Natures opposées

Chapitre 1 : Une cascade pour témoin.

Chapitre final

6528 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 01/12/2023 09:51

Natures opposées.


Le flocon de neige flottait nonchalamment dans la brise froide. Porté par le vent, il tournoyait et virevoltait au gré des courants aériens qui le faisaient voyager bien loin de son lieu de formation. Dentelle de glace éphémère, il se déposa sur le chapeau conique traditionnel, qui ornait la tête du sage en pleine méditation, mais n'y fondit pas. Très vite, des milliers de ses semblables constellèrent le couvre-chef. Aucun frisson n'anima l'ermite en pleine contemplation intérieure. À côté de lui, ses deux confrères étaient dans la même situation, imperturbables malgré l’incongruité de ce phénomène météorologique en ce lieu. Le trio était installé, dos à dos, sur l'énorme rocher surplombant une impressionnante cataracte. Perdus dans le flot de leurs pensées, elles-mêmes guidées par le grondement hypnotique de la haute cascade, les trois hommes étaient en pleine cultivation, leurs torses nus piquetés d'innombrables gouttelettes scintillantes comme autant d'étoiles sur la voûte céleste. Sur leurs dos, des tatouages se faisaient face, comme s'ils discutaient pendant la retraite intérieure de leurs porteurs. Une Balance d'or, un Tigre d'argent et un Dragon de bronze, les trois derniers totems d'une armée sacrée… et maintenant dissoute.  


Il n'y aurait plus de Guerre Sainte sur Terre. Plus jamais la planète bleue tant convoitée ne serait un champ de bataille divin. Et pour cause, tous les dieux l'avaient désertée… ou plutôt, avaient été sommées de le faire. Cosmos et Chaos, deux existences précédant l'origine même du monde, avaient rappelé à elles toutes les déités. L'affrontement qui opposait les entités primordiales de l'Ordre et du Désordre, depuis une époque antérieure aux temps mythologiques, avait redoublé d'intensité et aucune divinité n'avait pu s'y soustraire plus longtemps. Ces dernières s'étaient vues obligées de prendre partie pour l'un ou l'autre de ces principes fondamentaux, selon leurs aspirations respectives, et de rejoindre leurs rangs pour combattre dans d’autres dimensions.


Dans ce monde qui n'était plus régi par les querelles divines, les chevaliers d'Athéna, et leurs équivalents des autres armées sacrées, n'avaient donc plus de raison d'être. Les conflits et les alliances qui s'étaient établis entre leurs maîtres ou maîtresses ne les concernaient plus. Les armures, devenues inutiles, s'étaient endormies. Les combattants avaient pu accéder à une vie dénuée de violence, de souffrance et de sang. Une ère de paix s'était ouverte, les humains et la Terre n'étant dorénavant plus soumis qu'aux seules lois naturelles inhérentes à la Création. 


Le maintien de cette harmonie revenait à présent entièrement aux disciples de la Contrée Mystique, ce lieu hors du temps, à la frontière entre le monde tangible et le monde onirique, et berceau des Taonias, des guerriers utilisateurs des forces naturelles et fervents protecteurs de l'écosphère. Les membres de cet escadron étaient les seuls à encore posséder des protections sacrées. Chacun d'eux était caractérisé par un emblème tatoué dans le dos. Pour les plus expérimentés, les totems se matérialisaient sous la forme d'armures appelées Tattoos. 


Traditionnellement, les Taonias résidaient dans la Contrée des Sennins d'où ils ne sortaient que pour réparer les affronts faits aux écosystèmes. Certains s'étaient néanmoins installés sur Terre par le passé, s'exilant de leur plein gré dans des endroits particuliers afin d'y jouir du passage du temps, dans l'espoir d'atteindre la longanimité, état de patience infinie auquel tous aspiraient. L'un de ces lieux se situait dans la paisible région reculée du Jiangxi, en Chine, au Pic des Cinq Vieillards. 


Lushan accueillait des disciples de la Contrée Mystique depuis des centaines d'années. Parmi eux, Shiryu, Okko et Genbu, les trois élèves du Sennin Dohko, envoyé sur Terre par Hakuryu lui-même au dix-huitième siècle, étaient les derniers en date. Entraînés pour devenir des Saints d'Athéna, ils étaient devenus Taonias à part entière lorsque leur déesse avait quitté la planète qui lui avait été confiée. Leurs Tattoos, directement dérivées de leurs Clothes, s'étaient incrustées dans leur corps, les intégrant définitivement aux rangs des guerriers mystiques. 


À eux trois, ils étaient chargés de la surveillance de l'équilibre naturel terrestre, véritable avant-garde de la Contrée dans le monde réel. Depuis toujours privilégiés pour leur connexion à la planète, les Wu Lao Feng s'érigeaient sur un nœud énergétique tellurique, une intersection dans le réseau de Hartmann terrestre. En entrant en communion avec les esprits de la Nature, les disciples de Dohko pouvaient percevoir toute anormalité dans les cycles naturels. Et la neige à Lushan en était une.


  - Montrez-vous ! ordonna Okko.


  - Nous savons que vous êtes là, ajouta Genbu.


  - Vous ne pouvez pas tromper notre vigilance, prévint Shiryu.


Aucun d'eux n'avait ouvert les yeux, ni même changé de position, restant aussi imperturbables que leur maître l'avait été en son temps, pendant deux cent cinquante ans. Trois silhouettes encapuchonnées se matérialisèrent en ricanant.


  - Nature Unity ! [Union avec la Nature] annoncèrent-ils à l'unisson et sans préambule.


Les embruns de la cascade de Lushan se figèrent, mués en d'innombrables flocons à la fois contondants et tranchants, comme autant de fragments de verre gelé, avant de se précipiter vers les trois condisciples. Rompant brusquement leur immobilisme, Shiryu, Okko et Genbu se propulsèrent hors de portée du cœur de l'attaque. Ils se perdirent de vue dans ce brouillard hostile et coupant, trop occupés à échapper aux attaques ciblées du blizzard. Plus ils se débattaient, plus les flux acérés tentaient de les taillader. Un souvenir précieux remontant dans l'esprit de Shiryu.


  - Ne luttez pas ! cria-t-il in extremis à ses frères d'armes.


Okko et Genbu arrêtèrent de se défendre, suivant aveuglément l'incitation de leur camarade, et cessèrent de considérer les embruns détournés de leur cascade comme une offensive ennemie. La scène se suspendit, les forces soumises de la Nature ne les voyant plus comme une menace. Quand enfin la brume se dissipa, les anciens élèves de Dohko se rassemblèrent.


  - Comment as-tu su ? demanda Okko, curieux de la solution contre-intuitive de Shiryu.


  - J'ai déjà été confronté à cette technique, répondit ce dernier. Il y a longtemps.


  - Qui sont-ils ? s'enquit Genbu.


  - Nous n'allons pas tarder à le savoir. Je ne peux jurer que d'une chose : ils amènent avec eux le froid d'Asgard et cela ne me dit rien qui vaille.


Les trois individus s'approchèrent de front.


  - Tu es fin observateur, apprécia celui qui se tenait au centre.


Les nouveaux venus écartèrent les pans de leurs capes. Un reflet passager révéla la présence d'une pierre précieuse rutilante sur les ceintures de leurs armures. Des Robes de Guerrier Divin, identifia Shiryu instantanément, ornées de leur saphir d'Odin. D'un geste bref, les Nordiens ôtèrent leurs mantes qui s'envolèrent dans la bise glacée, dévoilant leurs protections. Les trois Robes se ressemblaient assez pour laisser croire à une origine commune, comme autant de déclinaisons de la même armure d'origine. Il ne s'agissait pourtant pas de clones, chacune d'elles ayant indubitablement son existence propre. Mais le plus inquiétant pour Shiryu, corroboré par la technique que les assaillants avaient utilisée, était qu'il reconnaissait la Robe d'origine. Celle du Guerrier Divin de Delta, qu'il avait affronté par le passé… celle d'Albérich de Megrez, le félon.


Le souvenir amer de son âpre combat contre celui qui avait laissé Hilda de Polaris se faire manipuler par l'anneau des Nibelungens, don de Poséidon, ressurgit du passé. Le Guerrier Divin avait réussi à se défaire de Marine, Seiya et Hyoga les uns après les autres en usant de sa ruse et de son intelligence naturelles. Était venu ensuite l'ancien chevalier de bronze du Dragon. Shiryu était parvenu à déjouer ses fourberies, notamment grâce aux enseignements de Dohko qui avait lui-même combattu l'ancêtre du Guerrier de Delta, Albérich XIII. Cela n'avait été ni facile, ni sans garantie de pouvoir libérer ses amis d'une mort certaine dans les cercueils d'améthyste, qui les vidaient de leur énergie vitale. Mais le chevalier avait décroché la victoire.


  - Qui êtes-vous ? interrogea Genbu. Nous ne vous avons jamais vus.


 - Et que nous voulez-vous ? poursuivit Okko. Que signifie cette agression si soudaine ?


Leurs interlocuteurs se consultèrent du regard. Ils avaient tous les trois une chevelure garance et des yeux émeraude. Indéniablement frères, ils étaient jeunes, trop jeunes au goût de Shiryu pour porter le poids de la guerre à une époque qui ne le justifiait plus. 


  - Identifiez-vous ! ordonna l’ex-chevalier du Dragon, du ton de l’aîné s’adressant à des cadets 


Celui de droite prit la parole :


  - Nous sommes Obéron, Elegast et Andvari de Megrez, Guerriers Divins de Delta, déclara-t-il dignement en se désignant lui-même puis ses frères.


  - Et nous venons régler une vieille querelle, tueurs de Lushan ! ajouta celui de gauche.


La hargne, mêlée d’autres émotions plus profondes, pointait dans la voix de ce dernier. L’œil affûté d’Okko crut même déceler le scintillement d’une larme, mais cela s’avéra si fugace qu'il pensa avoir rêvé. Shiryu tenta l’apaisement en levant devant lui ses deux mains ouvertes.


  - Nous n’avons aucune raison de nous battre… commença-t-il.


  - Oui, nous en avons une, Dragon ! rugirent-ils d’une même voix.


Le débordement d'émotions atteignit le Taonia de plein fouet, au point qu'il en recula instinctivement. Okko l’arrêta d’une main sur l'épaule et Genbu fit un pas en avant, prêt à le défendre. Shiryu se reprit.


  - C'est à cause d’Albérich, n’est-ce pas ?


La tension qui animait les inconnus monta d’un cran. Il avait vu juste.


  - Albérich de Megrez était notre père, déclara Obéron.


Shiryu ferma les yeux et soupira longuement. Il commençait à comprendre.


  - Et Albérich XIII, notre aïeul, poursuivit Andvari.


  - Tous deux occis par des disciples de Lushan, gronda Elegast. Les vôtres n'ont jamais accusé de telles pertes et il est temps que cela change !


Le Taonia du Dragon rouvrit les yeux et fixa son regard dans chacun des leurs, l’un après l'autre.


  - Nous étions en guerre, rappela-t-il doctement. Chevaliers ou Guerriers Divins, nous étions prêts à donner notre vie pour protéger les intérêts de nos dieux.


  - Cela n’excuse rien ! cracha Andvari.


  - Cela excuse tout ! le corrigea vertement Okko. La vie des hommes ne leur appartient pas quand ils combattent au nom des divinités ! Vos aïeux sont morts à la loyale ! En cherchant à vous venger, vous ternissez leur mémoire !


Les trois frères s’agitèrent, rongeant manifestement leur frein. Ils n'étaient pas là pour dialoguer, mais on aurait dit qu'une certaine retenue les empêchait de mettre un terme tout de suite à la discussion, maintenant qu’elle était lancée. De la bienséance ? Ils ne semblaient pas le savoir eux-mêmes.


  - Peu importe les circonstances ! Vous avez brisé notre famille par deux fois ! clama Obéron. Vous autres, disciples de Lushan, nous avez privés d’un ancêtre et d’un père, mes frères et moi. Aujourd'hui, nous sommes les derniers descendants d'une noble famille de Guerriers Divins qui réclame vengeance !


  - Vous n’êtes vraiment ici que pour une simple vendetta ? s’étonna Genbu en secouant la tête, incrédule et soupçonnant une raison plus profonde.


  - Cela te semble-t-il si futile ? s’indigna Obéron. Des fils n’auraient-ils pas le droit de venger leur père et leur ancêtre ?


Était-ce un léger tremblement dans sa voix ? Colère ? Frustration ? Autoconviction ? Ou bien le vrombissement entêtant de la cascade jouait-il son rôle d’égérie ? Les agresseurs étaient maintenant totalement tombés dans le piège de la conversation lancée par les disciples de Dohko. Il y avait encore peut-être l’espoir de s’en sortir sans effusion de sang.


  - Ces armures, le coupa Shiryu. D’où viennent-elles ? Les seules qui sont encore actives sont celles de Taonias normalement. Alors comment ?


Il semblait avoir totalement changé de sujet, mais une intonation dans sa voix faisait écho aux suspicions de Genbu.


  - L’inimitié qui oppose les Megrez et les disciples de Lushan remonte effectivement à plus loin qu’au combat qui a opposé votre maître à notre aïeul, ou celui qui t’a opposé à notre père, confirma Elegast. Et nos Robes semblent t’avoir mis sur la piste, Shiryu.


Celui-là parlait d’un ton beaucoup plus mesuré que ses frères, ce qui parut calmer ces derniers. Andvari précisa fièrement :


  - Les Megrez sont, et ont toujours été, des Taonias. D'où nous vient cette aptitude à maîtriser les forces de la Nature d'après toi ?


  - Je n'ai vu aucune maîtrise, objecta Okko, dédaigneux. Mais plutôt une emprise. Vous n'êtes pas en communion avec la Nature, vous la forcez à réaliser vos volontés.


Obéron leva les yeux au ciel, comme exaspéré. Un rictus de dégoût le défigura lorsqu'il s’exprima :


  - Tu as le même discours que ceux qui ont banni nos ancêtres, il y a plus d'un millénaire. Hakuryu, le dieu dragon, alors tout juste proclamé protecteur de la Contrée Mystique, a prononcé des paroles identiques lorsqu'il a exilé nos aïeux. 


Il écarta les bras, comme pour désigner une foule invisible dont ses frères et lui n'étaient qu’une infime portion.


  - Les Megrez étaient un puissant clan parmi les Taonias, reprit-il, mais nous n'étions pas d'accord avec la vision du dragon blanc. Nous avons été exclus de notre province natale, obligés de descendre sur Terre et d’évoluer parmi les humains. Pour survivre, nos ascendants ont même dû entrer au service des Polaris et d'Odin dans cette région froide et peu accueillante d'Asgard.


  - Allégeance de peu de foi, fit remarquer Genbu, dont les bénéfices n’ont pas suffi à empêcher Albérich XIII de quitter votre domaine pour attenter aux connaissances du Vieux Maître, ni votre père de trahir Hilda de Polaris.


  - C'est vrai, concéda Elegast en hochant la tête, grand seigneur. Notre ancêtre était peut-être avide d’un savoir qu’Asgard ne pouvait lui apporter, et notre père aigri de se sentir rejeté par Hilda. Mais ils ne méritaient pas de mourir. C’est votre clan qui a fait couler le sang du nôtre. Ce même sang réclame le talion à présent, et la Nature elle-même s’est prononcée en notre faveur !


Les Taonias des Wu Lao Feng tiquèrent.


  - Comment cela ? demanda Shiryu prudemment.


Qu'est-ce qui aurait pu amener les forces naturelles à donner raison aux exilés des terres nordiques ? Il n’aimait pas l’assurance qui transparaissait dans l'affirmation d’Elegast.


  - Le départ des dieux et l’avènement des Taonias, pour commencer , répondit Andvari. Nous sommes les seuls à pouvoir encore combattre avec des protections sacrées. Cela ne peut être une coïncidence.


  - Notre nombre, ensuite, poursuivit Obéron sans attendre. Il y a toujours eu trois Guerriers Divins de Delta, en réalité. Delta Ursae Majoris est un système constitué de trois étoiles. Les deux ancêtres que votre maître et toi avez combattus étaient les seuls de leur fratrie. Aussi n'ont-ils pu utiliser qu'une seule des trois Robes de Megrez. Mes deux frères et moi sommes les premiers depuis un millénaire à pouvoir enfin porter les trois protections de Delta. Preuve que notre génération est l'élue.


  - Enfin, continua Elegast, le fait de ne plus dépendre d’Odin nous donne la possibilité d’assouvir notre désir de vengeance sans risquer une Guerre Sainte. Nous n’en avons qu’après vous. Si vous apparteniez encore aux troupes d’Athéna, et nous à celles d’Odin, nous ne pourrions pas nous en prendre à vous sans provoquer un conflit généralisé entre nos deux factions. Et les conflits entre armées divines ont trop de répercussions sur le commun des mortels, ce que nous voulions éviter. Tout cela mis bout à bout ne peut qu'être un présage favorable à notre entreprise : l'heure du châtiment a sonné et votre mort sera votre rédemption !


S’ils avaient accepté jusque-là d'exposer leurs motivations, force était de constater que les frères Megrez n’avaient pas perdu de vue leur objectif. Ils donnèrent l’assaut.


  - Séparons nous ! ordonna Shiryu.


Il bondit, se dirigeant prestement vers le sommet de la cascade. Elegast le suivit immédiatement. Genbu sauta vers les remous, au pied de la cataracte et Obéron fondit à sa suite. Okko resta sur place, prêt à en découdre avec Andvari. Dans un éclat de lumière qui se refléta tout le long de la chute d’eau, les tatouages dorsaux des trois Taonias de Lushan étincelèrent. Les Tattoos se manifestèrent et couvrirent leurs porteurs. Shiryu du Dragon, Genbu de la Balance et Okko du Tigre étaient désormais parés pour le combat. Pourtant, ils ne passèrent pas tout de suite à l’offensive, un doute ineffable les étreignant. Quand bien même leurs agresseurs désiraient régler une bonne fois pour toute un compte familial, ils avaient eu la prévenance d’en préserver le reste de l’humanité. Ce type de considération était ordinairement étranger à des individus malfaisants. Il y avait une dissonance entre la violence apparente des Megrez et leur personnalité sous-jacente. 


Se pouvait-il que leur jeunesse les empêchât de juger convenablement de la situation millénaire ? Se pouvait-il que leur inexpérience les aveuglât au point de ne pas réussir à surmonter des siècles d'animosité refoulée ? S’étaient-ils fourvoyés, enhardis par quelque impératif familial dont ils se sentaient investis ? Les disciples de Dohko pouvaient respecter le devoir filial et la dette de sang que ces jeunes hommes désiraient régler. Leur ardeur et leur hardiesse avaient été nourries par l’injustice d'avoir été privés de la figure paternelle, et plus largement, ils se sentaient probablement obligés de porter sur leurs épaules la vindicte séculaire de leur clan à l'égard des héritiers des Cinq Pics. Après tout, tout semblait opposer la famille Megrez et la confrérie de Lushan, par nature la plus proche héritière des enseignements d’Hakuryu. Mais Elegast, Obéron et Andvari n’avaient pas un mauvais fond. Voilà ce que des guerriers expérimentés tels que Shiryu, Okko et Genbu ressentaient instinctivement. 


*


Au sommet de la cascade, Shiryu regardait son adversaire d'un autre œil. Elegast lui fonça dessus, poing en avant, mais il stoppa l'attaque d'une seule main. Il repoussa son assaillant. Le choc les sépara violemment et le Guerrier Divin atterrit sur la berge opposée au Taonia du Dragon.


  - Honoo no Ken ! [Épée flamboyante] clama soudain Elegast.


Ralenti par sa réticence à combattre sérieusement, Shiryu n'eut que le temps d'esquiver la lame d'améthyste embrasée. Il avait déjà affronté cette arme redoutable qui pouvait fendre la glace la plus indurée. L'attaque trancha le cours de la cascade, provoquant une pause dans son écoulement et sa chute, comme une porte s'ouvrant dans le rideau d'eau.


  - Qu'est-ce que… ? s’exclama le Taonia du Dragon sans cacher sa stupeur.


Jamais le cours de la cataracte mythique n'avait été interrompu et il avait suffit d'un coup d'épée du Guerrier Divin.


  - Dans les légendes, mon totem est un chevalier elfe dont l'épée agit comme une clé capable d'ouvrir toutes les portes. Le tranchant de mon arme incarne cette capacité. Elle ne coupe pas, elle ouvre la matière, exposa Elegast.


Albérich n'avait jamais eu une telle puissance. D'où son descendant la tirait-il ? Eût-il fait partie des chevaliers d'Athéna, connus pour leurs miracles in extremis, Shiryu aurait pu attribuer le pouvoir de son adversaire à sa détermination et à son abnégation. Était-il possible qu'Elegast se crût à ce point dans son bon droit que son énergie se décuplait en conséquence ? Cela demandait un esprit de sacrifice pour sa cause que l'ancien chevalier du Dragon n'avait personnellement rencontré que chez Siegfried de Dubhe, le contemporain d'Albérich et Guerrier Divin d'Alpha.


  - Honoo no Ken ! [Épée flamboyante] répéta férocement Elegast de Megrez.


  - Cette épée est trop dangereuse, se dit Shiryu. Je dois la briser…


Il concentra sa cosmo-énergie dans son bras droit, jusqu'à sa main, à laquelle il fit prendre la forme d'une lame. Il était temps qu'il prenne son assaillant au sérieux et lui fasse l'honneur de répliquer. Ce dernier se battait de toutes ses forces, Shiryu ne pouvait faire moins, ne serait-ce que par respect pour son engagement. D'un geste affirmé, il projeta son bras vers l'arme qu'Elegast abattait sur lui.


  - Excalibur ! rugit le Taonia du Dragon.


L'épée sacrée héritée de Shura, et par lui de tous les chevaliers du Capricorne depuis les temps mythologiques, rencontra l'épée d'améthyste enflammée… qui se brisa net, sous le regard médusé du Guerrier Divin, avant que ce dernier ne s'écroule lui-même, sa Robe en pièces.


  - Excalibur est une épée de cosmos capable de tout trancher, remise par Athéna elle-même au premier chevalier d'or de la dixième maison du Zodiaque, expliqua patiemment Shiryu. Elle m'a été transmise par un formidable guerrier en repentir.


La stupéfaction d'être à terre, pour avoir simplement subi le contrecoup de la lame mythique, figeait Elegast.


  - Ne poursuivons pas cet affrontement, Elegast, le pria Shiryu. Tes frères et toi êtes trop jeunes, trop inexpérimentés dans le combat pour espérer nous défaire, mes condisciples et moi. Je te le dis sans condescendance, crois-moi.


*


De son côté , Genbu était aux prises avec son propre adversaire. Les deux combattants échangeaient attaques, parades et esquives, de simples coups pour le moment, mais portés avec toute la puissance d'hommes rompus aux arts des utilisateurs du cosmos.


  - Je vais te sceller pour l'éternité ! gronda alors Obéron. Amethyst Sealed ! [Le cercueil d'améthyste]


Shiryu avait déjà parlé de cette technique à ses condisciples. Son utilisateur invoquait un flux de cosmos cristallin dont les fragments s'agglutinaient sur ses victimes, les enfermant dans une gangue minérale qui les vidait petit à petit de leurs forces vitales. C'était une mort lente et douloureuse qui attendait l'ennemi piégé. L'ex-chevalier du Dragon avait su s'en protéger grâce à son bouclier. 


Genbu brandit les deux siens devant lui. La multitude de petits cristaux percuta la barrière dorée. Confiant, le Taonia de la Balance ne s'aperçut pas tout de suite de l'adaptation de l'attaque. Un gigantesque bouclier d'améthyste se déploya de derrière ceux de Genbu et déborda sa défense. Une vague de cristal s'abattit sur lui puis le souleva, l'emprisonnant dans une coupe d'améthyste. Une sérénité forcée envahit l'esprit de Genbu, apaisant des angoisses et des colères qu'il ne se connaissait même pas. Un sentiment de bien-être indicible bien loin des affres décrits par Shiryu.


  - L'améthyste est une pierre fine connue pour ses vertus envoûtantes et calmantes. On raconte que le roi des fées, mon totem, maîtrisait ce minéral et possédait une coupe emplie de bienfaits. Tu seras à jamais enfermé dans ce cercueil diaphane de quartz violet. Ta mort se fera dans la paix de l'âme et l'abondance de l'esprit.


Genbu eut du mal à trouver la volonté de se défendre contre une technique si douce. Accorder un trépas si bienveillant à son ennemi n'était pas compatible avec une personne agissant pour de mauvaises raisons. Se pouvait-il qu'Obéron de Megrez agisse en toute légitimité ? Mais le Taonia de la Balance ne pouvait se laisser mourir pour permettre la vengeance d'une famille qu'il n'avait jamais combattue. Il se concentra et dix rayons d'or irradièrent de sa Tattoo. Le cercueil d'améthyste vola en éclats, brisé par les armes offensives de la Balance qui venaient d’être libérées. Celles-ci tournoyèrent un instant au-dessus de Genbu, leur rutilance se reflétant dans les yeux hagards d'Obéron, avant de se ficher de nouveau dans l'armure d'or.


  - Les armes de la Balance préservent toujours les vertueux, déclara Genbu. Et leur porteur est le garant de l'harmonie entre le Bien et le Mal chez les humains. Il n'est qu'un test auquel je peux procéder en ce qui te concerne… et ce sera avec mon poing !


Un cosmos doré engloba la main refermée du Taonia et il s'élança sur le Guerrier Divin :


  - Rozan Shinbu Ken ! [Attaque de la véritable arme de Lushan] cria-t-il en s'élançant dans les airs avant de frapper son adversaire.


Il évita avec soin les points vitaux d'Obéron qui reçut néanmoins le coup de plein fouet. Sous l'impact, le pied de la cascade forma un geyser dont les éclaboussures s'éparpillèrent dans toutes les directions, allant jusqu'à cingler les quatre autres combattants sur les hauteurs de la chute d'eau.


  - Ne te relève pas, Guerrier, incita Genbu. Je n'ai pas envie d’achever un combattant aussi prometteur que toi. Ne vois pas dans ma demande le dédain du vainqueur, mais l'espoir du précepteur.


*


Pendant ce temps, Okko avait bien du mal à se motiver pour affronter son propre antagoniste. Le Taonia du Tigre avait toujours appris à connaître ses adversaires en les combattant, et plus il échangeait de coups avec Andvari, plus il était persuadé que ces trois frères avaient été trompés par une idéologie familiale unilatérale et étriquée. Ils étaient jeunes, aussi immatures et intolérants qu'Okko avait pu l'être lors de son entraînement aux côtés du Vieux Maître. À l'époque, seule une amère défaite le lui en avait fait prendre conscience. 


Ce souvenir peu glorieux réveilla sa hargne. Il se résolut à passer aux choses sérieuses et prit position. Andvari saisit le changement de ton que prenait leur altercation et se mit en garde également.


  - Penses-tu m'impressionner ? provoqua le Guerrier Divin. Je me suis renseigné sur toi, Okko du Tigre. Tu n'es qu'un disciple raté et renvoyé par ton maître Dohko. Tu ne maîtrises aucune des techniques de Lushan.


Le Guerrier Divin écarta les bras et sa cosmo-énergie enfla. Okko sentit les particules minérales environnantes entrer en synergie avec ce cosmos. Elles se rassemblèrent en cercle autour de lui. Le Taonia voulut s'en échapper, mais il se surprit à ne pas pouvoir faire le moindre geste. Il n'était pas immobilisé à proprement parler, car ses muscles répondaient encore à sa volonté, mais c'était plutôt comme si, au plus profond de lui-même, il ne voulait pas bouger. Comme s'il désirait s'abandonner à la mort.


  - Nibelungen Fluch. [Malédiction des Nibelungen] annonça Andvari. Mon totem représente le seigneur des nains qui, selon les fables, maudit l'anneau qui lui fut volé afin qu'il donne la mort à tous ses détenteurs. 


Un anneau d'améthyste se forma autour d'Okko et commença à se refermer. Au fur et à mesure qu'il se rapprochait du Taonia, ce dernier sentait ses remords et ses scrupules se réduire. Il lui semblait qu'il pouvait mourir en paix.


  - Je t'offre la mort sans regret que tu ne mérites pas, élève rejeté.


Ces paroles réveillèrent le Taonia. 


  - J'ai, comme tu dis, été répudié par le Vieux Maître. Je suis un disciple différent de Shiryu, accepté comme son digne héritier, et de Genbu, qui a lui-même mis fin à son entraînement avant d'en retrouver la voie. Mais, à terme, j'ai reconnu la sagesse de ses préceptes. Mon parcours chaotique a fait de moi ce que je suis, Andvari. Et, ça, tu ne me l'enlèveras jamais ! Prends ça ! Mōko Reppū Shiden Ken ! [Vent déchirant et arc électriques du tigre violent]


La tornade horizontale parcourue d'arc électriques brisa l'anneau d'améthyste et emporta le Guerrier Divin qui alla s'écraser plus loin. Okko l'y rejoignit :


  - J'ai épargné ta vie, Andvari. Repars d'où tu viens, ou mieux, voyage et expérimente le monde jusqu'à trouver ta paix intérieure. Je ne suis pas ton ennemi. Tes frères et toi n'avez pas à faire vôtre le ressentiment des générations précédentes. La vie est un cadeau de la Nature qu'il ne faut pas gâcher pour la vengeance. Crois-moi sur parole.


*


Laissant derrière eux leurs opposants, Shiryu , Okko et Genbu se cherchèrent du regard. Chacun d'eux avait neutralisé son adversaire et ils s'apprêtaient tous trois à se rejoindre quand ils furent stoppés par une flambée de cosmos en provenance de leurs assaillants défaits. À la manière des chevaliers sacrés, qui se relèvent autant de fois que nécessaire pour accomplir leur devoir, Elegast, Obéron et Andvari se remirent debout, chancelants mais débordants d'une énergie impossible. Des remous basilaires aux berges sommitales, en passant par le promontoire intermédiaire, trois émanations de cosmos s’élevèrent. Une fois de plus, les disciples de Dohko eurent cette désagréable sensation de voir les rôles s'inverser par rapport à leur passé. Seraient-ils pour une fois du mauvais côté de la justice ? Se consultant du regard malgré la distance qui les séparait, ils prirent la même décision : celle de rendre hommage à l'abnégation de ces trois frères envers la mission qu'ils s'étaient donnée. 


  - Ton engagement est admirable, Elegast de Megrez, déclara Shiryu du Dragon. J'y ferai honneur en te lançant ma plus puissante attaque : Rozan Hyaku Ryū Ha ! [La colère des cent dragons de Lushan]


  - Ta dévotion envers ta famille est formidable, Obéron de Delta, annonça Genbu de la Balance. Par respect pour cela, reçois mon ultime technique : Rozan Shō Ten Ha ! [Ascension suprême de Lushan]


  - Le dévouement dont tu fais preuve est incomparable, Andvari d'Asgard, affirma Okko du Tigre. Tu mérites une réponse à la hauteur : Yūko Sennin Enbu ! [Danse des mille Tigres enjoués]


Les trois arcanes frappèrent implacablement, emportant les trois frères Megrez de Delta. La mort dans l'âme d'avoir eu à en arriver à de telles extrémités, Shiryu, au sommet de la chute d’eau, et Genbu, au pied de la cataracte, soulevèrent délicatement les corps inertes de leurs adversaires et les amenèrent auprès de leur frère, rejoignant Okko qui les attendait sur l’escarpement rocheux du Vieux Maître. Les trois condisciples rassemblèrent respectueusement Elegast, Obéron et Andvari, les allongeant avec précaution les uns à côté des autres. Ils se détournèrent pour les laisser reposer en paix. Seul était audible le vrombissement permanent de la cascade de Cinq Pics, mais il ne leur apporta pas l'apaisement habituel. Dans le silence de leur malaise, les Taonias de Lushan perçurent un murmure dans leur dos.


  - Nature… Unity… [union avec la Nature] gémirent les Guerriers Divins de Delta.


Ils contraignirent les esprits de la Nature à leur céder des forces… et ils se relevèrent, chancelants et à peine conscients. De nouveau, Shiryu, Okko et Genbu constatèrent la faculté de leurs adversaires à détourner les techniques de leurs ancêtres. Si le mode opératoire était critiquable, la soi-disant union relevant davantage de la compulsion, il n'en restait pas moins que, cette fois, ils en usaient comme une technique de soin plutôt que comme une attaque. Ils comprirent alors avec soulagement qu’aucun des deux clans n'était du mauvais côté de la justice. Elegast, Obéron et Andvari ne devaient pas être considérés comme des ennemis, mais comme des élèves. Cette illumination dissipa tous les doutes des épigones de Dohko.


Dans un état second, les frères Megrez se placèrent en triade, adoptant une position que les anciens chevaliers reconnurent immédiatement. En aînés désireux de guider leurs cadets vers la droiture, et ce par tous les moyens, ils se résolurent à mettre un terme à ce combat. Les trois condisciples se placèrent dans la même conformation que leurs assaillants. 


  - Cette posture interdite par les dieux est le dernier recours des désespérés, déplora Genbu.


  - Souhaitez-vous à ce point devenir des parias pour votre seule vendetta ? Voulez-vous vraiment en arriver là ? les interpella Okko.


Un coup de vent apporta quelques gouttes de la cascade proche. L'eau légendaire issue des Neuf Cieux. Le sang de Lushan. L'ichor de la Nature. Leurs armures prirent leurs formes divines.


  - Nous ne pouvons qu'y répondre de la même façon, trancha Shiryu, professoral. Mais le résultat ne fait aucun doute. Nous sommes encore en pleine possession de nos moyens, nous vous dominons par notre expérience et nos capacités. Dans l'ardeur de votre jeunesse, vous vous êtes convaincus de votre noble cause, et peut-être l'est-elle, mais vos méthodes sont erronées. Notre dernier acte en tant qu'aînés sera de vous montrer que posséder la confiance de la Nature vaut mieux que son allégeance. Si vous persistez, vous serez balayés par notre technique.


Elegast, Obéron et Andvari de Megrez ne répondirent pas. Ils en étaient incapables, portés uniquement par leur désir de venger leurs aïeux. Depuis leur défaite, ils avaient perdu connaissance. Ils n'étaient plus animés que par leur instinct de combattant et leur détermination, leur conscience ayant sombré dans les limbes, dans les tréfonds de leurs esprits tourmentés. Leurs cosmos se portèrent à leur paroxysme, s'unissant inextricablement. Leurs bouches s'ouvrirent comme celles d'automates et les paroles jaillirent.


  - Megrez Exclamation ! [Exclamation de Megrez]


Shiryu, Genbu et Okko se résignèrent. Leurs propres cosmo-énergies flamboyèrent et s'entremêlèrent.


  - Rozan Exclamation ! [Exclamation de Lushan]


Le choc de ces deux arcanes extrêmes, s'ils avaient été égaux, aurait dégagé une énergie équivalente à un petit Big Bang, rasant les Wu Lao Feng. Mais l'attaque combinée des disciples de Dohko, par sa supériorité et sa légitimité, eut raison de celles des fils d'Albérich qui s'effondrèrent lourdement, définitivement vaincus. Les Tattoos se dématérialisèrent, réencrant le dos des Taonias, dont les torses dénudés accueillirent le contact des embruns des Cinq Pics avec un frisson de délectation. Shiryu, qui avait guidé l'attaque, s'approcha des trois frères, affalés à plat ventre sur le rocher même ou Dohko avait passé deux cent cinquante ans. Ils frémirent et relevèrent difficilement la tête vers celui qui allait les achever. Le Taonia du Dragon leur souriait avec compassion.


  - J'ai connu deux frères autrefois. Eux aussi se battaient pour leur idéal. Shinadekuro et Fukuryu du Dragon Noir, c'était leurs noms, étaient, comme vous, aveuglés par la colère et le ressentiment. À la fin, avant de rendre leur dernier souffle, de mon poing je le déplore, ils ont eu envie de croire au pouvoir de l'amitié et de la justice.


Genbu et Okko se rapprochèrent aux côtés de Shiryu et, tous les trois, tendirent chacun une main accueillante et salvatrice vers l'un des frères Megrez… qui trouvèrent la force insoupçonnée de se relever sur leurs coudes. Leurs vies épargnées, leur dévouement approuvé, leurs méthodes corrigées et leur valeur acceptée, la défaite était totale, tant corporelle que spirituelle. Les larmes leurs montèrent aux yeux. Des larmes de compréhension et de gratitude face à la bonté de ceux qu'ils étaient venus éliminer. Leurs natures n'étaient pas si opposées finalement, et les querelles passées ne devaient pas perturber les amitiés naissantes. Les mains, jusque-là ennemies, se rejoignirent et, avec la grande cascade comme témoin, les poignées s'affermirent.


De ce jour, les Megrez furent réintégrés dans les rangs de la Contrée Mystique. Auprès de leurs maîtres de Lushan, ils apprirent à réellement communier avec la Nature. Quand Shiryu, Okko et Genbu eurent fini de les former, Elegast, Obéron et Andvari retournèrent sur les terres d'Odin. Ils élurent domicile à la Grande Cascade Gelée d'Asgard, devant laquelle Shiryu avait combattu Fenrir d'Alioth, et qui s'avérait être un équivalent nordique de celle de Lushan : un nœud de Hartmann dans le réseau des lignes énergétiques telluriques. Depuis ce lieu de villégiature, inspirés par les disciples du Pic des Cinq Vieillards, les trois Taonias de Delta participèrent au maintien de l'équilibre et de l'ordre naturels.


Jusqu'au Ragnarok.

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