Un nouveau monde
En sortant du donjon, le groupe guidé par Batël s'en alla déjeuner dans une taverne du quartier des nains, où ils commandèrent une soupe au champignon avec un peu de pains et de bière, ainsi que du nectar sucrée pour la jeune elfe qui ne supportait toujours pas ce type d'alcool et un bol de lait pour le Sabre-de-Nuit.
Durant le repas, le groupe parla d'atteindre la ville de Forgefer par le Tram des Profondeurs dont l'entrée se trouvait justement dans le même quartier. C'était selon les dires de Batël le moyen le plus sûr et le plus rapide pour atteindre la ville des nains.
Si seulement le Tram avait été opérationnel le jour où la princesse Moira devait conduire une troupe jusque dans les Carmines, elle n'aurait pas eu à se faire capturé par les Sombrefers et réduite à être la concubine de leur dirigeant.
Le gnome fut cependant peu enthousiaste à l'idée de prendre le Tram et il ne tarda pas à le faire savoir durant le repas en demandant d'un ton las :
— J'imagine qu'il n'y a pas d'autres moyens d'atteindre Fegefer ?
— Ben, à moins que l'un de nous ait le permis-griffon, veille passer par le Mont Rochenoire à pied, ou bien que tu te décides de nous téléporter, non, il n'y a pas d'autres moyens, lui répondit Batël.
— Alors va pour le tram, dit le gnome dépité.
— Mais en quoi ça te pose problème ? lui demanda le nain incrédule. Le Tram est une construction de gnome. Tu devrais en être fier, non ?
— Si j'étais un mécanicien invétéré, peut-être, répondit le gnome.
— Et ce n'est pas le cas ? osa demander Bartélo.
— Pour les miens, je suis une brebis galeuse, répondit amèrement Baelbo. La risée de Gnomeregan. Il faut dire que depuis mon plus jeune age, j'étais moins intéressé par la mécanique que par la magie.
— Et après ? demanda le nain. Ce n'est pas comme si on allait s'éterniser dans le quartier des gnomes ou à Gnomeregan.
— Ben j'aime autant qu'on ne s'y éternise pas ! rétorqua le gnome.
— Vous avez un problème avec votre ville natale, je me trompe ? lui demanda le paladin.
— Disons que j'ai beau y avoir passé toute mon enfance, je n'ai jamais su la considérer comme étant mon chez-moi, expliqua Baelbo. Que je ne me suis jamais senti à ma place à Gnomeregan. Contrairement à Dalaran, où j'ai pu m'épanouir et étudier ce qui me passionnait vraiment, plutôt que de me confiner dans quelque chose que tout le monde m'imposait comme étant la norme.
— Mais... vous avez de la famille, là bas ? demanda Gahahli perplexe. Ou des amis d'enfance ? Des gens qui doivent vous manquer, non ?
— Oh, ils m'auraient manquer... si à eux, je leur avais manqué, répondit amèrement le gnome. S'il ne m'avaient soutenu quand j'ai décidé de suivre ma propre voie et de trouver mon bonheur et s'ils m'avaient eu la décence de m'ouvrir leur porte et de m'accorder leur réconfort le jour où j'ai tout perdu, de me prendre au moins en pitié. Vous savez, comme le ferait une famille ou des amis digne de ce nom. Plutôt que plutôt de me renier et me traiter comme un étranger le jour où j'ai le plus besoin d'eux parce que je n'ai pas voulu suivre la "tradition", que j'ai "osé" m'écarter des sentiers battus pour suivre mon rêve. Quand je vous dis que je ne me suis jamais senti chez-moi à Gnomeregan.
— Par Elune ! lâcha la jeune elfe horrifiée.
— Par ma barbe ! s'exclama à son tour le nain.
— Mais vous avez une famille très sectaire, ma parole ! s'étonna le paladin.
— Plus sectaire que ça, tu meurs, confirma Baelbo. Vous comprenez maintenant pourquoi j'aimerai qu'on ne s'attarde pas plus que nécessaire dans le Tram ou à Brikabrok. Ces lieux me rappellent trop le fait que je ne suis pas trop le bienvenu dans la ville de mon enfance.
— Je suis vraiment désolée, s'empressa de dire la jeune elfe compatissante. Je n'ose imaginer combien c'est dur d'être traiter de paria par les siens.
— Moi, c'est surtout le fait de ne plus vouloir ou ne plus pouvoir mettre les pieds dans sa propre patrie, intervint le nain. Je ne sais pas si je le supporterai.
— Vous au moins vous avez de la chance, leur répondit le gnome. Vous êtes en bon terme avec votre patrie et vos semblables.
Plus ou moins ! eut tenté de répondre la jeune elfe, en songeant tristement à sa propre patrie et son père qu'elle avait pour ainsi dire fui en catimini et sur un coup de tête, qui en plus commençaient à lui manquer. Elle se rendait compte qu'elle avait été bien mieux lotie que son ami gnome et en eût presque honte d'avoir eu autant de chance.
Suite à cette discussion délicate et après que Batël eût payé l'addition, le groupe sortit de la taverne et s'en allèrent prendre le Tram qui les attendaient au coin de la rue en sortant de l'établissement.
Gahahli n'avait encore jamais mis les pieds à Forgefer et pour cause, le soir où elle devait s'y rendre, elle avait été intercepté par des orcs à la peau noirs dans sur le chemin et avait été sauvé par Baelbo qui avait dû risquer une téléportation de groupe afin d'échapper à une mort certaine tout en rapprochant la jeune elfe de sa destination Hurlevent. Cela fut une soirée très mouvementée, mais Gahahli en était resté reconnaissante envers le gnome qui avait pratiquement risqué sa vie pour une inconnue.
De ce fait, elle était intriguée de connaître la capitale des nains maintenant qu'elle avait vu celle des humains, mais se montrait également hésitante, rien qu'à l'idée de rencontrer des nains ayant un caractère aussi difficile si ce n'était plus que celui de Batël. De plus, maintenant qu'elle arpentait le quartier des nains avec sa troupe, c'était clairement le quartier de Hurlevent qu'elle appréciait le moins. Notamment avec la forge en plein air, au centre du quartier, d'où émanait l'air chaud empli de fumée et d'étincelles, suffocant pour la jeune elfe. Et c'était sans parler des forgerons qui s'affairaient autour de la forge, battant le fer sur leur enclumes jusqu'à en faire trembler le sol et dans le son retentit dans toute la ville telle des cloches. Si bien que Gahahli fut contrainte de se couvrir les oreilles si sensibles au bruits durant son bref passage dans ce quartier.
Elle ne fut pas au bout de ses peines quand le groupe atteignit l'entrée du Tram des Profondeur. Devant eux se tenait un tunnel fait d'engrenages géants qui tournaient inlassablement dans un vacarme clinquant, obligeant la jeune elfe à appuyer davantage sur ses oreilles de ses mains.
— Bienvenu dans mon "monde" ! commenta Baelbo avec une pointe d'ironie, remarquant le malaise de son ami aux cheveux bleus.
Le tunnel traversait la muraille enveloppant le quartier et s'enfonçait dans la montagne qui surplombait la ville, amenant le groupe dans une vaste salle fait de métaux soudés, dont les couleurs alternaient entre le bleu sombre et le bronze. Le son des machines résonnait dans cette salle froide et faiblement éclairé par des projecteurs, sans pour autant être aussi assourdissant que le son des engrenages ou des enclumes sur lequel on battait le fer, mais toujours assez pour faire bourdonner les oreilles de l'elfe. Devant eux, se tenaient deux fossés parallèles, vides et qui se prolongeaint dans de sombres tunnels s'enfonçant plus loin sous la terre, vers le nord si Gahahli en jugeait par son sens de l'orientation. Du moins, si elle pouvait encore s'y fier, sous terre et entourés de métaux plus froids que la pierre elle-même.
Tandis que ces compagnons attendaient à proximité d'une des deux tranchées, l'attention de la jeune elfe fut attiré par un grand panneau noir, en hauteur au fondde la salle, sur lequel se dessinaient des points rouges et bleus, formant des trajectoires rectilignes. Elle hésita à demander à Baelbo se que signifiaient ces signaux mais après que celui-ci n'était plus en bon terme avec ses semblables et tout ce qui se rapportait à la technologie pour s'être tourné vers la magie, elle se retint.
Et puis sans crier gare, une série de trois wagons débouchèrent d'un deux tunnels, suspendu par un monorail attaché au plafond et firent halte dans la fosse avec un crissement métal strident. La jeune elfe crut pendant un moment que ses oreilles allaient saigner, face un son aussi déplaisant.
— Et voici notre tram, déclara Baelbo d'un ton las. En voiture, tout le monde !
Le groupe monta dans un wagon qui avait assez de place pour accueillir cinq passagers, incluant un tigre Sabre-de-Nuit. Gahahli fut cependant alarmée de s'apercevoir qu'il n'y avait nulle part où s'assoir, juste la rambarde et les supports métalliques qui attachaient le wagons au monorail au dessus-de leur tête. Elle vit cependant Batël et Baelbo s'agripper machinalement à la rambarde.
— Accrochez vous à ce que vous pouvez ! conseilla le nain à l'intention de l'elfe et du paladin. C'est que ça part vite ces engins.
— Technologie gnome, dit Baelbo d'un ton las.
Comme l'avait prévenu Batël, le Tram démarra à une vitesse ahurissante, laissant à peine le temps à Gahahli et Bartelo de s'agripper au support métallique avant que l'inertie ne les éjectassent en dehors du tram. Jakua quant à lui, dût se contenter de la force de ses pattes pour ne pas être propulser en dehors du wagon.
Passé le démarrage abrupt, le groupe dût s'accommoder au vent qui sous la vitesse du tram leur fouettait le visage.
Si le tram allaient en ligne droite, les aventuriers n'ayant nullement à se soucier des virages à une telle vitesse, il descendit toutefois en pente douce, s'enfonçant encore plus profondément dans la terre, parcourant un tunnel toujours aussi faiblement éclairé par les projecteurs éparpillés le long de la voie.
Puis, quand le trajet devint à nouveau plat, Gahahli eut le souffle coupé quand le tram amena elle et sa troupe dans un long tunnel à la paroi de verre, donnant sur ce qui semblait être le fond de la mer. Apparement, le Tram devait passé sous une portion de la Grande Mer, probablement un lagon, qui séparait le royaume de Hurlevent de Khaz Modan, le royaume des nains. L'espace d'un instant, la jeune elfe fut angoissé à l'idée de se trouver si loin sous l'eau — surtout de l'eau de mer, elle qui n'aimait pas des masses le contact avec l'eau salée et avait une peur monstre de tout ce qui vivait en dessous — et que la paroi de verre pût un jour se fissurer et ainsi inonder toute la voie. Mais elle fut vite transite d'admiration devant ce spectacle, aussi bref fût-il en raison de la vitesse du train. Ce bleu apaisant, ces bancs de poissons plus vastes que n'importe quel nuée d'oiseaux, ces algues qui s'élevaient encore plus haut que les arbres d'Orneval, sans parler des parois rocheuses qui couvraient la zone et s'élevaient à n'en plus voir le bout, jamais Gahahli n'aurait l'occasion d'assister à un tel spectacle à la surface, fusse dans le plus beau pays qu'elle pût trouver. Ce fut clairement la partie du voyage qu'elle préférait dans ce trajet dans les profondeurs qu'elles n'étaient pas sûre d'apprécier avec toute cette mécanique. La jeune elfe eut le temps de repérer l'épave d'un bateau, des coquillages géants ainsi que la silhouette d'un battrodon, un imposant reptile aquatique au long cou dont Gahahli avait déjà aperçu des spécimens au large de Sombrivage, quand ce n'était pas des cadavres échoués sur la plage et à moitié dévorés par les mouettes ou les murlocs. C'était la première fois qu'elle pouvait en contempler un dans toute sa splendeur, nageant paisiblement au milieu des algues et des poissons peu soucieux de sa présence — ils semblaient même lui tenir compagnie dans sa nage paisible — dans ce qui semblait être son sanctuaire.
Dire que ce tunnel sous-marin fût aussi une construction de gnome, cela épatait la jeune elfe. Cela ne devait pas être de la tarte pour cette petits bons hommes de construire à une telle voie.
Et puis se fut à nouveau le tunnel au métal froid, faiblement éclairé par les projecteurs, qui cette fois montait en une pente plus abrupt. La jeune elfe sentit dès lors que le tram amenait sa troupe plus haut dans les montagnes.
Puis enfin, le tram aussi brusquement qu'il avait démarré dans une station similaire à celle que le groupe venait de quitter à l'instant, dans un même crissement de métal si assourdissant et strident que la jeune elfe, occupée à se tenir fermement au support pour être éjectée du wagon à l'arrêt, crut cette fois que ses oreilles allaient vraiment saignée.
— Terminus, tout le monde descend ! déclara Baelbo toujours d'un ton aussi las.
Gahahli ne se le fit pas dire deux fois et fut la première, avec son Sabre-de-nuit, à sauter du wagon pour retrouver le plancher des vaches où elle se sentit un peu nauséeuse. Ce n'était peut-être pas une bonne idée de déjeuner avant de prendre le tram, songeait-elle. Et au vue de la tronche de Bartélo quand il descendit à son tour du wagon, elle ne devait pas être la seule à se sentir dans un tel état. Il n'y avait que le nain et le gnome qui n'avaient pas l'air de souffrir du mal des transports, clairement ils étaient plus habitués à ce type de trajet.
Bien que la jeune elfe avait apprécié le passage sous l'eau, c'était décidé, elle n'était pas pressé de voyager par le Tram des profondeurs.
Le groupe quitta la station via un tunnel fort similaire à celui qu'ils avaient pris à Hurlevent, constituée d'engrenages ne cessant de tournant dans un vacarme clinquant. Sauf que cette fois, les aventuriers se trouvèrent dans un curieux district dans l'architecture était fort similaire à la station qu'ils venaient de quitter, couvert, les murs constitués de métaux soudés, d'engrenages et de tuyaux apparents, comme s'ils s'était trouvé à l'intérieur d'une machine. Des gnomes pullulaient dans cette zone insolite, allant et venant entre chaque compartiments qui devaient constitués leurs maisons. Ils avaient tous la même taille que Baelbo, la même forme du visage, le même nez, les mêmes oreilles. Ils avaient tous des coiffures et une pilosité insolites, entre les femmes qui portaient d'énormes couettes ou dont les cheveux tressés se dressés tel une que de scorpion et les hommes qui avaient les cheveux ébouriffés ou formant une touffe quand leur crâne n'était pas dégarni et portaient des moustache dont la longueur dépassaient la largeur de leur visage, quand ce n'était pas des barbes qui leur tombaient jusqu'à la ceinture. La couleur de leur cheveux variaient entre le bleu, le vert, le rose, le violet, le brun, le noir et le gris. Ce qui les différenciaient de Baelbo était qu'ils avaient tous des tenus d'alchimiste ou d'ingénieurs, certains portant des lunettes en cul de bouteille et teintés.
Comme l'avait recommandé Baelbo, le groupe ne s'attarda pas longtemps dans cet endroit excentrique et même Gahahli dût s'y résigner, le bruit des machines et la froideur du métal qui constituait la zone la mettait mal à l'aise. Tout en se frayant un chemin parmi les gnomes, les oreilles de l'elfe ne purent s'empêcher de percevoir les commentaires de cette dernière à son encontre — et spécifiquement à son encontre ainsi qu'à son Sabre-de-nuit, comme si c'est les autres étaient invinsibles, y compris un de leurs semblables. Cela lui rappela le jour où elle avait posé le pied sur ce continent. La plupart des commentaires étaient plutôt flatteurs, complimentant les charmes que l'elfe dégageaient inconsciemment, d'autres se faisaient plus médisants, considérant l'elfe comme une étrangère doublée d'une sauvage. Comme toujours, l'elfe préféra ne pas y prêter attention.
Le groupe quitta la zone en empruntant un autre tunnel aussi constitué d'engrenages tournant, plus courts cette fois ci, et le spectacle qui s'offrait à Gahahli la laissa bouche bée.
Elle se trouvait maintenant dans une ville souterraine, spacieuse, au plafond parfaitement courbé et dont les bâtisses, allant de simple maisons naines aux majestueux édifices étaient taillé dans la roche, sculpté avec une précision et une propreté que l'elfe n'aurait jamais soupçonné venant de personnes comme Batël. L'endroit était faiblement éclairé par des torches ou des puits de braises dans la faible lueur venait se reflété sur les parois rocheuses et il y dégageait une chaleur plutôt agréable, voire apaisante.
C'était donc ça, Forgefer !
L'endroit grouillé de nains, tantôt des civils qui vaguaient à leur occupations, tantôt des militaires qui faisaient leur ronde. Gahahli ne put s'empêcher de remarquer que les quelques nains qu'elle et son groupe croisaient sur leur chemin s'arrêtèrent et firent à salut militaire à Batël avant de reprendre leur route. Apparement, tous ses résidents se rappelaient que Batël fut un héros de guerre autrefois, bien qu'il eût été sur le déclin entretemps.
Gahahli ne fut pas au bout de ses surprises quand le nain guida le groupe vers une partie de la ville constituée d'une immense caverne circulaire, assez vaste pour contenir le donjon de Hurlevent à elle-seule, au centre de laquelle se tenait un large puit où coulait des cascades de ce que l'elfe assuma comme étant de la lave en fusion. C'était comme s'ils étaient en réalité dans le cœur d'un volcan qui aurait été aménagé en une ville par les nains. Un large pont traversa la fosse, sur laquelle des forgerons nains autour d'imposantes enclumes et qui menait vers une grande bâtisse à l'autre bout de la grotte.
Batël dût expliquer à l'elfe — ainsi qu'au paladin tout aussi époustouflé — qu'ils étaient dans la Grande Forge, le cœur et l'âme de la culture naine, et sans laquelle cette ville ne s'appellerait pas Forgefer. De l'autre côté du pont que le groupe dût emprunté se tenait le Haut-Siège, la salle du trône du roi de la cité. Il leur expliqua d'ailleurs que la fosse devant laquelle ils se tenait et que traversait le pont était simplement la fonderie de la ville, que ce qui coulait depuis le plafond était simplement du métal en fusion.
Il n'en demeurait pas moins que Gahahli eut l'impression d'être dans un volcan rien que la chaleur qui se dégageait de ce métal quand elle et ses compagnons traversèrent le pont, rendant l'air soudain plus étouffante. Elle qui quelques secondes plus tôt trouvait la chaleur de la ville agréable. Et c'était sans compter le bruit du fer martelé sur les enclumes, obligeant l'elfe à se couvrir une nouvelle fois les oreilles. Elles n'avaient pas fini de bourdonner après un voyage aussi assourdissant.
Une fois avoir traversé la Grande Forge, le groupe ne dût pas attendre longtemps avant d'être autorisé d'entrer au Haut Siège. À peine Batël eut le temps de se présenter aux gardes qu'une voix tonitruante se fit entendre depuis la salle du trône.
— Que je sois changé en pierre ! Batël Marteau-de-Bronze ! Gardes, laissez donc entrer ces gens !
Devant se tenait un nain couronné et en armure éclatante qui descendit de son trône en s'en alla à la rencontre du groupe. De loin, Gahahli aurait juré qu'il s'agissait du frère jumeau de Batël, tant la couleur et la longueur de leur barbe était similaire, à ceci près que celle du roi nain était largement mieux soignée et entretenue. Puis en s'approchant, l'elfe se rendit compte que le roi avait les traits largement plus doux et chaleureux que son compatriote qu'il enlaça de ses bras au grand étonnement du reste du groupe.
— Ça fait du bien de te reprendre du poil de la bête, mon vieux camarade, s'exclama le roi. Surtout après cette période difficile. J'ai d'ailleurs eu vent de vos exploits à la Marche de l'Ouest contre les Défias.
L'espace d'un instant, Gahahli crût voir Batël rougir d'embarras. Elle ne sût dire si c'était dû aux compliments du roi ou le fait qu'il le serrait dans ses bras comme le ferait un frère, mais ça suffisait à lui laisser échapper un rictus.
— Ça me flatte, mon roi, dit enfin Batël. Mais je crains apporter de mauvaises nouvelles. Et... cela concerne votre fille disparue.
— Moira ? s'exclama le roi dont le visage amical s'était affaissé, laissant place à un air de désarroi. Dites moi tout, mon ami. Je vous tous savoir.
Avec le soutien du reste du groupe, Batël raconta donc au roi Magni leur brève escale à Comté-de-Lac où ils avait retrouvé un des gardes chargé de la protection de la princesse qui avait échappé aux Sombrefers après des mois d'emprisonnement et qui aurait affirmé que la princesse fut ensorcelé par l'empereur des Sombrefers, Dagran Thaurissan, pour en faire concubine.
Quand les aventuriers eurent terminé leur récit, Magni laissa exprimer sa fureur et son désespoir en frappant le mur de son poing.
— Le fourbe ! s'écria-t-il. Le scélérat ! Le fils de p... ! Non content de me ravir ma fille unique, la chair de ma chair, la prunelle de mes yeux, voilà qu'il en fait sa propriété et s'en sert contre moi !
— Je... je suis désolée de ce qui arrive à votre fille, s'empressa de dire Gahahli compatissante. Et je me permet de parler au nom du groupe que vous avez tout notre soutien.
— Je vous remercie, gente dame, lui répondit Magni. Je vous remercie tous. Votre gentillesse me touche. Ah, le salaud ! Le pire est que je ne peux lancer un assaut sur le Mont Rochenoire. Cela mettrait ma propre fille en danger.
— En plus d'attirer l'attention des orcs Rochenoires qui occupent aussi la montagne, ajouta Baelbo défaitiste.
— On peut dire qu'il a bien préparer son coup, ce vaurien ! pesta le roi nain. Me voilà donc les mains liés et le royaume de Forgefer à sa merci.
— Il faut pourtant qu'on fasse quelque chose pour cette pauvre princesse, s'indigna Bartélo. On ne peut pas la laisser à son sort, si ?
— Bien sûr que non, lui répondit Batël. Mais encore faut-il savoir comment on va s'y prendre, si on ne peut pas lancer d'assaut sur Forgefer sans risquer la vie de Moira ou d'attirer les orcs. Et déjà que la cité d'Ombreforge n'est pas facile à prendre d'assaut ni à infiltrer, même avec les meilleurs espions du SI:7.
Toute l'assemblée fut silencieuse, occupé à réfléchir à un plan de sauvetage pour libérer la princesse de ses ravisseurs.
De son côté, Gahahli aimerait tant aidé le roi et ses compagnons à trouver une solution à cet épineux problème. Seulement voilà, elle ne se sentit pas d'une grande aide. Elle n'avait encore jamais les pieds sur le Mont Rochenoire, que ce soit sur le flanc de la montagne ou en son cœur. Elle n'avait donc aucune connaissance du terrain. Nettement moins que Batël qui, si ces souvenirs de la jeune elfe étaient exacts, avait combattu sur le flanc de cette montagne au nom si sinistre. Aussi, elle n'y connaissait rien en stratégie militaire ou même en infiltration. Ces connaissances se limitaient à survivre dans un environnement sauvage, traquer ses proies, échapper à ses ennemis, leur tendre des pièges, se fondre dans le paysage et éventuellement apprivoiser des bêtes sauvages pour peu qu'elles se laissaient faire. Et encore, elle était loin de toutes les maîtriser. Mais elle n'avait rien qui pouvait être une quelconque utilité en des circonstances pareils. À moins que... Et si ses connaissances comptait en fait comme de l'infiltration.
Elle brisa finalement le silence et interrogea Batël :
— Vous qui avez combattu au Mont Rochenoire, que connaissez vous au juste de la montagne ? Que ce soit de l'intérieur ou de l'extérieur.
— Et ben... je sais où se trouvent les parties occupés par les orcs et celles par les Sombrefers, ainsi que leurs entrées respectives, répondit le nain pensif. Mais je ne saurais comment y pénétrer sans leur faire sonner l'alerte. Pourquoi, t'as une idée ?
— Je... je ne sais pas encore, répondit l'elfe en cherchant ses mots. Mais je me demandais juste s'il y aurait un moyen de tromper la vigilance des gardes ou de détourner leur intention...