Un nouveau monde

Chapitre 28 : Un prince en pleurs

4356 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 04/01/2021 17:18

Il s'était écoulé plusieurs heures depuis que Fyrvas et Harrina furent rentrés de l'Île d'Alcaz. Le temps pour la magicienne de récupérer après avoir épuisé toute sa mana en les téléportant tous les deux. Le temps également pour le druide qu'on lui pansât la plaie qu'il avait à l'omoplate. Et enfin le temps pour Jaina Portvaillant de se libérer afin de connaître le compte-rendu des deux enquêteurs improvisés.

Tous se réunirent dans la maisonnette d'Harrina, située un peu à l'écart des autres habitations, pour plus d'intimité, où celle-ci sortit de sa bourse la preuve qu'elle avait ramené de l'île.

— Une bague !? s'indigna Fyrvas. Vous m'avez embarqué sur une île infestée de nagas et de draconides pour une vulgaire bague ?

— Alors d'abord vous baissez d'un ton ! le réprimanda fermement Harrina. Ensuite, non ! Ce n'est pas une vulgaire bague. Voyez par vous-même !

Elle lui présenta la bague en question, laissant le druide perplexe. Il était doué pour reconnaître un arbre d'un autre arbre même dans la plus dense des forêt, mais en joaillerie, ses connaissances étaient nulles. Pour lui, dès lors que c'était rond, que ça se mettait au doigt et que c'était serti d'une pierre, rien ne ressemblait moins à une bague qu'à une autre bague.

— Qu'est-ce que je suis censé voir ? demanda-t-il.

— Que voyez-vous sur le chaton ? l'interrogea Portvaillant.

— Quel chaton ? Où ça un chaton ? redemanda Fyrvas de plus en plus perplexe, balayant la pièce du regard à la recherche de l'ombre d'un petit chat.

— Pas le "chaton" le chat ! lui expliqua Harrina. La tête de la bague ! Là où la pierre est serti !

Quel idée de donner un nom pareil à cette partie d'un bijou ! pesta intérieurement le druide. Ces humains sont décidément bizarre !

Il inspecta donc la partie désignée par les deux magiciennes humaines et...

— Je ne vois pas de pierre. Juste une tête de lion gravé dessus.

— Exactement ! s'exclama Harrina. La Tête de Lion. Le symbole de Hurlevent.

— Le royaume des humains ? demanda Fyrvas.

— L'un des derniers qui soient encore debout depuis l'invasion de la Légion, précisa Portvaillant d'un ton grave. Et le seul qui ne se soit pas retiré de l'Alliance.

Le druide vit Portvaillant triturer entre ses doigts un pendentif en forme d'ancre, semblable à celui brodé sur les bannières et les tabards de Theramore, qu'elle portait autour du cou, l'air profondément meurtrie.

Durant un bref instant, Fyrvas fut tenté de demander à la dirigeante de Theramore ce qui l'a tracassait tant mais son instinct que ce n'était pas le bon moment, en plus de risquer de les éloigner du sujet.

— Et donc, cette bague ... ? demanda-t-il.

— C'est la chevalière du Roi de Hurlevent, Varian Wrynn ! déclara Harrina. La voilà ma preuve !

— Comment vous vous l'êtes procuré ? demanda Portvaillant.

— Le draconide la tenait entre ses griffes quand nous sommes arrivé, lui expliqua la jeune magicienne aux cheveux auburn. Pendant que Fyrvas faisait diversion, je l'ai gelé lui et la sirène et j'en ai profité pour le lui choper. Un jeu d'enfant.

— Mais attendez, en quoi ce... ce roi est impliqué dans notre affaire ? intervint Fyrvas toujours perplexe.

— Réfléchissez donc ! lui répondit Harrina.

— Vous... Vous ne voulez pas dire que... ce diplomate qui devait venir à Theramore... et qui fût enlevé en chemin par ces bandits au foulard rouge... avant d'être capturé par les nagas... c'est donc ce roi ? demanda le druide qui ne cachait plus son étonnement.

— En effet ! confirma la magicienne aux cheveux aubruns. Et cette chevalière est la preuve que tout concorde.

Le druide n'en revenait pas. Depuis le début, il assistait la jeune humaine dans une enquête sur la disparition d'un monarque et non des moindres, le dirigeant du royaume le plus important de l'humanité et de l'Alliance. Dès à présent, il comprenait mieux l'importance de cette affaire.

— Mais Varian, l'avez-vous trouvé ? les interrogea soudain Portvaillant.

— Honnêtement, s'il n'y avait pas eu cette chevalière, j'espérais que ce serait lui, ma preuve, répondit Harrina. Malheureusement, on appris sur place qu'il s'est évadé. J'ignore depuis combien de temps. Mais à en croire ses anciens geôliers, il serait en vie, sur le continent et les nagas seraient encore à sa recherche. Mais il aurait perdu la mémoire.

— Il va donc falloir que j'envoie des hommes sur le continent pour retrouver sa trace, en conclut Portvaillant d'un ton grave. Pourvu que la Horde ne l'ait trouvé avant nous.

— Connaissant Varian, je pense qu'il saura gérer deux trois orcs paumés, tenta de la rassurer Harrina.

— C'est justement ce qui m'inquiète, lui rétorqua la dirigeante de Theramore. Quand je pense que je l'ai convoqué pour un pourparler avec la Horde, il ne manquerait plus qu'il nous crée un incident diplomatique, cet abruti.

— Vous semblez oublier la présence des drakes et des draconides sur cette île, intervint le druide.

— C'est vrai, il est probable que le Vol noir soit impliqué dans la disparition du roi, confirma Harrina.

— Ça ce n'est pas bon ! maugréa Portvaillant. Pas bon du tout !

Fyrvas ne connaissant le Vol draconique noir — ou du moins son dirigeant qui à une lointaine époque se faisait appelé Neltharion — que de réputation. Il savait au mieux que depuis que leur chef avait été rendu fou par les Anciens Dieux, c'était une race de dragons avec lesquels il valait mieux ne pas se frotter.

— Je les ai entendu parler de leur maîtresse, Onyxia, s'empressa-t-il d'ajouter. Est-ce que cela vous dit quelque chose ?

— Sûrement la dragonne qui dirige le Vol, mais franchement ça ne me parle pas plus que ça, lui répondit Harrina avec un haussement d'épaule.

— C'est possible, concéder Portvaillant pensive. Bien que je ne connaisse peu de dragons de ce Vol pour le confirmer, hormis le tristement célèbre Aile-de-mort. Et que la Lumière nous vienne en aide si lui aussi est impliqué dans cette affaire. (elle se leva soudain de sa chaise et empoigna de son bâton de mage) Il faut que vous en informiez le régent de Hurlevent. Ils doivent être au courant. Je peux vous y envoyer tous les deux avec ma magie.

— Alors ne perdons pas de temps ! approuva Harrina en se levant à son tour. Mais vous ne venez pas avec nous ?

— J'aimerais bien mais j'ai encore cette affaire avec les Totem-sinistres à règler, lui répondit Portvaillant. Et puis je dois m'occuper de retrouver Varian. Si possible avant qu'il n'attire l'attention de la Horde.

— Entendu, concéda la magicienne aux cheveux auburns.

— Un instant ! s'écria soudain Fyrvas. Et ma fille ? Vous m'avez promis que vous m'aiderez à la retrouver en échange de ma protection sur l'île.

— Raison de plus pour que je vous envoie tous les deux à Hurlevent, lui répondit Portvaillant. Si elle est bien dans les Royaumes de l'Est vous aurez plus de chances de la retrouver là bas.

— Et ne vous inquiétez pas, je n'ai pas oublié pour votre fille, le rassura Harrina en lui serrant le bras. C'est juste que je dois d'abord en finir avec cette enquête qui, vous l'aurez compris, est tout de même une affaire d'État. Mais promis, je vous l'aiderez à la retrouver une fois que ce sera fini. Peut-être même que vous la retrouverez avant, avec un peu de chance.

Le druide finit par céder. Après tout, les deux humaines venaient de marquer un point. Il n'était pas très à l'aise à l'idée d'être à nouveau téléporté, surtout pour se retrouver dans un lieu où il n'y avait encore jamais mis les pieds, mais si ça pouvait le rapprocher de sa fille sans attendre le prochain bateau pour les Royaumes de l'Est, il était preneur.

De plus, il avait quelque chose de bizarre quand l'humaine aux cheveux auburn lui avait serré le bras. Quelque chose qu'il n'avait pas ressenti pas ressenti depuis le jour où il avait fait la connaissance de celle qui allait devenir son épouse...


Un nouveau cercle de runes lumineux apparût au sol, encerclant Fyrvas et Harrina, tandis que Jaina Portvaillant entamait son incantation. Ce fut visiblement long et laborieux, la dirigeante de Theramore ayant eu besoin de toute sa concentration pour réaliser son sort sans accroc.

La mage au cheveux auburn serra davantage le bras du druide, renforçant son sentiment de malaise.

Puis au bout de longues minutes qui parurent être une éternité, un aura de lumière enveloppa les deux compères, manquant d'aveugler l'elfe. Et une fois la lumière dissipé, il sentit que lui et sa partenaire avaient changé d'endroit. Ils étaient à l'extérieur, en bordure d'une forêt, à proximité d'un sentier. Et à juger par l'odeur de la terre et de l'herbe humide, il venait de terminer de pleuvoir. Le ciel était couvert et le peu de clarté semblait indiquait qu'il cela allait bientôt être la tombée de la nuit. Cela suffisait à Fyrvas, pou qui la lumière du jour était encore trop brillant pour ses yeux sensibles et qui de ce fait, voyaient encore trouble après la téléportation.

— Elle a réussi ! entendit-il soudain s'exclamer Harrina au bord de l'extase. Jaina nous en envoyé au portes de Hurlevent ! Vite, allons au donjon avant qu'ils ne ferment les portes !

Le druide n'eut pas le temps de réagir ou de se rendre compte qu'ils étaient effectivement devant les portes de la ville que la jeune humaine l'empoigna à nouveau par le bras et le traîna à travers toute la cité. C'était qu'elle avait de la force et de la poigne, pour une femme de son gabarit !

Fyrvas n'eut pas le temps d'admirer les imposantes portes de Hurlevent, ni les non moins monumentales statues qui trônaient dans l'Allée des Héros tant la jeune humaine l'entraîner avec fermeté. Mais tandis qu'ils traversaient les allées, les quartiers, les tunnels et les ponts qui enjambaient las canaux qui séparaient les différents quartiers de le cité, les murs et les bâtiments lui furent soudain extrêmement familiers.


— Désolé, messieurs-dames, mais le roi ne reçoit plus personne à cette heure, leur dit un des gardes lorsqu'il atteignirent le pont-levis menant au donjon.

— Justement, c'est le régent que je dois voir, leur répondit Harrina. C'est pour une affaire d'État.

— Quel genre d'affaire d'État ? demande le garde.

— Ça concerne le roi, répondit la jeune magicienne à voix basse. Celui qui a disparu.

— Oh, je vois ! rétorqua le garde. Veuillez me suivre.

Les deux compères emboitèrent le pas du garde qui les guida jusqu'à la salle du trône quand arrivé à mi-chemin...

— Les visions ! s'écria le druide.

— Plait-il ? demanda la magicienne prise de court.

— Les visions qui m'avaient guidé jusqu'à Theramore, expliqua le druide au bord de l'effervescence. Ça me revient maintenant. C'étaient cette ville qu'elles montraient. Ma fille est dans cette ville !

— Formidable ! lui répondit Harrina. On partira à sa recherche une fois quand on aura rendu notre rapport...

— Vous ne comprenez pas ! l'interrompit Fyrvas. Elle doit être quelque part dans cette ville ! Il faut que je la retrouve au plus vite !

— Messire Fyrvas ! s'impatienta la magicienne. Je vous rappelle que nous avons une mission de la plus haute importance à rendre !

— Et moi, dame Harrina, je vous rappelle que j'ai une fille à retrouver et à ramener à la maison, s'impatienta à son tour le druide. Et il n'est pas question que je la laisse me filer entre les doigts. Pas après tout ce chemin. Pas si près du but

— Cela fait à peu près une semaine qu'elle a disparu, non ? le questionna Harrina. Si vraiment elle est saine et sauve et si vraiment elle est dans cette cité, je pense qu'elle peut attendre cinq minutes. Allez, on a assez perdu du temps.

Fyrvas tremblait de rage et d'indignation tandis qu'ils se dirigeaient vers la salle du trône. Sa fille, la seule famille qui lui restait, était quelque part, tout près, dans cette maudite ville peuplée d'humains. Et tout ce qui importait sa partenaire était d'expliquer à de gros bonnets richards qu'un monarque n'ayant pas donné signe de vie depuis plus d'un moins était toujours porté disparu. D'autant que cinq minutes étaient le temps qu'il suffisait à Gahahli de disparaître dans la nature pendant que tout le monde avait le dos tourné.


Les deux compères arrivèrent finalement à la salle du trône où se tenaient deux humains d'âge mûr et au regard sévère. L'un était un homme en armure blanche dorée et aux cheveux bruns. L'autre était une femme en robe pourpre et aux cheveux noirs de jais.

— J'avais pourtant dit que nous ne recevons plus personne à cette heure, soldat Anton, gronda la femme.

— Pardonnez-moi, dame Prestor, répondit le garde. Mais ces deux personnes détiennent une info de la plus haute importance concernant le roi...

— En réalité, je suis là pour une tout autre raison, intervint Fyrvas qui cédait à l'impatience. Voyez-vous, je suis à la recherche de ma fille. Elle a fugué il y a de cela quelques jours et j'ai de fortes raisons de penser qu'elle est quelques parts, dans votre royaume.

— Messire elfe, sachez que nous avons des affaire plus importante à régler que vos problèmes de famille, lui rétorqua sèchement l'homme en armure.

— Je vous en supplie, mes seigneurs, insista le druide. Je dois savoir. Avez-vous ne serait-ce que vu passer une jeune elfe aux cheveux du même bleu que les miens et toujours suivie d'un Sabre-de-nuit ? Ou avez-vous ne serait-ce qu'entendue parler d'une certaine Gahahli Ventenuit ?

— Nous recevons la visite de plus en plus d'elfes de la nuit, ces derniers jours, lui répondit la dénommée Prestor. Et nous ne sommes pas supposés être au courant de leur identités ou de leurs déplacements. Pas plus que pour nos sujets. D'ailleurs, quel genre de société formons nous si on doit contrôler le moindre fait et geste de nos si loyaux sujets.

— Veillez excusez la hardiesse de mon ami, mes seigneurs, s'empressa d'intervenir Harrina légèrement gênée par le numéro du druide. C'est une affaire qui lui tient particulièrement à cœur, mais je peux vous assurer que ses intentions sont tout-à-fait honorables.

— Cet elfe est donc avec vous, jeune magicienne ? interrogea l'homme en armure. Quel est donc son implication dans votre enquête ?

— Il m'a servi de garde-du-corps pendant que je récoltais des indices, seigneur Fordragon, lui répondit humblement la magicienne.

— Bien, dans ce cas, nous souhaiterons nous entretenir avec la vraie tête pensante de l'enquête dans la cellule de crise, déclara la dame aux cheveux noir de jais. Veuillez nous excuser, messire elfe, mais nous n'apprécions pas tellement les agitateurs au sein de nos quartiers.

La femme en pourpre et l'homme en armure guidèrent donc Harrina dans une salle située sur la droite de la salle du trône. Celle-ci lança un regard à la fois désolé et désapprobateur à l'elfe de la nuit qui resta seule dans l'imposante salle.

Il ne leur en tint pas rigueur pour autant. Aussitôt qu'il avait mis le pied dans cette foutue salle, il avait senti qu'il n'allait pas s'entendre avec ces deux personnages. Il dégageaient en eux quelque chose que le druide ne put déterminer mais qui l'incitaient à garder ses distances. Et la manière dont ils avaient reçu sa requête ne lui avait pas donné de raison de changer d'avis. Il en venait à regretter la douce et affable Jaina Portvaillant qui à présent se trouvait de l'autre côté d'un océan.

De plus, cette histoire de roi disparu, bien qu'ayant éveillé de la curiosité en lui quelques heures plus tôt, commençait à l'excéder. Surtout en sachant que sa fille était probablement dans le coin et qu'il devrait être à sa recherche au lieu d'attendre dans une salle de pierres blanches ou converser avec des aristocrates, exactement le genre de personne qui l'insupportait. Cette enquête ne faisait que le détourner de sa mission à lui et même pire, elle le retardait. Mais il était bien obligé d'attendre que sa partenaire eût fini de faire son rapport afin qu'il pût la guider dans cette ville et ce royaume qui lui était étranger.

Il scrutait le trône, vide de son occupant, dont le dossier était surmonté d'un symbole formant une tête de lion — le même symbole qu'il avait vu sur la chevalière qu'Harrina avait ramené de l'île quelques heures plus tôt — et orné de quatre statues de lion dorées. Décidément un fétichisme à Hurlevent, le lion. À tous les coups, cela représentait ni plus ni moins que l'arrogance et le pédantisme de ces humains et de cette Alliance avec laquelle son propre peuple avait dû s'allier. C'était du moins l'impression que lui avait laissé l'homme en armure et la femme en pourpre qui en ce moment conversait avec Harrina dans une chambre voisine.


Le garde qui l'avait conduit et sa partenaire dans la salle du trône revint vers lui et l'arracha à ses pensées.

— On... Quelqu'un vous demande dans le jardin, lui dit-il en balbutiant. Il-il dit qu'il pourrait vous aider dans... ce pourquoi vous êtes là.

Intrigué par cette demande, Fyrvas se dirigea vers le lieu que lui indiqua le garde, sur la gauche de la salle du trône, avant de retourner à son trône.

Il se retrouva dans une petite cour en plein air où se tenait effectivement un petit jardin, tellement petit qu'on pourrait y faire tenir une maisonnette, et dont le rebord dominait une zone rurale qui semblait être la périphérie de la ville, plongée dans le crépuscule. Tout paraissait si calme.

— Par ici, messire elfe ! chuchota une voix d'enfant.

Fyrvas vit alors assis sur banc dans un coin de la cour un jeune garçon blond, vêtu de bleu et qui à vue d'œil, ne devait pas avoir plus de dix ans. Celui-ci fit signe au druide de s'approcher.

— Qu'est-ce que tu fais ici, mon garçon ? demanda Fyrvas à la fois intrigué et perplexe par la présence de l'enfant.

— Je sais que c'est impoli au porte mais je vous ai entendu dans la salle du trône, lui expliqua le garçon d'un voix qui trahissait la timidité et la culpabilité. Il paraitrait que vous et votre ami aurait des informations sur le roi...

— C'est que... Je ne suis pas supposé divulgué ce genre d'information...

— Je dois savoir ! lâcha soudain le garçon. Il s'agit de mon père !

— Ton père ?... Ne me dis pas que tu es...

— Bolvar et Katrana font tout pour me mettre hors du coup et je me doute qu'ils aient de bonne raisons, tempêta le jeune garçon qui était visiblement au bord des larmes. Mais... Vous savez ce que c'est, n'est-ce pas ? Quand un être qui vous est cher manque à l'appel. De vivre dans l'attente d'avoir de ses nouvelles. De vivre dans l'angoisse qu'il lui soit arrivé malheur.

Fyrvas se contenta d'hocher la tête silencieusement, contemplant ce pauvre garçon qui venait de confirmer avoirs écouter aux portes et semblait en plus de ça partager sa peine.

— Et comme si ça ne suffisait pas, je suis obligé de porter sa couronne en son absence, dit le garçon en fondant finalement en larme. Et vous savez à quel point c'est lourd à porter, pour un enfant de mon âge ?

En voyant ce si jeune garçon en pleurs, Fyrvas fut pris de pitié et lâcha un long soupir de dépit.

— Si quelqu'un te le demande, je ne t'ai rien dit et on ne s'est jamais parlé. Tu es d'accord.

L'enfant hocha la tête après s'être essuyé les larmes et tout en s'assurant qu'aucune oreille indiscrète ne trainait aux alentours, le druide s'assit à côté du garçon et lui expliqua ce qu'il savait au sujet du roi de Hurlevent, qu'il avait été enlevé par des bandits puis retenu prisonniers par des hommes-serpents collaborant avec des dragons noirs, qu'il avait réussi à s'échapper et devait en ce moment même en cavale, sinon en vadrouille quelque part sur le continent d'où venait le vieil elfe. Il dût choisir ses mots avec un maximum de soin pour ne pas infliger l'enfant plus qu'il ne l'était déjà.

— C'est tout ce que je sais, mon petit. Désolé de t'en dire davantage.

— Après des mois, à être tenu dans l'ignorance, c'est déjà suffisant, répondit le garçon avec une pointe d'amertume. Je vous remercie.

— Écoute, j'aimerai pouvoir faire quelque chose pour ramener ton père, tenta de le rassurer Fyrvas. Seulement...

— Je sais, vous êtes à la recherche de votre fille, l'interrompit le garçon qui se reprit soudain avec air compréhensif. Une certaine "Vent-de-nuit", n'est-ce pas ? Avec les cheveux du même bleu que les vôtres ? Toujours accompagnée d'un tigre noire avec des rayures blanches ? Serait-elle aussi une archère, par hasard ?

— Elle manie le tir-à-l'arc, en effet, lui répondit le druide. Donc tu l'as vue ?

— Au moins deux fois en l'espace d'une semaine, si c'est bien celle à laquelle je pense, lui répondit l'enfant. Même que je l'ai aperçu pas plus tard qu'en ce début d'après midi, dans cette même salle où vous étiez il y a à peu près cinq minutes.

— Louée soit la nuit ! s'exclama le druide au bord de l'extase.

Enfin une bonne nouvelle ! Après des jours à se demander où sa maudite fille pouvait être, il avait enfin une piste. Encore mieux, en lui révélant que Gahahli était présent peu de temps auparavant, le garçon venait de lui informer qu'il était sur la bonne voie. Cela ne disait pas pour autant où il pouvait la trouver, surtout s'il s'était écoulé une demi-journée depuis sa dernière apparition, mais ça suffisait à lui donner de l'espoir. Jamais il n'avait été aussi près de son but.

— Et est-ce qu'elle vivante ? redemande Fyrvas. Comment elle se porte ?

— De ce que j'ai vu, elle n'avait pas l'air de pas trop mal se porter, lui répondit l'enfant. Mais je ne puis vous où elle est en ce moment ni où elle est partie. Mais elle doit forcément être avec ses compagnons, soit en vadrouille quelque part dans le royaume, soit en train de festoyer dans une taverne.

— Ses compagnons ? Qui sont-ils ? demanda le druide. Comment puis-je les reconnaître ?

— Et bien, parmi eux, il y a un jeune paladin récemment adoubé, blond et qui entre nous, a un peu l'air simple d'esprit. Il y a aussi un vieux guerrier nain roux et unijambiste, et enfin un gnome mage à l'âge incertain, aux cheveux bleus ciel avec une drôle de barde. Vous savez ? Ce genre de barbe qui part des moustaches et remonte jusqu'aux oreilles.

Pour Fyrvas, ce fut suffisant comme indice. Sans songer une seconde s'il était autorisé à faire cela, il enlaça le garçon en guise de reconnaissance et le serra avec tant d'enthousiasme avec ses bras imposants qu'il manqua de lui casser une côte.

— Je ne sais comment te remercier, petit bonhomme !

— Je vous en prie, messire elfe, lui répondit le garçon à la fois gêné et flatté. Vous et votre fille aves tellement fait pour mon royaume.

Ainsi donc, cette petite effrontée avait déjà commencer à se faire connaître dans ce maudit royaume d'humains. Encore une chose qu'elle allait devoir lui expliquer !


Une fois l'avoir libéré de son étreinte, Fyrvas laissa le jeune prince retourner à ses appartements, lui souhaitant de bien se reposer. L'enfant, quant à lui, lui souhaita de retrouver sa fille saine et sauve.

Le druide retourna donc dans la salle du trône, toujours aussi déserte que quand il l'avait quitté. Il se dirigea vers la salle où s'était rendu Harrina avec l'homme en armure et la femme en pourpre, impatient de lui faire part de la bonne nouvelle. Elle devait avoir fini de faire son rapport, après tout.

Il s'apprêtait à frapper à la porte quand il entendit des voix à travers. Il reconnût d'abord celle de la dame en pourpre.

— Je vous remercie pour cette information, chère enfant, disait-elle. Vous rendez là un grand service à Hurlevent.

— Tout le plaisir est pour moi, répondit une seconde voix que le druide reconnut comme étant celle de Harrina. Si je puis faire encore quoi que ce soit..

— Ça ira, l'interrompit la dame en pourpre. Vous en avez fait suffisamment pour cette fois.

— Dans ce cas, je n'ai plus qu'à me retirer et vous souhaiter bonne nuit...

— Et je crains, hélas, que nous n'ayons plus besoin de vos services, désormais, avait repris la dame en pourpre d'un ton plus menaçant.

— Mais qu'est-ce que... ? Mais enfin ?... Seigneur Bolvar ! Que faites-vous ?... Vous me faites mal !

Fyrvas sentit que quelque chose n'allait pas dans cette pièce. Quelque chose n'était pas normal. De l'autre côté de la porte, il pouvait sentir la détresse et l'incompréhension dans la voix de la jeune magicienne. Elle avait des problèmes.

D'instinct, le druide força la porte. Il eut tout juste le temps de voir l'homme en armure saisissant fermement la magicienne par les poignets, ainsi que la femme en pourpre qui affichait un sourire satisfait devant cette scène et restait impassible en voyant l'elfe entrer par effraction dans la pièce.

Fyrvas n'eut pas le temps de faire le moindre mouvement ou de demandait ce qui se passait que soudain, ce fut le trou noir.

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