SPIDER-MAN MEDIEVAL 1 : LES ESPRITS DE LA TERRE
Chapitre 1 : Un roturier parmi tant d'autres
3173 mots, Catégorie: G
Dernière mise à jour 18/06/2019 18:37
Il était une fois au treizième siècle après la naissance de notre bien aimé seigneur Jésus Christ, non pas un preux chevalier, ni un roi juste et bon, et encore moins une belle princesse. Il était une fois un simple roturier de quinze ans nommé Peter Paker.
Malgré sa jeunesse il avait déjà connu son lot de malheurs. Orphelin très tôt son oncle et sa tante s’étaient chargés de le recueillir. Ce couple d’artisans se montra attentionné et aimant. Hélas leurs âges se faisaient sentir à présent. Par conséquent Peter devait les aider autant qu’ils l’aidaient.
Présentement sa commission pour le compte de ses parents d’adoption, lui permettaient de s’évader un peu. Car si Peter manquait de force pour se bagarrer et d’audace pour faire la cour aux jeunes filles, en revanche il disposait d’un esprit vif et curieux. Et dans la ville d’Oscorpia il y avait toujours de quoi nourrir son esprit. C’était un de ces endroits où l’on songeait à élever l’esprit humain où pullulaient commerçants, artisans, artistes, et érudits.
D’ailleurs le regard de Peter trouva vite un sujet d’attention. La cathédrale était un monument majestueux du moins en phase de le devenir. La construction de cette bâtisse remontait d’avant même la naissance de Peter, qui par conséquent l’avait vu grandir, et s’y était d’une certaine manière attaché.
Ce décor déjà assez particulier bénéficiait en plus d’un spectacle de qualité en la personne du maitre d’œuvre. Cet homme âgé au crâne dégarnit et au dos voûté, supervisait ses ouvriers avec une vigueur impressionnante, ne laissant absolument rien passer.
Une personne s’appliquant dans son travail, était-ce si intéressant ? En fait tout reposait sur l’emplacement. Le maitre d’œuvre afin de bénéficier d’une vue d’ensemble sur le chantier, exerçait toujours en hauteur. Il circulait ainsi sur des échafaudages branlants sans afficher la moindre frayeur.
De part cette habitude et la dureté de sa direction, ses subordonnés comparaient régulièrement Adrian Toomes à un rapace. Depuis quelques temps il s’accordait de plus en plus à ce sobriquet. Adrian rognait sur les salaires, et imposait des cadences infernales.
Il faut dire que le seigneur local avait d’autres priorités en tête que la cathédrale. Donc les moyens venaient à manquer au maitre d’œuvre. Or si Peter considérait ce bâtiment comme une sorte de compagnon d’enfance, pour le rapace il s’agissait de sa progéniture. Se chargeant de façonner ce bâtiment depuis son apprentissage, la comparaison n’était en rien exagérée.
Le balai aérien du vieil homme capta l’attention de Peter au point, qu’il s’arrêta de marcher. Ce qui lui valut immédiatement une bousculade. Après tout il se trouvait dans l’artère principale de la cité où la foule évoluait comme un flot incessant.
Suite à ce retour brutal à la réalité le jeune homme dévia de son chemin initial. Il faisait chaud ce jour-là. Et du fait de sa petite taille Peter suffoquait un peu au milieu de la masse. Alors il emprunta les petites rues. Certes le danger des détrousseurs et autres tire-laines y résidait. C’est pourquoi Peter évoluait en parallèle de la grande rue sans trop s’y éloigner.
Il détenait un certain sens des responsabilités malgré son jeune âge. Un sens détenant certaines limites vue qu’une nouvelle distraction le détourna de sa route. Un petit attroupement se tenait à un croisement à proximité . Il en émanait une seule voix, mais quelle voix ! Puissante et grandiloquente. On sentait un homme de spectacle derrière elle.
Ce ne fut pas un esprit en quête de savoir ou d’une quelconque prouesse technique, qui s’approcha alors, mais seulement un gamin avec son besoin de divertissement. Le centre d’attraction était un trentenaire à la chevelure brune et épaisse soigneusement lissée en arrière. Une large moustache et des favoris entouraient son grand sourire charmeur.
Sa tenue se composait d’une tunique et de chausses d’un vert foncé assez sobre. Il en allait différemment de sa cape violette. Il était rare de voir une couleur si vive chez les gens du commun. Soutenu une gestuelle appuyée suggérant un saltimbanque expérimenté, l’homme continua de discourir.
« Venez défier le grand Mystério et peut-être doubler votre mise. »
Une fois plus près Peter vit une petite table devant l’auto-proclamé Mystério. Ils se trouvaient dessus trois gobelets en terre cuite, et une petite pierre ronde. Peter comprit vite le principe. Le bateleur plaçait la pierre sous l’un des gobelets, puis le mélangeait avec les autres. Ensuite il fallait deviner où se trouvait la pierre.
Peter fut déçut par la première phase. Mystério se montrait un peu trop lent dans son mélange. Au point que le jeune homme songea à miser la pièce trainant au fond de sa poche et constituant sa maigre fortune personnelle. Seulement du fait de son manque d’assurance, il se fit devancer par un autre.
Dans un premier temps il maudit son hésitation, et ensuite la remercia. Le gobelet désigné était vide. Peter avait pourtant bien regardé. Lui qui était toujours si observateur, fut vexé par cet échec. Si bien qu’il examina très attentivement la nouvelle démonstration oubliant au passage de miser. Le problème et sa solution l’intéressaient bien plus que le profit.
Par l’intermédiaire de parieurs malchanceux, Peter connut trois nouveaux échecs. Finalement il comprit. Mystério trichait. Dans ce cas pourquoi personne ne s’en plaignait ? Une autre explication naquit dans la tête de Peter. Il était le seul à avoir perçu cette arnaque.
Cette situation gonfla son égo de manière inhabituelle. Lui le garçon courtois et effacé décida alors de jouer les troubles-fêtes. Une fois le nouveau mélange achevé, Peter plaça avec vigueur sa pièce en face du gobelet du milieu, et l’instant d’après souleva les deux autres bien évidemment vides. Que pouvait faire Mystério alors ? Enlever le gobelet restant et dévoiler la supercherie.
« Bravo jeune homme. » Dit-il avec son intonation appuyée tout en ajoutant une seconde pièce sur la première.
Mystério gratifia au passage Peter d’un petit regard complice. On aurait dit un joueur d’échec ou de cartes félicitant son vainqueur après une partie. Cette réaction troubla Peter. Il s’attendait plutôt à de la colère. Après tout il lui ôtait le pain de la bouche.
Soudain une voix masculine retentit derrière Peter.
« Que se passe-t-il ici ? »
Le timbre fort et autoritaire poussa instinctivement les quelques gens présents à se retourner immédiatement. Il s’agissait de quatre hommes ou plutôt des gamins à une exception prêt. L’ainé par défaut qui devait avoir vingt-cinq ans, menait visiblement les autres.
Ils portaient tous le blason de la seigneurie à savoir un cercle ouvert vers le bas. Pour des hommes d’armes leur équipement était plutôt léger. Il se limitait à un casque, à une lance, et à une protection en cuir bouilli au niveau du buste.
De toute évidence le quatuor appartenait à la prévôté. Son rôle se limitant à la sécurité à l’intérieur de la ville, ce groupe était essentiellement composé de novices. Les véritables combattants aguérris eux gardaient les remparts ou se chargeaient des expéditions au dehors.
Le chef de groupe fendit le rassemblement avant de s’exclamer :
« Encore lui ! Vite on se disperse. Il ne doit pas être loin. »
Ces mots en plus de l’autorité contenaient aussi de l’agacement. Toujours curieux Peter regarda dans la même direction que le meneur des gardes, et réalisa à son tour que Mystério avait disparu laissant derrière lui sa table.
Apparemment la prévôté en avait après lui. Il n’avait pourtant pas l’air bien méchant. Pour preuve il avait laissé les deux pièces sur la table en bon joueur. Peter s’en empara immédiatement avant que quelqu’un d’autre ne le fasse. Mais alors qu’il les enfournait dans sa poche, on lui prit le poignet.
Peter tourna la tête de nouveau cette fois vers le visage du propriétaire de cette forte poigne. Le destin venait de lui jouer un sale tour. Il faisait face à une vieille connaissance : Flash Thompson. Issue du même quartier que Peter il ne comptait pas hélas parmi ses amis d’enfance. A l’époque Flash occupait le rôle de la petite brute tabassant sans cesse les autres gamins y compris et surtout Peter.
Flash lui aussi avait reconnu son ancienne victime. Il affichait le même air arrogant qu’autrefois juste avant de lui mettre une raclée. Au fond c’était très banal. D’ailleurs Flash s’était toujours contenté de quelques coups et rien de plus. Pourtant ce personnage avait marqué la mémoire de Peter. Tout simplement parce qu’il fut son premier contact réel avec la méchanceté.
Or dans les histoires qu’on conte aux enfants, le méchant était un ogre, une sorcière... bref quelqu’un de laid et de difforme. Flash Thompson lui entre sa silhouette athlétique, et sa chevelure auburn, avait toujours disposé d’un physique avenant.
Alors que se rejouait une scène du passé, Peter dévia de son texte initial. Sa victoire sur Mystério lui donnait un regain de fierté.
« C’est à moi ! » Protesta-t-il vigoureusement.
« Les jeux de hasard sont interdits en ville. » Répliqua Flash avec une joie délectable en serrant un peu plus.
L’idée vint alors à Peter de lutter sur un terrain différent de celui de son adversaire.
« Rien ne prouve que je l’ai gagné au jeu. »
D’abord troublé Flash observa les alentours sans doute en quête de témoins. Malheureusement les joueurs et spectateurs avaient déguerpi. A cela s’ajouta son supérieur entrain de l’appeler. Contrairement aux apparences Flash avait tout de même changé, et acquit une certaine discipline en tant que soldat. Bien qu’à contrecoeur il relâcha Peter, et partit aider ses compagnons.
Quant à Peter il vivait une superbe journée. Cette impression dura le temps, qu’il se souvienne de sa course. Il repartit alors de plus belle. Plus question de s’arrêter désormais même si un troll se baladait au milieu de la rue. Cette attitude permit à Peter de parvenir rapidement à l’endroit résumant à lui seul son passé, son présent, et son avenir : une boutique de tisserand.
Cette modeste bâtisse se limitait à deux étages. Le rez-de-chaussée était consacré au stockage, à la création, à l’étalage.... L’étage lui servait tout simplement de logement. C’était un de ces lieux où tout était mélangé que se soit les différentes étapes de l’artisanat ou du quotidien.
L’établissement avait connu son heure de gloire, avant que les grands ateliers se développent. Désormais cette boutique ne comptait plus d’apprentis hormis Peter, et vivotait grâce à une clientèle d’habitués et à quelques demandes complexes.
Peter disposait d’un bien modeste héritage. Mais à son âge on ne songeait pas encore au futur. L’intérieur faisait penser à un tableau. Il était figé. On y sentait l’absence de clientèle, et de passage en général. Pourtant aucun signe de décrépitude n’était à déplorer. Pas un grain de poussière ne trainait.
Ce miracle on le devait à la personne tournant autour d’une petite estrade destinée aux retouches.
« Peter te voilà enfin ! » S’exclama Tante May.
Juste un léger reproche émanait de ces mots. Cette femme aux rides creusés et aux cheveux blancs unis en un épais chignon, était la compassion incarnée toujours attentive aux autres et à leurs problèmes.
« J’ai les aiguilles pour le fuseau. » Commença à dire Peter la culpabilité le gagnant.
Puis sa chère tante s’évapora. Car il venait de la remarquer.
« Mademoiselle Stacy, je vous présente mon neveu Peter Parker. »
« Bonjour. » Parvint péniblement à dire l’intéressé.
Comment elle était belle ! Avec sa taille fine, et sa chevelure blonde platine elle rappelait les princesses des contes. Une différence subsistait tout de même. Contrairement à ces êtres êtérés et inaccessibles, qu’on trouvait sur les gravures il émanait d’elle de la chaleur, une présence palpable.
Malgré son jeune âge égal à celui de son admirateur Gwen Stacy avait déjà conscience de sa beauté et même subis des désagréments à cause d’elle. Pourtant elle répondit par un sourire au regard appuyé du jeune homme. Il paraissait différent des autres, qui la regardaient comme une pièce de viande appétissante. Lui l’observait avec une douceur, qu’elle n’aurait jamais cru déceler chez un homme.
En cet instant Cupidon venait de décocher deux de ses flèches. Parviendraient-elles à atteindre les cœurs de ses cibles ?
Une voix forte sans être oppressante sortit les deux jeunes âmes de leur rêve éveillé.
« Tu es en retard Peter. »
Même si sa silhouette se pliait sous le poids des ans, il émanait d’Oncle Ben encore une certaine vigueur. Comme une sorte de contre-partie, il n’affichait pas l’air repu des gens de son âge. Au contraire il paraissait préoccupé.
« Oui, j’ai... » Improvisa Peter avant de réaliser la présence de l’homme au coté de son oncle.
Il portait exactement la même tenue que les soldats, qu’il avait croisé précédemment hormis l’absence de casque et de lance. De plus le visiteur détenait à la ceinture une épée courte. Il était aussi plus âgé que ses confrères, comme le suggérait sa chevelure grisonnante. Son maintient martial révélait un véritable homme d’arme expérimenté.
Ca ne pouvait pas être une coïncidence. Ce gueux de Flash l’avait dénoncé !
« Voici George Stacy. » Enchaina Ben face au mutisme soudain de son neveu. « Le prévôt de la ville. Il est venu commander des habits pour sa fille. »
Le prévôt en personne ! Peter réalisa alors son erreur. Jamais un tel personnage se serait dérangé pour un petit pari. Retrouvant son calme Peter lui dit « C’est un honneur monsieur. » tout en effectuant une révérence.
Il n’avait pas l’habitude de ce genre d’usage, mais il retenait facilement une leçon et savait l’appliquer. George observa le jeune homme avec un certain intérêt avant de s’adresser à son oncle.
« Alors c’est votre neveu. »
« Oui. » Commença à dire Ben avec une énergie nouvelle.
La suite Peter l’ignora. Comme la plupart des gens de son âge sa concentration était fluctuante. Par conséquent il reprit son œillade avec Gwen, ignorant ce qui était entrain de se jouer.
Oncle Ben lui le savait. Alors il parla des créations de Peter : le lance-pierre contre les rats, les peintures sur les enseignes du quartier, ce fil torsadé très résistant....
Effectivement Peter Parker était un garçon brillant et inventif. Pourtant il ne percevait toujours pas le chemin si particulier qu’était entrain de prendre sa destinée.