as rien dit ?, la questionna David, surpris.
La jeune femme se gratta le bras, soudain écarlate.
- Je.. Je voulais pas… Que ça change… Quoi que ce soit à la manière dont vous auriez pu me traiter.
- Tu connais d’autres types super célèbres et craints dans l’univers ?
- Euh…
- Et si on allait boire un verre ?, proposa Harlock. De toute façon, votre train n’est plus en état de voler.
Bulge soupira et capitula devant la perspective d’un moment de répit.
- D’accord, mais pas d’alcool. On est tous en service.
Reiko avait agrippé le bras de son père et ne semblait pas décidée à s’en séparer. L’équipage de l’Arcadia, composé de ses quarante pirates, et escorté du peloton Sirius, investit l’un des nombreux bars de Gun Frontier, ville d’inspiration western où la liberté des uns ne doit pas entrer en conflit avec l’alcool des autres, sous peine d’une mort longue et douloureuse.
- Papa, t’étais vraiment pas obligé d’envoyer Wawa vérifier que j’étais en vie. Il a mis notre QG sans dessus-dessous et a menacé de virer la moitié des employés et d’exécuter l’autre moitié pour faire bonne mesure.
- Il a toujours été excessif.
- C’est bien ce que j’ai dit, mais quand même.
Le barman versa un verre de red bourbon au pirate et un jus de tomate au Commandant Bulge.
- Son père, c’est l’homme le plus recherché de l’univers et son ami c’est le légendaire guerrier spatial, mais à part ça tout va bien, répéta David une énième fois.
- On a compris, tu changes de disque ?, le rembarra Bruce.
- Père adoptif, rectifia Reiko.
- Depuis quand c’est important ça ?
- Non, mais.. Laisse tomber Otto-san.
- J’aime mieux ça.
Schwanhelt Bulge s’éclaircit la gorge avant de prendre la parole.
- J’imagine que ton intervention est totalement fortuite ?
- Pas tout à fait. J’avais à faire dans le coin et nous avons détecté Big1 sur nos radars.
- Elle est bon pilote, hein ?, intervint Tadashi. Je lui ai tout appris.
- C’est lui qu’on doit remercier alors, maugréa Bruce.
- Arrête, Aniki. Tu m’affiches là.
- Mais les grands frères c’est là pour ça Nee-san, dit-il en lui ébouriffant les cheveux. Tu me présentes ton unité ?
Elle s’exécuta et nota avec exaspération qu’Harlock passait chacun d’eux au crible, surtout Bruce.
- Je suis au courant de ta combine avec Wawa, lui souffla-t-elle.
- Tu pensais quand même pas que j’allais te laisser partir sans un minimum de garanties ?
- Et la liberté dans tout ça ?
- Toi, c’est pas pareil.
- Ben voyons. J’imagine qu’il t’a fait un rapport.
- Parfaitement, dit-il en fixant l’artilleur de son unique œil, une lueur inquiétante dans la prunelle.
- Alors, ne fais rien. Je veux pas d’ennuis. C’est déjà assez compliqué comme ça, avoua-t-elle en songeant aux événements de Robunte Roldo.
- Pourquoi ?
Rougissante, elle avala son verre de limonade d’une traite.
- Pour rien. Oublie.
- Hum. On verra ça.
- Otto-san !
- C’est bon, d’accord, céda-t-il avec un sourire en coin.
Le Commandant Bulge, pour qui une heure sans travail est une heure perdue, donna le signal de départ.
- Désolé de t’arracher à ta famille Reiko, mais nous allons tous devoir mettre la main à la pâte pour aider l’équipe de mécanos.
- Entendu !
- J’imagine également que nous passerons la nuit ici, je préviens le QG.
Reiko se tourna vers son père adoptif, anxieuse.
- Tu… Tu restes ici ce soir ?
- Bien sûr, tu croyais que j’allais m’enfuir comme un voleur ?
- Non, évidemment que non, répondit-elle, soulagée. On se voit plus tard.
Loin d’être convaincu que la Space Defence Force soit l’environnement idéal pour sa fille, Harlock observa le peloton Sirius vider les lieux en portant un verre à ses lèvres.