Le paquebot de cauchemar

Chapitre 1 : On l'appelait le paquebot de rêve...

Chapitre final

3873 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour il y a 5 mois


Cette fanfiction participe au Défi d’écriture du forum Fanfictions .fr : La Boucle Temporelle (septembre - octobre 2024)


 

Matin du 15 avril 1912

Pont du Carpathia, le lendemain du naufrage du Titanic

 

-         Est-ce que vous avez vu un bébé ? Une petite fille… Elle s’appelle Filly…

Je fixe la femme aux yeux gonflés par les larmes.

-         Elle n’a même pas une année, les cheveux blonds. Nous... nous avons été séparées. Quelqu’un l’a jetée dans un canot de sauvetage et depuis, je n’ai plus de nouvelles. Mais je sais qu’elle devrait être ici, je le sais ! Oh, je vous en prie, dites-moi que vous l’avez vue, insiste l’inconnue en serrant un petit mouchoir contre elle.

Je voudrais lui répondre, mais mes lèvres restent closes. Un cri immense m’étouffe, si énorme qu’il écrase mes organes, brûle mes pensées. Impossible de le laisser échapper, pas devant cette pauvre femme, alors je secoue la tête et lui serre la main en signe d’encouragement : si Filly était sur un canot de sauvetage, elle devrait la retrouver. Cette petite n’est pas morte comme… Comme…

Mon âme hurle de plus belle.

Non ! Ne plus y penser !

Ne plus y penser.

Les minutes s’écoulent, plus creuses les unes que les autres.

Alors que je croyais cela impossible, l’épuisement finit par me rattraper.

Je m’assoupis.


Des cris me réveillent. La chaleur de la couverture n’est plus qu’un souvenir, tout comme les sanglots étouffés des survivants, sur le Carpathia. Il n’y a que la puanteur de la peur, planant au-dessus d’un spectacle absurde.

Je suis de retour sur le Titanic. Le Titanic sur le point de sombrer.

Ce n’est pas possible.

Et pourtant, le plancher sous mes pieds semble réel, tout comme l’air glacé et ma tenue trop légère. Les étoiles brillent avec tant d’intensité qu’elles semblent sortir du ciel, brillant comme des diamants. C’est le genre de nuit où on se sent heureux d’être vie… quelle ironie. J’ai beau me pincer le bras, la scène ne s’efface pas.

-         Rose ! Allez, viens !

Oh mon Dieu ! Cette voix. Ce visage. J’ai vu Jack s’enfoncer dans les eaux de l’Atlantique, et pourtant, il est là, à côté de moi ! Ce n’est pas possible, pas possible.

En attendant, Jack me tire en avant, et je le suis machinalement, avec l'impression d'être dans un rêve. Parce que c’est un rêve, pas vrai ? Une vaste et cruelle blague orchestrée par mon inconscient, ce qui intéresserait certainement Freud.

 Nous sautons d’un pont à l’autre, nous nous frayons un passage jusqu’à la poupe à travers la masse grouillante des passagers.

Tout se déroule à l’identique. Jack me fait passer de l’autre côté de la rambarde, tandis que le navire s’incline de plus en plus. Alentour, le craquement des gens qui s’écrasent des dizaines de mètres plus bas semble horriblement réel.

Et comme la première fois, la peur me laboure le ventre.

-         Jack, je lance d’une voix tremblante.

Il tourne la tête vers moi, dissimulant à peine sa panique.

-          Tout ça…

Les mots se bloquent dans ma gorge, alors Jack avance sa main pour la poser sur la mienne, m’encourageant à continuer.

-         Tout ça… ce n’est pas vrai… ce n’est pas la réalité, n’est-ce pas ?

Il fronce les sourcils, tandis que j’avale ma salive, luttant pour ne pas vomir :

-         Je veux dire… Je l’ai déjà vécu, alors…

-         Quoi ?

-         Je l’ai déjà vécu. Tu dois me croire !

-         Je… D’accord, ne t’en fais pas, ça va aller, répond-t-il, perdant son combat contre la peur.

Il doit penser que la situation me fait perdre la tête, et il a peut-être raison. Ou alors, je suis morte.

La proue amorce alors son ultime voyage et mon cerveau se bloque sur une seule pensée. Je ne veux pas. Je ne veux pas sentir la morsure de l’eau. Pourtant, c’est ce qui se produit : le froid s’enfonce dans ma peau, l’océan tente de m’étouffer. Quand je perce la surface de l’Atlantique, à bout de souffle, je ne vois Jack nulle part. Il n’y a que des éclaboussures et des cris partout.

Soudain, je suis à nouveau sous l’eau.

Quelqu’un s’agrippe à moi ! Je me débats, réussi à remonter, à aspirer une goulée d’air, mais l’autre est trop fort. L’océan se referme à nouveau sur ma tête.

Puis la pression disparaît.

C’est Jack. Jack qui m’a sauvée.

-         Nage, Rose ! Il faut que tu nages !

Puis arrive la porte, la fichue porte.

Lorsque je me hisse dessus, mon corps n’est qu’une vaste et immense brûlure, tandis que mes dents claquent de toutes leurs forces. Mais la panique desserre légèrement ses griffes, assez pour que je puisse réfléchir. Jusqu’à maintenant, tout s’est déroulé exactement comme la dernière fois : la course effrénée, le navire à la verticale, ma presque noyade… Donc si je ne fais rien, Jack mourra. Et ça, pas question. Il m’a déjà été arraché une fois, ça ne se reproduira pas ! Cauchemar ou réalité, mort ou folie, rêve ou mirage, je compte bien me battre ! Ne pas abandonner.

Il faut trouver quelque chose pour faire flotter le radeau. A la faible lueur des étoiles, je ne distingue aucune autre planche, juste une scène d’horreur : des passagers qui luttent contre la mort – pas par noyade, non, mais à cause du froid. Réfléchis, Rose, réfléchis. Mon regard ricoche d’un malheureux à l’autre, s’attardant sur les gilets, brillants comme des phares… Oui ! Oui, c’est ça ! Ça pourrait marcher ! Ne manque plus qu’à trouver… Oui, là-bas !

Je regarde Jack, qui tremble de tout son corps, et j’articule faiblement :

-         Il faut qu’on mette mon gilet sous la planche… et qu’on en trouve un autre… Comme ça, tu pourras monter aussi.

Son regard s’éclaire.

-         On peut récupérer le gilet là-bas, j’ajoute en désignant une silhouette au loin.

C’est la seule qui ne s’agite pas. Son visage semble être plongé dans l’eau, même si c’est difficile à dire avec certitude, à cette distance.

-         Rose, tu es un génie ! s’exclame Jack.

Il s’élance aussitôt. Quand je le vois atteindre la forme sombre, je me prends à espérer qu’il s’agisse effectivement d’un cadavre, et mon cœur se brise. Qui suis-je devenue? Un monstre sans conscience ? Mais la situation ne laisse malheureusement aucune place à la pitié.

Jack s’affaire un moment puis finit par revenir, victorieux. Nous ne perdons pas une minute, obligeant nos doigts engourdis à dénouer les lanières, puis à faire passer les gilets sous le radeau et à les y fixer. Dix fois je crains que mes mains ne m’obéissent plus, mais à force de patience et de jurons, nous finissons par y arriver.

Jack se hisse à bord.

Le bois s’enfonce dans l’eau, comme la dernière fois.

Mon cœur s’arrête.

-         Recule un peu, souffle Jack, qui s’est immobilisé.

Oh, j’aurais pu y penser. Mieux réparti, notre poids combiné ne fait plus couler la porte, et nous sommes enfin allongés côte à côte au sec. Seigneur, est-ce vraiment possible ? Faut-il y croire ?

-         Il faut qu’on s’éloigne… poursuit Jack.

L’ancienne Rose aurait peut-être haussé les épaules ou obéi aveuglément. Sauf que je le sais désormais : si un passager se met en tête de nous rejoindre, notre radeau n’en sera plus un. J’ai tellement honte de penser ça. Au fond, je ne vaux pas mieux que les occupants des canots de secours, alors que des femmes et des enfants luttent pour leur vie juste à côté de moi. Et je sais qu’ils vont mourir. Alors je me répète que ce n’est pas ma faute s’il n’y a pas assez de chaloupes, que ce n’est pas moi qui ai décidé d’en mettre aussi peu, mais je ne me sens pas mieux. Alors je me force à retourner dans l’eau, les dents serrées, avec l’impression de plonger dans un brasier.  

Nous poussons la planche, puis quand nous remontons à bord, je ne sens plus mon corps. La peur, acide, ressurgit.

-         Il f-faut qu’on continue à b-bouger… On doit tenir jusqu’à ce que les chaloupes revvviennent…, je murmure.

-         Surtout, ne t-t’endors pas…. T-tu m’as compris, Rose ?

Je hoche la tête tandis que je remue mes jambes et mes bras, stupidement, désespérément, comptant des secondes trop lentes. Alentour, les cris finissent par s’éteindre, tout comme mes frissons. Je m’accroche à la voix de Jack, qui parle de son enfance, de ses dessins, de ses aventures aux quatre coins du monde.

-         L-le dîner en première classe… T-tu te rrrapelles ? murmure-t-il une éternité plus tard.

Un pauvre sourire flotte sur mes lèvres, tandis que ma gorge se serre. Comment aurais-je pu oublier ?

-         Les gens qu’on a vvvvu ce soir, là. Redis-moi leur n-nom. M-mais attention, du p-plus snob au moins s-nob. Je t’ép-pargne les « comtesse » et « sir » machin chose, à-à m-moins que tu veuilles y p-passsser la nuit. Et s’il existe p-pire que Cal, alors là, jjje te dis b-bravo…

Je m’exécute, les larmes aux yeux, sachant très bien que Jack fait ça pour me maintenir éveillée :

-         C-cal, J-John Jacob Astor, Edward Scott, M-mary Conover, Henry Forbes, Benjamin Guggenheim John Irw-win, G-gladys Cherry, Joseph Holland, Washigton Augustus, Charles Duane, Constance Willard…

La liste est interminable. Les noms succèdent aux noms qui succèdent aux noms. Ma voix finit par s’éteindre, ou peut-être ai-je l’impression de ne plus l’entendre. La peau de Jack est désormais si pâle qu’il ressemble à un ange. Va-t-il s’envoler et m’emporter avec lui, loin de ce cercueil liquide ? Qu’attend-il? D’ailleurs, n’étais-je pas censée faire quelque chose ? Je… Le monde devient de plus en plus noir… même le froid semble s’éloigner…

C’est un son qui m’arrache à la mort. Une minuscule voix cassée, qui répète :

-         C-anots… Rose… Ils sont là… Les C-c-canots…

Je veux replonger dans la douce chaleur ouatée, mais la voix insiste :

-         Rose… r-réveille-toi !

Qu’on me laisse tranquille.

-         Au s-secours ! Au s-secours ! lance alors la voix.

Mais elle est trop faible, personne ne va l’entendre. Cette pensée est un électrochoc. Avec l’impression d’inspirer une goulée d’eau glacée, j’abandonne mon cocon.

Jack, blanc comme un linge, les cheveux gelés, appelle péniblement les secours. Je réalise qu’il me secoue l’épaule en même temps, mais je ne sens plus rien. Mes yeux balaient les alentours, tandis que mon cerveau engourdi se réveille. Non ! L’homme au sifflet ! Pourquoi n’est-il plus là ? Est-ce que la porte a dérivé trop loin ? J’écarquille les yeux, comme si ça allait m’aider.

Les cris des secours sont déjà en train de s’éloigner.

-         Par ici ! R-revenez ! R-revenez ! s’entête Jack.

C’est trop bête ! Nous n’allons quand même pas mourir à cause d’un foutu sifflet ! La rage au cœur, je regarde les centaines de cadavres devant nous.

Alors que je n’y croyais plus, je l’aperçois enfin ! Son uniforme… ça ne peut être que lui.

-         Le s-sifflet… Il y a un sifflet là-bas… J-je vais le chercher, je balbutie faiblement.

-         Oui ! B-bonne idée ! J’y v-vais… Attends-moi là, murmure Jack.

Et c’est ainsi que nous réussissons à faire revenir la chaloupe.

Je prie sans discontinuer pour que ce rêve ne s’arrête pas, pour qu’il s’agisse de la réalité.

Et au petit matin, nos pieds se posent sur le pont du Carpathia. On nous donne du thé brûlant, des couvertures et des mots de réconfort. Emmitouflée jusqu’aux oreilles, je manque de croiser le regard Cal lorsqu’il vient inspecter le pont. Il a la main dans la poche intérieure de son veston, signe qu’il tripote le couteau à cran d’arrêt qu’il y dissimule. Je tourne la tête de justesse. Entends ses pas s’éloigner.

Alors je laisse enfin disparaître ce cri qui gonflait mes entrailles, et me blottis contre Jack, écoutant chacune de ses inspirations. Et pour la première fois, je m’autorise à penser au futur. Une vie avec un homme que j’aime. Une vie où le bonheur semble possible. Une vie dont je n’avais jamais osé rêver.

Je m’assoupis.



Et je me réveille sur le pont du Titanic. Le Titanic en train de couler.

Non, c’est absurde. Ça ne peut pas être vrai. Il y a deux secondes, nous étions avec Jack sur le pont du Carpathia… Je ne peux pas être de retour ici. Ma bouche s’emplit de bile, tandis que je ferme les yeux de toutes mes forces. Quand je les rouvre…

… Je suis toujours sur le pont du Titanic et Jack me tire par la main :

-         Allez viens, Rose ! 

Je n’ai que le temps de tourner la tête pour vomir. 

Non, non, non ! Mon Dieu, faites-moi sortir de ce cauchemar.

Mais rien à faire, le pont refuse de disparaître. Il s’incline toujours davantage.

-         Tu étais avec moi, sur le Carpathia, je lance à Jack, éperdue.

Il me regarde comme s’il ne me reconnaissait plus.

-         Je… ça va aller, Rose, tu m’entends. Ça va aller. Suis-moi.

Non, il ne comprend pas, mais comment le pourrait-il ? Faute de mieux, je me laisse entraîner jusqu’à la poupe, alors que je n’ai qu’une envie, m’effondrer. Je me force à passer de l’autre côté de la rambarde.

Tout se déroule à l’identique.

Jack et moi montons ensemble à bord du Carpathia, où je me force à garder les yeux ouverts, malade de peur. Hélas, l’épuisement a encore raison de moi.



Je me réveille une troisième fois à bord du Titanic. Du Titanic en train de sombrer.

Peut-être que je m’y prends mal. Peut-être qu’il faut sauver Jack d’une autre manière pour sortir de ce cauchemar que je n’explique pas. Ou alors, peut-être dois-je envisager sérieusement la possibilité d’être morte ou folle. Mais je m’y refuse encore. Il doit exister un moyen de rompre cette boucle infernale, de revenir dans la réalité.

Cette fois, nous nageons jusqu’aux chaloupes à la place d’utiliser le sifflet.

Cela ne change rien.

Je me retrouve à nouveau à bord du Titanic.

La cinquième fois me pousse au bord du gouffre.

La sixième fois, je suis si désespérée qu’au moment de remonter à bord du Carpathia, avec Jack, j’abandonne toute prudence.

Emmitouflée dans ma couverture, je détourne les yeux une seconde trop tard, lorsque Cal arrive. Celui-ci se précipite vers nous, la main dans son veston.

-         Non ! je rugis en m’interposant.

Le couteau destiné à Jack plonge dans ma poitrine. Je suis si choquée que je ne sens d’abord rien. Puis la douleur me submerge, encore plus horrible que la brûlure de l’Atlantique. La vie coule hors de moi. Jack crie mon nom. Le monde devient flou.

J’aurais aimé maudire Cal, hurler sans m’arrêter, mais c’est déjà trop tard.

Je bascule dans le noir.



Je rouvre les yeux sur le pont du Titanic. Le Titanic sur le point de couler.

Je baisse les yeux, mais il n’y a aucune trace du couteau, de la plaie mortelle. Alors, sans que je puisse l’en empêcher, un rire douloureux enfle dans mes côtes, lacère ma gorge, sortant par saccade.

-         Rose ! Rose, reprends-toi, lance Jack en me secouant doucement.

Lorsque je relève les yeux vers lui, ceux-ci sont pleins de larmes.

-         Tu ne comprends pas, je murmure.

-         Tout ce que je comprends, c’est que si on reste ici, on va mourir.

La course jusqu’à la proue. Le naufrage. La quasi-noyade. La planche.

J’ai à peine la force de m’y agripper, parce que je sais que même la mort ne m’empêchera pas de revenir sur le Titanic à l’agonie.

Plus rien ne semble réel, même la douleur qui cisaille mon corps ou mon cœur qui lutte pour continuer à battre.

Les mains agrippées à la planche, Jack me parle, mais je l’entends à peine. Mon esprit est loin, si loin…

-         Ne fais pas ça, n-ne fais pas celle qui me dit adieu. P-pas encore. Est-ce que tu m'as compris ?

Presque malgré moi, je reviens au moment présent, comprends que Jack se méprend sur mon détachement.

-          Écoute, tu vas te sortir de là, poursuit-il. T-tu vivras longtemps, tu vas faire plein de bébés et tu vas les voir grandir…. Tu mourras très vieille, une vieille dame, bien au chaud dans ton lit…. P-pas ici. Pas cette nuit. P-pas comme ça. Est-ce que tu m'as c-compris ? P-promets moi que tu vas survivre et que t-t-t-u n'abandonneras jamais. Même si ça a l'air sans espoir, promets-le moi m…maintenant et ne romps j-jamais cette promesse.

Ma main se plaque encore une fois sur mon flanc intact, tandis que je réalise ce que je suis en train de faire. Je suis en train d’abandonner. Je n’ai pas cherché le second gilet, alors que les lèvres de Jack ont déjà viré au bleu.

Toutes les images d’avenir se ternissent dans ma tête jusqu’à ne laisser qu’un grand trou noir, aussi béant que celui qui a failli m’avaler, la nuit où j’ai voulu en finir. La nuit où Jack m’a sauvée pour la dernière fois.

Et je repense à ce que j’ai essayé de cadenasser au plus profond de mon esprit, à cette image si insoutenable qu’elle me dévore de l’intérieur. Le visage gelé de Jack, disparaissant petit à petit dans l’eau noire de l’Atlantique.

Et là.

Le monde semble s’arrêter.

Ne reste qu’une certitude, qui enfle, enfle, enfle jusqu’à remplir tout l’espace. Elle était là dès le début, seulement, je ne voulais pas la voir, ou plutôt, je faisais comme si elle n’existait pas. Mais désormais, je n’arrive plus à l’empêcher de s’épanouir, de s’enraciner dans mon cerveau.

Si Jack…

Non !

Si Jack meurt…

Non !

Si Jack meurt, la boucle temporelle sera brisée.

Dès que cette pensée s’échappe de mon esprit, je sais que rien ne pourra l’y renvoyer. Je me suis menti à moi-même trop souvent : en me persuadant qu’accepter la bague de fiançailles de Cal était le seul chemin possible, en ignorant les vérités que Jack me jetait au visage.

Alors désormais, je sais ce qu’il me reste à faire.

Il suffit de laisser les événements se dérouler, exactement comme la première fois. Jack mourra d’hypothermie, et moi, je serai sauvée.

C’est le seul moyen.

Je laisse échapper un sanglot, avec l’impression de me déchirer de l’intérieur.

Il faut le laisser partir. C’est écrit ainsi.

Mais j’en suis incapable.

Le futur auquel je m’agrippais, avec tant de rêves et d’espoirs… ce bonheur que j’avais cru possible… je les laisse s’envoler. Ils s’élèvent sans bruit dans la nuit, jusqu’à atteindre les étoiles.

Puis je promets. Je promets de ne jamais abandonner, même si ça a l’air sans espoir.

Et je montre le gilet du noyé.

Parce qu’un cauchemar éveillé vaut mieux qu’une vie sans Jack.

Et la boucle se poursuit.

Recommence.

Recommence encore…

Encore …



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