Histoire de cendres

Chapitre 7 : Dette (en cours d'écriture)

1420 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/11/2016 08:02

Chapitre 7: Une dette

Pélagiad est un petit village au coeur de la région des Iles Ascadiennes, à moins d'une heure de marche au nord-est de Seyda Nihn. C'est du moins ce que j'appris à l'auberge d'Arille en me renseignant sur les lieux environnants. Certains des habitants du village cotier perdu au milieu des marécages, parlaient de Pelagiad avec une expression d'envie reveuse, m'expliquant que le climat et les opportunités y étaient beaucoup plus favorables qu'ici.

Ils avaient certainement raison quant au climat, me dis-je en franchissant les hauteurs qui séparaient les deux localités, et débouchant sur une région de lacs scintillants et de collines boisées. L'humidité oppressante des marais de la cote s'était dissipée au cours de ma marche matinale vers Pélagiad. Il faisait encore assez chaud cependant que je cheminais au soleil, mais les petites brises d'alitude rendaient le voyage assez plaisant.

Les gens de Seyda Nihn m'avaient recommandé de voyager en utilisant les services de l'échassier des marais -le curieux moyen de transport utilisé dans ces contrées- pour me déplacer de ville en ville, car c'était bien plus sr. Ils me dirent que toute créature hostile, animal sauvage ou bandit de grand chemin, savait que s'attaquer à un échassier des marais était s'exposer en retour à recevoir un coup d'une patte de la taille d'un tronc d'arbre propre à briser tous les os du corps.Bien que qu'un tel mode de transport paraisse, d'une certaine maniere, rassurant, je décidai de voyager a pied. J'avais besoin d'exercice après ces semaines de confinement. De plus, avec cet assassin dans la nature et, présumai-je, toujours à ma recherche, je me disais que voyager au vu et au su de tous, sur un itinéraire bien connu, offrait trop d'opportunités pour une embuscade.

Peu après avoir franchi le col, je vis Pélagiad, perché sur la crete d'une moyenne colline, au pied de laquelle s'étendait un des nombreux lacs de la région. Au sommet se dressait un fort impérial, un parmi tant d'autres dans l'empire; ils poussent comme des champignons, partout où la main de l'empereur s'étend. Me rappelant la piètre condition de mon équipement, je me dirigeais vers le fort, espérant remplacer mes pauvres pièces d'armure en chitine par quelque chose de plus solide. Les légions impériales avaient en général des surplus a vendre.

En fait, je fus fort décu par la sélection d'armure que je trouvais, mais au moins je pus acheter des jambières en cotte de maille, renforcées par une coquille d'acier. Ce dernier article est toujours l'objet de plaisanteries grivoises dans les baraquements, mais les combats des derniers jours m'avaient appris a ne pas m'en moquer complètement.En prime, le forgeron du fort fut heureux de "réparer les pièces endommagées par un vrai combat, ca change de gratter la rouille des cottes de maille qui ont trop vu la pluie."Pendant qu'il redressait les nombreux anneaux tordus ou cassés de ma cuirasse, j'inspectai le grand hall du fort et tombai sur une guérisseuse du Culte Impérial. La Légion et le Culte sont pratiquement indissociables, et ce n'est pas sans raison qu'on les surnomme "le corps et l'esprit de l'Empire": l'un ne va jamais sans que l'autre suive.

A dire vrai, j'avais espéré trouver un ministre du Culte dès que j'avais apercu le fort depuis la route. J'achetai quelques potions de guérison diverses et m'enquis de savoir si la branche du Culte, ici en Vvardenfell, acceptait de nouveaux membres. Etant donné le zèle missionnaire qui caractérise le Culte Impérial, il est rare que les prêtres soient assaillis de ce genre de demande; en général c'est plutot l'inverse.La guérisseuse du Culte eut l'air surpris, mais touché, que je lui pose cette question, et produisit immédiatement un rouleau administratif.

Peut-être faites-vous partie de ces gens qui se moquent gentiment du Culte Impérial, les appelant "grenouilles de bénitier", ou pire; et peut-etre vous demandez-vous pourquoi j'étais si empressé de les rejoindre et servir dans leurs rangs.

Pour être tout a fait honnête, peu m'importaient leurs croyances; je n'ai jamais été témoin de quoi que ce soit qui puisse me convaincre de l'existence des dieux; mais je ne saurais non plus me persuader tout a fait de leur inexistence. De toute façon, cela n'a que peu a voir avec la raison de ma reconnaissance envers eux: ma vie, je la dois au Culte.

Certains disent qu'ils "doivent leur vie au Culte" car celui-ci les a aidé a sortir d'une vie ruinée par les beuveries, les orgies ou de le jeu; loin de  moi l'idée de vouloir rabaisser la profonde expérience religieuse qu'ils ont vécue, mais pour moi il en va différemment. Je dois ma vie au Culte car ils m'ont élevé, de tout bébé jusqu'a mon adolescence, quand personne d'autre ne s'en serait préoccupé.

Comme beaucoup d'autres enfants, je fus abandonné, à peine né, sur les marches d'un orphelinat de la Cité Impériale. Je ne sais rien de mes parents, à part le fait qu'ils étaient vraisemblablement des Brétons. L'orphelinat était dirigé par des prêtres du Culte Impérial, et je n'étais qu'un orphelin parmi tant d'autres; aussi mes souvenirs d'enfance sont-ils ceux d'un chaos plus ou moins controlé. Au moins ils nous donnèrent des vêtements, le gîte et le couvert; ils nous apprirent même à lire et à écrire.

Parfois, dans nos instants de désoeuvrement, moi et quelques autres nous nous asseyions sur les marches de l'oratorium pour écouter les pretres disputer sans fin sur des sujets de politique et de philosophie. Ils ne le faisaient certes pas pour nous: nous étions spectateurs, pas étudiants, et cela nous amusait quand le débat devenait houleux et que les dignes prêtres, leurs arguments épuisés, se criaient dessus et se lancaient des noms d'oiseaux a la figure.

A force cependant, j'apprenais de leurs débats; je me sentais privilégié de pouvoir distinguer, dès le plus jeune âge, que les termes de "légal et illégal", et "moral et immoral", ne se recoupaient que rarement. J'avais le sentiment que beaucoup de gens ne réalisaient pas que les notions de bien et de mal n'étaient pas universelles; qui peut affirmer, sans risque de se tromper, ce qui est bien, ou juste, et affirmer que cela est vrai toujours et partout ? Qui, de plus, pourrait prétendre imposer légitimement aux autres ses opinions en la matière ? Bien peu de gens, avais-je toujours pensé; mais j'avais toujours compris que le monde ne fonctionnait pas -et ne fonctionnerait jamais- ainsi. Aussi, si j'avais du respect pour les raisons qui faisaient que les lois existaient, cela ne m'avait jamais empêché de ne ressentir que très peu de remords quand il m'arrivait de voler, pour moi ou mes amis.

 

Laisser un commentaire ?