Shadow the Hedgehog
Je me lève à grand mal, ce matin. Mon bras gauche me torture, d’ailleurs. Je regarde mon portable : 8h06. Et un nouveau message. De Blaze. Je l’ouvre, et le lis :
Blaze : Ça va ?
Moi : Mouais. Bof. Marre de ces imbéciles.
Blaze : Moi aussi.
Moi : Pas grave. On se démerde du mieux qu’on peut.
Blaze : Écoute, mon Shadow, je ne suis pas sûre que ça aille. Tu veux que je vienne dans ta chambre ?
Moi : Nan, j’vais bien.
Blaze : Bon… je t’aime mon amour, à tout à l’heure.
Moi : Je t’aime moi aussi.
Et je ferme la conversation. Il est maintenant 8h18. Je me rends sur le balcon pour fumer. J’allume, je fume, j’éteins. Je regarde le lever de soleil. Et j’entends un faible cri qui vient du balcon d’à côté : Daisy qui est à deux doigts de tomber du balcon. Quelle conne. Je ne sais pas si je dois l’aider. Non. Pas la peine.
« - Sauve-la, dit la petite voix.
- Ta gueule.
- Sauve-la !
- Ta gueule !!
- Sauve-la ! »
Je fini par écouter la petite voix. Je saute d’un coup sur l’autre balcon, et tire Daisy vers moi, pour la remettre sur pied. Elle reprend son souffle, et elle me dit :
« - Merci ! Tu m’as sauvé la vie !
- Quoi ?!! »
Oh non… oh non !
« - Bon, okay, peut-être pas la vie, mais de longs mois d’hôpital ! Et toi ? Ça va ?
- Ça peut aller. Je ne dors jamais bien.
- Oh ? Pourquoi, ça ? »
À cause de vos mamours à Sonic et toi !
Je la regarde dans les yeux. De l’innocence. Ce qui m’avait frappé dans le regard de Maria. Est-ce que je devrais lui dire… la vérité ?
« - Je passe mon temps à penser… à une amie, répondis-je, le cœur lourd.
- Elle n’est pas venue à Rio pour t’encourager ?
- Non, elle ne pouvait pas, murmurais-je. Elle est morte. »
Elle eut une exclamation, et elle voulut s’excuser tout de suite :
« - Excuse-moi, pardon vraiment, je suis idiote, je…
- Tu ne savais pas, dis-je. Ce n’est pas grave... »
Je me retourne vers le paysage du balcon. Je pense que je devrais lui raconter ce qui s’est passé. Pour de vrai.
« - Ça va, me demande Daisy. »
Elle m’a surpris dans mes pensées.
« - Comment elle s’appelait, cette amie ?
- Maria, soupirais-je. Maria Robotnik.
- Elle était importante pour toi ? »
Je réfléchis à comment répondre à cette question. Et je reprends :
« - Écoute, Daisy, si je te raconte une histoire, tu n’iras pas la crier sur tous les toits ?
- Non !
- Très bien. »
Je me retourne entièrement vers elle, et je commence mon récit.
« - Il y avait un hérisson. Son ADN était un mélange entre celui d’un hérisson, de son créateur, du Diable, et de sa protégée. Ce hérisson avait la jeunesse éternelle, dans le sens où il ne vieillira jamais. Il détient le Contrôle du Chaos, la plus grande énergie du monde, que seul trois personnes possèdent. Il a toujours vécu dans l’espace, dans un vaisseau spatial. L’ARK, une compagnie spéciale du Professeur Gérald Robotnik, le plus grand génie de tous les temps. L’ARK recueillait les malades victimes de virus inconnus, et Robotnik trouvait toujours un remède miracle. Et le hérisson dont je parle a été conçu là-bas, par ce génie, pour tenter de guérir sa petite fille, Maria Robotnik, victime d’une maladie inconnue : elle ne pouvait pas vivre sur la Terre. Et on ignorait pourquoi. Quand le hérisson fut achevé, elle eut une dizaine d’année. Et il avait lui aussi son âge. C’était le début d’une grande amitié sincère entre eux. Mais le hérisson rêvait de rencontrer son père, qui était Black Doom, le Diable en personne. Cependant, le Professeur Robotnik refusait de revoir ce personnage sinistre. Et Maria inventait histoire sur histoire parlant de lui, de la Terre, d’eux, de leur Grand-Père (Robotnik), et de la beauté du monde. Quand elle eut vingt ans, elle fut toujours aussi naïve et enfantine. Mais elle croisa le chemin d’un homme dans l’ARK. Le coup de foudre. Un enfant : une fille. À la naissance même de cette fille, Gérald Robotnik conçut un nouvel hérisson : Sonic the Hedgehog, mon frère.
- Sonic, s’exclame Daisy à en faire réveiller tout l’hôtel. Il n’est pas… enfin je veux dire…
- Il n’est pas complétement « vivant », en effet. Mais laisse-moi finir. Sonic était lui aussi doté du Contrôle du Chaos. Un an plus tard, le Professeur créa Silver the Hedgehog, mon autre frère, ayant aussi le Contrôle du Chaos, en plus de la télékinésie. Maria fut comme une mère pour les trois, et le hérisson du début comme un père. Car le père de la petite fille est mort de sa maladie une semaine avant sa naissance. Les histoires continuaient. Elles s’inventaient. Elles faisaient rêver. Mais malgré tout, Maria n’est jamais allée sur Terre.
- Pourquoi, demande Daisy doucement.
- Quand Maria avait eu trente ans, et Sonic trois, la catastrophe est arrivée. Des hommes armés se sont infiltrés dans l’ARK, pour y tuer tous les malades. Surtout Maria, car apparemment, ils avaient peur que le monde soit contaminé. Le professeur Robotnik a dit à Maria et au hérisson de s’enfuir dans la capsule de sauvetage Est, pendant que lui et les enfants dans l’Ouest. Le hérisson fit les derniers réglages dans la capsule alors que Maria s’était fait tiré dessus, à l’extérieur de la capsule. Une fois. Elle murmura des mots. Le hérisson s’effondra. De ses faibles mains, elle ferma la capsule. Il cria, pleura, tapa. Un homme armé tirait sur lui. Il s’en fichait. L’homme tirait des dizaines de balles sur elle. Elle murmura ses derniers mots, alors que la dernière balle lui traversa le cœur, et elle tira sur un levier. Et la capsule s’envola alors brusquement vers la Terre. Et l’ARK, derrière-lui, explosa…
- C’est horrible, murmure Daisy. Je… qu’est devenu le hérisson ?
- Lui… il a atterri sur la Terre, choqué et traumatisé. Plus jamais ces images ne l’ont quitté. Il a retrouvé Sonic, Silver, et la petite fille les larmes coulant comme une cascade sur leurs joues, et le Professeur était devenu fou. Le hérisson prit la petite et la confia à une autre famille. Car personne ne mérite d’être orphelin à un tel âge. Il a ensuite découvert que les hommes armés étaient dirigés par… Black Doom, son propre père. Le Professeur devint toqué par tout ça. Il laissa le hérisson dans un énorme tube à essais endormi pendant dix ans. Mais il n’a jamais oublié les dernières paroles de Maria : « Adieu… Shadow the Hedgehog. ».
- C’est, balbutie Daisy. Toi ?!! »
Je la regarde dans les yeux, comme si je voyais Maria, et je répondis :
« - Oui. »
Sa bouche forma un « O ». Je ravalais lentement mes larmes. Je n’ai pleuré qu’une seule fois : quand Maria est morte. Et plus jamais je ne laisserai les couler sur mes joues. Jamais.Daisy me prend lentement dans ses bras. Je me laisse faire, mais ce n’est pas que j’aime ça. Elle murmure :
« - Je te comprends.
- Non, dis-je la voix cassée. Tu ne peux pas. Moi, la mort de Maria m’a traumatisé, et ça m’a écrasé ma vie, en même temps que tous nos rêves… mais pas seulement. Ma promesse aussi. Mon devoir. Mais raison de vivre. Et depuis, je ne parle plus à personne. Je me suis refermé sur moi-même, dans la mélancolie, la nostalgie, le cauchemar, et toujours les mêmes images en boucles. »
J’eus un pincement de cœur en prononçant ces mots.
« - Tu sais, dit Daisy, la gorge serrée. C’est tellement triste que… j’ai envie d’en pleurer…
- Mais toi, continuais-je. Personne ne te traite de fils du Diable, alors que c’est lui qui a tué Maria. Les préjugés à mon sujet sont poisseux partout.
- C’est vrai, ajoute-t-elle sans se retirer. Beaucoup de gens racontaient des rumeurs sur toi. Mais je ne les ai pas crus une minute. »
Mais malheureusement, elles sont vraies, ces rumeurs…
Je me retire d’elle, et je ne voudrais pas mentir plus. Autant tout lui balancer, je m’en fous.
« - T’aurais dû les croire, marmonnais-je. Tu sais, ils ne racontaient pas de conneries. C’est vrai. »
Daisy recula d’un grand pas. Elle eut une autre exclamation, et elle s’écria :
« - Tu… tu… non ! Ce n’est pas possible !
- Si.
- Tu as…
- Tué. Oui. J’ai déjà tué. Toutes les rumeurs à mon sujet sont vraies. »
Elle ouvrit la bouche pour parler mais elle fut interrompu par la porte qui toquait, et une voix cool, tranquille, que je ne connais que trop bien :
« - Daisy ?
- Oh, c’est Sonic, s’exclame Daisy.
- J’avais pensé, continue l’imbécile derrière la porte. Tu voudrais qu’on s’entraine tous les deux ce matin ?
- Salut, coupais-je vers Daisy. J’me casse.
- Tu veux que je t’ouvre la porte, demande-t-elle. Ou…
- Non, c’est bon. »
Et je saute sur mon balcon, derrière une Daisy ébahie. Je lui lance un regard, rentre dans ma chambre, et m’affale sur le lit.