Requiem pour un astre
Disclaimer : L'histoire et les personnages de Naruto appartiennent à Masashi Kishimoto.
Auteur : ArdellChapitre huit
Jusqu'au bout et au delà
Anwvyn
Le chêne – Duir
La situation n'avait pas progressé, au contraire. Algethi avait beau se donner à fond, cela semblait ne servir à rien. A l'optimisme avait succédé une forme de découragement. Il savait qu'il devait une fière chandelle à sa protection sacrée. Sans elle, il en avait parfaitement conscience, ses os n'auraient plus été que miettes et ses muscles écrasés comme sous un rouleau compresseur. D'ailleurs il avait la désagréable impression que sa Cloth faisait office de tuteur à son propre corps, empêchant celui-ci de s'effondrer, lui maintenant une forme humaine quand toute sa chair ne demandait qu'à se liquéfier.
Son adversaire, lui, n'avait pas l'air très mal en point. Cela dégoûtait Algethi autant que cela le décourageait. Fergus était bien l'ennemi le plus difficile qu'il ait eu à affronter. Même Seiya dans l'armure du Sagittaire ne l'avait pas ainsi poussé dans ses derniers retranchements. Certes, il les avait balayés en deux temps trois mouvements ses comparses d'Argent et lui, mais il portait une armure d'or tout de même ! Avec Fergus, c'était différent. Les dégâts s'accumulaient dans l'organisme du Saint. Une lente agonie. D'autant plus fâcheuse que ne pas être éliminé tout de suite permettait un espoir. Tant qu'il y a de la vie...
A vrai dire, Algethi était sur le point de vouer cette expression aux gémonies, tant elle lui paraissait cruelle. Permettre d'espérer alors que tout semblait perdu... L'espérance n'était-il pas un cadeau empoisonné des Dieux ?
Les Dieux... Il commençait vraiment à les détester, tous ces êtres supérieurs qui s'amusaient aux dépends des humains. Et puis d'abord, pourquoi ne réglaient-ils pas leurs différents directement entre eux ? Même Athéna se servait de chair à canon...
Une fois encore, le Chevalier d'Hercule lança son attaque.
Sans aucune conviction.
Ce fut comme si une douce brise avait caressé le corps de Fergus. Celui-ci éclata de rire et Algethi se sentit piqué au vif.
— Quoi, c'est tout ce que tu as ? Tu régresses, cette attaque est encore plus faible que les premières que tu as lancées !
Algethi voulut répliquer vertement quelque chose comme « Je t'ai ménagé par pitié mais rassure-toi, tu n'as encore rien vu ! ». Il resta cependant muet. Fergus avait raison, c'était de pire en pire.
"Athéna, pourquoi m'avez-vous choisi ? Vous voyez bien que je ne suis pas de taille... C'est fini, j'abandonne".
Une voix douce résonna alors en lui.
"Chevalier, si je vous ai choisi tes compagnons et toi, c'est parce que je sais que je peux avoir confiance en vous. Vous êtes les Saints de l'Espoir !"
Ah les Saints de l'Espoir. Elle parlait de Seiya et des autres Bronzes, ceux qui avaient vaincu tous les obstacles pour la sauver.
"Non, Chevalier. Je veux parler de vous tous. Tous mes Saints, vous êtes les Chevaliers de l'Espoir. D'Or, d'Argent ou de Bronze, vous avez tous la même valeur, immense à mes yeux. C'est avec une totale confiance que je vous confierais ma vie, à chacun d'entre vous. Tu avais raison, tout à l'heure. Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir. Cette expression, malgré ce que tu penses, reflète la réalité. Vous, mes Chevaliers, vous représentez cette espérance, vous vivez par elle et pour elle. Tu y arriveras Algethi, j'ai confiance en toi !"
Lorsque Algethi releva la tête, des larmes brillaient dans ses yeux. Dans lesquels scintilla bientôt une lueur farouche.
Athéna l'avait comparé aux héros qui lui avaient sauvé la vie tant de fois ! Et pourquoi ces héros avaient-ils réussi à triompher ? Parce qu'ils n'abandonnaient pas. Ils se battaient encore et encore, jusqu'à l'extrême limite et au delà. Il devait prendre exemple sur eux, après tout, il était lui aussi un Chevalier de l'Espoir !
Ce fut comme si quelque chose s'était réveillé en lui. L'espoir, sa fierté, quoi que ce fût, c'était là.
— Oh, à voir ton regard, tu as repris du poil de la bête. Ça ne suffira pas ! The Fatal Crash !
Cette fois au lieu d'encaisser cette attaque bras tendus devant lui, Algethi décida d'accompagner cette force qui venait sur lui. Comme les fois précédentes, une sensation d'écrasement l'envahi. Aussitôt, il se servit de cette puissance comme un judoka se servant de la force de son adversaire. Et il lança en même temps sa propre technique.
Le résultat dut que Fergus se retrouva projeté en arrière avec une grande violence, faisant trembler le mur de racines. Le Chevalier le vit chuter et rester là, sonné. Et pour cause ! Fergus venait de prendre sa propre attaque, combinée à celle de son ennemi, en pleine face !
Quant à Algethi, il n'était pas indemne, loin de là. En fait, maintenant que l'adrénaline cessait ses effets, la douleur se rappelait à son bon souvenir. L'effort qu'il venait de fournir était encore plus violent que le Fatal Crash. De fait, il avait l'impression que ses muscles s'étaient transformés en compote. Le moindre mouvement lui donnait envie de hurler. Il était à deux doigts de s'effondrer.
Au prix d'un terrible effort, il resta debout et provoqua son ennemi :
— Tu en veux encore ? Viens donc !
Mais au lieu de bondir sur ses pieds, Fergus se releva avec une certaine difficulté. Son regard était étrange. Il semblait perplexe, comme s'il était étonné de se retrouver là, blessé.
— Que... Qu'est-ce que je … Qui es-tu ? bafouilla-t-il.
Algethi faillit tomber sur les genoux. Se pourrait-il... se pourrait-il que le coup qu'il lui avait porté ait suffi à rompre le maléfice ? Les yeux du Sidhe achevèrent de le convaincre.
Nul cercle noir n'entourait plus les prunelles noisette.
Propriété Kido
— Athéna, c'était un honneur de vous servir. Je veux dire vous et Sa Majesté Artémis.
— Tu avais raison, Athéna, admit la déesse de la Lune. Je ne l'aurais pas cru mais ce Chevalier a rempli sa mission. J'espère seulement qu'il sera toujours à la hauteur si de nouveaux enne...
— Artémis !
Réagissant vivement, Jamian se leva et rattrapa la divinité avant qu'elle ne chute. Celle-ci, très pâle, cligna des yeux plusieurs fois, comme désorientée.
— Je... je...
— Ne parle pas, Artémis, conseilla Athéna. Tes forces t'ont abandonnée. Est-ce que ça veut dire que tes sœurs ?...
Artémis hocha la tête.
— Presque... murmura-t-elle.
Le Chevalier porta la déesse jusqu'à une chaise de jardin et l'y installa. Athéna, à genoux à ses côtés, lui tenait la main. Peu à peu, Artémis reprit des couleurs.
— Ça va, maintenant, assura-t-elle.
— Je préfère que tu ne te lèves pas, ton malaise pourrait revenir.
— Justement, le Saint du Corbeau a réussi mais qu'en est-il des autres ? Où en sont-ils ?
— Ils réussiront, affirma Athéna.
Alors que le ton d'Artémis était sévère, le sien était apaisant.
— Tu dis cela mais je ne vois toujours aucun résultat. La lune s'éloigne de plus en plus à chaque heure, que dis-je, à chaque minute ! Même si ce n'est pas de beaucoup à chaque fois, au bout du compte cet astre n'aura bientôt plus aucun lien avec la Terre !
— Crois-moi, cela m'inquiète aussi. Mais je sais que nous serons victorieux. Mes Chevaliers se battraient jusqu'à l'extrême limite de leurs forces et au-delà. Tu connais la réputation des Saints n'est-ce pas ?
Anwvyn
Le noisetier — Coll
Une grande faiblesse, l'estomac sens dessus dessous, des remontées acides, l'envie de vomir... Comment diable un simple malaise pouvait-il ainsi paralyser un Chevalier ? Dante ne se l'expliquait pas. A moins que le son produit par le Hululement Discordant ne provoque davantage qu'une banale grippe... N'empêche, terrassé par un virus, la honte...
— Laisse-moi deviner, avait-il dit plus tôt. Même si je me perce les tympans, ça ne servira à rien, n'est-ce pas ?
Un sourire de Cathbad lui avait répondu. Bien sûr, il aurait pu mentir, mais Dante sentait distinctement, à chacune de ses attaques, cette vibration qui parcourait son corps de façon très désagréable. Cette technique visait avant tout le système nerveux. Donc se rendre sourd ne servirait à rien. En attendant, Dante commençait à en avoir vraiment assez. D'autant plus que son adversaire profitait de son malaise pour le frapper ; dans l'état où il était, le Saint ne pouvait parer les coups ni riposter.
— The Discordant Hoot !
— Ah mais tu vas la fermer, oui ! s'écria le Chevalier en lançant aussitôt ses boulets.
Du moins il tenta de les lancer. Le haut et le bas se télescopèrent, la gauche et la droite se mélangèrent, et Dante vacilla. Puis il cracha de la bile. Des coups sourds pulsaient dans son crâne et il avait l'impression d'être aussi faible qu'un apprenti le jour de son tout premier entraînement.
— Si... seulement... tu... pouvais... la... fermer... murmura-t-il.
Pitié que quelqu'un fasse taire ce maudit hibou ! Sa tête allait exploser, à moins qu'il ne finisse par la taper contre les murs.
Ce fut alors qu'il l'entendit. D'abord lointain, puis de plus en plus proche. Un chant très beau, une voix magnifique. Il sut aussitôt qui était la chanteuse. Athéna ! Mais pourquoi poussait-elle la chansonnette ?
"Concentre-toi, Chevalier, concentre-toi sur ma voix."
Athéna était bien une déesse miséricordieuse, depuis que ses notes avaient pénétré les oreilles de Dante, celui-ci se sentait déjà mieux.
— Pourquoi souris-tu ? demanda Cathbad.
— Parce que je vais gagner ce combat.
— C'est ce qu'on va voir. The Discordant Hoot !
L'habituelle vibration commença à parcourir le corps du Saint. Celui-ci se concentra sur la voix de sa déesse. Cette dernière chantait plus fort. Peu à peu, un doux frisson entoura le Chevalier.
— Comment ? fit Cathbad en constatant que non seulement sa technique n'avait pas effet, mais qu'en plus son ennemi reprenait des couleurs.
— Hé hé hé ! A mon tour maintenant ! Jigoku no Kōkyūsa !
Et Dante lança ses boulets qui se multiplièrent. Cathbad bondit pour les éviter mais le Saint le rejoignit dans les airs et lui porta plusieurs coups. Le dernier projeta son adversaire contre le mur. Il se releva très vite. Dante ne perdit pas une seconde et lança son poing en avant. L'onde de choc ainsi créée alla creuser un cratère dans le mur de racines, derrière le Sidhe qui avait esquivé. Peu à peu, il se résorba. C'était comme si rien ne pouvait détruire cet arbre.
Dante verrait cela plus tard. Pour l'instant, ayant repris du poil de la bête, il enchaînait coups de poing et coups de pied. Comme s'il avait besoin d'extérioriser sa frustration d'avoir été, un temps, à la merci de son adversaire. Celui-ci n'était pas en reste et se défendait bien. Quant au chant d'Athéna, il avait baissé de volume mais le Saint l'entendait toujours, comme un doux murmure.
— Il est temps d'en finir ! fit-il en frappant une fois de plus Cathbad.
Aussitôt après, il lança ses boulets. Ceux-ci atteignirent le Sidhe, déchirant sa chair aux endroits où elle n'était pas protégée par son Unseelie. Le sang se mit à couler.
Furieux, Cathbad s'élança, poing en avant... et fut cueilli par celui de Dante.
Ce fut le coup décisif. Peu après, le Sidhe cligna des yeux. Des yeux exempts de cercles noirs.
If — Idho
La peau parcheminée, des douleurs aux articulations, lesquelles émettaient un craquement sinistre à chaque mouvement, la sensation d'un voile blanc devant les yeux, des difficultés à entendre... Un vieillard, voilà de quoi Algol avait l'air.
C'était incompréhensible ! Les Saints d'Athéna ne pouvaient pas être soumis aux caprices du temps, comme le reste des mortels ! D'ailleurs, le cosmos... Le cosmos aurait dû effacer les effets de l'âge ! Allons, certains Chevaliers vivaient jusqu'à deux cents ans ! Du moins était-ce la rumeur. Infondée ?
— Je ne tiens pas à te tuer. Si tu quittes cet endroit bien gentiment, je lèverai le Time Killer.
Algol se permit un petit rire. Les paroles de son adversaire lui étaient parvenues comme à travers du coton, mais il avait deviné le sens de ses mots.
— Et puis quoi encore ? Tu ne crois quand même pas que c'est ça qui va arrêter un Saint d'Athéna ?
Et il brandit une fois de plus son bouclier.
— Ça ne servira à rien, fit Bran avec une certaine tristesse.
Effectivement, comme pour les fois précédentes, le Sidhe ne resta pas longtemps changé en statue. Très vite, celle-ci se fissura et se transforma en poussière.
— Time Killer, murmura Bran.
Ce dernier ne portait pas le moindre coup. Il n'en avait nul besoin. Son attaque se chargeait de rendre son adversaire inoffensif et, de plus, les dégâts occasionnés valaient bien une déferlante de coups. Bientôt, Algol mourrait simplement de vieillesse.
Il fallait faire quelque chose ! Il ne pouvait pas rester là à attendre la fin ! Plus d'une fois il avait lancé son Ra's Al Ghûl Gorgonio, chaque tentative avait été plus piteuse que les précédentes. Tout ça à cause de sa grande faiblesse. Plus le combat durait et plus il était désavantagé.
Que faire ? Il devait bien y avoir un moyen...
Soudain les yeux d'Algol s'écarquillèrent.
Dans son esprit venait d'apparaître l'image d'un jeune homme aux longs cheveux noirs. Celui-ci avait les paupières closes et du sang traçait des lignes rouges sur son visage.
Que... Shiryu ?!
Aussitôt, Algol se remémora son combat contre le Dragon. Le sacrifice du Chevalier de Bronze , qui n'avait pas hésité à se crever les yeux.
Pourquoi ce souvenir ? Était-ce un signe, un indice ? Shiryu s'était sacrifié, cela voulait-il dire que lui aussi ? Mais comment ? Ce qu'il aurait fallu, c'était quelque chose qui puisse stopper sa vieillesse accélérée. Mais quoi ?
Les yeux du Chevalier se posèrent sur son bouclier.
La Méduse. Qui changeait les gens en statues de pierre.
La pierre. Élément figé.
Qui fige...
C'était insensé, c'était fou, et certainement stupide. S'il faisait ça, il mourrait à coup sûr. Pourtant, n'était-il pas déjà en train de mourir à petit feu ?
Bran vit son adversaire lever son bouclier.
Et le positionner en face de son propre visage.
— Mais que...
Les yeux de la Gorgone s'entrouvrirent, une lueur s'en échappa, illuminant pendant quelques secondes la face du Saint. Lequel ferma les yeux très vite. Cependant ils avaient déjà croisé le regard de Méduse et ce court laps de temps avait suffi pour occasionner des dégâts.
Certaines parties de son corps s'étaient pétrifiées, son pied et sa main gauches, ainsi que tout son bras droit avaient été changés en pierre.
— Imbécile ! Comment veux-tu combattre, maintenant ?
— Athéna y pourvoira, voulut répliquer Algol.
Il ne le put pas : la pierre avait également atteint, en partie, sa mâchoire.
"Et maintenant ?" pensa-t-il.
Il ne sentait plus ses membres pétrifiés. Le Dragon avait perdu la vue, et pourtant il avait réussi à le terrasser. Il n'y avait pas de raison qu'il ne puisse pas...
"Cosmos... brûle mon cosmos..."
Il devait y arriver. Il le fallait ou c'était la fin. Et ça, c'était hors de question.
Le cosmos, source de vie. Algol l'appelait de tout son être, se concentrant de toutes ses forces. Que son bras droit bouge. Qu'il bouge !
L'effort déployé par le Chevalier était d'une rare intensité. Un filet de sang coula de sa narine. Il ne s'en rendit pas compte. Par contre, il sentit très bien... ce petit picotement dans la main droite. Une sensation ténue mais bien là. Ça ne pouvait pas être une illusion.
Le picotement s'accompagna de chaleur, une chaleur qui augmentait. Bientôt, Algol eut l'impression que son bras était en feu.
"Oui, Chevalier. C'est ça, brûle ton cosmos !"
Cette voix...
"Oh Athéna, vous êtes là..."
Le Saint se sentit guidé, accompagné. Comme jadis elle avait guidé et accompagné le Dragon...
Allez, un dernier effort.
Algol lança son poing en avant. C'était étrange de bouger un membre rigidifié. Pendant un instant, il crut que rien ne se passerait. Puis il vit Bran projeté en arrière sous l'onde de choc.
— Comment... comment as-tu fait ? Tu es partiellement transformé en statue, et cependant tu as réussi à me porter un coup ! Quel est ton secret ? demanda Bran après s'être relevé.
Puis il se rappela qu'Algol ne pouvait parler. Néanmoins, la lueur dans ses yeux répondit à la question du Sidhe.
Cet esprit de sacrifice, c'était pour sa déesse. Les Saints d'Athéna étaient prêts à tout pour elle. Même à risquer leur vie ou à s'auto-mutiler. Ils croyaient tellement en sa cause !
Lui qui était immortel, il n'avait pas le tiers de leur courage. Peut-être valait-il mieux... Mais s'il faisait ça, jamais il ne connaîtrait le repos. Cependant, l'idée de son propre confort paraissait bien dérisoire face au sacrifice de son ennemi.
Ennemi ?
Non.
— Algol, tu m'as convaincu.
Aulne — Fearn
Le héros celte était de nouveau envoûté. Avec un cri de rage, il se jeta sur Misty est lui asséna plusieurs coups, que le Saint parvint à parer.
— Tu n'avais pas revu ton fils depuis sa naissance ? Ça a dû être long...
— Tais-toi ! Tu ne sais pas de quoi tu parles !
Oh non Misty ne se tairait pas. Il avait compris que seule l'évocation de l'enfant était susceptible d'arracher Cúchulainn à sa transe. Pour preuve, les cercles noirs autour de ses iris et qui avaient pâli tout à l'heure.
— Il devait être heureux de revoir son père. Même si vous ne pouviez vous reconnaître, au départ, il était venu vers toi pour ça, n'est-ce pas ?
Cúchulainn secoua la tête comme pour chasser ses souvenirs.
— Je t'ai dit de la fermer ! Gae Bolga !
Aussitôt, le Saint fit appel à sa propre technique :
— Mavrou Tripa !
Le tourbillon créé par le Chevalier forma un vortex entre lui et son ennemi. L'attaque de celui-ci resta dans cette mini tornade quelques instants puis s'en échappa pour venir frapper Misty. Contrairement aux fois précédentes, la douleur était atténuée. Sans doute parce que le Gae Bolga avait été freiné par le Mavrou Tripa.
Néanmoins, le Saint continuait à considérer le simple fait d'être touché physiquement comme extrêmement déplaisant. Où était l'époque où il était craint de tous, où pas une égratignure ne déparait son corps ?
— J'ai vu Aifé. C'est une belle femme. Comment était ton fils, est-ce qu'il te ressemblait ?
Cúchulainn se mit à trembler.
— Comment s'appelait-il, déjà ?
Un autre cri de colère. Un coup que Misty évita. Aussitôt après avoir esquivé, il balança son poing et atteignit le Celte au visage. Ce dernier recula de quelques pas sous le choc.
— Comment s'appelait-il ? insista le Chevalier tout en continuant de frapper.
Son adversaire parait les coups difficilement, comme s'il n'était pas concentré. Soudain il lança son attaque et Misty sentit une fois encore des millions de petits crochets qui s'ouvraient dans sa chair, la tordant de l'intérieur.
Ignorer la souffrance. Continuer son interrogatoire.
— Son nom, quel était son nom ?
Et il ponctua sa question par un nouveau coup de poing.
— Comment s'appelait-il ?
Le Chevalier eut un instant d'hésitation en distinguant des larmes dans les yeux de son adversaire. Cependant, dans son regard brillait également une lueur ombrageuse.
Encore un coup.
— Son nom ?
— Conla ! Il s'appelait Conla ! s'écria enfin Cúchulainn.
Il resta là, tête baissée et poings serrés.
— Je suis sûr qu'il méritait la fierté que tu éprouvais pour lui.
Le Celte porta la main à son front, comme s'il souffrait de migraine. Puis il ouvrit les yeux et Misty remarqua aussitôt l'absence de cercles noirs.
— Que s'est-il passé, pourquoi suis-je ici à me battre ?
— Tu ne te souviens de rien ?
— Si. Je me rappelle t'avoir affronté mais ce que je ne m'explique pas, c'est pourquoi. J'ai l'impression... d'avoir été drogué.
— Il y a un peu de ça, tu as été envoûté, raconta le Saint.
— Par qui ? Qui a osé ? Oh non... Aifé... soupira Cúchulainn.
— Cette femme semble posséder un certain pouvoir car elle en a fait de même avec les autres Sidhes. Je dois aussi te dire que j'ai pour mission de m'emparer de la Lance de Lug, qui se trouve derrière toi.
Le Celte jeta un coup d'œil en arrière.
— Bien, fit-il. Je suppose que je n'en suis plus le gardien à présent. Je ne continuerai pas de me battre pour quelqu'un qui m'a manipulé.
Il fit un geste de la main. Obéissant à son appel, le talisman s'arracha du mur et vint se planter aux pieds du Chevalier.
La Lance de Lug ne semblait rien avoir de spécial. Sa hampe en bois était enlacée de deux longs rubans, l'un doré, l'autre noir. En posant la main dessus, Misty s'attendait à ce qu'un courant d'énergie le traverse. Mais rien ne se passa. Était-ce bien la fameuse lance qui ne ratait jamais sa cible ?
— Oui, c'est bien elle, répondit le Sidhe. Que t'a dit Aifé ?
— Qu'il fallait réunir les cinq talismans. Et je suis sûr que mes compagnons ont réussi, eux aussi !
Anwvyn
Ce fut avec une joie pleine d'assurance qu'ils se retrouvèrent, à l'extérieur des arbres. Algethi, qui avait toujours l'impression que son corps était passé au mixeur, s'appuyait sur Dante. Lequel avait encore un peu la tête qui tourne, dû au contrecoup du malaise qui l'avait saisi lors de son combat. La lance de Lug, le chaudron et la massue de Dagda reposaient sur l'herbe, près d'eux. La massue ressemblait à un gros gourdin, quant au chaudron, il était en fonte et n'aurait pas dépareillé au milieu d'une batterie de cuisine.
— Je savais qu'on les aurait, c'était couru d'avance, commença Dante avec un sourire triomphant.
— Évidemment, répliqua Misty tout en passant un doigt sur une de ses blessures, le relevant ensanglanté.
Il fronça les sourcils à la vue du liquide rouge, comme si sa simple existence à l'extérieur de son corps constituait une offense. Il aurait dû apprendre la leçon, après son combat contre Seiya. Lorsqu'on se battait, il fallait s'attendre à recevoir des coups et à être blessé. Le Lézard avait conscience de cela et pourtant c'était plus fort que lui, la moindre marque sur son corps avait des allures d'affront. Face à Cúchulainn, il avait su se maîtriser, mais maintenant, il ne désirait rien de plus que de se baigner dans une étendue d'eau fraîche.
Il secoua la tête. Décidément, il était irrécupérable... Pas étonnant qu'il ait perdu face au Saint de Pégase.
— Je dois l'admettre, vous êtes pleins de ressources, déclara Fergus.
À ses côtés se tenaient Cathbad et Cúchulainn.
— Vous nous avez battus mais vos compagnons ? s'enquit le premier.
— C'est vrai, il en manque deux. Sans doute n'ont-ils pas réussi...
— Ne dis pas n'importe quoi ! s'emporta Dante. Ils s'amusent, c'est tout.
— Je crains que non...
Tous se tournèrent vers cette voix. Bran marchait vers eux en portant quelque chose. Tout d'abord les Chevaliers ne comprirent pas ce qu'ils voyaient. Cette armure, c'était celle de Persée. Mais pourquoi recouvrait-elle cette statue ? Statue étrange, d'ailleurs, certains endroits avaient le grisâtre de la pierre, tandis que d'autres étaient couleur chair.
— Mais... oh Athéna, Algol ! s'écria Algethi qui avait été le premier à comprendre.
— Quoi, Algol ? fit Dante.
Voyons, cette chose, qui ressemblait à un vieillard à moitié pétrifié, n'avait rien de commun avec son frère d'armes ! Il se rendit cependant à l'évidence et reprit :
— C'est pas vrai...
— Que s'est-il passé ? voulut savoir Misty en s'approchant de son infortuné compagnon.
Il eut comme un coup au cœur en constatant que, si la pierre avait atteint une partie de sa mâchoire et de son visage, ses yeux, eux, conservaient l'éclat de ceux d'un homme qui jouit de toutes ses facultés mentales.
— Il a utilisé le bouclier de la Méduse sur lui-même, expliqua Bran. C'était le seul moyen...
Et, à présent, Algol se trouvait entre deux mondes. A moitié figé, il était devenu ni vivant ni mort. Le pire était sans doute qu'il en était parfaitement conscient.
— Voici la pierre de Fal, annonça Bran en posant à terre une sorte de gros galet plat, qui semblait avoir été patiné par les ans.
Le talisman alla rejoindre la lance de Lug, ainsi que le chaudron et la massue de Dagda.
— Il vous manque l'épée de Nuada, constata Cathbad.
Les regards des Saints d'Argent se croisèrent.
Où en était Astérion ?
Mais le plus préoccupant, c'était que, depuis un trop long moment, aucun d'entre eux n'avait entendu sa voix.