à la lueur des bougies. Os Jarchie.

Chapitre 1 : à la lueur des bougies

Chapitre final

1657 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 14/05/2020 12:50

Par Violette Baudelaire


Jarchie





à la lueur des bougies




Il était beau.


Ses cheveux parfaitement lisses étaient coiffés en arrière et aucune mèche ne jouait la rebelle. Ses lèvres étaient closes et légèrement rosées. Ses tâches de rousseurs étaient mises en valeur, elles étaient telles des constellations qui coloraient ses joues. Chaque parcelle de son visage était magique et il aurait pu l’observer des heures durant. Il portait son éternel blouson Southside Serpents et un t-shirt orné d’une couronne, le bleu, son préféré. Dans sa main gauche, le bonnet qu’il ne quittait jamais, pluie ou beau temps, autorisation ou interdiction. Toutes les règles lui passaient au-dessus de la tête et ce couvre-chef en était la preuve. Dans sa main droite, un exemplaire de son livre.


200 pages et l’histoire complète des mystères de Riverdale. Tout ce qui avait pu avoir été caché dans les recoins les plus sombres de cette ville, il l’avait découvert. Tout ce qui avait pu être enterré sous les caves des demeures familiales, il l’avait déterré. Tout ce qui avait pu être dissimulé sous des mensonges plus obscurs les uns que les autres, il l’avait mis en lumière. C’était une petite ville qui croulait sous les secrets, mais il les connaissait tous. Sous ses doigts d’or, cette ville hypocrite et malsaine était devenue douce et merveilleuse.


De toute manière, le garçon savait rendre chaque chose magnifique. S’il avait apprécié toutes ces longues après-midi de collège et de lycée, s’il avait aimé poursuivre le groupe dans leurs enquêtes folles, s’il avait adoré ces soirées consacrées à observer les étoiles, c’est parce qu’à chaque fois, il était là. S’il savourait la vie, s’il vivait, c’était parce qu’il était là.


Ce garçon, c’était son point de repère dans le monde. En fait, il était le monde, son monde.


Quand l’autre lui parlait, que ce soit des problèmes causées par les Ghoulies ou l’inspiration tombée du ciel qui lui avait permis d’écrire cinq pages supplémentaires chez Pop’s la veille, il ne pouvait s’empêcher de le fixer, sans jamais savoir s’arrêter. L’adolescent parlait et il s’abreuvait de ses paroles. Chaque mot sorti de ses lèvres était une occasion de fixer celles-ci et il n’en ratait pas une seule. Il rêvait de pouvoir l’embrasser, et dans ses songes les plus fous, il se permettait même d’imaginer que c’était aussi le cas de l’adolescent.


Parfois le garçon lui posait une question et il était bien forcé de revenir sur Terre, et tandis qu’il lui répondait, avec les uniques bribes de phrases que son imaginaire avait bien voulu laisser enregistrer à son cerveau, la réalité lui revenait en pleine face. Il était meilleurs amis, uniquement meilleurs amis et ce depuis la primaire. Ils étaient tous les deux, ce mot lui provoquait une douleur à la poitrine rien qu’en y pensant, en couple.


Ils étaient tous les deux avec des filles superbes, drôles, originales, débrouillardes, intelligentes, créatives, talentueuses, belles et … amoureuses. Ils étaient heureux comme ça.


Et si son bonheur n’était pas dû au fait d’être en couple avec fille superbe, drôle, originale, débrouillarde… une fille parfaite, il était tout de même heureux. Car même s’il ne pouvait être en couple avec celui qu’il aimait réellement, il était heureux de l’avoir à ses côtés.

Il pouvait malgré passer du temps avec lui. Il pouvait parler avec lui, il pouvait se confier sur des choses qu’il n’osait même pas avouer à sa petite amie, il pouvait découvrir les secrets de Riverdale avec lui, il pouvait sortir en pleine nuit pour observer les étoiles avec lui. Il pouvait tout avec lui.


Mais si seulement il pouvait lui dire ces quelques mots qui brûlaient au fond de lui-même, s’il seulement… si seulement il avait pu.


Il lui regarda à nouveau. Lui et ses cheveux noirs, lui et ses lèvres roses, lui et ses tâches de rousseurs, lui et son bonnet, lui et son livre.


Lui.


Il était beau.


« Je n’ai jamais osé te l’avouer. Je ne sais même pas de quoi j’avais tellement peur, peut-être que tu ne veuilles plus me voir si jamais je te disais quoi ce soit. C’était ridicule, parce même si ce que je ressentais n’avait pas été partagé, tu m’aurais écouté. On en aurait parlé, et tu ne m’aurais pas abandonné, on serait même devenus plus proches encore. C’était toi ça, toujours à aider ceux qui en avaient besoin, toujours à écouter ceux qui ne demandaient qu’une oreille attentive, toujours à être là pour les autres. Tu n’as peut-être pas pu me venir en aide sur ce que je ressentais pour toi, mais tu m’as aidé pour bien d’autres choses, comme me soutenir après la mort de mon père, et je t’en serai éternellement reconnaissant. J’ai aimé toutes tes petites actions, toutes nos discussions sous les étoiles, tous ces secrets qui n’appartiennent qu’à nous deux. Je t’ai aimé. »


Betty, doucement, s’approcha, et plus lentement encore, le prit dans ses bras. Elle pleurait bruyamment, peinant à reprendre son souffle à travers son torrent de larmes.


« Il me manque, il me manque tellement. »


« Je sais Archie, je sais. »


Assise sur une chaise un peu plus loin, toute habillée de noire, Veronica Lodge sanglotait discrètement. Ses yeux rouges étaient cachés dans un mouchoir noir brodé de ses initiales et elle tremblait, sans bruit.


« Il l’avait réalisé il y a à peine 3 mois et il m’avait tout déballé d’un coup. Mais Veronica et moi, ça faisait longtemps qu’on se doutait de quelque chose. Après que tu l’ai avoué à Veronica, ça crevait les yeux que vous étiez fait l’un pour l’autre. Ça nous fait tellement mal à nous deux, mais je n’arrive même pas à imaginer ta douleur. Je suis désolée Archie, tellement désolée. Je veux que tu saches que je suis là pour toi. »


Tout devenait plus clair tout à coup.


L’inscription du garçon à Stonewall Prep et son entrée dans le monde de l’écriture. Ses amis étranges et son professeur qui avait préférer se suicider plutôt que de l’aider. La série de bouquins et son grand-père mystérieux qui avait écrit le premier livre. Tous les mauvais tours que ces camardes de classe lui avaient joué. Toutes les lettres de menace. Tous les avertissements.


Puis, ce jour, où il avait disparu.


Les recherches qui ont duré trois semaines.


Trois semaines passées à ratisser la forêt, à interroger les élèves de son nouveau lycée, à suspecter la moindre personne qui avait pu le côtoyer, à s’horrifier avec les pires scénarios possibles, à s’imaginer qu’il pouvait franchir la porte d’un instant à l’autre, à se poser des milliards de questions. Mais surtout, ça a été trois semaines passées à attendre. Parce qu’au fond, il n’y avait que ça à faire. Attendre.


À nouveau, tout devenait plus clair.


Archie restait impassible. Il avait le visage figé de celles et ceux à qui une chose chère avait été arrachée. Il avait la plaie au cœur de celles et ceux qui avaient tant à révéler, mais qui n’auriont plus jamais l’occasion de le faire. Il avait le regard vide de celles et ceux qui ont perdu, une grand-mère paternelle ou un amour de toute une vie, et qui ne pourront jamais le regagner.


Tout paraissait si limpide. Tout était là depuis le début.


Les bougies, les dizaines de bouquets de fleurs de toutes couleurs entassées autour des chaises, les tableaux représentants de colombes, des arbres, des praires et accrochés sur tous les murs, les diverses symboles religieux peints de doré qui entouraient le groupe d’adolescents, tout ça était désormais visible. Les fleurs, les tableaux, les croix et au milieu de tout cela, le cercueil.


Alors maintenant que la dure et froide réalité lui revenait en plein visage, qu’il ne pouvait plus cacher le présent et son cercueil par le passé et son bonheur, Archie était forcé de comprendre : ils ne se parleraient plus jamais, ils ne se souriraient plus jamais, ils ne riraient plus jamais, ils n’auraient plus jamais une occasion de pourvoir se dire tout ce qu’ils avaient à se dire.


Archie craqua. Betty le prit dans ses bras. Ses pleurs redoublèrent.


Veronica se leva pour éviter une nouvelle crise de tremblements. Elle sortie de la pièce et elle fut suivie de près par Betty. Ce dernière se retourna vers Archie, lui demanda de les rejoindre à l’extérieur dès qu’il se sentirait prêt.


Bientôt, ses larmes s’arrêtèrent, les tremblements cessèrent. Il se leva pour sortir à son tour. Il s’apprêtait à ouvrir la porte, mais se retourna.


Il regarda, une dernière fois, l’adolescent dont il était éperdument tombé amoureux, l’adolescent hors normes qui n’avait jamais respecté les règles une seule fois, même pas celles de la raison de l’amour, l’adolescent qui avait volé son cœur et qui ne le lui rendrait jamais. Il regarda, une dernière fois, l’adolescent qui sous les bougies, semblait endormi, mais surtout, paisible.


À la lueur des bougies, Jughead souriait.












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